Description de l’Égypte (2nde édition)/Tome 1/Chapitre III/Paragraphe 3

§. III. Du temple du nord.

Le temple du nord est situé, comme je l’ai dit, auprès de l’un des villages d’Éléphantine : il en reste à peu près la moitié debout avec le couronnement ; savoir, cinq piliers, une des colonnes antérieures et un des côtés de la salle. Ce temple est environné de constructions modernes et de palmiers, qui forment avec lui, à quelque distance, un groupe très-pittoresque ; ce qui en est demeure suffit pour faire connaître l’étendue et la forme primitives qu’avait l’édifice : il n’y a pas de doute qu’il ne fût, comme le temple du sud, composé d’une salle à deux portes, ainsi que d’une galerie ayant sept piliers sur les deux côtés longs, et deux colonnes à chaque extrémité[1].

La colonne est de la même forme générale que dans l’autre temple ; mais le haut du fût est différent : le chapiteau est aussi renflé par le bas et en forme de bouton de lotus tronqué, mais uni et sans côtes. La grandeur de ce temple ne diffère pas de celle de l’autre ; elle est d’un peu plus de douze mètres[2] : les hauteurs de tous deux, au-dessus du soubassement, sont égales. Dans celui-ci, le stylobate est plus élevé ; mais on n’a pu s’y assurer, par des fouilles, de la vraie hauteur du soubassement.

Ce temple est bâti de grès, comme le premier ; toutes les parties subsistantes sont couvertes de sculptures, mais fort endommagées, et l’on n’a pu en recueillir d’assez bien conservées pour faire juger de quelle nature étaient les sujets de ces tableaux.

On a lieu d’être surpris en voyant dans la même île, et aussi près l’un de l’autre, deux monumens tout semblables, tous deux également petits ; tandis qu’on trouve constamment ailleurs un petit temple à côté d’un plus grand. Avaient-ils tous deux le même objet ? existait-il à Éléphantine un grand temple qui aura disparu ? enfin, où est celui qui était célèbre dans l’antiquité, sous le nom de temple de Cneph ou Cnuphis ? Sans vouloir nier ni assurer que le temple du sud fût consacré à Cneph, je me bornerai à rappeler ici les constructions que l’on trouve parmi les ruines de la ville, ainsi que ces grog blocs et surtout cette grande porte en granit, qui ont dû assurément appartenir à des édifices plus grands et plus somptueux que celui que j’ai décrit ; je citerai aussi Aristide le rhéteur, qui a voyagé sur les lieux, et qui rapporte qu’à Éléphantine, temples, hommes et obélisques, tout était sans ombre à midi. Que sont devenus ces obélisques ? on n’en voit pas même de débris à la surface du sol. Combien il est à regretter qu’on n’ait pu faire des fouilles suivies dans ces ruines !

  1. Voyez pl. 38, fig. 2 et 3.
  2. Trente-sept pieds.