Correspondance de Voltaire/1771/Lettre 8434

Correspondance de Voltaire/1771
Correspondance : année 1771GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 567).
8434. — À M. BERTRAND.
À Ferney, 10 décembre.

Je vous envoie, monsieur, par le coche de Berne, un petit article nouveau sur la superstition#[1], dans lequel on rend aux révérends pères dominicains, confrères de Jacques Clément, toute la justice qui leur est due. Cela se trouve dans le huitième tome des Questions sur l’Encyclopédie, que vous pourrez envoyer à monsieur votre neveu pour son édification.

Ne croyez-vous pas que cette horrible aventure pourra devenir très-utile au roi de Pologne ? Rien n’est plus avantageux que d’avoir des ennemis détestés du genre humain. Les confédérés ont amassé des charbons ardents sur leur tête[2], et ont affermi la couronne sur la tête du roi. Mais que dites-vous de cinq têtes couronnées assassinées en peu de temps[3] dans ce siècle de la philosophie ? Pour moi, je dis que Lucrèce vivait du temps des proscriptions. Tantum relligio[4], etc.

Le très-malade vieillard vous embrasse de tout son cœur.

  1. Formant aujourd’hui la troisième section de l’article Superstition (Voyez tome XX, page 451) ; mais ce morceau ne fut imprimé que dans le neuvième tome des Questions sur l’Encyclopédie.
  2. Épître aux Romains, chapitre XII, v. 20.
  3. Voyez lettre 8418.
  4. Le vers entier de Lucrèce, I, 102, est :

    Tantum relligio potuit suadere malorum !