Dernier Amour/Le dernier sourire


XIV.

LE DERNIER SOURIRE.


Oui, votre cœur est jeune encore,
Jeune, malgré vos vingt-cinq ans !
votre front charmant se colore,
Aux moindres mots, aux moindres chants ;
Vous souriez à la nature,
À l’arbre, aux moissons, à la fleur,
L’air qui passe, l’eau qui murmure
Ravissent votre aimable cœur !
En vain vous avez vu la terre
Et ses plus vastes horizons,
Les palais !… les moindres gazons
Et la plus petite chaumière
Ont pour vous un charme nouveau,
Et tout vous plaît, et tout est beau.
Ah ! gardez bien cette jeunesse,
Dans vos regards, dans votre voix.
Et cette naïve allégresse
Dont j’ose sourire parfois.
Ce sentiment qui nous ranime,
Dans nos chagrins, dans nos langueurs,
Je l’ai perdu par les rigueurs
Du temps qui m’a fait sa victime ;
Le bois ne me semble plus doux,
Rien ne m’étonne ou ne m’attire.
À toute chose je soupire,
Il ne me reste qu’un sourire,
Et Dieu me l’a gardé pour vous.