Cours d’agriculture (Rozier)/OTALGIE

Hôtel Serpente (Tome septièmep. 345-346).
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OTALGIE. Médecine rurale. Mal d’oreilles qui a toujours son siége dans l’intérieur de cet organe. Cette maladie est très-fréquente en hiver, & sur-tout dans le mois de mars. L’exposition aux intempéries de l’air, les variations de l’atmosphère, le passage subit d’un lieu chaud à un endroit froid, & tout ce qui supprime l’insensible transpiration, peut exciter cette maladie.

Elle est souvent produite par l’introduction de quelque ver ou de quelque insecte dans les cornets de l’oreille ; la cire qui se filtre dans les glandes de cet organe la détermine aussi par son épaississement ; enfin elle vient souvent de la métastase dans le déclin des maladies très-graves, telles que les fièvres malignes, &c. Elle est, pour l’ordinaire, un symptôme de très-bon augure, & il le seroit bien davantage s’il n’occasionnait alors la surdité.

L’otalgie est presque toujours accompagnée de douleurs vives, aiguës ; lancinantes & ceux qui en sont attaqués éprouvent un tintement continuel dans l’oreille, des douleurs & des crispations à la tête : les yeux participent quelquefois à l’inflammation ; les malades sont tourmentés par les veilles & une insomnie invincible, & si cette maladie dure quelques jours, on voit survenir le délire, & même les convulsions.

On combattra l’otalgie causée par l’inflammation, par les saignées du bras & du pied, par l’application des sangsues tout près de l’organe affecté ; on prescrira aux malades une diète sévère, un régime rafraîchissant, & on fomentera l’oreille avec la décoction d’orge coupée avec le lait ; ou avec le lait seul tiède. Les cataplasmes émolliens & relâchans préparés avec les feuilles de mauve, de guimauve, de violette, de pariétaire, sont très-propres à calmer les vives douleurs d’oreille, & pour en obtenir un soulagement plus prompt, on peut injecter sur les cataplasmes quelques gouttes de teinture anodine.

Les bains de vapeurs sont encore très-efficaces, ainsi que les bains de jambes, aiguisés avec la moutarde en poudre ou avec une sorte dissolution de savon.

Tous ces secours n’apportent pas toujours le soulagement, il faut alors avoir recours à d’autres dont l’efficacité soit plus certaine, tels que l’huile camphrée, & le liniment volatil si vanté par Buchan. Malgré tous ces remèdes, l’inflammation dégénère quelquefois en abcès, & on doit même s’attendre un pareil événement quand les malades ont des élancemens qui les incommodent plus ou moins. Il faut alors injecter dans le tuyau de l’oreille une décoction d’orge avec le miel rosat, & si l’abcès ne donne pas un pus louable, on injectera de la teinture d’aloès faite à l’esprit de vin, & on donnera au malade du quinquina ou autres remèdes amers, capables de redonner aux humeurs le baume dont elles ont besoin. On opposera à l’otalgie, par suppression de transpiration, les boissons chaudes & sudorifiques, telles que l’infusion des fleurs de sureau, adoucie avec le miel de Narbonne, une légère décoction de feuilles de scordium, de racine de bardane, de racine de squine, & des bois sudorifiques. Sur toutes choses, on doit recommander aux malades de se faire brosser la peau devant le feu : c’est le moyen le plus sur de rétablir la transpiration, en l’irritant cet organe excréteur.

On aura recours a un chirurgien habile quand l’otalgie sera produite par des corps étrangers dans l’intérieur du méat auditif, afin de les en extraire ; mais on injectera de l’huile d’olives ou d’amandes douces, lorsqu’on soupçonnera la présence de quelque ver ou de quelque insecte dans ce conduit. Les huileux sont les poisons des vers ; ils ne résistent jamais à ces remèdes ; le succès constant qu’ils ont eu les ont rendus recommandables auprès des médecins les plus expérimentés. M. AMI.