Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 6/1070

Louis Conard (Volume 6p. 77-78).

1070. À MAXIME DU CAMP.
[Paris.] Mercredi 13, 11 h du soir [13 octobre 1869].

Sainte-Beuve est mort tantôt à 1 heure et demie sonnant.

Je suis arrivé chez lui par hasard à 1 h. 35.

Encore un de parti ! La petite bande diminue ! Les rares naufragés du radeau de la Méduse disparaissent !

Avec qui causer de littérature maintenant ? Celui-là l’aimait, — et bien que ça ne fût pas précisément un ami, sa mort m’afflige profondément. Tout ce qui, en France, tient une plume, fait en lui une perte irréparable.

Ton vieux Caraphon n’est pas gai ! J’ai, à propos d’Aïssé, des embêtements graves. Latour-Saint-Ybars surgit avec un traité et force l’Odéon à le jouer avant la mère Sand. Or, comme le Bâtard[1] fait de l’argent, et que l’Affranchi[2] ne sera pas représenté avant le commencement de décembre, cela rejette Aïssé je ne sais quand[3]. Rien n’est encore absolument décidé. Mais je suis contrarié à cause du petit Philippe.

Le retard de la pièce entraîne celui du volume de vers, etc., etc. Quoique je n’aie rien à te dire, j’éprouve un besoin démesuré de te voir et d’embrasser mon vieux Max.

Amitiés au Major ; tendresses au Mouton.

Et à toi,

Ton G. F.

  1. Le Bâtard, par Alfred Touroude.
  2. L’Affranchi, de Latour-Saint-Ybars.
  3. Le 14 octobre, M. de Chilly écrivait à Flaubert : « Au cas, où par suite du succès de la pièce de Mme Sand qui doit précéder Mademoiselle Aïssé, il y aurait impossibilité de faire passer la pièce de Bouilhet du 25 février au 10 mars prochain, vous aurez le droit d’exiger qu’elle soit reportée à la prochaine saison théâtrale et représentée du 20 octobre au 20 novembre 1870.