Des théorèmes mécaniques (trad. Reinach)/Théorème IV

Traduction par Théodore Reinach.
Texte établi par Théodore ReinachArmand Colin (p. 43-46).


(Théorème IV)[1].

Tout segment d’un paraboloïde de révolution[2], déterminé par un plan perpendiculaire à l’axe, vaut les 3/2 du cône ayant même base et même axe.

Figure 6 : Calcul du volume d’un paraboloïde par la méthode mécanique.
Fig. 6.

Soit un paraboloïde coupé par un plan passant par son axe, qui détermine la parabole ΒΑΓ (fig. 6). Coupons le paraboloïde par un second plan, perpendiculaire à l’axe. Soient ΒΓ l’intersection des deux plans, ΔΑ l’axe du segment, que nous prolongeons d’une longueur ΑΘ = ΔΑ, et considérons ΔΘ comme un levier dont le milieu fixe est Α.

La base du segment est le cercle ΒΓ, perpendiculaire à ΑΔ. Imaginons un cône ayant pour base ce cercle et pour sommet le point Α, et un cylindre ayant pour base ce même cercle et pour axe ΑΔ. Dans le rectangle ΕΖΓΒ, menons une parallèle quelconque ΜΝ à ΒΓ, et par ΜΝ un plan perpendiculaire à ΑΔ, qui coupera le cylindre suivant le cercle ΜΝ, et le segment de paraboloïde suivant le cercle ΞΟ.

ΒΑΓ étant un arc de parabole, ΑΔ l’axe de la parabole, ΞΣ, ΒΔ des ordonnées[3], on a[4] :

(1)

ΔΑ/ΑΣ = ΒΔ²/ΞΣ²,

et comme ΔΑ = ΘΑ, (ΒΔ = ΜΣ), il vient :

(2)

ΘΑ/ΑΣ = ΜΣ²/ΞΣ².

Mais cette dernière expression représente aussi le rapport du cercle ΜΝ au cercle ΞΟ. On a donc :

(3)

ΘΑ/ΑΣ = cercle ΜΝ/cercle ΞΟ.

Par conséquent le cercle ΜΝ, déterminé dans le cylindre, équilibre par rapport au point Α le cercle ΞΟ déterminé dans le paraboloïde, suspendu au centre de gravité Θ : car[5] le cercle ΜΝ a pour centre de gravité son centre Σ, le cercle ΞΟ transporté a pour centre de gravité Θ, et les distances des deux centres au point fixe Α sont inversement proportionnelles aux cercles correspondants.

On démontrera de même, pour toute parallèle menée à ΒΓ dans le rectangle ΒΓΖΕ, par laquelle on mène un plan perpendiculaire à ΑΔ, que le cercle déterminé dans le cylindre, restant en place, équilibrera le cercle déterminé dans le paraboloïde, transporté au point Θ du levier comme centre de gravité.

Remplissons de cercles pareils le cylindre et le segment de paraboloïde. Au total, le cylindre, restant en place, équilibrera, par rapport au point Α, le segment de paraboloïde transporté en Θ comme centre de gravité. Dès lors, les distances de leurs centres de gravité au point Α devront être inversement proportionnelles à leurs volumes, ou, puisque le cylindre a pour centre de gravité le milieu Κ de son axe :

(4)

ΑΘ/ΑΚ = cylindre/segm. parab..

Mais ΑΚ est la moitié de ΑΘ, le cylindre vaut donc 2 fois le segment de paraboloïde. Et, comme le cylindre vaut 3 fois le cône ΑΒΓ qui a même base et même axe, on voit finalement que le segment vaut les 3/2 du cône.


  1. Ce théorème est démontré géométriquement dans le Traité Des conoïdes etc., prop. 21 (I, 386, Heib.) par la méthode dite d’exhaustion.
  2. Archimède dit : « d’un conoïde orthogonal ». La parabole elle-même est dite « section d’un cône orthogonal ».
  3. M. à m. « des droites tirées ordonnément », τεταγμένως κατηγμέναι. Ailleurs (II, 231, Heib.), Archimède explique ce terme ainsi : « cordes parallèles à la tangente au sommet de la courbe ».
  4. « Le carré de l’ordonnée est proportionnel à l’abscisse ». C’est l’équation fondamentale de la parabole, qui se démontre par les moyens élémentaires (cf. Rouché : Géométrie, no 1025). Elle figurait dans les Éléments des sections coniques d’Aristée et d’Euclide, auxquels Archimède, dans la Quadrature de la parabole, prop. 3 (II, 300, Heib.), renvoie pour la démonstration.
  5. Au lieu de καὶ ἐστι (Heiberg, p. 264, 25), il faut lire ou corriger ἐστὶ γὰρ.