Correspondance de Voltaire/1759/Lettre 3810
J’enverrai, mon cher ami, votre Amiante à l’Académie de Lyon. J’aurais voulu quelque chose d’un peu plus piquant, et dont le sujet eût donné plus d’exercice à votre esprit philosophique ; envoyez-moi encore quelques petits morceaux, afin de faire une cargaison honnête.
Je crois que l’Encydopèdie se continuera ; mais probablement elle finira encore plus mal qu’elle n’a commencé, et ce ne sera jamais qu’un gros fatras. J’ai eu la complaisance d’y travailler lorsqu’il y avait encore un peu de liberté dans la littérature ; mais, puisque les assassins des rois coupent les ongles aux gens de lettres, il faut se contenter de penser pour soi, et laisser là le public, qui ne mérite pas d’être instruit.
Je crois les sottises lausannoises tout à fait finies ; mes sentiments pour vous et pour M. et Mme de Freudenreich ne finiront qu’avec ma vie.
La moitié de Genève sortit hier de la ville pour accompagner deux voleurs ; l’autre moitié va à Lyon pour voir passer des rois. Cela est peu philosophe. V.