Correspondance de Voltaire/1771/Lettre 8201

Correspondance : année 1771GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 348-349).
8201. — À M. LE MARQUIS DE THIBOUVILLE.
6 février.

Partisan du bon goût dans un siècle dégénéré, protecteur d’un théâtre en décadence, connaisseur dans un art où presque personne ne se connaît plus, élève de Baron, dont on devrait prendre des leçons, et dont on n’en prend guère, le jeune provincial[1] a envoyé aux anges les Pelopides. Il vous prie de les lire avec attention ; il vous prie encore de relire, si vous pouvez, le barbare Atrée du barbare Crébillon, et de juger entre un Français et un Vandale. Ceci devient une affaire importante, une affaire de parti, et par conséquent très-convenable au temps où nous sommes. Prenez cette affaire à cœur ; mettez-y toute la politique et tout le courage possibles ; trouvez quelque jeune homme dont vous pourrez disposer, qui passera pour l’auteur, et qui pourra même lire la pièce aux comédiens.

N’y aurait-il point à Paris quelque jeune comédien de campagne qui, moyennant quelques pistoles, pourrait se charger de cette négociation ? Cela serait fort plaisant : rêvez-y ; amusez-vous, et aimez-moi. Si la chose réussit, je viendrai vous voir.

Mme Denis vous fait mille compliments.

  1. C’était sous le nom de Durand que Voltaire voulait donner les Pelopides ; voyez tome VII, page 101.