Correspondance de Voltaire/1773/Lettre 8912

Correspondance : année 1773GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 48 (p. 442-443).
8912. — À M. VILLEMAIN D’ABANCOURT[1].
19 auguste.

Le vieux malade de Ferney vous remercie, monsieur, avec la plus grande sensibilité. Il ressemble à ces vieux chevaliers qui ne pouvaient plus combattre en champ clos ; ils étaient exoines[2], comme dit la chronique, et un jeune chevalier plein de courage prenait leur défense.

Je n’aurais jamais si bien combattu que vous, monsieur ; je rends grâce à ma vieillesse, qui m’a valu un si brave champion. Vous êtes entré dans la lice accompagné des Grâces. Le bon roi René dit que, quand « li preux chevalier se desmene si gentiment, il rengrege l’amitié de sa dame ». Je ne doute pas que vous ne plaisiez fort à la vôtre. Pour moi, je ne sais si les agréments de votre style ne m’ont pas fait encore plus de plaisir que votre combat ne m’a fait d’honneur.

Agréez, monsieur, la reconnaissance très-sincère de votre, etc.

  1. Sur sa fable intitulée le Cygne et les Hiboux, qui n’est qu’une allusion à M. de Voltaire et à ses ennemis. (K.)
  2. C’est un terme du palais.