Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 1/0172

Louis Conard (Volume 1p. 408-409).

172. À LA MÊME.
Dimanche cinq heures et demie[1].
[29 novembre 1846.]

Comme si ce n’était pas assez de tout ton amour, tu m’offres encore tous les hommages et tout l’amour qu’on t’a donnés. Merci de cette attention de la médaille ; elle m’est sacrée à plus d’un titre.

À demain donc nos adieux. J’embrasserai Henriette, tu prendras ce baiser pour toi. Je le donnerai en pensant à toi. Je ne vois pas où nous pourrions nous revoir le soir.

Ce soir, j’ai eu bien du mal à m’échapper : ma mère est malade, et je me suis enfui sous prétexte d’aller passer une demi-heure chez M[ax]. Il faut que je rentre. Nous partons mardi, probablement par le convoi de neuf heures.

Comme elle était douce la petite promenade que nous avons faite l’autre jour à pied, seuls dans cette rue déserte !…

Aussitôt rentré à R[ouen], je t’écris une longue lettre où je te dirai tout ce qu’ici je ne puis te dire. Je suis trop pressé. M[ax] est tellement occupé de ses affaires d’argent que je ne le vois pas.

Adieu donc, à demain. Je te reconduirai jusque sur le perron, et je te donnerai une dernière poignée de mains réprimée.

Adieu, adieu, mille tendresses, mille baisers, et encore plus du cœur que de la bouche.


  1. Louise Colet a écrit sous la date : « Billet remis à la main, 2 décembre 1846. »