Correspondance de Voltaire/1772/Lettre 8503

Correspondance : année 1772GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 48 (p. 53-54).
8503. — À M. VASSELIER.
Le 28 mars.

Premièrement, le cher correspondant est supplié de s’informer du jeune Chazin, écolier de rhétorique, qui paraît avoir quelques talents, et qui a écrit une lettre si bien faite que le vieux malade lui a répondu [1], quoiqu’il ne réponde à personne ; et qu’on lui envoie un petit livre tout de poésie, pour le mettre un peu au fait.

Secondement, voici bien une autre histoire la pièce de l’avocat Duroncel[2] a été lue aux comédiens, qui en ont été émerveillés, et qui l’ont reçue avec acclamation. On ne sait encore s’ils pourront la jouer immédiatement après Pâques, parce qu’ils ont donné parole à M. de Belloy, et qu’ils ont appris déjà sa tragédie de Don Pèdre. Un ami de M. Duroncel s’est chargé de cette négociation ; on attend des nouvelles de cet ami : ainsi il faudra absolument que Rosset[3] attende ces nouvelles pour imprimer. Il ne s’agit que de huit ou dix jours ; c’est un présent qu’on lui fait, et il doit se conformer aux intentions de ceux qui le lui font : à cheval donné on ne regarde pas la bride, dit Cicéron.

Au reste, il y a de bien bonnes notes à faire à la queue de cette tragédie, à commencer par les sacrifices de sang humain qu’ont faits si souvent les Juifs, tantôt à leur Adonaï, tantôt à Moloch, tantôt à Melkom ; mais ces notes doivent édifier les fidèles dans une autre édition.

On embrasse tendrement le cher correspondant.

P. S. M. Duroncel, à qui j’ai communiqué votre lettre du 27, dit que vous êtes le maître absolu de la facétie à vous envoyée, que tout ce que vous ferez sera très-bien fait. Pour moi, je trouve que les druides d’aujourd’hui sont aussi fripons que les anciens. Je suis sûr qu’ils brûleraient tous les philosophes dans des statues d’osier, s’ils le pouvaient. Je ne sais pas quels monstres sont les plus abominables, ou ceux du temps passé, ou ceux du temps présent.

  1. La lettre à Chazin manque.
  2. Les Lois de Minos ; voyez tome VII, page 165.
  3. Libraire à Lyon : voyez lettre 8487.