Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 5/0814

Louis Conard (Volume 5p. 173-174).

814. À SA NIÈCE CAROLINE.
[Paris] Vendredi, 1 heure, 5 mai 1865.
Ma chère Caro,

J’arriverai à Croisset pour déjeuner mercredi prochain, sans faute, à moins d’empêchements imprévus. Je voulais partir mardi matin ; mais d’ici à lundi soir, tous mes moments sont pris, et je n’ai que mardi pour voir l’Exposition et faire mes visites d’adieu. Alors je recule jusqu’à mercredi.

J’attends en ce moment Monseigneur, qui va passer toute la journée et la soirée avec moi. Nous avons à travailler ensemble, ainsi que demain. Dimanche a lieu ma dernière réception ; lundi je fais mes paquets, et le soir dîner chez Magny où l’on portera des toasts au père Sainte-Beuve, sénateur. Voilà mon programme.

Hier nous avons dîné chez Théo, où nous étions vingt personnes à table, y compris un Chinois, avec lequel Monseigneur a causé en chinois.

J’ai reçu une lettre de reproches de la jeune Bosquet, qui prétend que je l’oublie. Cela est parfaitement vrai ; mais s’il fallait fréquenter tous ses amis, on ne rentrerait pas chez soi.

Tu serais bien gentille de t’arranger pour prolonger ton séjour à Croisset, mon bibi, afin que je jouisse un peu de ta compagnie. Réponds-moi et embrasse pour moi tes deux compagnons.

Je te prends par les oreilles et je dépose sur chacune de tes joues un gros bécot de nourrice.

Ton vieux ganachon d’oncle.