Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5592


5592. — DE FRÉDÉRIC,
landgrave de Hesse-Cassel.
Cassel, 13 mars.

Monsieur, c’est toujours avec un sensible plaisir que je reçois vos lettres. Il y règne un feu auquel l’on peut aisément découvrir le Nestor et le père de la littérature. Que je serais charmé si votre santé vous permettait, dans la belle saison, de venir ici, et de renouveler notre ancienne amitié !

Vous avez bien raison de n’avoir jamais pu vous faire à voir représenter à un chapon les rôles des empereurs romains. Ces cris perçants et ces cadences à la fin des airs m’ont toujours révolté, et j’avoue que, quoique j’en aie un qui soit assez bon, je préférerai toujours la tragédie et la comédie françaises. Vous pourriez, monsieur, donner à mon spectacle un nouveau lustre, et qui le mettrait en réputation : ce serait de m’envoyer une tragédie qui n’aurait point encore paru. Fouillez seulement dans votre portefeuille, et alors vous pourrez aisément me faire ce plaisir.

Je suis avec les sentiments d’amitié la plus sincère, monsieur, votre très-humble, etc.


Frédéric, landgrave de Hesse.