Dictionnaire de Trévoux/5e édition, 1752/Tome 1/071-080


Fascicules du tome 1
pages 061 à 070

Dictionnaire de Trévoux, 1752
Tome 1, pages 071 à 080

pages 081 à 090



jeunesse à la Cour, a toujours parlé Bas-Normand, & conservé son accent ; ce qui donna lieu à Mademoiselle de Montpensier de dire à un gentilhomme qui alloit faire le voyage de Normandie avec M. de Segrais : vous avez un fort bon guide, il sait parfaitement la langue du pays. Vign. Mar.

Les Hébreux ont l’accent de Grammaire, de Rhétorique, & de Musique, ou plutôt, l’accent de Grammaire & de Rhétorique ; car l’accent de Musique n’est point différent de l’accent de Grammaire qu’on appelle aussi accent Tonique, parce qu’il donne le ton à la syllabe ; & l’accent de Rhétorique se nomme Euphonique, parce qu’il sert à rendre la prononciation plus douce & plus agréable. Il y a quatre accens de Rhétorique, ou Euphoniques, & 25 Toniques, ou de Grammaire, dont les uns se placent sur la syllabe, les autres dessous. Les Grammairiens Juifs, suivis des autres qui ont écrit des Grammaires Hébraïques, les distinguent en accens Rois, & en accens Ministres, ou serviteurs. Les premiers sont ceux qui font une distinction grande ou petite. On les appelle Rois, parce que les autres se rapportent à eux, leur servent, & qu’ils sont dans leur Empire ; c’est-à-dire, dans la phrase que ceux-là gouvernent, & qu’ils terminent. Les seconds sont ceux qui ne font point de distinction, mais qui montrent que la phrase n’est pas finie, qu’il faut rapporter le mot ou le membre sur lequel ils dominent à ce qui suit. Parmi ceux qui font distinction, & qu’on appelle généralement Rois, on distingue encore un Empereur, des Rois, des Ducs, ou Chefs. Tous ces noms sont métaphoriques pour marquer une distinction plus ou moins grande. Celui qui domine sur toute une phrase complète, qui termine un sens entier, s’appelle Empereur : cela revient à ce que nous appelons un point. Celui qui domine sur un grand membre de la phrase, qui termine un sens, qui n’est pas cependant tout-à-fait complet, s’appelle Roi : & c’est à-peu-près comme nos deux points, ou notre point avec une virgule. Enfin, celui qui dans un grand membre en gouverne & en coupe un plus petit, qui fait aussi un sens, mais imparfait, se nomme Duc : c’est, si l’on veut, notre virgule. Au reste, l’accent Roi devient quelquefois Ministre, & le Ministre Roi, selon que les phrases sont plus ou moins longues. De plus, l’art & la combinaison des accens est autre dans la poësie hébraïque, que dans la prose. On dispute beaucoup sur l’usage de tous ces accens Toniques, ou de Grammaire. Un grand nombre de Protestans, sur-tout parmi les Luthériens, soutiennent qu’ils servent à distinguer le sens. Le commun des Catholiques, & les plus habiles Protestans, croient au contraire qu’ils ne servent que pour le chant, ou la Musique ; car les Juifs chantent l’Ecriture-Sainte dans leurs Synagogues plutôt qu’ils ne la lisent. Je crois qu’ils sont faits pour marquer ce chant ; mais qu’on a réglé ce chant sur le sens des paroles, & sur l’attention qu’on a voulu qu’on fît à certains mots ; qu’ainsi les accens Hébreux, en marquant le chant, marquent aussi quelque distinction, mais que ces distinctions en si grand nombre sont souvent inutiles ou trop subtiles. Ainsi parmi nos Ecrivains Latins & François, & parmi ceux qui nous donnent des éditions des anciens Auteurs, il y en a qui mettent une fois plus de distinctions de points, de virgules, &c. que les autres. Quoiqu’il en soit, il est certain que les anciens Hébreux n’avoient pas ces accens, qu’ils n’ont été inventés que vers le VIe siècle par les Docteurs Juifs qu’on nomme Massorettes, & qu’ainsi ils n’ont point une autorité divine, quoiqu’en disent quelques Protestans. Les plus judicieux même parmi eux conviennent de ce qu’on vient de dire. Voilà en peu de mots ce que l’on peut dire de plus clair & de plus raisonnable sur une matière fort embrouillée & sur laquelle on a écrit, & l’on écrit encore tous les jours bien des volumes.

Il y a de grandes disputes parmi les Savans sur les accens qu’on trouve depuis plusieurs siècles dans les Livres Grecs, soit imprimés soit manuscrits. Isaac Vossius, qui a composé un discours à ce sujet, prétend que ces accens ne sont point anciens, & qu’autrefois il n’y en avoit point d’autres que de certaines notes qui servent à la Poësie. C’étoient proprement des notes de Musiciens pour chanter les Poëmes, &


non pas des notes de Grammairiens, telles que sont celles qui ont été inventées très-long-temps après. Aristophane le Grammairien, qui vivoit vers le temps de Ptolomée Philopator, fut l’Auteur de ces notes musicales. Aristarque son disciple enchérit dans cet Art par-dessus lui : & tout cela ne servoit que pour apprendre plus facilement aux jeunes gens l’art de faire des vers. Le même Vossius montre par plusieurs anciens Grammairiens, qu’on marquoit en ces temps-là les accens Grecs sur les mots, tout autrement qu’ils ne sont présentement dans les Livres, ce qu’il justifie aussi par des exemples. Voyez sa dissertation De accentibus Græcanicis.

Henri Christian Hennin, dans une Dissertation qu’il a publiée pour montrer qu’on ne doit point prononcer la Langue Grecque selon les accens, a embrassé le sentiment d’Isaac Vossius, qu’il a poussé encore plus loin. Il croit que ce sont les Arabes qui ont été les inventeurs de ces notes, ou pointes, acuminum, qu’on voit sur les mots, & qu’on nomme accens ; & qu’ils ne s’en sont servis que dans la Poësie. Il appuie ce sentiment sur le traité de Samuël Glarck de Prosodiâ arabicâ, imprimé à Oxford en 1661 ; mais il ne paroît pas avoir entendu la pensée de cet Auteur.

Hennin prétend que ces anciens accens, inventés par Aristophane, s’accordoient parfaitement avec la prononciation de la Langue Grecque, au lieu que ceux d’aujourd’hui la détruisent. Il ajoute que les nouveaux Grammairiens Grecs ne les ont inventés, que dans des temps où la Langue Grecque commençoit à tomber, voulant empêcher par-là la mauvaise prononciation que les Barbares y introduisoient ; & il ne leur donne que neuf cens ans d’antiquité, ce qu’il prouve, parce qu’il ne se trouve point de plus anciens Livres manuscrits, où ces accens soient marqués. Lisez sa Dissertation imprimée à Utrecht en 1684, sous le titre de Dissertatio paradoxa, avec celle d’Isaac Vossius qui y est jointe.

Wetstein, Professeur à Bâle, en Langue Grecque, a opposé aux paradoxes de Hennin une savante Dissertation, où il fait voir que les accens qui sont dans les Livres Grecs, soit imprimés, soit manuscrits, ont une bien plus grande antiquité. Il avoue que ces accens n’ont pas toujours été marqués de la même manière que les Anciens, & il en apporte en même temps la raison. Comme la prononciation de la Langue Grecque n’a pas été la même chez tous les peuples, il n’est pas étonnant que les Doriens les aient marqués d’une manière, & les Æoliens d’une autre. De même, ajoute-t-il, un même peuple a prononcé différemment sa Langue en différens temps. Tout ceci se peut confirmer par l’exemple de notre Langue. Il rapporte deux raisons qu’on eut dès ces temps-là de marquer les accens. L’une est qu’on écrivoit alors tout en lettres majuscules, toujours également éloignées les unes des autres, sans distinction de mots, ni de phrases. L’autre est de distinguer les mots ambigus, & qui peuvent avoir deux sens. Il prouve ceci par une dispute sur un endroit d’Homère, rapportée par Aristote dans sa Poëtique, Ch. 25. C’est ainsi que les Syriens, qui ne marquent point les accens toniques, quoiqu’ils aient des accens distinctifs, ont encore inventé certains points, qui se mettent au-dessus ou au-dessous du mot, pour en faire connoître le mœuf, le temps, la personne, ou le sens, & qui étoient très-utiles lorsqu’on écrivoit le Syriac sans voyelles. Cette Dissertation, qui est pleine d’érudition, a été imprimée à Bâle en 1686, sous le titre de Dissertatio epistolica de accentuum Græcorum antiquitate & usu, à la fin de ses Discours apologétiques pour la véritable prononciation de la Langue Grecque.

Il n’est pas possible de fixer exactement le temps auquel les Grecs ont marqué les accens dans leurs Livres. Mais on peut assurer que Hennin & Isaac Vossius ont un peu outré cette matière. Wetstein a aussi trop étendu quelques-unes de ses preuves. De plus, on doit demeurer d’accord que les accens ne sont point marqués dans les Livres Grecs qui ont mille ans d’antiquité. Mais il ne s’ensuit pas de là que ces accens ne fussent point encore dans ce temps-là en usage chez les Grecs. Cela prouve seulement, que la plûpart des Copistes les ont négligés ; & c’est ce qui fait qu’il est très-rare de trouver d’anciens Manuscrits où ils soient marqués. C’est la remarque que M. Simon, qui a lu un grand nombre de Manuscrits Grecs, a faite dans son Histoire critique du Nouveau Testament, où il dit : l’Exemplaire Grec & Latin de Cambridge, qui contient les quatre Evangélistes & les Actes des Apôtres, & qui est au moins ancien de mille ans, n’a aucuns accens. L’Exemplaire Grec & Latin des Epîtres de S. Paul qui est dans la Bibliothèque du Roi, & qui n’est pas moins ancien que celui de Cambridge, a à la vérité des accens ; mais il paroît qu’ils y ont été ajoutés après coup, parce qu’ils ne sont point de la même main que l’écriture de tout le Livre. Georges Syncelle, ajoute M. Simon, fait mention d’un Exemplaire Grec de la Bible, qui étoit écrit avec une grande exactitude, où l’on avoit mis les points & les accens. Syncelle dit que cet Exemplaire lui étoit venu de la Bibliothèque de Césarée en Cappadoce, & qu’on voyoit par l’inscription qui étoit au-devant du Livre, qu’il avoit été copié sur un Exemplaire qui avoit été corrigé par le grand S. Basile.

Hennin ne paroit pas exact, quand il assûre que les accens sont une invention des Arabes, qui fut perfectionnée par Alchalil vers le temps de la mort de Mahomet ; que les Massorettes de Tibériade, au milieu du sixième siècle adopterent cette invention, & que celui qui perfectionna les accens, fut le Rabbin Juda ben David Chiug, natif de Fez, dans l’onzième siècle. Il se peut faire à la vérité, que les Juifs aient emprunté leurs points voyelles des Arabes ; mais comment auroient-ils pris de ces mêmes Arabes leurs accens, puisque la Langue arabe n’a aucuns accens, ni dans la prose, ni dans les vers ? La poësie est très-ancienne chez les Arabes, & long-temps avant Alchalil Eben Ahmed, qui l’a seulement réduite en art, marquant les mesures des vers que nous appelons en Latin pedes, les pieds. C’est ce que Samuël Clarck a fort bien expliqué dans son Livre intitulé, De Prosodiâ arabicâ.

A l’égard des Juifs, on peut croire que les Massorettes de Tibériade ont ajouté les accens au texte Hébreu de toute la Bible. Ceux qui disent que le Rabb. Juda de Fez perfectionna les accens, n’ont avancé cela que parce qu’ils ont crû que ce Rabbin a été le premier Grammairien des Juifs. Mais ils se trompent ; car Rabb. Saadias Gaon, qui vivoit long-temps avant Juda Chiug, a composé une Grammaire hébraïque. On trouve dans l’Histoire Critique de l’Ancien Testament, Chap. 30, un Catalogue des Grammairiens Juifs, à la tête desquels est ce Rabb. Saadias. M. mon dit en ce lieu-là : Après que les Juifs de Tibériade eurent ajouté les points voyelles & les accens au texte de la Bible, les Docteurs des autres Ecoles commencerent à les imiter. Ils mirent ces points & ces accens dans leurs exemplaires, que les particuliers décrivirent ensuite.

Les accens des Hébreux ont quelque chose de commun avec les accens des Grecs & des Latins, & ils ont en même temps quelque chose de particulier, & qui ne se trouve que dans la Langue hébraïque. Ce qu’ils ont de commun, c’est qu’ils marquent les tons, quand il faut élever, ou abaisser la voix sur certaines syllabes. Quand un Juif habile lit le texte Hébreu de la Bible, il chante plutôt qu’il ne lit, parce qu’il le prononce selon les tons qui sont marqués par les accens. Ce que les accens ont de particulier dans cette Langue, c’est qu’ils y font la même chose que les points & les virgules dans le Latin, dans le Grec & dans le François : ils distinguent les sections, les périodes, & les membres des périodes. Le mot accent vient d’accentus ; & ce dernier mot, selon Covarruvias, vient d’accento, verbe fréquentatif dérivé d’accino.

Accent, en Musique, est une inflexion, ou modification de la voix, ou de la parole, pour exprimer les passions & les affections, soit naturellement, soit par artifice. L’accent oratoire se dit de même du ton qui accompagne les mots avec lesquels on exprime telle ou telle affection de l’ame. Chaque passion, chaque sentiment a un ton qui lui est propre.

Les Poëtes se servent quelquefois du mot d’accens au pluriel pour signifier la voix, ou les cris. Les accens plaintifs. Les derniers accens. Il expliqua sa passion par ces tristes accens.

Loin d’ici, profane vulgaire,
Apollon m’inspire & m’éclaire :
C’est lui, je le vois, je le sens :
Mon cœur cede à sa violence.
Mortels, respectez sa présence,
Prêtez l’oreille à mes accens. R.


Rien n’empêche même de s’en servir en prose, & M. Pelisson a dit fort élégamment aux Réfugiés : Pendant que toute la terre pleine de son nom (du Roi) & des charmes de votre Patrie, apprend à parler François, vous tâcherez de vous former avec peine aux accens de quelque Langue étrangère, qui ne laissera pas de vous faire entendre à toute heure ce que vous avez perdu.

ACCENTUER. v. a. Marquer les syllabes avec des accens, pour avertir comment il les faut prononcer. Syllabæ accentum apponere. Les Romains n’accentuoient point leurs syllabes en écrivant.

ACCENTUÉ, ÉE. adj. & part. pass. Cet é est accentué, il le faut prononcer plus fortement.

ACCEPTABLE. adj. m. & f. Ce qu’on ne peut raisonnablement refuser. Accipiendus, quod potest accipi. On le dit au palais, des offres, des propositions qui sont raisonnables, & concilient, autant qu’il est possible, les droits & prétentions respectives des parties.

ACCEPTANT, ante. adj. Terme de Pratique. Celui qui accepte, qui agrée ce qu’on fait en sa faveur. Dans tous les Contrats on dit, qu’un acquéreur, ou donataire, est présent & acceptant. Dans les cessions à un absent, le Notaire prend qualité d’acceptant pour le cessionnaire.

ACCEPTATION. s. f. Consentement de celui qui accepte, action par laquelle on reçoit volontairement, on agrée ce qui est proposé, offert. Acceptio. L’acceptation d’une donnation est nécessaire pour sa validité : c’est une formalité essentielle. L’acceptation est le concours de la volonté du donataire, qui donne la perfection à l’acte ; sans quoi le donateur peut révoquer son don. Si le porteur d’une lettre de change n’en fait point faire l’acceptation dans un certain temps, il n’a plus de garantie sur le tireur. Savary.

En matière bénéficiale, l’acceptation doit être faite au temps même de la résignation, & non ex intervallo. L’acceptation est réputée faite par un Gradué, nommé, quand il a demandé à l’ordinaire qu’il lui confère le Bénéfice. Bouchel.

Acceptation, en termes de Théologie, se dit de la manière de recevoir les Constitutions des Papes, ou de l’acte par lequel on les reçoit. Il y a deux sortes d’acceptations, l’une solennelle, & l’autre tacite : l’acceptation solennelle est l’acte par lequel on reçoit, & on accepte une Constitution, en condamnant ce que le Pape condamne. L’acceptation solennelle se pratique plus ordinairement dans les lieux où les erreurs condamnées se sont élevées, dans ceux où elles se sont répandues, où elles ont causé du scandale, où les Livres condamnés ont été imprimés ; dans les pays où sont ceux à qui la Constitution est adressée en particulier, quand elle ne l’est pas à tous les Fidèles. Quand une Constitution a été acceptée expressément par ceux qu’elle regarde d’une manière particulière, elle est censée acceptée tacitement par les autres Prélats du monde Chrétien qui en ont connoissance ; & cet acquiescement est ce qu’on appelle acceptation tacite. Ainsi la France, la Pologne, &c. ont accepté tacitement la Constitution contre la Doctrine de Molinos ; & l’Allemagne, la Pologne, &c. ont accepté tacitement les Constitutions contre la Doctrine de Jansénius, Evêque d’Ypres. Enfin, quand la plus grande partie des Evêques a accepté une Constitution expressément, ou tacitement, les autres sont obligés de l’accepter & d’y adhérer, en ce qui regarde la foi & les mœurs ; & il n’est point nécessaire que l’acceptation du Corps des Pasteurs soit solennelle, pour que les Constitutions du Saint-Siége soient des règles du sentiment des Fidèles. Procès verbal de l’Assemblée du Clergé en 1705.

Acceptation d’une lettre de change, est la promesse par écrit de l’acquitter dans le temps de son échéance.

ACCEPTER. v. a. Agréer ce qui est offert. Accipere. Il a accepté une charge difficile à remplir. La loi est censée accepter pour les mineurs, & elle supplée à leur intention dans les choses favorables. Courtin. Accepter un combat sur un défi. Accepter la paix, les conditions d’un traité. Il faut remarquer que ce mot est moins étendu que recevoir ou agréer, & qu’il suppose quelque traité ou négociation. On le dit pourtant quelquefois lorsqu’il ne s’agit point d’affaires. Les Juges ne doivent accèpter aucuns présens des Parues ; pour dire simplement, Recevoir.

Elle venoit, Seigneur, fuyant votre courroux,
A la face des Dieux l’accepter pour époux.

Ragin.

On dit, j’en accepte l’augure ; pour dire, je souhaite que cela arrive comme on le fait espérer.

Accepter se dit des Constitutions, Bulles, ou Brefs des Papes, comme on l’a expliqué au mot acceptation. Un arrêt du Conseil du cinquième Juillet 1714, le Roi y étant, déclare un Mandement d’un Evêque comme non fait, & non advenu, parce qu’il introduit une nouvelle manière d’accepter les Constitutions du Pape. Il y a cette différence entre accepter & acceptation pris en ce sens, que l’on dit également bien accepter ou recevoir une Bulle, ou Constitution, au lieu qu’on ne dit point réception, mais toujours acceptation d’une Bulle ou Constitution.

On dit aussi, accepter une lettre de change, pour en empêcher le protêt, lorsqu’on la souscrit, & qu’on promet de la payer.

On dit aussi au Palais, Accepter les offres de sa partie.

Accepté, ée. part. Qui a les mêmes sens que son verbe. Les offres qui ne sont point acceptées sont sujètes à révocation. En matière de Bulles & de Constitutions du Saint-Siége, quoiqu’on dise acceptation, & non pas réception, on dit cependant reçu, & non pas accepté. Cette Constitution est reçue en France. On n’encourt point en France l’excommunication, & les autres peines portées dans cette Bulle, parce qu’elle n’y a point été reçue, & non pas acceptée, au moins dans l’usage ordinaire.

ACCEPTEUR. s. m. Terme de commerce. Acceptor. L’Accepteur est celui qui a accepté une lettre de change. L’Accepteur devient débiteur personnel après l’acceptation, est obligé de payer, quand même le tireur viendroit à manquer.

ACCEPTILATION. s. f. Acceptilatio. Terme de Jurisprudence Romaine. Remise verbale qu’on donne à un débiteur sans aucun payement de sa part ; déclaration qu’on fait en faveur de son débiteur, qu’on ne lui veut plus rien demander, qu’on a été satisfait d’une dette, ou qu’on la lui remet. On trouve dans le droit une certaine forme prescrite pour l’acceptilation. Ulpien a cependant décidé que l’acceptilation n’est point aux paroles ; & qu’étant de droit naturel que chacun remette ce qui lui est dû, en la manière qu’il lui plaît, elle ne dépend point des formalités.

ACCEPTION. s. f. Considération, sorte de préférence qu’on a pour quelqu’un plutôt que pour un autre. Respectus, discrimen, delectus. Les bons Juges ne font aucune acception des personnes. Cette expression nous est venue de l’écriture, où le Traducteur Latin rend par accipere personam, & personarum acceptio, ce que l’Hébreu exprime par גקר פנים connoître, ou considérer le visage, y faire attention, ou par משא פנים, assumptio facierum, ce qui signifie faire distinction des personnes, avoir des égards, des considérations pour les unes, qu’on n’a pas pour les autres. On s’est servi autrefois aussi en ce sens du mot d’acceptation ; mais acceptation est plus propre pour les affaires, & acception pour les personnes.

Acception. Terme de Grammaire. Sens dans lequel on prend un mot. Significatio, notio, intellectus. Ce mot a plusieurs acceptions. Dans sa première & plus naturelle acception, il signifie, &c.

ACCÈS, s. m. Abord, entrée ; facilité d'approcher de quelque personne, ou de quelque chose. Aditus. Heureux celui qui a accès auprès du Roi. Cet homme cherche quelque acces dans cette maison, quelque connoissance qui lui en facilite l'entrée. C'est un homme dans l'esprit duquel il est impossible de trouver aucun accès. S. Evr. L'accès de cette côte est difficile à cause des rochers. Le facile acces est une partie du devoir du Prince. Louis XI. donnoit des audiences publiques à tous ses Sujets ; son accès étoit doux & charmant, sa présence étoit agréable, Matthieu en sa vie L. 3. Deroch.

Accès. s. m. Se dit dans les Conclaves, à l’élection des Papes, lorsque les voix se trouvant toujours trop partagées pour que l’élection se puisse faire, des Cardinaux se désistent de leur premier suffrage, & joignent leurs voix à celles qui ont été données à un autre Cardinal. Corradini eut trente voix au scrutin, mais à l’accès il n’en eut que vingt-huit.


Les billets du scrutin, les billets de l’accès. Après le scrutin, on alla à l’accès. Il fut fait Pape à l’accès. On dit aussi Accessit. Voyez ce mot. Accès vient du latin accessus, d’accedo, j’accède, je me joins.

Accès. Terme du Droit Canon, qui signifie la faculté qu’on accordoit à quelqu’un pour posséder un bénéfice après la mort du titulaire, ou parce que celui à qui on accordoit cette faculté, n’avoit pas encore l’âge compétent. En attendant, on donnoit le bénéfice à un autre ; & lorsqu’il avoit atteint l’âge requis, il entroit dans son bénéfice sans nouvelle provision. Le Concile de Trente, par le chapitre septième de la vingt-cinquième session, a abrogé les accès. Il réserve seulement au Pape la faculté de nommer des Coadjuteurs aux Archevêques & Evêques, pourvu qu’il y ait nécessité pressante, & que ce soit en connoissance de cause. La différence que les Canonistes mettent entre l’accès & le regrès, c’est que les regrès habent causam de præterito, parce qu’il faut avoir eu droit au bénéfice ; & l’accès, habet causam de futuro. Rassicot.

Accès, se dit aussi en Médecine des retours périodiques de certaines maladies, qui laissent quelques bons intervalles. Accessio, accessus. Il a eu un accès de fièvre, de goutte. Il lui prend quelquefois un accès de folie. En ce sens il se dit aussi seul, & sans ajoûter le nom de la maladie. L'accès a été long & violent.

Accès, se dit aussi au figuré & dans les choses morales. Il signifie alors, mouvement intérieur & passager, en conséquence duquel on agit. Il a des accès de dévotion, des accès de libéralité.

ACCESSIBLE. adj. m. & f. Ce qui peut être approché. Ad quem facilis est aditus. On le dit des lieux & des personnes. L’humeur farouche de ce Juge fait qu’il n’est accessible qu’à peu de gens. Il étoit accessible à toute heure & à tout le monde. Le Gend. Cette place n’est accessible que par un seul endroit.

ACCESSION. s. f. Terme de pratique. L’action d’aller dans un lieu. Accessio. Le Juge a ordonné une accession de lieu, pour dresser procès verbal de l’état des choses. Il signifie aussi l’union d’une chose à une autre que l’on possédoit déjà ; en ce cas c’est la même chose qu’accroissement : s’approprier un fonds par droit d’accession. Le droit explique diverses sortes d’accessions, en vertu desquelles une chose jointe à une autre accroît au profit du propriétaire de la chose à laquelle l’autre a été unie. La pourpre par voie d’accession appartient au maître du drap avec lequel elle a été confondue par la teinture. Inst. P. 2, T. i.

Accession. L’action d’accéder à un traité. Il sera permis aux autres Puissances d’entrer dans ce traité : le terme d’accession sera d’une année. Merc.. Juin 1725..

ACCESSIT, Terme de Collége. Récompense qu'on donne aux écoliers qui ont composé presqu'aussi-bien que celui qui a emporté le prix. Un tel a eu le premier prix des vers, & un tel le premier accessit ; c'est-à-dire, qu'il est celui qui a approché le plus près des prix.

Ce mot est Latin, & vient de ce qu'après avoir donné les prix on nomme ceux qui en ont approché le plus près, en disant : Ad hos proximè accesserunt. Il se dit & de la personne & de la chose ; c'est-à-dire, de l'honneur d'être ainsi nommé, & aussi de la récompense qu'on donne à ceux qui sont ainsi nommés, car on dit : Il est le premier ou le second accessit, il a eu le premier accessit ; &,;voilà mon accessit, en montrant le Livre qu'on a reçu.

Accessit, se dit dans le Conclave, d’un scrutin dans lequel des Cardinaux quittent le parti qu’ils avoient suivi jusque-là, & joignent leurs voix à celles d’un autre parti pour le fortifier. Le Cardinal Polus n’eut que vingt-six voix, tant au scrutin qu’à l’accessit. Dupin. Le Cardinal eut dix-huit voix au scrutin, & vingt-six à l’accessit. Id. On dit aussi Accès. Voyez ce mot.

ACCESSOIRE, s. m. Dépendance du principal, suite de quelque chose qui est plus considérable. Accessio. Les depens, qui ne sont qu'un accessoire, montent souvent plus haut que le principal. L'accèssoire doit céder au principal. Persée fut le principal acteur de la guerre, & Gentius n'en étoit que comme l'accèssoire. Ablanc. La caution dans le contract est un accèssoire qui fortifie le contract, & par cette raison il est condamné comme le principal obligé, parce que l'accèssoire tient de la nature du principal. ☞ M. l’Abbé Fleury dans le discours qui est à la tête du treizième tome de son Hist. Eccles. dit, en parlant des Pélerinages, que sur la fin de l’onzième siècle, on préféra ce petit accessoire à l’essentiel de la Religion.

Accessoire, se prend figurément pour un état fâcheux. Status acerbus. Il étoit dans un étrange accessoire. On ne s’en sert plus en ce sens.

Accessoire, pris pour adjectif, se dit de ce qui n’est point de l’essence d’une chose, mais que l’on y joint comme un accompagnement, comme une dépendance ou une suite. Adscitus, adventitius. Une dette accessoire, une idée accessoire.

Accessoire, en matière de Pharmacie, veut dire un changement qui arrive au médicament par des causes extérieures, & qui augmente, ou diminue sa valeur, son action.

l’Accessoire du long extenseur des orteils, en termes d’Anatomie, est une masse charnue, longuette & plate, située obliquement sous la plante du pied. Ce muscle a été autrefois appelé la chair carrée de la plante du pied, à cause de sa situation & de sa figure. Winslow.

Accessoire de Willis ; Accessorius Willisii, est, en termes d’Anatomie, un nerf, que nous appelons le Spinal. Voyez ce mot. Les nerfs accessoires appartiennent à la huitième paire, & naissent par plusieurs filets des deux côtés de la moëlle de l’épine du cou, quelquefois plus haut, quelquefois plus bas. Ils montent chacun entre les plans nerveux qui sortent latéralement de la moëlle de l’épine pour former les nerfs vertébraux ; & à mesure qu’ils montent, ils grossissent par les filets qu’ils reçoivent des plans nerveux postérieurs.

ACCHO. Accho. Ville de Phénicie. Elle fut donnée à la Tribu d’Aser ; mais cette Tribu n’en chassa point les Chananéens, ou Phéniciens, non plus que de quelques autres lieux dont il est parlé au Ch. i du Liv. des Juges v. 31. Quelques-uns veulent que ce soit la même qu’Acé, ou Ptolémaïs. Bochart, Chanaan, C. 2, dit que c’est Acon, que Jacques de Vitry, dans son Histoire d’Orient, C. 25 écrit Accon. Voyez sur cet endroit les notes d’André Hojux, p. 461, de l’édition de Douai 1597, & Fuller. Miscell. Liv. iv, C. 15.

Etienne a tort de chercher dans la langue grecque l’étymologie de ce nom ; encore plus Josephe de le faire venir d’ἀρχή, principium. C’est un mot purement Hébreu, ou Phénicien, עכו, que quelques-uns interpretent compressus, ou consractus ; mais dont nous ne savons pas la vraie signification.

☞ ACCIA. Ville de Corse, autrefois épiscopale. Accia. Elle est au nord de l’Île, entre la rivière de Golo, & celle de Tavignano. Accia ayant été ruinée, son évéché a été uni à celui de Mariana.

ACCIDENT, s. m. Terme de Philosophie, propriété accidentelle, ce qui survient à la substance, & qui ne lui est pas essentiel ; qui peut y être, ou n’y être pas, sans qu’elle périsse. Accidens. Un accident, ou un mode, c’est ce que nous concevons nécessairement dépendant de quelque substance. Roh. La blancheur est un accident dans une muraille, parce que cette muraille peut subsister sans la blancheur : au lieu que la blancheur ne peut naturellement subsister sans qu’elle soit soutenue par quelque substance. Les Cartésiens disent que l’extension constitue l’essence de la matière, & que les accidens ne sont que des modifications, qui n’en sont point distinctes réellement. Ces sentimens sont rejettés par les Théologiens, comme contraires à ce que la Foi nous enseigne touchant l’Eucharistie. Ce n’est pas nous, Nos très-chers frères, qui avons imaginé cette distinction de substance & d’accident ; c’est Platon, c’est Aristote, qui n’avoient aucune part à nos disputes : nous ne faisons qu’emprunter leurs termes, pour mettre hors de tout équivoque les termes communs. Peliss.

On distingue en Philosophie des accidens logiques, des accidens physiques, des accidens métaphysiques. L’accident logique est tout ce qui peut être conçu être ou n’être pas dans le sujet, sans qu’il cesse d’être ce qu’il est. La blancheur, par exemple, est un accident logique d’une muraille, ou de quelque autre corps que ce soit qui est blanc, parce qu’elle peut être dans la muraille, ou n’y être pas, sans que la muraille cesse d’être muraille. L’Accident métaphysique est tout ce qui n’est point l’essence première d’une chose ; & en ce sens les propriétés sont des acci-


dents. L’Accident physique est opposé à la substance, & on en distingue de deux sortes, l’Accident physique absolu, & l’accident modal. Par accident physique absolu, ou simplement accident absolu, accidens absolutum, on entend celui qui subsiste, ou qui peut au moins surnaturellement & par miracle subsister sans sujet. Tels sont les accidens du pain & du vin dans le Sacrement de l’Eucharistie, suivant le grand nombre des Théologiens. Par accident physique modal, on entend toute modification réelle, inséparable absolument de son sujet, quoique le sujet puisse être sans elle, ou en avoir une différente. Ainsi la rondeur, la carrure, &c. sont des accidents physiques modaux. Voyez Mode. C’est la même chose.

Accident, Evènement fortuit, hasard, coup de fortune. Casus. Malheur imprévu. Casus adversus. Il y a des gens à qui la faveur arrive comme un accident, ils en sont surpris les premiers. La Bruy. C’est par un heureux accident que cet homme a été garanti du naufrage. Quand il est mis seul, & sans adjectif qui en détermine le sens, il se prend presque toujours en mauvaise part. Il arrive quelquefois des accidens d’où il faut être un peu fou pour se bien tirer. Rochef. C’est dans les hôpitaux que se rassemblent toutes les infirmités, & tous les accidens de la vie humaine. Flech. Je suis fâché de l’accident qui vous est arrivé : cela s’entend de quelque avanture désagréable.

Quand on se brûle au feu que soi-même on attise,
Ce n’est point accident, mais c’est une sottise. Regnier.

Accident, signifie aussi les circonstances, & les incidens d’une action. Quand Sapho veut exprimer les fureurs de l’amour, elle ramasse de tous côtés les accidens qui suivent, & qui accompagnent cette passion : & remarquez que de tous ces accidens, elle choisit ceux qui marquent davantage l’excès & la violence de l’amour. Boil.

Accident absolu. Accidens absolutum. C’est celui qui subsiste, ou qui peut au moins surnaturellement & par miracle subsister sans sujet. Tels sont les accidens du Pain & du Vin dans le Sacrement de l’Eucharistie : car l’Eucharistie étant un Sacrement ; c’est-à-dire, un signe visible, de la Grace invisible, il faut nécessairement qu’il y ait quelque chose de sensible. Ce ne peut être aucune substance, il faut donc que ce soient des accidens. De plus il se fait dans l’Eucharistie une véritable conversion ; c’est la Foi de l’Eglise Catholique, la Doctrine des Pères, & la décision des Conciles de Rome, sous Grégoire VII. de Latran, sous Innocent III. & de Trente, Sess. XIII. Chap. 6. Or en toute conversion il doit y avoir quelque chose de commun, qui demeure après le changement le même qu’il étoit avant le changement ; autrement ce ne seroit qu’une simple substitution d’une chose à la place d’une autre. Comme donc il n’y a aucune substance qui demeure, il faut que ce soient de purs accidens. Enfin, le Concile de Constance a condamné comme hérétique cette proposition, qui est la seconde de Wiclef, dans la Sess. VIII. Les accidens du Pain ne demeurent point sans sujet dans le même Sacrement (de l’Eucharistie). Et quoique le Concile de Trente ne se soit point servi du mot d’accident, il a néanmoins défini la même chose au regard des espèces, qui dans le langage de tous les Théologiens ne signifient autre chose que les accidens du Pain & du Vin. Car que sont autre chose les especes après la consecration, que des espèces sacramentelles & des accidens sans sujet ? dit le Concile de Cologne en 1539. Part. VII. §. 15. On peut voir encore dans le Concile de Basse le discours de Jean de Ragusio, Procureur général des Dominicains. Quelques Théologiens ou Philosophes reconnoissent pour accidens absolus tous ceux qui restent dans le Sacrement après la consécration ; la quantité, la couleur, la saveur, &c. D’autres disent qu’il n’y a proprement que la quantité qui soit un accident absolu & sans sujet, que les autres ont pour sujet la quantité. Le premier sentiment est plus conforme à celui des Pères, & à l’ancienne Doctrine ; car les Pères ont reconnu des accidens absolus autres que la quantité, & ailleurs que dans le Sacrement de l’Eucharistie. S. Basile, dans son Homélie VI. sur la création, enseigne, que la lumière ou plutôt la splendeur, la lueur de la lumière, , est différente de son sujet, comme la blancheur du corps blanc, & qu’elle a été au commencement sans ce sujet, ayant été créée quatre jours auparavant, ce qu’il regarde comme un miracle de la toute-puissance de Dieu. S. Grégoire de Nazianze dit la même chose. Orat. 43. Nicétas aussi-bien que Procope sur la Genèse approuvent ce sentiment de S. Basile. Les Cartésiens ont imaginé tout ce qu’ils ont pu pour détruire cette Doctrine des accidens absolus ; mais ils n’ont rien inventé qui satisfasse. Ils disent que sans qu’il reste rien, Dieu fait sur nos sens les mêmes impressions que faisoient le Pain & le Vin avant la consécration. Mais c’est là rejetter la Doctrine de l’Eglise, & au lieu d’une vraie conversion, ne reconnoître qu’une simple substitution. D’autres soutiennent que tous les corps ont beaucoup de matière hétérogène, d’air & d’autres corpuscules renfermés dans leurs pores ; que quand le Pain est détruit, cette matière, qui n’est point du Pain, subsiste ; que Dieu par miracle la conserve dans le même arrangement, qu’elle avoit dans les pores du Pain, avant qu’il fût détruit ; qu’ainsi elle doit produire les mêmes sensations que produisoit le Pain. Mais on répond à cela que c’est encore là n’admettre qu’une pure substitution, & non point une véritable conversion ; que d’ailleurs dans les principes mêmes des Cartésiens toute cette explication doit être fausse ; que l’espace qu’occupoient avant la consécration les parties solides de la substance du Pain & du Vin, ou demeure vuide après la consécration, ou se remplit de quelque autre substance, qui n’est pas du Pain, ni du Vin ; que soit qu’il demeure vuide, soit qu’il se remplisse de quelque autre substance, ce n’est plus le même tissu, ni le même arrangement de parties, puisque ce n’est plus du Pain ni du Vin ; qu’ainsi selon les Cartésiens mêmes ce ne doit plus être les mêmes sensations. De plus, que les parties du Pain n’étant point disposées, ni figurées de la même manière que celles du corps de Jesus-Christ, les pores ne peuvent être non plus disposés de même ; que cela étant il ne se peut faire que la matière interceptée dans les pores du Pain & du Vin, & conservée après la consécration dans la même situation, réponde exactement aux pores du Corps de Jesus-Christ ; qu’en plusieurs endroits elle tombera sur des parties solides ; qu’alors il faut de deux choses l’une ; ou que pour conserver toujours le même arrangement de cette matière, il y ait pénétration de plusieurs de ses parties avec des parties solides du Corps de Jesus-Christ, ce qui n’est pas possible dans les principes de Descartes ; ou que la disposition & l’arrangement se change, & que ce ne soient plus les mêmes sensations, ou impressions sur nos sens, ce qui est faux. Voyez la lettre d’un Philosophe à un Cartésien de ses amis. La substance corporelle ne se peut séparer de ses accidens. Qui vous l’a dit ? Etiez-vous du Conseil de Dieu, quand il tiroit du néant les substances & les accidens ? Peliss.

☞ Il est donc évident qu'on ne peut soûtenir aucun des sentimens rapportés ci-dessus. Car l'Eucharistie est un Sacrement, c'est-à-dire un Signe sensible où on ne peut pas dire, 1°. que cette sensibilité vienne du Corps de Jesus-Christ immédiatement, puisque la foi de l'Eglise est que J. C. n'est présent dans l'Eucharistie, que d'une maniére insensible par rapport à nous ; à la maniére des esprits. De plus, on ne rompt point le Corps de J. C. on ne le brise point avec les dents, &c. cependant si la sensibilité qui paroît dans l'Eucharistie, vient du Corps de J. C. immédiatement, il faut le dire nécessairement. 2°. Elle ne vient point non plus de la substance hétérogène qui étoit cachée dans les pores du pain & du vin avant la Consécration, & que Dieu conserve après dans le même arrangement & la même situation ; car il ne paroît pas le moindre changement à nos sens après la Consécration, or suivant cette explication, il faudroit nécessairement qu'il nous parût un changement très-grand après la Consécration : car avant la Consécration cette matiére hétérogène jointe avec le pain, n'excitoit dans nous qu'une certaine sensation : donc après la Consécration la sensation doit être différente, puisque par la Consécration on ôte ce qu'il y a de plus sensible, & ce qui fait incontestablement le plus d'impression sur nous. En effet, ou les petits espaces qu'occupoient les parties du pain & du vin demeurent vuides, ou ils sont remplis d'une autre matiére ; s'ils demeurent vuides, la sensation doit être différente ; s'ils sont remplis par une autre substance,


il faut encore qu'il y ait du changement, puisque cette substance étrangère n'aura pas le même arrangement de parties qu'avoient le pain & le vin ; que si elle avoit précisément le même arrangement, ce seroit pour-lors, comme en conviennent tous les Philosophes, du pain & du vin, puisque les corps ne diffèrent entr'eux que par le différent arrangement de leurs parties. 3°. Enfin on ne peut pas dire que cette sensibilité vienne de Dieu : car l'Eucharistie est en elle-même un Sacrement, & par conséquent un Signe sensible ; donc elle a sa sensibilité indépendamment de nos sens : donc sa sensibilité ne vient point des impressions que Dieu exciteroit dans nos sens. D'ailleurs l'Eucharistie est un Sacrement, ou un signe sensible tout comme les autres Sacremens : or il est certain que ces autres Sacremens sont sensibles en eux-mêmes. De plus, il est de foi que J. C. est réellement présent sous les espéces du pain & du vin, que le corps de J. C. n'est point rompu quand on divise l'Hostie, mais seulement les espéces : or y a-t-il du sens à dire que J. C. est caché sous les impressions de nos sens ; ce mot sous marque un voile à parte rei ? Et qui est-ce qui oseroit dire que nos sensations sont rompues ? Il faut donc conclure nécessairement que l'Eucharistie n'est un signe sensible ou Sacrement, que pour les espéces ou accidens ; que l'Eucharistie nous oblige donc d'en admettre. On peut ensuite, si l'on veut, prouver par l'autorité des Conciles & des Théologiens cette même vérité.

☞ S'il y a des accidens absolus dans l'Eucharistie, donc le pain & le vin les avoient ces mêmes accidens avant la Consécration, donc tous les autres corps en ont pareillement : donc dans tous les corps il y a une quantité, ou grandeur ou extension qui n'est pas matiére, & qui peut être sans la matiére.

Accident, en termes de Médecine, est la même chose que symptome, & se dit de tout ce qui arrive de nouveau à un malade, soit en bien, ou en mal. Symptoma. Le remède travailla de telle sorte, que les accidens qui s’ensuivirent fortifierent l’accusation. Vaug. Cette plaie se pourra guérir, s’il ne lui arrive point d’accident ; c’est-à-dire, de fièvre, d’inflammation, ou d’autre symptome.

Par Accident, manière de parler adverbiale. Fortuitò. Elle marque une chose arrivée par malheur, ou un évènement qu’on ne devoit pas naturellement attendre. Le Prince a l’humeur bienfaisante, & s’il fait du mal, ce n’est que par accident. En termes de Philosophie, par accident, per accidens, signifie ce qui ne suit pas de la nature d’une chose, mais de quelque qualité accidentelle qu’elle a, & il est opposé à de soi ; per se, autre manière de parler semblable qui marque ce qui suit de l’essence & de la nature d’une chose. Ainsi le feu brûle de soi, per se, & entant qu’il est feu, & non pas par accident ; mais un fer, même chaud, ne brûle que par accident, par une qualité accidentelle qui lui est ajoûtée ; & non pas de soi & entant qu’il est fer.

ACCIDENTEL, ELLE. adj. Qui n’est pas de l’essence d’une chose, ce qui est indifférent à un sujet. Adventitius. La blancheur est accidentelle au marbre, la chaleur au fer.

Point Accidentel. Terme de Perspective, c’est un point dans la ligne horizontale, ou les projections des lignes parallèles entr’elles, mais non perpendiculaires à la Peinture, se rencontrent. Accidentale punctum. Harris.

ACCIDENTELLEMENT. adv. Par accident. Ce n’est qu’accidentellement qu’un homme est blanc ou noir, grand ou petit. On ne s’en sert guère qu’en termes de Philosophie.

ACCISE. s. f. Terme de Relation. C’est une certaine taxe, ou impôt qu’on leve dans les Provinces-Unies sur le vin, la bière, & sur la plûpart des choses qui se consument. On condamne à de grosses amendes ceux qui fraudent les accises. Ce mot vient du Latin, disent les Jésuites d’Anvers, Acta. Sanct. April. T. iii. p. 738, de accidere, tailler, parce que c’est une taille, un retranchement. On trouve en Latin moderne Accisia, pour la taille.

ACCISME. s. m. Terme proverbial, qui signifie le refus dissimulé des choses dont on a le plus d’envie. Les filles répondent ordinairement par un accisme, lorsqu’on leur parle de mariage. Ce mot vient d’une femme nommée Acco, qui avoit accoutumé de refuser les choses dont elle avoit le plus d’envie. Moreri, au mot Acco.

ACCLAMATION, s. f. Clameur, bruit confus, cri de joie, par lequel le public témoigne de l’applaudissement, de l’estime, ou son approbation par quelque chose. Acclamati. Le Roi entra dans la ville parmi les applaudissemens & les acclamations du peuple. Ablanc. Les soldats ne purent retenir les pleurs, ni les acclamations par lesquelles une multitude exprime ses mouvemens. Vaug. Aux avénemens des Princes, & à leurs premières entrées dans les villes, les peuples ont accoutumé de faire des acclamations & des réjouissances publiques. Dans le Code Théodosien, L. vii, il est fait mention des acclamations du peuple Romain, aux entrées des Empereurs Auguste & Constantin. De Roch. Voici quelques formules de ces acclamations, que l’Antiquité nous a conservées : Que les Dieux vous conservent pour nous, votre salut, notre salut : Dii te, nobis servent, vestra salus, nostra salus. En vous, ô Antonin, & par vous, nous avons tout. In te omnia, per te omnia habentur, Antonine. Lamprid. Lorsqu’Agripprine entra dans Rome, les peuples crioient qu’elle étoit l’honneur de la patrie, le seul sang d’Auguste, le seul modèle de l’antiquité, & faisoient des vœux pour ses enfans. Tacit. Annal. L. iii. C. 4. Lampridius dit qu’à l’entrée d’Alexandre Sévère les peuples crioient Salve, Roma, quia salvus Alexander ! O Rome, soyez sauve, puisqu’Alexandre est sauf. Les Hébreux crioient Hosanna. Les Grecs Ἀγαθὴ τύχη, c’est-à-dire, bonne fortune. De Roch. Voyez Juste. Lipse, Elect. L. 11. C. 10, & Lymneus, Jus Public. Imper. L. 11. C. 5. Anciennement on se servoit d’acclamation & d’applaudissement dans les églises, comme dans les théâtres : les Magistrats, les Evêques, étoient élus autrefois par les suffrages, & les acclamations publiques. Dans les Conciles on s’en est aussi souvent servi, soit pour souhaiter de longues années aux Empereurs, soit pour opiner.

☞ On dit, élire par acclamation, quand les voix se réunissent tout d’un coup pour l’élection d’un Sujet. Acad. Fr. Un avis, une loi passent par acclamation, quand l’avis ou la loi sont reçus & approuvés dès qu’ils sont proposés.

ACCLAMPER. v. a. Terme de Marine. C’est fortifier un mât par des clamps, qui sont des pièces de bois qu’on y lie, qu’on y attache pour opposer plus de résistance au vent.

☞ ACCOIL, ou ACCUEL. s. m. Vieux mot s. m. Accueil.

☞ ACCOILLIR. Vieux v. a. Accueillir quelqu’un, le bien recevoir.

ACCOINTABLE. adj. Vieux mot. Gracieux, accostable.

A lui se tint ung Jouvencel
Accointable, très-gent & bel.

Gloss. du Roman de la Rose.Ësc

ACCOINTANCE. s. f. Vieux mot. Habitude, commerce, ou familiarité qu’on a avec une personne. Commercium, consuetudo. Il ne faut avoir aucune accointance avec des gens de mauvaise vie.

Le bel esprit au siècle de Marot,
Des grands Seigneurs vous donnoit l’accointance.

Des Houl.

ACCOINTER. v. act. Vieux mot, & hors d’usage qui signifioit, Hanter quelqu’un, faire société avec lui. Habere commercium, inire consuetudinem. Il s’est accointé de cette fille, pour dire, il la voit un peu trop familièrement.

ACCOISEMENT. s. m. verb. Calme. Terme de Médecine. Il n’est d’usage que dans cette phrase, l’Accoisement des humeurs.

ACCOISER, v. act. Vieux mot, qui signifioit, Adoucir, appaiser. Placare, mulcere. La tempête après avoir duré


six heures, s’accoisa un peu. La sédition fut accoisée par l’adresse d’un tel Magistrat. Ce terme est usité en Médecine, où l’on dit accoiser les humeurs. On le dit aussi avec le pronom personnel. Les humeurs s’accoisent.

Accoisé, ée, part. pass. & adj.

ACCOLLADE, ou Accolade. s. f. Embrassement, caresse qu’on fait en sautant au cou de quelqu’un en l’embrassant. Amplexus, complexus. Les amis qui ont été long-temps sans se voir, se font mille embrassades & accollades.

Accolade, se dit aussi de l’embrassade, & d’une cérémonie dont on use quand on fait un Chevalier, lequel on embrasse en signe d’amitié ; & en ce cas on dit, donner l’accolade aux Chevaliers. Grégoire de Tours rapporte que les Rois de la première race donnoient le baudrier & la ceinture dorée aux Chevaliers, & les baisoient à la joue gauche. Après l’accolade le Prince donnoit un petit coup du plat d’une épée sur l’épaule du Chevalier, qui entroit par là dans la profession de la guerre.

Accolade, dans un compte, c’est un trait de plume qui joint plusieurs articles pour n’en faire qu’un.

Accolade, se dit aussi de deux lapereaux qu’on sert, qu’on présente joints ensemble.

☞ On dit en plaisantant : Donner l’accollade à une bouteille, à un flacon.

Accolade, Ordre Militaire, ou de Chevalerie, en Angleterre. Autrefois il n’appartenoit qu’aux Chevaliers de l’Accolade de porter l’épée & les éperons dorés. Justiniani ne dit rien de cet Ordre dans ses deux volumes des Ordres de Chevalerie.


ACCOLLER, ou Accoler. v. act. Embrasser quelqu’un en lui mettant les bras sur le cou pour le baiser, le caresser. Amplecti, complecti. Ce mot est composé de col, & vient de ad, & de collum. Il se dit le plus souvent en riant.

Accoler, Embrasser le cou.

Psycharpax sur son dos légérement s’élance,
l’accole, & de ses bras le serre étroitement.

Accoler la cuisse, accoler la botte, signifie, Saluer quelqu’un avec grande soumission, avec respect, comme quand on va au devant d’un homme qui arrive, jusqu’à l’endroit où il descend de cheval, & qu’on s’y trouve pour l’y saluer:ce qui est une marque d’infériorité. Ad genua advolvi.

Accoler, en termes de Pratique, signifie, Faire un trait de plume en marge d’un compte, d’un mémoire, d’une déclaration de dépens, qui marque qu’il faut comprendre plusieurs articles sous un même jugement, & les comprendre dans une même supputation pour n’en faire qu’un seul. Multa in unum redigere.

Accoler, en termes de Jardinage, se dit des branches d’arbres, des séps de vigne qu’on attache à des espaliers, à des échalas. Alligare. Il est temps d’accoler la vigne. Les vignes ont besoin d’être accolées, afin que par ce travail donnant plus d’air aux raisins, & empêchant qu’ils ne penchent trop à terre, ils puissent parvenir à une maturité parfaite. Accoler la vigne, est un terme fort bien inventé, car en la liant, il semble qu’on l’arrête par le cou. Liger. Cet Auteur fait entendre que ce mot ne se dit que de la vigne; & en effet je ne l’ai jamais oui dire d’autre chose.

Accoler, signifie aussi, Joindre deux lapereaux ensemble pour en servir une accolade. Componere.

ACCOLLÉ, ou Accolé, ée. part & adj. En termes de Blason, se prend en quatre sens différens. On le dit des animaux qui ont des colliers ou des couronnes passées au cou. Torquatus. Ainsi on dit, un lion de sable armé, lampassé, & accolé d’or. On s’en sert aussi en blasonnant les armes de Navarre, qui sont de gueules aux rais d’escarboucle accolés & pommetés d’or.

Accolé, se dit aussi des choses entortillées à d’autres, comme d’un serpent à un arbre, ou à une colonne, ou de toute autre chose qui est entourée de lierre ; d’un sep de vigne à un échalas ; d’une givre, Alligatus.

Accolé, se dit encore de deux écus qui sont joints ensemble, & attachés par les côtés. Scutum scuto annexum, adjunctum. Ainsi les écus de France & de Pologne étoient accolés sous une même Couronne du temps de Henri III, ceux de France & de Navarre depuis Henri IV. Les écus de Léon X & de François I. sont en tête du Concordat en deux Ecussons accolés : ils le sont pareillement dans le sceau dont il est scellé. Les femmes accolent aussi leurs écus à ceux de leurs maris.

On dit aussi que des fusées, des losanges & des macles sont accolées, quand elles se touchent de leurs flancs, ou de leurs pointes sans remplir tout l’écu. On se sert aussi de ces termes pour les clefs, bâtons, masses, épées, bannières, & autres choses semblables qu’on passe en sautoir derrière l’écu.

ACCOLURE. s. f. Terme de jardinage. Lien de paille, ou d’autre chose, dont les vignerons se servent pour accoler les vignes. L’accolure n’est pas une marchandise bien chère.

Ce mot signifie aussi l’action d’accoler.

☞ ACCOMBA. Ville du Péloponèse, ou de la Morée. Hypania. Elle est dans le Belvédère, au quartier que l’on nommoit autrefois l’Elide, près de la rivière de Diagon, qui, quelques lieues au-dessous, se décharge dans l’Alphée.

ACCOMMODABLE. adj. m. & f. se dit en matière de différent ; qui se peut terminer, ajuster, pacifier. Quod componi, conciliari facilè potest. Cette querelle est venue de rien, elle est accommodable. Les différens en matière de Religion ne sont guère accommodables.

ACCOMMODAGE. s. m. Travail ou salaire de ceux qui apprêtent, qui accommodent les viandes. Operæ, laboris merces. Quand on porte des viandes au cabaret, il en faut payer l’accommodage, les sauces, l’apprêt. On a tant payé au Tapissier pour l’accommodage des chambres, quand on a déménagé.

ACCOMMODANT, ante. adj. Qui est facile, complaisant, qui veut bien ce que les autres veulent, avec qui l’on peut traiter aisément. Commodus. Vous aurez bientôt conclu votre marché avec cet homme-là, il est fort accommodant. Votre humeur si égale, sociable, & si accommodante me charme. Cost.

Accommodant, signifie aussi, Ce qui nous fait grand bien, qui établit nos affaires. Un gros billet de lotterie, une succession inesperée, sont des choses fort accommodantes.

ACCOMMODATION. s. f. Terme de Palais. Accord qui se fait à l’amiable. Compositio. Ce procès est si embrouillé, qu’il n’y a pas moyen d’en sortir que par voie d’accommodation. On ne s’en sert plus. Il faut dire, accommodement.

On le dit aussi figurément de la conciliation des Loix, des passages des Auteurs qui semblent être contraires. Conciliatio. Le plus grand soin des Commentateurs est de trouver l’accommodation des textes de leurs Auteurs qui se contrarient. Conciliation est meilleur.

Accommodation. Terme de Philosophie. Accommodatio. Connoître par accommodation, c’est connoître une chose par l’idée d’une autre.

ACCOMMODEMENT. s. m. Ajustement, ce qui rend une chose plus commode, ou qui la met en meilleur ordre. Conveniens rerum dispositio, collocatio. Je ne louerai point votre maison, que vous n’y ayiez fait tels & tels accommodemens.

Accommodement, signifie aussi, Réconciliation, accord, traité pour finir un procès, ou un différend à l’amiable. Compositio, reconciliatio. Ces parties sont en voie, en termes d’accommodement. Cet homme n’est point chicaneur, il est homme d’accommodement ; il est porté naturellement à l’accommodement ; il entre volontiers en accommodement ; il écoute tous les moyens d’accommodement. Dans les accommodemens l’on cherche d’ordinaire des termes foibles, pour l’honneur de celui qui fait satisfaction. Bouh. Cet acte d’hostilité a rompu l’accommodement qu’on avoit ménagé. Ils ont fait un accommodement plâtré. [Acad. Fr. Il se prend encore pour un tempérament, & pour un biais de parvenir à un accommodement. Il y auroit un accommodement à proposer, si les intéressés y vouloient consentir ; c’est-


à-dire, un moyen, & un adoucissement pour les concilier.

Le ciel défend de vrai certains contentemens.
Mais on trouve avec lui des accommodemens.

Moliere.

Un négociateur qui a ses ordres de la Cour, feint cependant quelquefois de se relâcher de lui-même, & comme par un esprit d’accommodement. La Bruy.

On dit proverbialement, que le meilleur procès ne vaut pas le plus mauvais accommodement.

ACCOMMODER. v. a. Rendre une chose facile, commode, la réparer. Aptare, reparare, reficere. On a donné ordre pour accommoder les chemins. Il faut accommoder cette selle, la rembourer, la rendre moins dure, & plus commode.

Accommoder, signifie aussi, arranger, mettre en ordre, en bon état. Componere, concinnare. Il a pris grand soin d’accommoder sa chambre, son cabinet ; d’orner, d’accommoder son jardin, sa maison.

On le dit aussi des choses qui regardent l’ornement de la personne. Comere. Cette femme est toujours deux heures à s’accommoder ; c’est-à-dire, à s’ajuster & à se parer. Ce Barbier accommode bien la perruque, les cheveux.

Accommoder, signifie aussi, préparer, apprêter, assaisonner. Parare, apparare, instruere, condire. Ce Cuisinier accommode fort bien à manger. On est fort bien accommodé dans cette hôtellerie ; c’est-à-dire, on y est bien traité, & bien servi. A quelle sauce voulez-vous qu’on accommode ce poisson.

Accommoder, se dit aussi en parlant de ce qui est à la bienséance, au voisinage de quelqu’un. Convenire. Cette terre accommoderoit bien cette Seigneurie, parce que l’une releve de l’autre. Vous ferez aisément marché avec ce curieux, tout l’accommode.

Accommoder, signifie, presqu’en même sens, traiter, acheter, prêter, permuter. Si vous voulez m’accommoder de cette terre, je l’acheterai. Si vous voulez m’accommoder de quelque argent, vous me ferez plaisir.

Accommoder, signifie aussi débrouiller ses affaires, les rétablir, faire fortune, gagner du bien, reparare, restituere, rem facere. Cet homme s’est bien accommodé dans cette charge:il étoit gueux, il a bien accommodé ses affaires.

Accommoder, signifie aussi terminer un procès, une querelle. Componere, controversiam dirimere. Quand les gens sont las de plaider, c’est alors qu’ils sont disposés à s’accommoder. Ces jeunes gens étoient prêts à se battre ; mais on les a accommodes. Acad. Fr.

On le dit aussi des Loix, des passages des Auteurs & autres choses qui semblent se contrarier, & que l’on cherche à concilier. Conciliare. Comment accommodez-vous cette Loi du Digeste avec cet autre du Code ? Comment accommodez-vous la dévotion avec la coquetterie ? Il y a des dévots qui accommodent la Religion à leur intérêt.

Accommoder, se dit aussi avec le pronom personnel, & signifie être facile, commode dans la négociation, dans la manière de vivre. Fingere, accommodare se ad voluntatem, &c. Il y a plaisir de traiter avec cet homme-là; c’est un homme d’un esprit aisé, & d’une humeur agréable, qui s’accommode à tout. En ce sens on dit aussi, qu’un homme sage doit s’accommoder au temps. Servire tempori, &c. C’est-à-dire, se conformer à l’usage, aux lieux, aux humeurs, à la volonté, à la capacité des personnes à qui il a affaire, pour vivre en repos, & dans l’estime publique. La science d’un homme sage est de s’accommoder au temps. Le Gend. Il faut que la raison s’accommode à la sensibilité de la nature, & que dans les extrêmes déplaisirs elle lui laisse verser des pleurs. Cail. Pour être heureux par les passions, il faut que toutes celles que l’on a s’accommodent les unes avec les autres. Fonten. Les soupirs & les langueurs ne s’accommodent point à la fierté d’un Héros. Cail. C’est-à- dire, qu’ils ne compatissent point ensemble. Il faut s’accommoder aux choses, quand les choses ne s’accommodent pas à nous. Un sage s’accommode aux vices de son siècle. Mol. ☞ S. Ignace disoit qu’il ne faut pas accommoder les affaires à soi, mais qu’il faut s’accommoder aux affaires. Bouh. Quand on n’a pas de quoi s’accommoder, il faut s’accommoder de ce qu’on a. R.

s’ACCOMMODER, avec la particule de, signifie trouver une chose bonne, commode, ou du moins ne la trouver pas mauvaise, s’en servir, en user volontiers. Convenire, uti, adhibere. Je ne saurois m’accommoder de ce valet, pour signifier, je ne puis m’en servir. On dit qu’un homme ne s’accommode pas de toutes sortes de personnes, pour dire, que toutes personnes ne lui plaisent pas ; qu’il s’accommode dans un lieu, pour exprimer qu’il s’y trouve bien. Je ne m’accommode point de la solitude, ce genre de vie est trop ennuyeux. Le P. Malebranche pensoit trop subtilement pour s’accommoder de pensées qui sont naturelles. La Bruy. Socrate, dont la vertu n’étoit point farouche, s’accommodoit de l’innocente joie des festins. M. Scud.

Accommoder, avec le nom personnel, signifie encore prendre sans façon, s’approprier les choses un peu hardiment. Usurpare, vindicare. Cet homme s’accommode de tout ce qu’il trouve ; c’est-à-dire, il s’en saisit, il s’en empare. On dit aussi, voyez comme il s’accommode ; pour exprimer, qu’il prend ses commodités avec beaucoup de liberté.

Accommoder, se prend quelquefois à contresens, & en mauvaise part, & signifie maltraiter, ou de paroles, ou de coups ; gâter, mettre en désordre & en mauvais état. Malè habere. Il est tombé entre les mains de voleurs, d’assassins, qui l’ont accommodé d’une étrange manière. Il est tout couvert de boue, le voilà mal accommodé. Bon Dieu ! comme il s’est accommodé. En quel état il s’est mis. Expressions familières. On dit populairement, je vais l’accommoder de toutes pièces. Ablanc. Dans le jugement de ce procès il a été mal accommodé ; il y a eu de sévères condamnations contre lui.

On dit aussi par raillerie, d’un homme qui s’est enivré, qu’il s’en est donné, qu’il s’est accommodé de la belle manière ; pour dire, qu’il en a pris avec excès.

Accommoder, se dit proverbialement dans ces phrases. On l’a accommodé tout de rôti, pour dire, on l’a fort maltraité. On dit aussi, accommodez-vous, le pays est large ; pour se moquer d’un homme qui se met à son aise, qui prend ses commodités sans beaucoup de cérémonie.

{{scAccommodé, ée}}. part. Compositus. Un procès accommodé. Un homme assez accommodé des biens de la fortune. Dives. Masc.

ACCOMPAGNATEUR. s. m. Celui qui dans un concert joue de quelque instrument de Musique, en accompagnant la voix des chanteurs. A l’aide de cette nouvelle méthode on peut devenir sçavant Compositeur & habile Accompagnateur, même sans savoir lire la Musique. M. Rameau. Merc. Fév. 1732.

ACCOMPAGNEMENT. s. m. Action par laquelle on accompagne. Comitatus. L’accompagnement du Saint Sacrement, quand on le porte aux malades, est une action pieuse, & qui édifie. Dans ce sens l’on ne s’en sert guère que pour des cérémonies. Le Prince de C. fut chargé de l’accompagnement de la Princesse. Ac.

Accompagnement, se dit aussi de choses qui en accompagnent une autre, & qui en sont regardées comme une suite nécessaire, ou pour l’ornement, ou pour l’agrément, ou pour la symétrie. Adjuncta. Il ne manque à cette maison qu’un bois de haute futaie pour son accompagnement. Cette chambre est belle, mais elle n’a pas ses accompagnemens. S. Evr.

Accompagnement, en termes d’Organiste, se dit de divers jeux qu’on touche pour accompagner le dessus, comme le bourdon, la montre, la flûte, le prestant, &c Concentus.

Accompagnement, est aussi un terme de Blason, & se dit de tout ce qui est autour de l’Ecu pour lui servir


d’ornement, le pavillon, le cimier, les supports, &c. Stipatio.

Accompagnement. s. m. L’action d’accompagner dans la Musique. Apprendre l’accompagnement, savoir l’accompagnement.

ACCOMPAGNER. v. a. Marcher de compagnie avec un autre. Comitari. Un Religieux doit être toujours accompagné d’un Frère. Cette femme jalouse accompagne par-tout son mari.

Accompagner signifie aussi, Conduire quelqu’un par civilité, & pour lui faire honneur. Delucere. Le Président a accompagné cette Dame jusqu’à son carrosse. On envoie des gens de qualité aux Ambassadeurs pour les accompagner à l’audience du Roi, pour les y conduire.

Accompagner, se dit aussi de la suite, du cortége, de l’escorte qu’on donne à quelqu’un, ou pour l’observer, ou pour lui faire honneur, ou pour l’assurer en sa marche. C’est en ce sens qu’on dit accompagner le S. Sacrement, quand on le porte aux malades. Rodolphe, Comte de l’Hapsbourg, rencontrant à la campagne un Curé, qui portoit le S. Viatique à un malade par des chemins très-fâcheux, lui donna son cheval, & accompagna le S. Sacrement à pied. C’est à cette action de piété qu’on attribue son élévation, & celle de la maison d’Autriche, dont il est le Chef. On a remarqué que le Roi fit quelque chose de semblable peu de temps avant que le Duc d’Anjou parvînt à la Couronne d’Éspagne. Ce Seigneur marche toujours accompagné de six Gentils-hommes, &c. Les Maréchaux de France envoient un Garde à ceux qui ont querelle, pour les accompagner par-tout. Quand le Roi alla à la conquête de Flandre, il étoit bien accompagné, il avoit une nombreuse armée. On envoya un corps de cavalerie pour accompagner ce convoi, c’est-à-dire, pour l’escorter.

Accompagner, se dit aussi de ce qui orne ou décore quelque chose, & qui lui sied bien. Condecorare. Ces deux pavillons accompagnent bien ce bâtiment, ils font une belle symmétrie. Cette garniture accompagne bien son habit, cela est bien assorti. Lorsqu’elle joue, le thuorbe accompagne parfaitement son chant ; mais sa personne accompagne encore mieux le thuorbe. Le Ch. d’H.

Accompagner, se dit figurément en choses morales, de ce qui est joint ensemble. Consociare, Conjungere. Il accompagne tout ce qu’il dit de tant de graces, & de tant d’honnêtetés, que cela gagne les cœurs. La colère & l’emportement accompagnent d’ordinaire le jeu. St Evr. L’admiration qu’on a pour les actions glorieuses, est souvent accompagnée d’un secret dépit de n’en pouvoir faire autant. Cost. Il a accompagné le compliment qu’il lui a fait faire, d’un present considérable. La fortune a accompagné Alexandre en toutes ses entreprises ; elle l’a suivi par-tout. La vieillesse, par les infirmités qui l’accompagnent, ressemble plus à la mort qu’à la vie. Ablanc.

Accompagner, en terme de Musique, se dit de celui qui joue du clavecin dans un concert, ou de celui qui joue de la flûte, ou du violon, ou de quelque autre instrument, pendant que quelqu’un chante. C’est une science particulière, de bien accompagner une voix. ☞ Un habile Musicien accompagne de génie, & sur le champ toutes sortes d'airs.

s’Accompagner, v. n. p. Mener quelque gens avec soi pour quelque dessein. Il se prend le plus souvent en mauvaise part. Il s’accompagna de gens de main pour faire ce coup-là.

Accompagné, ée. part. pass. & adj. Comitatus.

Accompagné, en termes de Blason, se dit lors qu’autour d’une pièce principale, comme le sautoir, la bande, la fasce, le chevron, le croissant, le lion, l’aigle, &c. il y a plusieurs autres pièces qui sont auprès en séantes partitions. De Neufville Villeroi porte d’azur au chevron d’or, accompagné de trois croix ancrées de même. On le dit particulièrement des croix, sautoirs, chevrons, pairles, &c. quand ces choses sont également disposées dans les quatre cantons de l’Écu qu’elles laissent vuide.

ACCOMPLIR, v. act. Faire entièrement, mettre une chose en un état où il n'y ait plus rien à desirer ; lui donner sa perfection. Perficere. Notre Seigneur a accompli toutes les prophéties ; il a fait tout ce qu'elles avoient prédit. Cet Officier a bien accompli son devoir. Dieu lui donna des enfans pour accomplir ses desirs, & les lui ôta pour éprouver sa résignation. Felib. Il a accompli sa promesse, ou son vœu ; c’est-à-dire, qu’il a exécuté tout ce qu’il avoit promis. Promissa exsolvere.

Accomplir, se dit aussi de ce qui est fini & achevé. Absolvere. Ce garçon a accompli le temps de son apprentissage. Cet exilé a accompli le temps de son bannissement.

Accompli, ie. part. & adj. Achevé, parfait. Perfectus, absolutus. Le temps est accompli. Il a fait un ouvrage accompli. Ce Seigneur est accompli, pour dire, il a toutes sortes de perfections & de bonnes qualités. Il faut avoir 25 ans accomplis pour être en majorité.

ACCOMPLISSEMENT, s. m. Exécution, succès, ce qui rend la chose accomplie. Perfectio, absolutio. Nous avons l’accomplissement de nos vœux ; c’est-à-dire, tout ce que nous avons souhaité. Les instructions de l’Eglise tendent à porter les fidèles à l’accomplissement de la Loi de Dieu. Port-R. Lycurgue ordonna que les nouveaux mariés ne se vissent qu’à la dérobée, afin d’empêcher le dégoût qui suit l’entier accomplissement de nos desirs. Ablanc. Voyez un heureux, & quelle sérénité l’accomplissement de ses desseins répand sur son visage. La Bruy.

ACCON. Terme de Marine. Petit bateau à fond plat, dont on se sert pour aller sur les vases, lorsque la mer est retirée.

ACCONDUIRE. verbe act. Amener. Adducere. Il ne se dit plus.

ACCOQUINANT, ante. adj. verbal. Qui accoquine, qui attire. Le feu est accoquinant. Une vie accoquinante.

ACCOQUINER, v. act. amuser, attacher, s’accoquiner, v. n. p. Se plaire, s’attacher à une vie coquine, fainéante, & libertine ; s’amuser, s’accoutumer à quelque chose d’indigne. Tradere se inertiæ, ludo, voluptati, &c. Il ne se dit que dans le style bas & satyrique. Il s’emploie plus souvent avec le pronom personnel. Cet homme s’est accoquiné au jeu, s’est accoquiné avec cette femme débauchée. Un artisan qui s’accoquine au cabaret est toujours gueux. Depuis qu’on s’est accoquiné à gueuser, on est fainéant toute sa vie.

Mon Dieu, qu’à ses appas je suis accoquiné !

Moliere. Dépit amoureux.

La lecture des Romans accoquine l’esprit ; pour dire, elle l’amuse, elle l’attache. Nous verrions les femmes courir après nous, sans tous les respects où nous les accoquinons. Mol. Le feu accoquine, il rend les gens paresseux & fainéans. On le dit aussi de quelques animaux domestiques. Il ne faut pas qu’un chien de chasse s’accoquine à la cuisine. Ce mot, quand il est joint avec le pronom personnel, régit le verbe à l’infinitif avec la particule à : Quand on s’est une fois accoquiné à faire des vers, l’on ne peut plus s’appliquer à autre chose. St. Evr. Ce mot vient de coquus, parce que les fainéans se plaisent fort à la cuisine, ou plutôt de coquin, dont nous donnerons l’étymologie en son lieu, & signifie proprement devenir coquin, soit en général, soit à l’égard de quelque chose en particulier.

Accoquiné, ée. part. & adj.

ACCORD, s. m. Consonnance ou union de deux sons agréables à l’oreille. Consentus, consonantia. L’octave, la quinte, sont de bons accords. Ce Musicien ne joue pas une pièce, il fait seulement des accords. L’Organiste joue le plein chant du petit doigt, & des autres il fait des accords. On dit aussi, qu’un luth ou un autre instrument n’est pas d’accord, quand il ne fait pas les consonnances justes qu’on desire, & que les cordes ne sont pas montées justes au ton qu’elles doivent être.

Accord, s. m. Se dit aussi de la Poësie & des Vers.

En ce temps d'or & de délices,
Racan, dont les charmans accords
Obtiendroient du Prince des morts
Le retour de mille Eurydices. P. le M.

Accord, signifie aussi cette union & cette proportion qui est entre toutes les parties de l’Univers, qu’on appelle l’Harmonie du monde, qui en établit le repos & la stabilité. Consensus & convenientia.


Accord, signifie encore, Paction, convention entre les personnes qui traitent, qui conviennent de quelque chose. Conventum, pactio. Ces parties ont fait, ont passé, ont signé un bon accord. Ce changement s’est fait d’accord de parties, de concert. Un bon accord vaut mieux qu’un méchant procès. Il faut remarquer qu’on ne dit un accord, que des affaires légères & particulières ; & que dans les grandes on se sert du mot de transaction ou de traité : & accommodement est le genre qui se dit de tout cela. L’accord diffère de la transaction, en ce que les transactions se font moyennant quelque chose donnée, promise, ou retenue ; & l’accord, qu’on appelle en Droit nudum pactum, se fait sans se rien demander l’un à l’autre.

Accord, se dit aussi de l’union & de la bonne intelligence qui se trouve entre ceux qui vivent ensemble : en ce cas, il signifie une conformité d’esprits & de volontés. Concordia. Ce mari & cette femme sont bien d’accord.

Accord, se dit aussi de l’accommodement qui se fait entre des personnes qui étoient mal ensemble. Reconciliatio. Un accord se doit faire sans tant d’exactitude & de chagrin ; on le rend plus assuré. Bellum finire cupienti opus erat decipi, dit un Ancien. Il faut souvent se laisser tromper pour sortir d’affaire. De Roch. Les accords qui se font par nécessité ne durent pas ; le repentir les suit, & fait renouveller les querelles en peu de temps. Id.

Accord, signifie aussi, Consentement. Consensio. J’en suis d’accord. Les Protestans sont d’accord avec nous qu’au moins à l’égard des vérités Chrétiennes, & des promesses générales de Dieu, il faut avoir une certitude entière & parfaite ; être au moins infailliblement assuré qu’on est dans la voie du Salut ; autrement ce ne seroit pas Religion & Loi Divine, mais opinion & connoissance humaine. Peliss. Tout le monde demeure d’accord, tombe d’accord, est d’accord de cette vérité. Ils demeurerent aussi d’accord avec nous, que, &c. Peliss. J’en tombe d’accord. Je ne voudrois pas me servir de cette manière de parler. J’aimerois mieux dire : J’en demeure d’accord, qui me paroît plus propre & plus en usage : Suite des Mots à la mode C’est aussi le sentiment de Mr Andry, qui reprend le P. Bouhours du trop fréquent usage de, Je tombe d’accord, dans sa manière de bien penser. Réflexions sur l’usage présent de la Langue Françoise. Il faut, dit Mlle de Scudery, que vous demeuriez d’accord que la critique en général a fait mille biens au monde pour perfectionner les Sciences & les Arts, & qu’elle est aussi ancienne que lui. Conversations morales. On dit absolument, d’accord ; pour dire, J’y consens ; cela est vrai ; Je l’avoue. C’est ainsi que dans un Dialogue avec Pégase on a dit :

A. Tu suivis toutefois le diligent Achille.
Dans le cours glorieux de ses hardis exploits,
P. D’accord : mais en dix ans il prenoit une Ville :
Il n’en prit jamais quatre en la moitie d’un mois.

Accord, signifie encore, Conformité de sentimens, Consensus. Tous les Philosophes ne sont pas d’accord sur cette matière ; c’est-à-dire, qu’ils ne sont pas du même avis, ni dans le même sentiment là-dessus. Toute puissance est établie de Dieu, vous en êtes d’accord. Peliss.

Iris, dans notre querelle
Je n’examine pas qui de nous deux a tort :
De tout ce qu’il vous plait je demeure d’accord ;
Et vous avez raison puisque vous êtes belle. La Sabl.

Tout d’un accord, adv. Tout d’un consentement, d’un même avis.

On dit proverbialement d’un homme facile & de bonne humeur, qui consent à tout ce qu’on veut, qu’il est de tous bons accords.

Accords, ou étais, en termes de Marine, sont de grandes pièces de bois dont on se sert pour soutenir le Navire que l’on construit tant qu’il est sur le chantier. Tigna.

ACCORDABLE. adj. Qui se doit ou peut s’accorder. Dignus venia. Cette grâce n’est pas accordable, le crime est trop énorme. Il est peu en usage.

ACCORDAILLES. s. f. Il n’a point de singulier. Cérémonie qui se fait pour la lecture des qualités, ou pour la signature d’un contrat de mariage en présence des parens, quand les parties sont d’accord. Sponsalia. Ce mot est vieux, & ne se dit qu’au Palais. Hors de-là, on dit accords. Le peuple dit aussi accordailles.

ACCORDANT, ante, adj. Qui se peut accorder. Ad concentum aptus. La Musique consiste à bien choisir les tons accordans, & à les distinguer des discordans. Il y a des voix accordantes & discordantes.

ACCORDEMENT. s. m. Terme de Coutume. C’est l’accord, la composition, le traité que fait un acquéreur avec le Seigneur censuel pour les droits censuels des lods & ventes qui sont dûs audit Seigneur. Pactum, conventio. Ragueau.

ACCORDER, v. act. Mettre des voix ou des instrumens de Musique en état de faire des consonnances, ou des accords dans la plus grande justesse ; les mettre sur un même ton, pour en former un concert agréable. Concentum inter instrumenta musica efficere. Accorder un instrument, c’est monter les cordes au ton où elles doivent être, pour faire l’harmonie. On est plus long-temps à accorder son Luth, qu’à en jouer. Accorder sa voix avec un Thuorbe. Cantare ad cordarum sonum.

Accorder, se dit en Grammaire en parlant du régime & de l’accord que les parties d’oraison doivent avoir ensemble. Concordare. Le substantif & l’adjectif se doivent accorder en genre, en cas & en nombre.

Accorder, signifie aussi, Accommoder, mettre d’accord, établir la paix & l’union entre des personnes. Controversias dirimere, componere. Il a accordé son procès. Accorder les cœurs, & les esprits. Ces deux frères étoient en querelle, on les a accordés.

Accorder, se dit en matière de Doctrine, & d’opinions : alors il signifie les concilier, & en lever les contradictions apparentes. Conciliare. Les Théologiens font tous leurs efforts pour accorder S. Matthieu & S. Luc sur la généalogie de Jesus-Christ. Cl. & on les a très-bien accordés. Rien n’est si aisé que d’accorder l’Ecriture avec l’Ecriture, lorsque l’on croit avec l’Eglise Chrétienne, &c. Peliss.

On le dit aussi des choses, Consentire, convenire. Les qualités contraires ne s’accordent pas ensemble, elles sont incompatibles. Le chaud & le froid ne s’accordent pas. Ce que vous dites ne s’accorde pas avec ce que vous m’avez dit autrefois. Accordez-vous avec vous-même. Accorder la liberté de l’homme avec les decrets de Dieu. Port-R.

Accorder, se met aussi avec le pronom personnel ; & alors il signifie, Convenir, être d’intelligence & de complot. Ce Juge & ce Greffier s’accordent à tromper les Parties. Il marque encore la conformité des esprits & des humeurs : Les jeunes gens n’ont pas de peine à s’accorder ; leurs plaisirs communs les unissent. St Evr. Calvin voudroit bien accorder Luther & Zuingle : mais il ne peut s’accorder avec lui-même. Peliss.

Accorder, se dit aussi de ce qui peut subsister agréablement ensemble, & généralement de toutes les choses qui ont de la convenance, & du rapport. Concinere. Cette garniture s’accorde bien avec cet habit. Le plomb s’accorde bien avec l’étain. Le vinaigre ne s’accorde pas avec le lait.

Accorder, signifie aussi, Donner, faire une grace, octroyer une demande. Concedere. Le Cardinal Ximénès n’accordoit jamais ce qu’on lui demandoit, pour n’être pas troublé dans l’ordre du bien qu’il vouloit faire. Flech. Ce Prince lui a enfin accordé l’Emploi qu’il sollicitoit. Le Pape a accordé cent ans d’indulgence.

Accorder, Consentir, Concedere. Je vous accorde cette proposition.

On dit aussi, Accorder une fille en mariage, quand les Parens donnent une fille à celui qui la leur demande ; ou quand les parties en signent le contrat. Despondere.

On dit proverbialement, que des gens s’accordent comme chiens & chats ; pour dire, qu’ils ne peuvent compatir ensemble. Dissentire. Accordez vos flûtes ; pour dire, convenez de vos faits.

Accorder. v. n. On dit en termes de Marine, Accorde, & c’est un commandement qu’on fait quand on veut obliger l’équipage de la chaloupe à nager ensemble.

Accordé, ée, part. pass. & adj. Il a les significations de son verbe. Un luth accordé ; une proposition accordée ; un procès accordé.

Accordé, ée, s. m. & f. Qui s’est engagé par un traité pour mariage. Desponsus, desponsatus. C’est un accordé ;


c’est son accordée. L’accordé qui refuse d’accomplir le mariage, est toujours condamné aux dommages & intérêts, proportionnés à la qualité de l’accordée ; parce qu’elle est offensée, & méprisée par le changement.

ACCORDOIR. s. m. Petit instrument qui sert à accorder les instrumens de musique. L’accordoir d’une orgue est fait en forme d’un petit cône, dont on affuble les tuyaux en les pressant, jusqu’à ce qu’ils soient assez étroits pour les faire descendre aux tons qu’on désire ; ou en poussant la pointe du cône dans le tuyau lorsqu’on le veut élargir & le faire monter. L’accordoir d’un clavecin est fait comme un petit marteau.

Ces mots d’accord & d’accorder, selon quelques-uns, & entr’autres Nicod, viennent du Latin ad cor, comme si on disoit, que deux personnes sont amenées à un même cœur ou à une même volonté. Mais il y a plus d’apparence qu’ils viennent de corde, & que le premier sens d’accorder vient de ce que deux cordes qui se touchent en même-temps, forment des tons qui s’unissent agréablement : d’où vient qu’il y a des consonnances en Musique qui s’appellent tétracorde & hexacorde, qui sont la quarte & la sixte ; ce qui a été étendu aux conventions, qui font agir les parties de concert. Le mot accord est assez ancien. Le P. Papebroch, Act. Sanct. Mai, T. I. p. 64. cite un vieux mémoire dans lequel on lit : Fit tractatus & accordum cum quodam auri fabro istius Urbis.

ACCORER. Terme de Marine, qui signifie appuyer ou soutenir quelque chose. Sustentare, fulcire.

ACCORNÉ, ée. adj. Terme de Blason, qui se dit d’un animal qui est marqué dans un écu avec ses cornes. Cornutus. On le dit seulement quand elles sont d’une autre couleur ou métal que le reste du corps de l’animal. Têtes de vaches de sable, accornées d’argent.

Accorné, ée. adj. Terme de Fortifications. Défendu, couvert par un ouvrage à corne en tenailles. Cornuto propugnaculo munitus, protectus, a, um. Des demi-lunes tenaillées, ou accornées. Les demi-lunes accornées ou tenaillées, (ce dernier terme est plus usité) sont des demi-lunes couvertes par des ouvrages à corne en tenailles, dont le front est couvert de chaque côté, depuis l’escarpe jusqu’à la contrescarpe du fossé de la demi-lune ; de sorte qu’un côté de la tenaille n’a point de communication avec l’autre, & que ses faces qui sont formées par le prolongement de celles de la demi-lune, sont flanquées du corps de la place. Nou. Mém. de Fort.

ACCORT, orte. adj. Civil, complaisant, qui se sçait s’accommoder à l’humeur des personnes avec qui il a affaire, pour réussir dans ses desseins. Comis, obsequens, commodus. Les Grecs l’appellent πολύτροπος. Ce mot vient de l’Italien accorto, qui signifie la même chose. On a dit autrefois accortise & accortement : mais ces mots ont vieilli, quoique Pasquier témoigne qu'ils étoient nouveaux de son temps.

Accort, signifie encore adroit, habile à trouver promptement divers expédiens. Versutus, callidus.

ACCOSTABLE. adj. m. & f. Qui se laisse aborder facilement. Facilis, comis. Ce sont des personnes peu accostables. Voit. Ce Conseiller est fort accostable, il écoute paisiblement les parties. Ce mot est hors d’usage.

ACCOSTER. v. a. Approcher de quelqu’un pour lui parler, pour lui apprendre, ou savoir de lui quelque chose, ou pour nouer amitié avec lui. Accedere. On conjugue, je m’accoste ; je m’accostai ; je me suis accosté. Ces mots viennent de ad & de costa, côté ; comme si l’on vouloit dire, se mettre à côté, ou aux côtés de quelqu’un ; c’est-à-dire, se joindre à lui. Il est allé hardiment accoster cette femme. Ce mot n’entre que dans le discours familier.

Accoster signifie aussi, Hanter, avoir familiarité avec quelqu’un. Frequentare. Il ne faut accoster que d’honnêtes gens. Ils se défioient tellement les uns des autres, qu’on n’eût osé s'accoster de personne. Vaug.

Accosté, ée. part. pass. & adj. En ces mots l’S se prononce.

ACCOTAR. s. m. Terme de Marine. C’est une pièce de bordage que l’on endente entre les membres du vaisseau, pour empêcher l’eau de tomber entre les membres, ou entre les pièces qui le composent.

ACCOTEPOT. s. m. Petite pièce de fer, courbée en demi-cercle, qu’on met au pied d’un pot, ou d’un coquemar, pour empêcher qu’il ne tombe. Fulcrum. D’autres disent Appuiepot.

ACCOTER ou ACCOTTER. Terme de Marine. C’est approcher une chose d’une autre. Admovere. On le dit des huniers & des perroquets, quand on fait toucher les coins ou pointes des uns ou des autres aux poulies destinées à cet usage, & qui sont mises exprès au bout des vergues. Accotte, ou accoste, est le commandement pour faire approcher une chose de l’autre. Ainsi on dit à un petit vaisseau pour le faire approcher d’un plus grand, accotte, accoste à bord.

Ces mots viennent aussi du Latin Costa, Côte.

ACCOTER. v. act. Appuyer en mettant quelque chose à côté d’une autre qui la soutienne. Fulcire, sustinere. Il faut accoter ce coquemar, de peur qu’il ne tombe. Il faut s’accoter contre la muraille quand on n’a point de siége. Ce mot a la même origine & le même sens primitif que accoster, qui vient de costa. Il est familier.

Accoté, ée. part. pass. & adj. Appuyé. Fultus, nixus.

ACCOTÉ, ou ACCOTTÉ. Terme de Blason, se dit des pièces qui sont posées à côté d’une autre pièce de l’écu. Adpictus, appositus. Le Prêtre-Jean d’Ethiopie porte d’argent, à une croix haussée de gueules, chargée d’un Crucifix, accotée de deux fouets de cordes emmanchés d’azur. Il se dit particulièrement de toutes les pièces de longueur mises en pal, ou en bande, quand elles en ont d’autres à leurs côtés. Ainsi le pal peut être accoté de quatre ou de six annelets, quand il y en a deux ou trois de chaque côté. On dit la même chose de la bande, quand les pièces qui sont à ses côtés, sont couchées dans le même sens, & qu’il y en a le même nombre de part & d’autre. Quand elles sont droites, on nomme alors la bande accompagnée de deux ou de quatre fleurs de lys, ou autres choses dont il faut énoncer la situation. Quand ce sont des pièces rondes, comme des tourteaux, des besans, on peut dire indifféremment accoté, ou accompagné. Le P. Menestrier.

ACCOTOIR, ou ACCOTTOIR. s. m. Ce qui sert d’appui, de soutien à quelque chose. Fultura, fulmentum. Je suis si las, que je cherche un accotoir. Il est bas, hors de la conversation. En particulier, c’est un morceau de bois plat, attaché dans les confessionnaux, ou dans les chaises à porteurs, pour servir d’appui.

ACCOUCHEMENT. s. f. Enfantement, délivrance d’une femme grosse. Partus, puerperium, partio. Les travaux de l’accouchement sont une des peines du péché originel. Voyez Mauriceau sur cette matière. Il y a un traité latin du terme de l’accouchement des femmes, par Peysonnel, à Lyon, in-8°. Il entreprend de concilier toutes les contradictions apparentes d’Hippocrate sur ce sujet. Il prétend que le terme le plus court de l’accouchement naturel, suivant le sentiment d’Hipocrate, est de 182 jours, ou de six mois entiers & complets, & le plus long de 280 jours, ou de neuf mois entiers & 10 jours, & que les enfans qui viennent avant ou après ce terme, ne vivent point, ou ne sont pas légitimes. Cette opinion est contraire à la Loi, qui déclare qu’un enfant peut naître onze mois après la mort de son pere. Peysonnel répond que cette Loi doit s’entendre d’onze mois, en comptant la fin du premier mois & le commencement de l’onzième, & non pas d’onze mois entiers & accomplis. Bartholin a fait un Livre des conduits extraordinaires par où sort le fœtus ; il rapporte différens exemples d’accouchemens fort extraordinaires. Il y en a où le fœtus est sorti par la bouche ; il y en a où il est sorti par l’anus. Voyez Salmuthus, obs. 94. cent. 3. Le Journal des Savans d’Allemagne, sur l’observation 108. de l’année 1670. Degori, Diction. medical.

On le dit quelquefois figurément des productions de l’esprit. Partus, foetus ingenii. Socrate disoit, qu’il faisoit l’office de Sage-femme, & qu’il aidoit à l’accouchement des esprits. On dit proverbialement ; Après avoir long-temps attendu l’accouchement des montagnes, il n’en est sorti qu’une souris.

ACCOUCHER. v. n. Enfanter, mettre un enfant au monde. Parere, eniti. Il régit l’ablatif. Cette femme est accouchée d’un beau garçon. Elle est accouchée d’un faux germe, ou avant terme. Cette femme étoit accouchée quand la sage-femme arriva. On ne dit point elle a, elle avoit accouché. La Fable raconte que Jupiter accoucha de Minerve. La même nuit qu’Olympias accoucha d’Alexandre, le Temple d’Ephèse fut réduit en cendres. Cet homme, à cela près qu’il n’accouche pas, est la femme, & elle


le mari. La Bruy. Il est quelquefois actif, & signifie, aider à une femme à se délivrer de son enfant. Adesse parturienti, obstetricare, obstetricari. Il se dit de la Sage-femme, ou de l’Accoucheur. Les Chirurgiens savent mieux accoucher les femmes que les Matrônes. Mais, ma Bonne, qui vous accouchera, si vous accouchez à Grignan ? Me de Sev. On le dit aussi avec le pronom personnel. Cette femme s’accoucha elle-même.

Accoucher, se dit figurément des productions de l’esprit. Edere. C’est un bel esprit, qui conçoit, qui invente facilement ; mais qui accouche, ou enfante avec peine, c’est-à-dire, qu’il s’explique avec difficulté.

Le sort de ce sonnet a droit de vous toucher,
Car c’est dans votre cour que j’en viens d’accoucher.

Mol.


ACCOUCHÉE. s. f. Femme qui se tient quelque temps au lit, pour se remettre des douleurs de l’enfantement. Puerpera. On fait des visites en cérémonie aux femmes accouchées. Vous êtes parée comme une accouchée. En l’Amérique il y a des Peuples où les maris font les accouchés à la place de leurs femmes. Herrera. Lorsque les femmes accouchoient dans le Bearn, les maris se mettoient au lit, & les envoyoient à la charrue. Scalig. in verbo Bearn. fol. 49. & Scaligerian. de Roch.

Il y en a aussi dans les Antilles, & même dans les Indes orientales, & à la Chine vers l’île de Formosa, qui font la même chose, comme on le voit dans le Recueil de Thévenot.

Au Pérou les femmes accouchées ne gardent point le lit ; mais après s’être lavées, elles se remettent à faire leur ménage ; & si quelque femme les assistoit en leur accouchement, elle passeroit plutôt pour sorcière que pour Sage-femme. Voyez l’Histoire des Incas. Varron, l. 11. de Re Rust. raconte que les femmes d’Illyrie portoient leurs enfans par-tout, après être accouchées, & ne demeuroient pas un moment au lit pour cela. de Roch.

On appelle proverbialement, les caquets de l’accouchée, les discours frivoles & de peu d’importance des femmes qui visitent celles qui sont en couche. On dit aussi, tant d’un homme que d’une femme, qu’ils font l’accouchée, quand ils se tiennent au lit par molesse, & sans nécessité.

ACCOUCHEUR. s. m. Chirurgien dont le talent principal est d’accoucher les femmes. Adjutor partûs. Maintenant les Chirurgiens accoucheurs sont fort en vogue. Autrefois on ne se servoit que de Sage-femmes ou de Matrônes pour accoucheuses.

Accoucheurs. {{sc|Vers accoucheurs. Ce sont de petits vers rougeâtres dont les huîtres sont remplies dans une saison où elles sont laiteuses & mal-saines, & où elles font des œufs. Ces vers facilitent, selon quelques-uns, la naissance des petites huîtres ; & les œufs, au microscope, ne sont autre chose que de petites huîtres dans leur coquille.

ACCOUCHEUSE. s. f. Femme qui aide à accoucher. Obstetrix. Habile accoucheuse. On dit plutôt Sage-femme. Acad. Fr.

Ces mots viennent du Latin accubare.

ACCOUDER. v. n. S’appuyer sur le coude, Inniti cubito. Tristement accoudé contre une cheminée. S. Am. Il se dit plus souvent avec le pronom personnel. On met au rang des incivilités de s’accouder sur la table ; de s’accouder devant ses supérieurs. On ne s’en sert guère que dans le discours familier. On conjugue, je m’accoude ; je m’accoudai ; je m’accouderai. Accoudé, ée. part.

ACCOUDOIR. s. m. Chose destinée pour s’accouder ; ce que l’on met sous les coudes pour s’appuyer en avant. Cubiti fulmensum. En termes d’Architecture, c’est la même chose qu’appui. C’est le petit mur qui est élevé entre les deux pieds-droits d’une croisée. On appelle accoudoir, l’endroit inférieur de l’ouverture d’une fenêtre, sur lequel on s’appuie, on s’accoude. L’accoudoir d’une fenêtre doit aller seulement à la hauteur de la ceinture. Vitruve appelle un accoudoir, Pluteus, qui signifie un appui ou parapet. Il se sert aussi du mot Podium, qui est un balcon, ou saillie. On dit populairement & ironiquement à une personne qui en incommode une autre en s’appuyant sur elle, allez chercher plus loin des accoudoirs.

Ces mots viennent du François coude, qui s’est formé du Latin cubitus.

☞ ACCOUER. v. a. C’est quand le Véneur court un cerf qui est sur ses fins, & le joint pour lui donner le coup d’épée au défaut de l’épaule, ou lui couper le jarret ; & pour lors on dit, le Véneur vient d’accouer le cerf ; le cerf est accoué. Dict. Œconomique.

ACCOUPLAGE. s. m. Voyez ACCOUPLEMENT ; c’est le même, & il est le meilleur. Accouplage ne se dit que par le peuple.

ACCOUPLE. s. f. Liens dont on attache les chiens ensemble. Copula.

ACCOUPLEMENT, s. m. Assemblage, jonction du mâle & de la femelle pour la génération. Copulatio. Le Peuple croit que l’antechrist naîtra d’un accouplement sacrilége & incestueux. On croit que la cause des monstres d’Afrique vient de l’accouplement qui s’y fait des animaux de différentes espèces. On ne le dit en parlant des hommes, qu’en l’adoucissant par une épithète qui sert de correctif : c’est un heureux accouplement. Il est plus propre en poësie.

Tu menois le blond Hymenée,
Qui devoit solennellement,
De ce fatal accouplement
Célébrer l’heureuse journée. Malh.

Accouplement, se dit aussi des bœufs qu’on attache ensemble sous le même joug. Jugum.

ACCOUPLER. v. act. Associer, attacher, joindre ensemble deux choses de pareille nature. Copulare. On conj. Je m’accouplai, je me suis accouplé. Ces personnes sont mal accouplées ; leurs humeurs ne compatissent point. Il étoit défendu par la Loi de Moyse d’accoupler un bœuf & un âne pour labourer. On s’en sert dans un mauvais sens, & d’un ton railleur. C’est un Mercure de profession, qui sçait accoupler les amans avec leurs belles qui ne sont pas inhumaines. Comb.

ACCOUPLER. v. act. Associer, joindre deux choses ensemble. Copulare. Ces personnes sont mal accouplées ; leurs humeurs ne sympathisent point ensemble. On s’en sert dans un mauvais sens, & d’un ton railleur : c’est un Mercure de profession, qui fait accoupler les amans avec leurs belles qui ne sont pas inhumaines. Comb.

On le dit aussi du menu linge qu’on attache ensemble avec du fil pour en faire des paquets, de peur qu’il ne s’égare, quand on le donne à blanchir.

Accoupler, se dit encore des oiseaux, des animaux qui se joignent, qui s’apparient pour perpétuer l’espèce. Les pigeons s’accouplent au mois de Mars & de Septembre. Ce pigeon cherche avec qui s’accoupler. Le temps d’accoupler les serins arrive ordinairement à la fin de Mars. Vous prendrez pour cet effet une cage neuve ou fort propre, afin qu’il n’y ait point de mittes. Hervieux. Il y a des serins si mauvais qu’ils tuent les femelles qu’on leur donne pour couver. Il faut leur donner des femelles bien fortes, & qui soient, si faire se peut, d’un an plus vieilles que ce mauvais mâle, & accoutumées à demeurer ensemble. J’ai enseigné cette manière d’accoupler les mauvais serins à quelques-uns qui m’ont avoué qu’ils avoient réussi. Id.

Accoupler. M. le Baron de Polnitz a dit : Tout le long des bâtimens magnifiques qui forment des arcades, sur lesquelles il y a une galerie découverte qui accouple trois gros pavillons.

Accouplé, ée, part. pass. & adj. Copulatus. On dit, en termes d’Architecture : Colonnes accouplées. Ce sont plusieurs colomnes jointes ensemble, & qui font grouppe.

ACCOURCIE. s. f. Terme de Marine. Passage que l’on ménage dans le fond de cale & des deux côtés, pour aller de la poupe à la proue le long du vaisseau. Fori.

ACCOURCIR, v. act. Rogner, retrancher, rendre plus court. Curtare, resecare.. On conj. J’accourcis. Il faut accourcir ce manteau, en rogner un doigt. Il faut accourcir ce livre, en retrancher la moitié. Il faut accourcir les étriers d’un point, resserrer l’estrivière. On dit aussi accourcir, en parlant d’un discours ; c’est-à-dire, l’abréger. Contrahere, coarctare.

On dit aussi, Accourcir le chemin, quand on prend quelque faux-fuyant qui abrége le chemin, qui le rend plus court. Uti vià compendiariâ. On dit aussi, que les jours accourcissent, quand le soleil a passé le solstice d’été, quand les jours deviennent plus courts. Decrescunt dies. ☞ Ce verbe en cette phrase est ordinairement n. p. & signifie, Devenir plus court. Les jours commençoient alors à s’accourcir. Acad. Fr.

Accourcir le trait. Terme de Chasse. C’est le ployer à demi, ou tout-à-fait pour tenir le limier. Saln.


Accourci, ie. part. & adj. Contractus, decurtatus, comme son verbe.

ACCOURCISSEMENT. s. m. Ce qui accourcit, ce qui abrége. Contractio. Le passage qu’on a ouvert par ce parc, sert beaucoup à l’accourcissement du chemin. Viæ compendium.

ACCOURIR, verb. neut. Venir promptement, & en hâte en quelque lieu ; soit qu’on nous y appelle ; soit que notre passion nous y porte. Accurrere, advolare. On conj. J’accours, j’accourois, j’accourus. Je suis accouru, j’accourrai, &c. L’armée est accourue en diligence au secours de cette Place. Toute la Noblesse accourut au bruit du canon, pour se trouver à la Bataille. Ses amis sont accourus en foule, pour le féliciter de sa nouvelle dignité ; pour honorer son entrée. Il se dit figurément des personnes qui se portent à quelque action avec beaucoup d’ardeur. Accourir à la vengeance. Ablanc.

Accouru, ue, part. & adj.

ACCOURS. s. m. Vieux mot que Nicod explique par subvention, affluence d’advenants. Accursus. Il s’emploie encore en termes de Chasse. Ainsi l’on dit : La chasse de sanglier se fait à force, aux accours, aux chiens courans, levriers, & avec limiers & abboyeurs.

ACCOUSINER. v. act. Consanguineum appellare. Appeler cousin, traiter de cousin. Accousiner quelqu’un. Il se dit avec le pronom personnel. Ces deux Messieurs sont parens ; car ils s’accousinent. Ce mot est populaire, & a vieilli.

ACCOUSTIQUE, s. f. Signifie l’Art qui traite de l’ouïe & des sens. Ars quæ de sonis agit. Ainsi l’on dit dans les Mémoires de l’Accadémie des Sciences de l’an 1711. L’Accoustique n’offre qu’un article sur les systèmes tempérés de Musique. Journ. des Sçav. Ce mot est Grec Ἀκουστικὴ & vient d’Ἀκόω, j’entends.

ACCOUTREMENT. s. m. Habillement, parure. Ornatus. Il ne se dit que parmi le peuple, ou dans le burlesque. Quand cet artisan a marié sa fille, elle lui a coûté cent écus pour tous ses accoutremens.

Accoutrement. Il se peut dire figurément des ornemens de l’éloquence. Un Orateur me choqueroit infiniment moins sous l’accoutrement le plus grossier, que sous le fard & l’ajustement d’une courtisane. Morabin. p. 101.

ACCOÛTRER. v. a. Vieux mot, qui signifioit autrefois, Habiller, orner, parer. Ornare. Il y avoit des singes qu’on avoit accoutrés en charlatans. Ablanc. Charles VIII. accorde à la Duchesse Anne par un traité de 1491, qu’il lui sera donné 60000 livres à ce qu’elle puisse tant mieux accoustrer aucuns ses affaires. Il n’est plus en usage qu’en cette phrase figurée. Cet homme en une telle occasion, a été mal accoutré ; pour dire en raillant, qu’il a été maltraité, ou bien blessé. On diroit plus proprement, Accoûtrer, & préparer des peaux. Ces mots viennent du Gaulois, ou de l’Allemand. On appelle en quelques Cathédrales, comme à Bayeux, Coutre, le Sacristain ou Officier qui a soin de parer l’Eglise ou l’Autel, & en Allemand Kuster Sacristain, Νεώκορος. Du Traité de Charles VIII, dont nous venons de parler, le P. Lobineau juge qu’accoustrer pourroit bien venir de l’ancien mot Breton cost, dépens, d’où a encore été formé celui de custus, cousts ; mais il se trompe, il vient de Kuster, comme nous l’avons dit. Voyez Coustre.

ACCOUTUMANCE. s. f. Habitude que l’on contracte en réitérant plusieurs fois la même action, en la faisant tourner en coutume. Consuetudo, assuetudo. On est souvent emporté par la force des mauvaises accoutumances qu’on a contractées dans la jeunesse. L’accoutumance de prendre du tabac est difficile à surmonter. Ce mot qui commençoit à vieillir du temps de Vaugelas, s’est rétabli peu à peu, & plusieurs bons Ecrivains s’en servent. Bouh. Habitude est plus doux, & je dirois plutôt, il a fait cela par une mauvaise habitude, que par une mauvaise accoutumance. Corn. On lui a substitué coutume, quoique ce soit un mot équivoque, & qu’accoutumance exprime bien mieux & uniquement ce qu’il signifie. Mais il n’y a point de raison contre l’usage. Cependant comme les meilleurs Ecrivains se servent du mot accoutumance, il ne faut point absolument le condamner. Un esprit abattu & comme dompté par l’accoutumance au joug, n’oseroit plus s’enhardir à rien. Boil. La jeunesse change ses goûts par l’ardeur du sang, & la vieillesse conserve les siens par l’accoutumance. La Rochef.

ACCOÛTUMER. verb. act. & neut. Pratiquer souvent une même chose ; contracter une habitude par la fréquente réitération du même acte. Assuefacere. On s’accoûtume à tout, au travail, à la peine, aux douleurs. Il ne faut pas accoûtumer les Peuples à prendre les armes, & à murmurer. On accoûtume les bœufs au joug. Les enfans qu’on accoûtume à être applaudis, conservent l’habitude de juger avec précipitation. Fenel. Le Peuple est accoûtumé à la servitude. C’étoit la coûtume des Sénateurs de mener leurs enfans au Sénat, pour les former de bonne heure aux affaires, & les accoûtumer au secret. Bouh. Il faut accoûtumer les enfans à faire le bien, plutôt par leur propre inclination, que par la crainte. Port-R. Nous sommes si accoûtumés à nous déguiser aux autres, qu’enfin nous nous déguisons à nous-mêmes. La Rochef. L’étude de la critique accoûtume l’esprit à chicaner. St. Evr. Il ne faut pas s’accoûtumer à la fainéantise. Il ne faut pas accoûtumer son ventre aux purgations, de peur que la nature ne se rende paresseuse.

Au plaisir de vous voir mon ame accoûtumée
Ne vit plus que pour vous.

Quand le verbe accoûtumer est joint au verbe auxiliaire avoir, il demande que la particule de précède l’infinitif qui le suit : J’ai accoûtumé de faire, &c. Quand il est avec être il demande la particule à : Je suis accoûtumé à souffrir. Mais accoûtumer seul gouverne toujours à : Je m’accoûtume à prendre les choses sans m’affliger : Accoûtumez-vous à hair le vice. Corn. Il faut modérer la légèreté de sa langue, pour l’accoûtumer à ne se point précipiter dans les choses obscures & douteuses. Port-R. On dit que Démosthène déclamoit au bord de la mer pour s’accoûtumer au bruit du Peuple. Mes malheurs m’ont accoûtumé à envisager la mort sans crainte. P. de Ce. Il faut s’accoûtumer aux outrages de la fortune.

Accoûtumer, se dit aussi des choses inanimées. Solere. Il n’a pas accoûtumé de faire si chaud en ce mois-ci. Il y a des terres qui ont accoûtumé de rapporter deux fois l’an.

Accoûtumer, se dit aussi des choses qui sont tellement tournées en nature, qu’encore qu’elles soient incommodes aux autres, elles nous deviennent en quelque façon nécessaires. Les Lapons sont tellement accoûtumés au froid, que quand ils sont arrivés à Hambourg, ils s’en retournent, à cause qu’ils trouvent qu’il y fait trop chaud. Les Indiens s’en retournent quand ils sont arrivés au 30. degré, parce qu’ils y ont trop froid. Relations des Lapons & des Indes.

On dit proverbialement, qu’un homme est accoûtumé à une certaine chose, comme un chien d’aller nud tête ; comme un chien d’aller à pied.

Accoûtumé, ée, part. & adj. Assuefactus, Assuetus.

Accoûtumé, ée, signifie quelquefois, Ordinaire, ce qu’on a coûtume de faire. Solitus. On a tenu l’audience aux jours & aux heures accoûtumées. On lui a fait son procès en la forme & manière accoûtumées.

A l’accoûtumée, adv. De la manière qu’on avoit accoûtumé. Ut solet, de more. On a raccommodé ensemble ces amis qui étoient brouillés : ils vivent maintenant à l’accoûtumée. Ce mot n’est en usage que dans la conversation commune.

☞ ACCOUVER, v. n. Les poules & les canes s’accouvent, quand elles commencent à couver leurs œufs.

Accouvé, ée. part. & adj. Qui se tient au coin de son feu en fainéant, en paresseux, sans vouloir en sortir pour travailler. Alsiosus, iners. Cet artisan passe tout l’hyver accouvé au coin de son feu. Il est bas & vieux. Ce mot vient de incubitare. Nicod.

ACCRAVANTER. v. act. Ecraser, accabler sous un poids excessif. Onere obruere, mole opprimere. Si vous lui faites porter ce fardeau, c’est le moyen de l’accravanter. Cet homme a été accravanté sous les ruines de sa maison. Ce mot est vieux, & vient du latin aggravare. ☞ Autrefois on disoit même en François Aggravanter, & c’est de-là que s’est formé accravanter, en changeant g en c.

Afin que ce fardeau, qui tout autre accravante,
Les rende plus légers, comme elle est plus sçavante.

{{Alinéa|P. Pierre de S. Louis.


Accravanté, ée. part. C’est ce que nous disons Aggravé. Courbé & accablé de fatigue. Cl. Marot. Ce Poëte dit dans son Cantique à la Déesse Santé :

Soit à ton loz mon Cantique chanté,
Car par toy est laise doux enfanté,
Par toy la vie en corps accravanté
Est restaurée.

ACCRÉDITER. v. a. Donner du crédit & de l’autorité ; mettre en réputation & en estime dans le public. Commendare, auctoritatem dare. Il n’y a rien qui accrédite davantage une personne que la bonne foi. Un chef de parti est obligé à caresser un scélérat, qui s’est accrédité parmi le peuple. M. Esp. Est-ce un prodige qu’un sot riche & accrédité ? La Bruy. Il se joint souvent avec le pronom relatif. Ce Président s’est accrédité dans sa Compagnie par sa capacité & par son intégrité. Ce ministre s’est fort accrédité à la Cour par son zèle & par sa prudence. Les marchands s’accréditent en vendant fidélement.

Il se dit aussi figur. Accréditer la calomnie. Accréditer le mérite. Ce mot vient d’accreditus, qui a été fait d’accredere, dont on s’est servi dans la basse Latinité, pour signifier, Prêter. Du Cange.

Accrédité, ée. part. pass. & adj. Auctoricate pollens.

ACCRÉTION. s. f. Terme de Médecine dans M. Harris. Ce mot est Latin, accretio, Augmentation, accroissement. Et dans le sens que l’explique M. Harris, nous disons en François excresience. Voyez ce mot.

Accrétion, dans le même sens d’accroissement, est aussi un terme de coûtume:on le trouve dans le titre de l’art. 282. de la coutume de Normandie, & dans le Commentaire aussi.

ACCROC. s. m. Déchirure d’un habit, rupture qui se fait quand on est arrêté par quelque chose de crochu, & de pointu. Scissura. Il est difficile de passer à travers des ronces & des haies, sans qu’on se fasse quelqu’accroc. Il se dit aussi de ce qui accroche, de ce qui déchire. J’ai rencontré un accroc qui a déchiré mon habit.

Accroc, se dit figurément en choses morales de ce qui arrête, de ce qui retarde une affaire. Mora, impedimentum. La mort d’une des parties est un accroc qui empêche l’instruction de ce procès. L’accusation qu’on a faite contre cet homme, est un fâcheux accroc qui peut ruiner sa fortune. Il est bas dans ce sens.

ACCROCHE. s. f. Embarras, retardement qui arrive en quelque affaire, à cause de quelque difficulté qui survient. Impedimentum, mora. Les oppositions à ce décret sont des accroches qui retarderont long-temps notre payement.

ACCROCHEMENT. s. m. Action d’accrocher. Unci immissio. Il n’est guère en usage au propre. Quelques-uns s’en servent au figuré. Il y a des gens qui se font descendre des plus nobles familles sur des ressemblances de noms, ou par d’autres accrochemens visionnaires. Cail.

ACCROCHER. v. a. Attacher quelque chose à un crochet, à une cheville, à un clou, à une agraffe. Unco suspendere. Il faut accrocher ce sac à sa cheville. Accrocher sa montre à sa ceinture. Accrocher un tableau. Ce mot vient du Grec ἀκροχεῖρ qui signifie le bout de la main, parce qu’il sert à accrocher.

Accrocher, signifie aussi attacher à quelque chose de ferme. Unco astringere. Accrochez ce bateau avec sa chaîne à l’anneau de ce pont. Avec le pronom personnel il signifie se prendre à quelque chose. Nos braves s’accrochant se prennent aux cheveux. Boil. On dit qu’un homme qui se noie, s’accroche à tout.

Accrocher, en termes de Marine, signifie, arrêter un navire, le joindre, ou s’y attacher en jetant le grapin pour venir à l’abordage. Harpagonem in navim injicere, harpagare. Ces deux navires étoient accrochés, il y eut entr’eux un rude combat.

Accrocher, se dit figurément en choses morales, & dans le style commun. Il a trouvé moyen d’accrocher son affaire au Conseil, en l’y faisant retenir pour la juger. Ce procès étoit prêt à juger ; la partie l’a accroché par une chicane; c’est-à-dire, qu’elle y a apporté du retardement par quelque incident. Liti moram injicere. Ce prisonnier alloit sortir, mais il a été accroché par une nouvelle recommandation. Il signifie encore attraper, emporter par finesse.

Dans l’ame elle est du monde, & ses soins tentent tout,
Pour accrocher quelqu’un, sans en venir à bout.

Mol
.

☞ s’Accrocher, à un Prince, à un grand Seigneur, se dit de ceux que le mauvais état de leurs affaires oblige de s’attacher à la fortune d’un Prince, d’un grand Seigneur. Acad. Fr.

Accrocher, se dit proverbialement en cette phrase:Belle fille & méchante robe, trouvent toujours qui les accroche.

Accroché, ée. part. & adj. Inuncatus.

ACCROIRE. v. n. Il n’est en usage qu’à l’infinitif, & se met toujours avec le verbe faire. Faire croire à quelqu’un, ce qui n’est pas. Imponere, verba dare, ludificari. Le peuple est si sot, qu’on lui fait accroire tout ce qu’on veut. Vous faites accroire à une infinité de gens que ces points ne sont pas essentiels à la foi. Pasc. D’autres prétendent que faire accroire n’emporte pas que la chose qu’on veut persuader soit fausse ; mais seulement que celui qui l’a dit, a dessein de tromper. Vaug. Ce mot vient de Accredere, qui a été dit en basse Latinité, pour signifier Prêter.

Accroire, signifie aussi, Tromper. La plupart des valets en font bien accroire aux maîtres qui se confient en eux.

Il signifie encore, Concevoir de la vanité, s’enorgueillir ; prendre de la fierté d’un mérite qu’on n’a pas, présumer trop de soi-même. Multum sibi arrogare. Les favoris des Princes sont sujets à s’en faire accroire. Cette femme est belle, mais elle s’en fait trop accroire ; elle est trop vaine de sa beauté. Je ne hais rien tant que certains esprits qui s’en font extrêmement accroire.

ACCROISSEMENT, s. m. Augmentation d’un corps. Incrementum, accretio L’Accroissement se fait par l’addition de quelques parties qui sont propres à la nature de ce corps ; & c’est en cela que l’accroissement diffère de la raréfaction, dans laquelle les parties qui augmentent le corps, ne sont pas de la nature du corps qui se raréfie. On juge de la fertilité de l’Égypte par l’accroissement du Nil, selon les degrés de hauteur qu’il marque dans la colonne qui est élevée pour cela dans le Calis. Les chênes reçoivent de l’accroissement jusqu’à cent ans.

Accroissement. Terme d’Agriculture, s’entend de la manière plus ou moins belle avec laquelle croissent les végétaux. Ces arbres en peu de temps ont pris un bel accroissement. Le tuf est cause que nos arbres n’ont pris qu’un petit accroissement. Liger. L’accroissement des plantes se fait par la jonction de plusieurs nouveaux atomes, ou particules. Comme il y a des moyens d’avancer l’accroissement des plantes, ainsi qu’on le peut voir au mot Avancer, il y en a aussi de le retarder. On le fait premièrement en coupant les sommités des branches, lorsqu’elles commencent à pousser. 2°. Par une transplantation trop fréquente. 3°. En leur donnant de l’ombrage. Chom.

Accroissement, signifie aussi, Agrandissement. L’accroissement de son parc, de sa maison, lui a beaucoup coûté. L’accroissement de sa famille lui sera une occasion de nouvelle dépense. De la Mare, dans son Traité de la Police, L. i. Tit. vi. C. 3. & suiv. a marqué tous les accroissemens & embellissemens de Paris depuis les Romains jusqu’à nos temps.

Accroissement, se dit aussi figurément en choses morales, & signifie l’augmentation, la prospérité. Les passions ont leurs accroissemens, & leurs relâchemens. Sa fortune fait tous les jours de nouveaux accroissemens. Accroissement d’honneurs & de dignités. Honoris amplificatio. Les envieux s’affligent de l’accroissement des richesses, ou de la gloire d’autrui. M. Esp.

Accroissement, terme de Jurisprudence. C’est un droit par lequel une portion vacante est jointe & réunie à la portion qui est occupée & possédée par un autre. Cela arrive entre collègues, ou entre membres d’une compagnie, entre légataires, ou par la mort ou l’absence d’un associé, ou d’un confrere. Une chose léguée conjointement, tam re, quàm verbis, à deux légataires, appartient pour le total à celui qui survit le testateur, par droit d’accroissement. L’alluvion est une autre espèce d’accroissement. Il y a des titres exprès dans le digeste qui traitent du droit d’accroissement. Ce mot vient d’accrementum, qui signifie la même chose, d’accrescere, accresco, accroître.


Le droit d’accroissement n’a pas lieu dans les contrats entre vifs, tels que sont les donations, à cause que les donataires étant saisis de ce qui leur a été donné; c’est-à-dire, de leurs portions personnelles & viriles dans les choses données, ils n’ont par conséquent aucun droit aux portions des autres.

Accroissement, se dit aussi de l’augmentation qui se fait lorsqu’une rivière porte un morceau de terre & le joint à un autre.

ACCROÎTRE, v. act. & n. avec le pronom pers. Augmenter la grandeur de quelque chose, la rendre plus étendue. Augere, amplificare. Il a acheté deux maisons voisines pour accroître la sienne. Il est borné de chemins de tous côtés, il ne peut s’accroître. Cette Ville s’est fort accrue par son commerce. Ce Prince a acru son Royaume, il a reculé les bornes de son État. Il est aussi neutre, & signifie, devenir plus grand. Crescere, augescere. Son revenu accroît tous les jours. Ce mot vient d’adcrescere, adcresco, ou accrescere, accresco, accroître.

Accroître, se dit figurément en choses morales. Son amour, sa colère, s’accroissent au lieu de diminuer. Sa fortune s’accroît. Sa gloire, son crédit, son pouvoir s’accroissent tous les jours. Dans le monde les vertus sont affoiblies par les mauvais exemples, & les vices accrus par le libertinage, & l’impénitence. Flech. Les richesses ne font qu’en accroître la soif. Vaug. La Paix accroît le pouvoir de la Justice. Malh. Tes Discours superflus accroissent mes ennuis. Mol.

Accroître, en termes de Droit, se dit de ce qui tourne au profit de quelque associé, ou confrère, par la mort ou par l’absence d’un autre. La part de celui qui renonce à une succession accroit à ses cohéritiers. En toutes les Compagnies où il y a bourse commune d’épices, de droits, &c. la part des absens accroit aux présens. Si un Testateur associe dans un même usufruit plusieurs personnes, celles qui meurent, celles qui abandonnent, celles qui n’acceptent pas, le laissent entier aux autres. C’est tantôt un droit d’accroître, tantôt un droit de retenir, & de non décroître. Peliss.

Accru, ue, part. & adj. Auctus.

L’Effort d’une vertu commune,
Suffit pour faire un Conquerant ;
Celui qui dompte la Fortune,
Merite seul le nom de grand :
Il perd sa volage assistance,
Sans rien perdre de la constance,
Dont il vit ses honneurs accrus,
Et sa grande ame ne s’altere,
Ni des triomphes de Tibère,
Ni des disgraces de Varus.

ACCROUPIR, S’ACCROUPIR, v. n. p. Il se dit, pour exprimer la Posture de celui qui abaisse son corps presque contre terre en pliant les genoux, en sorte que le derrière touche presque les talons. Sidere, in clunes residere. La plupart des Orientaux s’accroupissent au lieu de s’asseoir. Il y avoit une vieille qui étoit cachée & accroupie derrière un buisson, qui entendit tout leur entretien.

Accroupi, ie. Terme de Blason, qui se dit d’un lion quand il est assis & de même d’autres animaux sauvages, quand ils sont assis. In clunes residens. On le dit des lièvres, & des lapins qui sont ramassés : ce qui est leur posture ordinaire quand ils ne courent pas. D’azur au lion accroupi d’argent, &c.

ACCROUPISSEMENT, s. m. État de ce qui est accroupi. accroupi. Incubitus. L’accroupissement d’un lièvre en forme. Ce mot est peu en usage, & est composé de croupe.

ACCRUE, s. f. Terme de coutume. Additamentum, adcretio, augmentum. Accrue de bois, est une espace de terre dans lequel un bois s’est étendu hors de ses limites. Voyez les coutumes de Troyes, de Sens, d’Auxerre, de Chaumont. Rag. Ce mot a la même origine qu’accroître, & accroissement.

ACCUBE. Vieux mot qui vient d’accumbo, & qui veut dire, Repaire, lit. Lectus, stratum. Borel. Ils tendirent pavillons & accubes. Rom. d’Artus de Bre.

ACCUBITEUR. s. m. Accubitor. C’est le nom d’un Officier des Empereurs de Constantinople. L’Accubiteur étoit celui qui couchoit près de l’Empereur. Chast. Ce mot vient du Latin Accubitor, qui couche proche d’un autre. Il vient du verbe accumbo, je couche proche.

ACCUEIL. s. m. Traitement, réception qu’on fait à une personne qui arrive, ou qui nous aborde. Acceptio, exceptio. Il se prend en bonne, ou en mauvaise part : l’épithète qu’on y joint la détermine. Je me suis laissé tromper par l’accueil hypocrite que m’a fait ce rusé Courtisan. M. Scud. Les grands gagnent l’amitié des Peuples en faisant un bon accueil aux personnes qui les approchent. Il m’a fait un accueil froid, & désobligeant : j’en attendois un accueil plus favorable.

Accueil, seul & sans épithète, se prend d’ordinaire en bonne part. Il signifie la manière civile & honnête dont on reçoit une personne, & le secours qu’on lui donne. Faire accueil à tout le monde. L’accueil qu’a fait ce Seigneur à cet infortuné Gentilhomme en le retirant dans sa maison, lui a sauvé la vie & l’honneur. Son accueil charme tous ceux qui l’abordent.

Bel-Accueil. s. m. Accueil honnête, poli, agréable. Marot a personnifié bel-accueil, & en fait le portier du temple de Cupido.

Si vins de pensée joyeuse
Vers Bel-accueil le bien appris,
Qui de sa main dextre m’a pris,
Et par un fort étroit sentier
Me fait entrer au beau pourpris
Dont il étoit premier portier.

ACCUEILLIR, v. act. Recevoir ceux qui ont à faire à nous, ou qui nous rendent quelque visite. Accipere, excipere leniter, amicè. Il l’accueillit avec des témoignages d’une grande tendresse. La première pratique de la civilité est de bien accueillir toutes sortes de personnes. On conj. J’accueille, tu accueilles, il accueille:j’accueillis ; j’ai accueilli ; j’accueillerai; j’accueillerois, &c.

Sa maudite grimace est par-tout bien venue ;
On l’accueille, on lui rit ; par-tout il s’insinue. Mol.

Ce mot vient du Latin adcolligere. Ménag. J’aimerois mieux l’éviter en disant, Il m’a fait un bon accueil, ou si vous voulez, il m’a reçu très-favorablement. Accueillir est douteux.

Accueillir, signifie aussi, Donner secours, protection, retraite. Praesidium ferre. C’est une grande ingratitude de méconnoître dans la prospérité ceux qui nous ont accueillis, & qui nous ont secourus dans notre misère.

Accueillir, signifie encore plus particulièrement, Recevoir dans un Bateau, dans un Navire. Ce batelier n’est pas loin du port, il faut lui crier qu’il vous vienne accueillir. On envoya une barque pour accueillir ceux qui se noyoient après le débris de ce Vaisseau.

Accueillir, se dit figurément en choses morales. Occupare, adoriri. Il ne faut pas se laisser accueillir par la nécessité ; c’est-à-dire se laisser presser, & accabler par la misère. Nous n’étions pas loin du port, lorsque nous fûmes accueillis par la tempête ; c’est-à-dire, battus & surpris par l’orage. Le P. Bouhours blâme accueillir dans cette signification, d’autres soutiennent qu’il est bon. Il vaut mieux chercher un autre tour. L’Académie. Françoise ne fait aucune difficulté sur ce mot, dans la dernière édition de son Dictionnaire.

Accueilli, ie, part. & adj. Acceptus, exceptus.

Cette beauté de vertu accuillie
Se passera comme une fleur cueillie. Marot

☞ C’est-à-dire, remplie, douée de vertu.

ACCUL, s. m. l’L se prononce. Lieu étroit & bouché d’où on ne peut sortir quand on est poursuivi par les ennemis. Angustiæ. On le dit particulièrement à la chasse des lieux où on réduit le gibier.

Acculs, sont aussi les lieux les plus enfoncés des terriers, où les renards ou bléreaux ont toute leur famille. Fundula. On appelle Carrefours, les principaux conduits ou creux qui mènent à leurs acculs. On appelle encore Acculs, en termes de chasse, les bouts des forêts & des


grands bois. Il se dit aussi des piquets qu’on enfonce en terre au bout d’une platte-forme pour retenir le canon, quand il recule après avoir tiré.

ACCULEMENT. s. m. Terme de Marine, qui se dit de la concavité & rondeur de quelques membres qui se placent à l’avant, & à l’arrière sur la quille du vaisseau. Varangues acculées, sont celles qui sont rondes en dedans. Ozanan dit qu’on appelle acculement, la proportion avec laquelle chaque gabary s’élève sur la quille plus que le premier gabary.

ACCULER, v. act. Pousser des ennemis dans un lieu étroit & fermé, d’où ils ne puissent échapper ; les réduire à ne pouvoir reculer, en sorte qu’ils soient obligés de combattre, ou de périr. In angustias redigere, complere. On a acculé les ennemis dans ce détroit de Montagnes, où on les fera périr de faim. On le dit aussi des sangliers, des renards, &c. Les chiens ont acculé le loup.

s’Acculer, signifie au contraire, se placer dans un coin, se retirer dans un lieu étroit où on ne puisse être attaqué par derrière, pour se mieux défendre contre plusieurs ennemis de front. Locis postico imperviis uti ad defensionem. Ce brave s’est acculé contre une muraille, pour n’être point enveloppé par les ennemis. Le taureau s’accule, quand il est pressé avec trop de vigueur par des dogues.

Acculer, en termes de manège, se dit lorsque le cheval qui manie sur les voltes, ne va pas assez en avant à chacun de ses mouvemens ; ce qui fait que les épaules n’embrassent pas assez de terrein, & que sa croupe s’approche trop près du centre de la volte. On dit encore vulgairement qu’un cheval s’accule, ou qu’il s’est acculé, lorsqu’il s’abandonne sur sa croupe, lorsqu’on l’arrête, ou qu’on le veut faire reculer.

Acculer, v. n. Terme de Marine. Je jugeai que je l’avois fort incommodé en lui donnant une bordée, puisqu’il mit toutes ses voiles à acculer. M. le Chev. de Caylus.

Acculé, ée, part. & adj. In angustias redactus.

En termes de Blason, on appelle un cheval acculé, quand il est cabré en arrière & sur le cul. In clunes residens. On le dit aussi de deux canons sur leurs affûts, dont les culasses sont opposées l’une à l’autre ; comme ceux que le Grand Maître de l’Artillerie met au bas de ses armoiries, pour marques de sa dignité. Ce mot se tire du Latin culum. On dit un cul-de-sac.

☞ ACCUM, AUXUM, ou CHAXUMO. s. m. Nom propre d’une ville de l’Abyssinie en Afrique. Auxima. Elle est dans le Royaume de Tigre, sur la rivière de Marabo. Elle a été capitale de l’Abyssinie ; ce n’est plus qu’un petit village, où l’on couronne cependant encore les Rois. Il ne lui reste de son ancienne splendeur, que les ruines de quelques édifices, celles d’une Eglise magnifique, & de quelques pyramides & obélisques qui servoient d’ornement aux tombeaux des Rois.

ACCUMULATION. s. f. Entassement, amas de plusieurs choses les unes sur les autres. Accumulatio, coacervatio. Accumulation de richesses. Il n’y a rien de plus ruineux que de laisser faire une accumulation d’arrérages.

On dit au Palais, une accumulation de droits, ou cumulation, quand quelqu’un prétend un héritage, un bénéfice, en vertu de plusieurs droits de différente nature, comme par mort, par résignation, &c.

ACCUMULER, v. act. Entasser, assembler, amasser plusieurs choses ensemble. Accumulare, coacervare, congerere. Les avares ne songent qu’à accumuler trésors sur trésors. On a puni ce scélérat, qui avoit accumulé crimes sur crimes. On dit aussi en Jurisprudence Canonique, accumulant droit sur droit, quand on obtient cession du droit d’une autre partie pourvue du même Bénéfice. On le dit quelquefois absolument. Les avares ne songent qu’à accumuler. Ce vieil avare accumule tous les jours ; on sous-entend du bien, des richesses.

Accumuler, est aussi récip. Et dans cette acception on dit, que des arrérages s’accumulent tous les jours ; pour dire, qu’ils augmentent tous les jours. Acad. Fr.

Accumulé, ée. part. Accumulatus, Congestus. Ce mot vient d’accumulatio, accumulare.

☞ ACCURBITAIRE. adj. m. qui se dit d’un ver du corps humain. Le ver qu’on appelle le Tænia, ou le solitaire, ou ver plat, quelques-uns le nomment Ver accurbitaire. M. Valisniéri prétend que les vers accurbitaires sont un amas de plusieurs petits vers joints ensemble, & qui se tiennent les uns aux autres pour éviter plus surement quelques dangers, tels que seroient certains sucs dangereux contenus dans les intestins. Rien n’est plus singulier que les preuves qu’il apporte de cette étrange supposition. Nous parlerons du Tænia, ou Solitaire en sa place.

ACCURSE. s. m. Accursius. Nom propre de trois savans Italiens. Les deux premiers, père & fils, célèbres Jurisconsultes du xie siècle, & le troisième, savant Critique du xvie siècle.

ACCUSABLE. adj. Qui peut être accusé. Danet. Le même Auteur n’a pas été si hardi dans son Dictionnaire Latin & François, où il s’est contenté de rendre accusabilis, par digne d’être blâmé ou repris ; repréhensible ou blâmable. On trouve accusabilis, Accusable dans le petit Dictionnaire de Boudot. Notre Langue a bien des mots qui ne valent pas celui-là. Tout ce qu’on peut faire, c’est de lui souhaiter une bonne fortune.

ACCUSATEUR, Accusatrice, subst. masc. & fém. Celui ou celle qui accuse, ou qui poursuit quelqu’un en justice criminellement. Accusator, accusatrix. Par le Droit civil il n’y avoit point d’accusateur public. Chaque particulier, soit qu’il eût interêt au crime public, ou non, pouvoit accuser, & conclure au châtiment de l’accusé. En France il n’y a que le Procureur Général, ou ses Substituts préposés dans chaque Siége, qui se puissent constituer accusateurs ; c’est à eux seuls à qui appartient la vengeance publique. La partie civile ne peut conclure qu’à la réparation, & aux intérêts, & non pas à la punition du criminel. En quelque lieu que se trouve un Parricide, il rencontre un Accusateur, un Juge, & un Bourreau. Le Mait. Cette femme est une dangereuse accusatrice. Son accusatrice parut fort animée contre lui. Au dernier jour nos péchés se présenteront comme autant de cruels accusateurs. Nicol. C’étoit autrefois une vilaine chose que de passer pour accusateur. Quintilien l’a dit avant moi, & a mis en proverbe, Accusatoriam vitam agere. Et parce qu’il y eut un Brutus qui fit à Rome ce sale métier, & qui fut appellé l’accusateur, Cicéron l’appelle pour cela le déshonneur de la famille des Juniens. Balz.

ACCUSATIF. s. m. Terme de Grammaire. C’est le quatrième cas des noms qui se déclinent. Accusandi casus, accusativus. Il marque & désigne le terme d’une action, ou d’un rapport, le sujet où passe l’action du verbe, ou de la préposition. Un verbe actif régit l’accusatif. Il y a des prépositions qui demandent après elles un accusatif. En François l’accusatif est semblable au nominatif.

ACCUSATION, s. f. Déclaration en Justice pour quelque crime. Accusatio. Intenter une accusation injuste, calomnieuse. Vous ferez bien de prévenir une accusation si redoutable ; ou de la repousser vigoureusement, si elle est déja formée. Ablanc. Susciter une accusation capitale. Il y a vingt chefs d’accusation contre ce criminel. L’accusation des crimes privés n’étoit recevable par le Droit Romain qu’en la bouche de ceux qui y avoient intérêt : pour les crimes publics l’accusation pouvoit être intentée par quiconque la vouloit entreprendre. Autrefois en France si l’accusation étoit grave, il en falloit venir à un combat ; si elle ne l’étoit pas, tout accusé étoit tenu de se purger du moins par serment. Il n’y étoit reçu qu’en faisant jurer avec lui des gens de sa profession, de son sexe, de sa parenté, ou du moins de son voisinage, gens sans reproche, domiciliés, & connus de l’accusateur. Le Juge en fixoit le nombre, il pouvoit les nommer d’office ; on les tiroit quelquefois au sort. C’étoit ordinairement l’accusé qui les présentoit ; & rarement en laissoit-on le choix à l’accusateur. La Gendre. Par le Droit Romain on procédoit par voie d’accusation dans les crimes publics, & par simple action dans les délits particuliers. En France il n’y a que le Procureur Général, ou ses Substituts, qui puissent former une accusation, excepté pour le crime de lèze—majesté, & pour le crime de fausse monnoie, où l’accusation est ouverte à toutes sortes de personnes. Dans les autres crimes les particuliers ne peuvent être que dénonciateurs, & n’ont droit que de demander réparation de l’offense pour les dommages & intérêts.

Il signifie aussi, Confession. Confessio. Il faut faire une sincère accusation de nos péchés au Prétre.


Accusation, se dit aussi des légères fautes dans les complimens ordinaires. L’accusation que vous me faites de n’avoir point songé à vous en votre absence, est mal fondée.

ACCUSER. v. a. Intenter une action criminelle contre quelqu’un, soit en son nom, soit sous le nom de la partie publique, qui est toujours le Procureur-Général, ou son Substitut. Accusare. Il n’appartient qu’au mari d’accuser sa femme d’adultère. On a accusé de concussion un tel Officier. Caton, l’homme le plus juste de son siècle, avoit été accusé 42. fois, & absous 42. fois. Dans l’esprit de la plûpart des gens, c’est assez d’être accusé pour être coupable. Voit. Un homme de bien accusé injustement, ôte à la prison même ce qu’elle a d’ignominieux. Bouh.

Accuser, signifie quelquefois simplement, Reprocher. Tous ses amis l’accusent de paresse à faire réponse aux lettres. On accuse les François de légèreté & d’imprudence. Ceux qui accusent la Providence, pour ce qu’elle rend l’adultère aussi fécond qu’un mariage légitime, se scandalisent mal à propos. La Pl. Malherbe, parlant d’un Scélérat heureux, ajoûte :

Mais le Ciel accusé de supporter ces crimes,
Se veut justifier.

On accuse souvent de beaux yeux, dont toute la force est dans la foiblesse du cœur qu’ils ont blessé. S. Evr. Je ne m’accuse que de trop de délicatesse pour mes amis, bien loin de les négliger. Id.

Ma juste impatience
Vous accusoit déjà de quelque négligence. Rac.

Accuser, signifie aussi, Impugner un acte, contester sa validité à cause de quelque défaut essentiel. Impugnare. Accuser un acte de faux. Accuser un testament de suggestion.

Accuser, signifie aussi, confesser sa faute, ou nommer ses complices. Confiteri. Le remords a quelquefois obligé les criminels à s’accuser eux-mêmes. Ce Criminel a tout confessé, & a accusé ses complices. Il a accusé bien des gens dans son testament de mort.

Il faut accuser ses péchés. Il faut qu’un pénitent s’accuse franchement de ses péchés, les déclare au prêtre dans le tribunal de la confession. Ce criminel a tout avoué, il a accusé tous ses complices. Il a accusé bien des gens dans son testament de mort.

Accuser, signifie aussi simplement, déclarer. Enunciare, exponere. Il a accusé 50. de point au piquet ; il a accusé la réception de ma lettre ; pour dire, Il a dit qu’il avoit 50. de point; qu’il avoit reçu ma lettre.

Accuser, avec le pronom personnel, se déclarer coupable. Insimulare se. Ce Criminel s’est accusé lui-même. Il faut qu’un Pénitent s’accuse franchement de ses péchés à la Confession. Les Persécuteurs semblent s’accuser de n’être pas bien convaincus eux-mêmes de la force & de l’évidence de leurs raisons, puisqu’ils emploient la violence. Cl.

Accusé, ée, part. pass. Accusatus. Socrate accusé répondit : Ce que j’ai fait ne mérite rien, sinon qu’on me nourrisse aux frais de l’Etat dans le Prytanée.

Accusé, se prend quelquefois substantivement. L’accusé a donné de bons reproches contre les témoins. On doit entendre l’accusé à peine de nullité du jugement. L’accusé ne peut point résigner quand le crime emporte la privation de son Bénéfice. Bouch. Par les dures Loix de l’Inquisition l’on contraint l’accusé à s’accuser lui-même du crime qu’on lui suppose. Inq. de Goa. L’accusé n’est point reçu à accuser son accusateur, ni à user de récrimination, avant qu’il se soit purgé. De Laun. ☞ L’Accusé fut interrogé sur les faits intentés contre lui. L’Accusé qu’ils ne nomment point est Arius. Fleury.

ACE.

ACÈ. Ace. Ville de Phénicie, dans Strabon & dans Etienne. Ce fut depuis Ptolémaïs. Voyez ce mot.

ACÉE. s. f. Ce mot se disoit autrefois pour bécasse : il vient d’acceia qui vient d’acus, à cause du long bec de la bécasse.

ACÉEMENT. s. m. Vieux mot. Grand équipage, ajustement. Parcevax esgarde la Demoiselle, & la voit tant belle, & si li plot tant étabeli (ébloüit, charma) par le grant acéement qu’il voit en li. Graal. Acéement se trouve dans les Poësies de Thibaut, Roi de Navare.

ACELLARO. Voyez ABYSO.

ACENSEMENT. Voyez ACCENSEMENT.

ACENSER. Voyez ACCENSER.

ACEPHALE. s. m. Acephalus. Proprement, qui n’a point de chef, de l’α privatif, & de ϰεφαλή tête, chef. On a donné ce nom, 1° à ceux qui, dans l’affaire du Concile d’Ephèse ne voulurent suivre ni S. Cyrille, ni S. Jean d’Antioche : 2° à des hérétiques du Ve siècle, qui suivirent d’abord Pierre Mongus, ou Moggus : puis l’abandonnèrent, parce qu’il souscrivit au Concile de Chalcédoine. Ils suivoient les erreurs d’Eutichès. Et sous l’empire de Justin, les Sectateurs de Sévère d’Antioche, & généralement tous ceux qui ne voulurent pas recevoir le Concile de Chalcédoine, furent appelles Acéphales. Quelques-uns prétendent que ce nom signifie hésitans ; & que parce qu’ils tenoient la neutralité pour les décrets du Concile de Chalcédoine, qu’ils ne se déterminoient à rien, qu’ils hésitoient quand on les pressoit, ils furent appelés Acéphales ; C’est-à-dire, hésitans. Mais l’autre opinion est plus vraie, & Acéphale n’a point ce sens. Voyez Bolland, T. I. Anastase le Bibliothécaire appelle l’exemption de la juridiction du Patriarche, Autocéphalie, Autocephalia. 5° On a appelé Acéphales, les clercs qui ne vivoient pas sous la discipline ecclésiastique d’un Evêque. Isidore, de Eccles. off. Lib. III. Les Conciles de Mayence, Can. 22 de Paris, Can. lO de Pavie en 850, Can. 18, &c. ont fait différens réglemens contre ces clercs Acéphales. On en trouve encore dans les Capitulaires de Charles le Chauve, I. VI, C. 57, dans Burchard, L.II, C. 226, dans Réginon à l’an de J. C. 865. Baronius à l’année 1090. Hucbert, frère de Thierberge concubine de Lothaire, fut appelé Acéphale, parce que, comme disent les Annales de Metz à l’an 864. de J. C. il étoit Clerc marié, & par là non soumis aux règles de la cléricature ; ou comme d’autres écrivent, parce que son Monastère étoit exempt de la juridiction de l’Evêque. Cependant les Moines exempts de la juridiction de l’Evêque, ne sont point Acéphales ; car Godefroy, Abbé de Vendôme, dit dans sa 27e Lettre du livre second ; Nous ne sommes point Acéphales, puisque nous avons pour chef Jésus-Christ, & après lui le souverain Pontife. 4° Dans les Loix de Henri I, Roi d’Angleterre, on appelle Acéphales les pauvres qui n’ayant rien, ne tiennent point de biens en fief, ni du Roi, ni des Evêques, ni des Barons, ou Seigneurs féodaux ; & ainsi sont en quelque forte sans chef. Voyez le Gloff. de Du Fresne. Voyez Nicéphore, L. XVIII. 54. Evagr. L. III. C. 31. Baron. aux années 432, 482, 492, 513, 536, 538, 546, 553. Hornius, Hist. Eccles. Nov. Test. Per. I, Art. 3, §. 48 & 49. Les Acéphales sont appelés Acéphalites dans Isidore, L. VIII, C. XV, & dans la Chronique d’Adon de Vienne. Voyez encore les Notes du P. Sirmond sur Facundus Hermianensis.

☞ ACÉPHALES. s. m. pl. Hommes sans tête. La fable dit qu’il y avoit au nord des Hyperboréens, (c’est-à dire, vers la Russie & la grande Tartarie d’aujourd’hui) un peuple d’Acéphales. Ce qui doit se prendre au figuré d’un peuple de barbares, qui vivoient alors sans chef, sans subordination, sans société.

ACÉPHALITE. s. m. Acephalita. Hérétique. Voyez Acéphale ; c’est la même chose. Le Chanoine Régulier de Léon, qui a écrit la vie de S. Isidore de Séville, dit Acephalita, & marque que cette Secte étoit fort étendue en Espagne & en France, au temps de ce Saint. Peut-être que dans ces pays-là on les nommoit alors Acéphalites, & non pas Acéphales.

ACERBE, adj. Ce qui est acre, verd, âpre. Acerbus. Les Médecins tiennent que ce goût est mitoyen entre l’aigre, l’acide, & l’amer. Ils appellent du vin acerbe, du vin fait de raisins qui ne sont pas encore mûrs. Tous les fruits avant leur maturité ont un goût acerbe. La saveur acerbe, est une des trois saveurs froides. Elle est formée d’une substance terrestre & aqueuse au 3e degré. Ce mot est latin, acerbus. Hors la Médecine l’on ne s’en sert point : on dit âpre.

ACÉRER. v. act. Terme de Taillandier. Garnir d’acier un outil de fer ; y joindre ou appliquer de l’acier, soit à la


pointe, comme aux burins ; soit au tranchant, comme aux couteaux & cimeterres ; soit sur la face entière des outils, comme aux enclûmes, &c. Durare ferri aciem chalybe. On a dit acérer pour aciérer.

Acéré, ée. part. & adj. Qui est d’acier, ou ce à quoi on a joint & appliqué de l’acier. Ferrum chalybe duratum. On le dit des instrumens de fer destinés à couper, à limer, à trancher, à forger. Un cimeterre acéré & bien tranchant. Les enclumes, les bigornes, & autres outils semblables sont aussi acérés, parce qu’on les couvre d’acier.

Il poursuit, & d’un trait qui fait bruit de son aîle,
Et qui porte une pointe acérée & mortelle. P. le M.

On le dit en termes de Médecine & de Pharmacie, pour signifier une saveur austère & astringente.

Acéré, s’emploie par quelques-uns au figuré, pour signifier, mordant, perçant, tranchant. C’est une plume bien acérée. La pauvreté est un glaive bien acéré. Mau. Il faut pourtant s’en servir avec discrétion.

ACERIDES. s. m. Terme de Pharmacie. C’est un emplâtre fait sans cire, tel qu’est celui qu’on nomme emplâtre de Nuremberg. Emplastrum Norimhergense. Hart.

☞ ACERNO. Ville épiscopale de la principauté citérieure, au royaume de Naples. Acernum. Elle est entre Salerne & Couza.

☞ ACERRA. Ville épiscopale du royaume de Naples dans la terre de Labour. Acerra. Elle est sur la rivière de Patria, entre Naples & Capoue.

☞ ACERTAINER. v. a. Vieux mot. Assurer, certifier. Asseverare, certiorem facere.

Quant au travail, bien je vous acertaine
Qu’incessamment y serai exposée. Marot.

ACÉSIEN. s. m. Acesius. Surnom que les Eléens donnoient à Apollon. Pausanias, L. VI. Tristan, T. I, p. 600.

☞ ACÉSINÉ, ÉE. adj. Vieux mot. Qui est en embonpoint. Belle, gente & acésinée.

ACESMEMENT. s. m. Vieux mot, qui veut dire, ajustement. Ornatus, Cultus.

ACESMER. v. a. Orner, ajuster. Ornare. Ce mot n’est plus en usage.

☞ ACESMÉ, ÉE. adj. Vieux mot. Embelli, orné.

De grant beauté est certes acesmée.
Celle pour cui mes cuers est si sopris.

Gasse-Brules
.

ACESMES, & ACHESMES. subst. plur. Vieux mot, qui veut dire, Habillemens, atours de femme. Mundus muliebris. Quand la Déesse a mis bas ses habits & achesmes, qu’elle eut deffeublé coiffe, guimple, atour, & autre accoutrement de tête, termaillets, chaînes, anneaux, bulletes, & tissus, jusqu’aux galoches dorées. Jean le Maire.

☞ ACESO. s. f. Fille d’Esculape, à qui la fable attribue une connoissance profonde de la Médecine. Le Clerc prétend que les Anciens, sous l’allégorie d’Acéso, ont voulu désigner un air épuré par les rayons du soleil, & rendu par-là salubre & propre à réparer les forces de ceux qui le respirent.

☞ ACESTE. s. m. Roi de Sicile, étoit fils du fleuve Crinisus & d’Egeste, fille d’Hippotas:c’est-à-dire, que ce Crinisus étoit le Roi ou le Seigneur d’un canton de Sicile où couloit ce fleuve, ou bien qu’il portoit le même nom.

ACETABULE. s. m. Terme d’Anatomie. Acetabulum. Il a différentes significations. Il se dit des cavités profondes de quelques os, dans lesquels sont reçues de grosses têtes d’autres os, pour faire les mouvemens. La cavité de l’os ischium, qui reçoit la tête de l’os de la cuisse, est appelée Acétabule, Cotyle ou Cotyloïde.

Il se dit d’une autre chose dont les Anatomistes ne conviennent point ; les uns appellent Acétabules les orifices des vaisseaux répandus dans la surface interne de la matrice; Harvée croit que ce sont de petites cellules du placenta, ou de ce qui tient lieu de placenta dans les femelles de plusieurs animaux. Le sentiment le plus probable est celui dans lequel on dit que les acetabules sont ces glandes qui s’élèvent dans la matrice des brebis & des chèvres, lorsqu’elles sont pleines, & qui sont ainsi appelées, parce qu’elles sont faites en forme de coupe ou de godet : ce qu’on ne remarque pas dans les femelles des autres animaux, non plus que dans la femme.

Acétabule, se dit encore des vases ou mamelons creux qui sont le long des pieds des polypes & des nautilles, par lesquels il sucent l’air & l’eau, & les rejettent ensuite.

Acétabule, signifie encore une certaine mesure dont les Apothicaires se servent pour les choses liquides. Voyez Cotyle, Cotylédon. C’est une mesure des anciens qui contenoit un cyathe & demi, comme Agricola le prouve dans son L. I. des mesures Rom. par ces deux vers de Fannius, qui, en parlant du cyathus, dit qu’il pese dix drachmes, & que l’oxybaphe, ou acétabule en contient 15.

Bis guinque hunc faciunt drachmæ, si appendere tentes,
Oxybaphus fiet si quinque addantur ad illas.

Pinet, dans un Traité des poids & des mesures qu’il a mis au commencement de sa traduction de Pline, dit que l’acétabule d’huile pese deux onces & deux scrupules ; l’acétabule de vin deux onces deux drachmes & demie, un grain & le tiers d’un grain ; l’acétabule de miel trois onces, trois drachmes, un scrupule & deux siliques.

Acétabule, étoit encore un petit vase, dans lequel on mettoit des choses propres à assaisonner, & que l’on servoit sur la table, comme on sert aujourd’hui une salière, un vinaigrier, &c.

Agricola, dans son Traité des mesures Rom. L. I. croit que c’est de-là que ce nom s’est formé ; que ce vase étant destiné principalement à servir du vinaigre, d’acetum, vinaigre, on a fait acetabulum, & qu’ensuite, à cause de la ressemblance, on l’a transporté à la mesure. C’est pour la même raison que les Grecs l’appeloient ὀξύβαφος.

ACETABULUM. s. m. Sorte de Plante, appelée autrement Umbilicus veneris. Il y en a de deux sortes : l’un dont les feuilles sont creuses, & tournées comme un acétabule, ou une coupe. L’autre jette une tige menue, & produit des fleurs semblables à celles de millepertuis. Cette plante a les feuilles larges & fort épaisses. Sa graine, qui est un peu grosse, a les mêmes propriétés que la joubarbe.

Acetabulum. s. m. Plante qui croît au fond de la mer, & qui a assez la figure d’un champignon, puisqu’elle est composée d’un pédicule mince & terminé par un chapiteau formé en bassin de balance. Cette plante est diurétique, & se trouve dans la mer Méditerranée, & dans les étangs salés, qui sont près de Montpellier. Quoique Cotylédon & Acetabulum, soient deux noms qui ont la même signification, ils ne se donnent pas néanmoins à la même espèce de plantes. Celle qu’on appelle Cotylédon, est même une plante terrestre.

☞ ACETÈS. s. m. Etoit un des compagnons de Bacchus, c’est-à-dire, un des partisans de son culte.

ACETEUSE. s. f. Oxalis. C’est un nom que l’on a donné quelquefois à l’oseille, à cause de son goût aigret, & qui est pris du nom Latin Acetum, qui signifie Vinaigre.

ACETUM. Mot Latin, qui signifie Vinaigre, & qui vient d’aceo, je suis aigre. Tout Latin qu’il est, on l’emploie quelquefois dans la Chimie.

Acetum Alcalisé, Alcalisatum. Terme de Chimie. C’est du vinaigre distillé, auquel on a mêlé quelque sel volatil, ou alkali. Harris.

Acetum Radicatum. Terme de Chimie. Ce sont les parties les plus fines & les plus aigues du vinaigre, quand le flegme en a été tiré. Harr.

Acetum Philosophorum, ou Vinaigre des Philosophes : terme de Chimie. Quelques Chimistes donnent ce nom à une liqueur aigre qui se fait en faisant dissoudre un peu de beurre, ou liqueur glaciale d’antimoine, dans beaucoup d’eau. Harr.

ACH.

☞ ACH, dans la terminaison des noms Géographiques Allemands, vient du mot Aquæ, & signifie que les lieux dont le nom a cette syllabe finale, sont au bord de l’eau, comme Ach, ou Achen, Aquisgranum. Rufach, Aquæ


rubeæ. Biberach, Crentzenach, Rotach, & quantité d’autres.

☞ ACHA, ou ACHZA. s. f. Nom propre d’une rivière d’Allemagne. Acha, Achzo. Du Tirol & de l’évêché de Salzbourg elle passe dans le lac de Chiemsée en Bavière, & se jette dans l’Inn, un peu au-dessus de l’embouchure de la rivière de Saltz.

Acha est encore une petite rivière du Duché de Bavière. Acha. Elle coule à l’orient du Lech, & se décharge dans le Danube, presque vis-à-vis de Neubourg.

☞ Il y a une troisième Acha à l’orient de la seconde, & qui se mêle au Danube au-dessus d’Ingolstad.

☞ ACHACHICA. Nom propre d’une petite ville de l’Amérique septentrionale. Achachica. Elle est dans la province de Mexique, vers les confins de Tlascola & de Panuco. Les mines d’Achachica sont des mines d’argent, qui rendent cette ville considérable.

☞ ACHAD. s. f. Nom propre d’une des villes que Nemrod bâtit. Achad. On n’en sçait point la situation, & c’est sans fondement que quelques Géographes la placent au confluent de l’Euphrate & du Tigre. Gen. X. 10.

ACHAÏE. s. f. Achaia, Hellas. C’est le nom d’une ancienne province de Grèce, entre l’Epire, la Thessalie, la mer Ægée, & le Péloponèse. On l’appelle aujourd’hui Livadie. On prétend que son nom lui vient d’ἀπὸ τοὺς ἄχους qui signifie douleur, parce qu’elle étoit sujète, dit-on, à de grandes inondations. Si cela est, ne seroit-il pas plus naturel de tirer son nom de אחו, achou, qui signifie un lieu humide, marécageux, plein de roseaux ? Cadmus & ses Phéniciens lui avoient donné ce nom. Mais d’autres prétendent que ce pays a été ainsi nommé d’Achéus, fils de Xurhus, fils d’Hellen, & petit-fils de Deucalion, qui chassé de Thessalie s’empara du Péloponèse, et eut de Creüse fille d’Erectée, Roi d’Athènes, Achéus & Ion, dont l’un fut chef des Achéens, & l’autre des Ioniens. On a encore appelé Achaïe proprement dite, une province du Péloponèse, qu’on nomme aujourd’hui Duché de Clarence. On donne aussi quelquefois ce nom à tout le Péloponèse. Les prêtres d’Achaïe, témoins du martyre de S. André, en ont écrit les Actes que nous avons encore ; mais que le Pape Gélase mit au nombre des livres apocryphes. Baronius & Bellarmin les soûtiennent avec beaucoup d’autres. D’autres les regardent comme supposés avec Messieurs Tillemont & Dupin.

ACHAÏENS, ou ACHÉENS, ACHÉES. Ainsi qu’écrit M. Corneille. Achæi. Peuples de l’Achaïe, & généralement les Grecs, qui sont souvent ainsi nommés dans les Poëtes. M. Tourreil écrit & dit Achaïens dans sa Table, & Achéens dans sa Préface sur sa traduction des Oraisons de Démosthène. Les habitans du Péloponèse, jusqu’aux Héraclides, se divisoient proprement en Achéens & en Ioniens. Les premiers possédoient les terres que les Héraclides assignerent aux Doriens, & aux autres peuples qui les avoient accompagnés. » Ceux des Achéens qui descendoient d’Æolus, & que l’on chassa de Lacédémone, se retirèrent d’abord en Thrace sous le commandement de Penthile, & après la mort allerent s’établir dans le canton de l’Asie mineure, qu’ils appelèrent Æolide. Quant aux Achéens de Mycènes, comme ils se voyoient contraints par les Héraclides d’abandonner leur pays, ils s’emparèrent de celui des Ioniens. Tourr. Polybe a écrit assez amplement de la République des Achéens, dans le prélude de son Histoire. Un Hollandois, nommé Martin Schockius, a fait un Traité Latin de la République des Achéens & des Veïens, dans lequel, parce que le gouvernement des 'Achéens a toujours été un des plus estimés de la Grèce, il affecte de lui comparer celui des Provinces-Unies.

☞ ACHAÏQUE. adj. m. & f. Achaicus, a. Qui appartient, qui a rapport à l’Achaïe. L. Mummius, qui détruisit Corinthe l’an de Rome 607, fut surnommé l’Achaïque, parce qu’il soumit l’Achaïe.

ACHAÏSONNER. v. act. Prendre occasion d’exiger injustement de quelqu’un la chose qui lui appartient, le vexer, l’inquiéter. Rag. Vexare, iniquam exigendi occasionem captare.

ACHALANDER. v. act. Attirer les chalands, accréditer, mettre une boutique, ou une maison, en réputation d’avoir de bonne marchandise, & à bon prix. Emptores allicere. Toute la fortune d’un marchand consiste à bien achalander sa boutique. C’est un terme du peuple, ou tout au plus de la conversation.

Achalander, est quelquefois neutre pass. & se met avec le pronom personnel. Cet homme commence à s’achalander. On le dit aussi en badinant, d’une personne qui a beaucoup d’intrigues : cette fille est fort achalandée.

Achalandé, ée. part. pass. & adj. ☞ Qui a des chalands. Il se dit également du marchand, & de la boutique. Un marchand achalandé, celui qui fait un grand débit. Une boutique achalandée, celle où il vient quantité de marchands pour acheter des marchandises.

ACHANACA est une plante des Indes, dont la feuille ressemble au chou ; mais elle est plus mince, & les côtes en sont plus tendres. Son fruit est gros comme un œuf, & de couleur jaune ; on le nomme Alfard : il croit au royaume de Mély ; on emploie sa décoction dans les maladies vénériennes. Voyez Thevet.

ACHAMECH. Terme de Chymie. Selon quelques Chymistes, c’est l’écume & les ordures de l’argent. Harr.

☞ ACHANAMASI. s. m. Terme de Relation. Nom de la quatrième prière que les Turcs font tous les jours, & qui se fait quand le soleil est couché. Quarta Turcarum precatio. Mahomet a ordonné de prier cinq fois en vingt-quatre heures : l’Achanamasi est la quatrième, ou la prière du soir. A. D. S. M.

☞ ACHAOVAN, ou ACHAOVA. s. m. Quelques personnes donnent ce nom à une plante semblable à la camomille, qu’ils appellent Achave, Achove, & quelquefois Alacuan. Cette plante est fort abondante en Egypte, sur-tout au Caire, dans un lieu appelé Sbéchie. Dict. de James.

ACHARNEMENT. s. m. Forte passion, emportement, attachement opiniâtre à quelque chose. Libido, propensio. Il se dit plus ordinairement en mauvaise part. Il a un furieux acharnement pour la débauche.

Acharnement, se dit encore de la fureur & de l’animosité avec laquelle on persécute quelqu’un. Insectatio vehemens, acerba. Ces deux Auteurs ont un furieux acharnement à se perdre mutuellement ; ils se déchirent par-tout.

Tous les dévots de cœur font aisés à connoître.
Jamais contre un pécheur ils n’ont d’acharnement ;
Ils attachent leur haine au péché seulement. Mol.

Arracher ce levain des fureurs parricides,
Qu’enfantent les esprits de nouveautés avides,
Dont les coups inhumains sont d’autant plus mortels,
Que leur acharnement croit servir les autels.

La Bastide.

ACHARNER, v. act. Donner aux bêtes le goût, l’appétit de la chair. Carnis famem, ou appetitum, excitare, irritare, ciere. On acharne les chiens, les oiseaux de proie à la curée. On dit aussi en Fauconnerie, acharner l’oiseau sur le tiroir, soit au poing avec le tiroir, qui est une aile de chapon ou de cocp-d’Inde ; ou en attachant le tiroir au leurre. Accipitres oblatâ escâ pascere. Il y a des oiseaux farouches qui ne s’acharnent jamais, & qui se laissent plutôt mourir de faim.

Acharner, animer. Irritare. On les a acharnés les uns contre les autres.

Acharner, se dit figurément en Morale avec le pronom personnel, pour dire, s’attacher avec fureur, avec opiniâtreté, à persécuter quelqu’un, à le blâmer. Acriter infectari. Ces deux plaideurs sont furieusement acharnés.

Il déchire l’Eglise il s’acharne contre elle ;
Et voulant s’affranchir des droits qu’elle a sur nous.
Il se les attribue & les prodigue à tous.

La Bastide.

Il signifie quelquefois s’adonner avec excès. Ferri immoderatiùs. Il est dangereux de s’acharner au jeu. Ce Docteur est si fort acharné à l’étude, qu’il se dessèche sur ses Livres. S. Evr. Ce mot est un composé, & dérive de chair.

Acharné, ée, part. & adj.

ACHART. s. m. Nom propre d’homme. Aicadrus. Saint Aicadres, que nous appelons plus communément S.


Achart, & que d’autres nomment encore S. Acaire, étoit issu d’une des meilleures maisons de Poitou, & fut second Abbé de Jumièges.

☞ ACHASSES. Nom propre d’une rivière de Languedoc, en France, Achassia, Achassius. Elle a sa source dans les montagnes, près de Viviers. Elle arrose le Vivarais, & au-dessous de Teil elle se jette dans le Rhône.

Acquisition ; traité par lequel on achète. Emptio. Il a fait aujourd’hui l’achat d’une terre à sa bienséance. Il a fait un mauvais achat. Il se prend aussi pour la chose achetée. Je veux vous montrer mon achat. Achat passe louage, est un proverbe tiré des Coutumes de Namur ; c’est-à-dire, que l’acheteur d’un héritage peut déposséder le conducteur, ou locataire, sauf à lui son recours contre son locateur. Ce mot vient du Latin adcaptare, ou adceptare. L’achat diffère de l’échange, en ce que dans l’achat on livre, ou on promet de livrer une chose pour un certain prix, & dans l’échange on donne une chose pour une autre, qui n’est pas de l’argent ; par exemple, du blé pour du vin, du bois pour du fer.

ACHATE. s. m. Achates. Nom d’un des compagnons d’Enée, son ami & son confident, qui, dans Virgile, ne le quitte presque jamais. C’est de-là que ce mot a passé dans notre Langue pour signifier un ami constant, un compagnon fidèle, un homme avec lequel on est toûjours.

Sans ce fidèle Achate il n’eût su faire un pas ;
L’un étoit le David, l’autre le Jonathas.

☞ ACHATES. s. m. Ancien nom de la rivière du Drillo en Sicile. Achates.

☞ ACHATOU. Village de l’isle de Chypre. Aphrodisium. Il est sur la côte septentrionale. C’étoit autrefois une ville célèbre consacrée à Vénus, que les Grecs appellent Aphrodite. Elle étoit à neuf milles de Salamine, entre Carpasium & Ceraunia.

☞ ACHAZIB. s. m. ACZIBA. Nom propre d’une ancienne ville de la Terre-Sainte. Elle étoit dans la tribu d’Aser. Saint Jérôme dit que dans la suite elle fut nommée Ecdippe, & il la place dans la Phénicie. Elle étoit près du lieu qui s’appelle aujourd’hui Sadderia, entre Ptolémaïde, & Tyr, ou entre Aete & Tyr.

☞ ACHBAATS. s. m. Terme de Relation. Officier dans les villes de Perse. C’est le Commandant du guet, qui a soin des prisons, & qui fait la ronde toutes les nuits. Dux Vigilum.

ACHE. s. f. ou bien API. s. m. Plante ombellifére dont les racines sont chevelues, fibreuses & blanchâtres ; les feuilles approchent de celles du persil ordinaire, mais sont plus amples, plus épaisses, & d’un autre vert ; les tiges sont branchues, médiocrement hautes, & portent à leurs extrémités des bouquets de fleurs disposées en parasol. Ses semences sont menues, arrondies, & cannelées sur le dos. Cette plante croît dans les marais & le long des ruisseaux ; transportée dans les jardins, d’âcre & d’amère qu’elle étoit, elle devient douce, & d’un âcre aromatique fort agréable. Le port de toute la plante change aussi par la culture ; c’est ce qui a trompé ceux qui ont cru que l’ache de marais & l’ache cultivée, étoient deux plantes différentes. On nomme en Latin l’ache de marais, ou ache simplement, Apium palustre ; & l’ache cultivée, ou api, & plus ordinairement céleri, Apium dulce, Celeri Italorum. L’ache est apéritive, diurétique, & bonne pour le scorbut. Ses deux espèces, la blanche & la jaune, dans l’extrémité de leur tige, forment un grand panache rempli de fleurs semblables à celles du lilas. Elles fleurissent dans le printemps, & sentent fort bon. La jaune a les racines rougeâtres, & en forme de glands. La blanche les a toutes blanches. Elle se plante de la profondeur de trois doigts à un demi-pied de distance. On la lève tous les trois ans pour en ôter le peuple. L’ache demande médiocrement le soleil, avec une terre grasse & humide. Quelques-uns distinguent quatre sortes d’ache. D’autres en comptent six. 1° L’ache de Macédoine, Apium Macedonicum, 2° L’ache de jardin, Apium hortense, qui est le persil ordinaire. 3° L’ache de montagne,