Imprimerie de Dubuisson et Cie (p. 14-16).



LES LÉGUMES DE JACQUES

chantés par madame blangy
Musique de M. Le Neva.
Séparateur


Je courtisons la belle Jeanne,
C’est un brin d’fille appétissant,

Pour ses appas chacun se damne
Moi, je n’suis pas si paysan.
Je l’aurai ben coûte que coûte,
J’suis enjoleux, faut qu’all’m’écoute :
Vive le vin !
Vive le vin, vive l’amour ;
Voilà le jour.

Dans l’temps son père était bon drille,
Sa mère aimait les amoureux :
Jeann’ tient beaucoup de sa famille,
Ça se lit ben dans ses grands yeux.
Elle a surtout un bon gros rire,
Il en dit plus qu’il n’en veut dire :
Vive le vin !
Vive le vin, vive l’amour ;
Voilà le jour.

Le mois dernier, je vis la belle :
Dans mon jardin je l’emmenai.
Que m’voulez-vous, Jacques ? dit-elle.
Venez, venez, je vous l’dirai :
J’allons cueillir de la salade,
Des artichauts à la poivrade :
Vive le vin !
Vive le vin, vive l’amour ;
Voilà le jour.

— Les artichauts, ça m’est contraire,
J’aimerais mieux un bon garçon.

— Un bon garçon ? j’suis votre affaire,
Car pour aimer, j’avons du bon.
À tous les deux nous f’rons la paire…
Verse du vin tout plein mon verre :
Vive le vin !
Vive le vin, vive l’amour ;
Voilà le jour.

La Jeanne alors m’fit une œillade,
Et me dit : vos légum’s sont beaux,
Je sens qu’en cueillant vot’ salade,
Je prends goût à vos artichauts.
Le même soir, heureuse et fière,
Elle avait bu dans mon grand verre :
Vive le vin !
Vive le vin, vive l’amour ;
Voilà le jour.

Ah ! si l’amour poussait en terre,
Dans mon jardin j’en planterais,
À tous les gens qui voudraient plaire,
Sans hésiter j’en donnerais ;
Mais sans cultur’, cett’ plant’ divine,
C’est dans le cœur qu’all’ prend racine :
Vive le vin !
Vive le vin, vive l’amour ;
Voilà le jour.




La musique se trouve chez Lebailly, éditeur, rue de l’Abbaye, 2.