Correspondance de Voltaire/1760/Lettre 4042

Correspondance de Voltaire/1760
Correspondance : année 1760GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 296).

4042. — À MADAME D’ÉPINAI.
6 février.

Quand il s’agit de son pain, ma chère et respectable philosophe, on oublie tout le reste, hors vous, à qui je songerais en mourant de faim. J’envoie aux fermiers généraux les déclarations du contrôleur et du receveur, qui avouent leur prévarication, le crime de faux dans le procès-verbal, et toutes les horreurs que nous avons essuyées. Je rends compte de la scélératesse de ces employés, que j’ai vus moi-même faire la contrebande. Je fais voir que le pays de Gex est à charge aux fermes du roi ; je propose les moyens de faire le bien des fermes générales et de la province. Je demande que M. d’Épinai ait la bonté de venir traiter avec nous. Si vous pouvez, madame, obtenir qu’il y vienne, et l’accompagner, la province sera, comme moi, à vos pieds. Le sel, le blé, sont de pauvres objets. Il y a des peuples qui n’ont ni pain ni sel. Mais quand on vous a vue, il faut mourir de vous revoir.

Et la paix, et la guerre, et Luc, et la Compagnie des Indes, je me moque de tout cela, madame ; il faut que vous reveniez. V.