Correspondance de Voltaire/1766/Lettre 6526

Correspondance : année 1766GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 453-454).

6526. — À M.  VERNES.
Septembre.

Voici, monsieur, où en est l’affaire de cette malheureuse et innocente famille des Sirven. Il a fallu deux années de soins et de peines réitérées pour rassembler en Languedoc les pièces justificatives. Nous les avons enfin arrachées. Le mémoire de M. de Beaumont est déjà signé par plusieurs avocats ; nous avons déjà demandé un rapporteur ; M. le duc de Choiseul nous protège ; il m’écrit ces propres mots de sa main, dans la dernière lettre dont il m’honore : « Le jugement des Calas est un effet de la faiblesse humaine, et n’a fait souffrir qu’une famille ; mais la dragonnade de M. de Louvois a fait le malheur du siècle. »

Avouez, monsieur le curé huguenot, que M. le duc de Choiseul est une belle âme, et que ces paroles doivent être gravées en lettres d’or. Pour celles de Vernet[1], si on peut les écrire, ce n’est qu’avec la matière dont Ezéchiel faisait son déjeuner. Quant à Jean-Jacques, il suffit de vous dire qu’il y avait autrefois à Paris un pauvre homme nommé Chie-en-pot-la-Perruque, qui se plaignait que la cour et la ville étaient liguées contre lui.

Vous devriez bien abandonner vos ouailles quelques moments, pour venir converser dans un château où il n’y a pas une ouaille.

  1. Lettres critiques d’un voyageur anglais ; voyez la note, tome XXV, page 492.