Contes populaires d’Afrique (Basset)/91

E. Guilmoto, Éditeur (Les Littératures populaires, tome XLVIIp. 221-223).

b) Egba.

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LA LÉGENDE DE LA PLANTATION DU MAÏS[1]


Les narrations rapportent que Kesi, Kemta, Ake sont les villes qui furent d’abord fondées dans la forêt d’Egba. Après cela, les autres villes se hâtèrent de jeter leurs fondements. Comme elles étaient toutes en paix, elles songèrent à nommer un roi parmi elles. Lorsqu’elles consultèrent l’Ifa (le sort), celui-ci désigna un homme qui se nommait Odjoko et qui était un ami du chef des habitants de Kesi. Alors ils le firent roi. À cette époque, les moyens de se nourrir n’étaient pas nombreux dans toutes les autres villes : le maïs existait seulement à Kesi, car il poussait uniquement là.

Le roi Odjoko avait dit à ses gens qu’ils ne devaient pas vendre de grains aux autres Egbas si auparavant on ne l’avait trempé dans l’eau chaude. Peu après, le chef d’Ake donna sa fille Adechikou en mariage au roi Odjoko.

Par elle, les centres egbas apprirent la ruse employée contre eux. Un jour, l’Alaka demanda à sa fille de lui montrer comment il pourrait réussir à planter du bon grain dans son champ. La fille lui répondit :

— Père, tu sais bien qu’ici il est expressément défendu de livrer du bon grain par toutes les douanes de la ville : quiconque transgresse cette défense mérite la mort ; mais à cause de l’affection que je te porte, comme ton enfant, je vais faire une tentative, quand même elle devrait me coûter la vie.

Alors elle commença à penser à la manière de s’y prendre pour arriver à son but. Il lui vint l’idée suivante. Deux jours après, elle fit dire à son père de lui envoyer trois poulets. Quand ils furent arrivés, elle les nourrit avec beaucoup de grains ; elle fit dire à son père par le messager de les tuer, de rassembler les grains qui étaient dans leurs intestins et de les planter. Le père le fit et s’étonna de voir les grains pousser ainsi dans son champ, mais il n’en dit rien à personne jusqu’à ce que le grain eût des épis et fût mûr.

Après que l’Alaka eut fait décortiquer ce mais, il en envoya à tous les Egbas pour en planter. Ceux-ci le firent, le rassemblèrent, le mangèrent et s’étonnèrent de voir le maïs pousser aussi dans leur champ comme toujours il croissait à Kesi. Ils tinrent une assemblée et, dans leur colère, ils décidèrent de faire la guerre à Idjoko où habitait alors Odjoko : ils détruisirent la ville et tuèrent beaucoup d’habitants pour se venger à cause du grain.




  1. Mann, Eine geschichtliche Sage aus der Zeit der ersten Niederlassungen der Egba ap. Büttner, Zeitschrift für afrikanische Sprachen, Berlin, Asher, t. II, 1888-1889, in-8, p. 209-216.