Capital et travail/Conclusion

Traduction par Benoît Malon.
Librairie du progrès (p. 277-288).


CONCLUSION

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J’ai parlé sérieusement et d’une manière positive, et il faudrait que je fusse un homme de plus mauvais goût que je ne suis réellement, si je voulais recommencer à examiner les innombrables absurdités de la suite de votre écrit.

Et d’ailleurs pourquoi ?

Nous avons appris à connaître ce que vous êtes et ce que vous savez. Vous êtes, — pardonnez-moi cette noble comparaison, mais je ne veux pas me servir de celle qui vous convient réellement, — vous êtes éventré comme un cerf, et mon dogue à mes côtés tient dans sa bouche vos entrailles encore fumantes.

Fouiller plus profondément votre personne ne pourrait qu’exciter la satiété et le dégoût.

Ce n’est plus de vos torts que je veux parler, mais vous faire mes excuses de l’injustice que j’ai commise envers vous !

Cette injustice provenait, comme je l’ai dit dans ma préface, de ce que je ne vous connaissais nullement en réalité et que ce n’est qu’à Tarasp que j’appris à vous connaître par la lecture de votre Catéchisme.

Jusqu’alors, je m’abusais totalement sur votre compte.

Je savais que vous n’étiez pas un savant, encore moins un homme de science, comme vous aimez à le faire croire.

Je vous tenais toutefois pour un homme passablement instruit.

Je savais que vous flâniez autour des travailleurs avec des propositions de petit bourgeois, propositions qui ne pouvaient mener à rien. Mais je pensais que ce n’était que par suite de votre faiblesse intellectuelle, qui n’excluait pourtant pas une bienveillance chaleureuse pour les classes ouvrières. Je ne savais pas encore (car je n’avais pas lu votre Catéchisme) que vous les endoctriniez et les maniiez comme un instrument de la bourgeoisie dans l’intérêt de la bourgeoisie et du capital !

De là la manière convenable avec laquelle je vous traitai dans ma Lettre ouverte. De là aussi la reconnaissance sincère que j’y exprimai pour votre bon vouloir, tout en exposant la déplorable impuissance de vos propositions.

Et même, quand après ma Lettre ouverte toute la meute de vos feuilles fondit sur moi et que, pendant des mois entiers, cent cloaques charrièrent journellement contre ma personne les mensonges, les imbécillités et les bassesses les plus inouïes, je ne changeai pas encore mon attitude à votre égard. Je croyais par sentiment de justice exagérée devoir distinguer entre le parti et son chef. Je voyais bien que vous étiez assez peu honnête pour laisser faire votre parti et tirer le plus grand profit possible de chacune de ses ignorances et de chacun de ses mensonges.

Mais je ne vous croyais pas ignorant et malhonnête au point d’y participer vous-même et directement. Je croyais que vous laissiez ce noble métier aux gens de votre parti.

Gomme je l’ai dit, je ne connaissais pas encore le Catéchisme. Le premier grand argument avec lequel votre parti voulut m’abattre, ce fut de dire que je cherchais à ressusciter les ateliers nationaux de Louis Blanc, en 1848. Toutes les feuilles de votre parti retentissaient alors journellement contre moi de ce reproche triomphant ! Je saisis la Volkszeitung qui se distinguait surtout par sa rage contre moi, et dans une réponse qui parut dans la Deutsche Allgemeine Zeitung, le 24 avril 1863, je la clouai au pilori de son ignorance.

Mais comme je ne trouvai rien dans les journaux qui pût faire supposer que par vos discours vous fussiez le fauteur d’une si colossale ignorance, je me fis toujours, par ce même sentiment de justice exagéré, un devoir de le constater.

C’est pourquoi dans mon discours de Francfort, lorsque j’en fis mention, je dis expressément[1] : Monsieur Schulze ne l’a pas dit ; il parlait des associations subventionnées qui se sont formées à Paris après la ruine des ateliers nationaux, etc. Maintenant, au contraire, je trouve dans votre Catéchisme que vous l’avez dit expressément. Vous dites là contre moi (p. 82) : Nous rappelons surtout les propositions de Louis Blanc et les ateliers nationaux de 1848, en France. D’après ces propositions l’État, dans le but de supprimer la funeste concurrence et la prépondérance pernicieuse du capital privé, doit successivement attirer à lui toutes les entreprises industrielles et les exercer pour le compte du public.

Ainsi vous vous êtes rendu coupable de la même ignorance que M. Bernstein, le rédacteur de la Volkszeitung. Mais votre cas est bien plus grave.

Quand vous fîtes imprimer votre Catéchisme, mon écrit qui dévoile le véritable état de choses sur ces ateliers nationaux avait déjà paru ; car il porte la date du 24 avril 1863, et votre préface est datée de Berlin, mai 1863.

Par conséquent vous deviez déjà connaître cet écrit.

Qu’on juge du front d’airain qu’il faut avoir, ou plutôt (car cette image est encore trop noble) de l’âme menteuse de petit bourgeois visant au gain, pour répéter cette même observation, après que l’écrit en question avait déjà paru, et que pour cette raison, je joins à cette œuvre, comme pièce additionnelle A !

C’est ma première excuse ! Allons à la seconde !

Dans ma Lettre ouverte, j’avais développé la loi d’airain du travail, et j’avais dit (p. 16) : Dans toute l’école libérale il n’y a pas un seul économiste digne d’être nommé, qui le nie. Adam Smith aussi bien que Say, Ricardo que Malthus, Bastiat que John Stuart Mill, sont d’accord pour le reconnaître. Il règne sur ce point une entente commune de tous les hommes de la science.

Un cri de rage inexprimable partit des entrailles de la bourgeoisie, parce que j’avais dévoilé devant le peuple ces mystères de Cérès !

Il était urgent de mentir effrontément.

Avant tout, ce fut M. Max Wirth qui reçut de ses patrons les ordres en conséquence. Il fit le premier pas, et dans des articles qui, du Journal du Rhin de Düsseldorf à la Réforme de Berlin et au Journal allemand du Sud, se répercutèrent également dans le Wurtemberg, la Bavière et Bade, M.Wirth déclara, après les tours et les détours les plus délicieux, et en déterminant le salaire de travail par le rapport de la prospérité industrielle avec le capital national, que la loi en question était une loi pourrie de Ricardo.

Du temps des épigones dans la période de Bastiat, grâce aux écrivains salariés de l’économie politique, on en était arrivé à traiter de cette façon méprisable le grand maître de l’économie bourgeoise Ricardo, parce qu’il leur était devenu gênant, par la franchise avec laquelle il énonce ses résultats scientifiques.

Rien ne pouvait égaler mon étonnement, lorsque, après avoir vu cette loi unanimement reconnue par toutes les autorités de l’économie bourgeoise, je la vis soudain aussi unanimement rejetée.

C’est pourquoi dans ma Lettre ouverte, j’ai tant insisté sur ce point, qui me paraît incontestable et qui est le seul sur lequel règne dans la science de l’économie libérale l’accord le plus rare.

Je ne connaissais pas assez l’habitude du mensonge et surtout l’impudence incomparable de la bourgeoisie.

Dans mon discours de Francfort j’en fis justice.

Je prouvai avant tout (Manuel des travailleurs, p. 5 et 6) que l’observation que m’avaient opposée MM. Wirth et ses collègues, que le salaire de travail était réglé par le rapport de la prospérité industrielle avec le capital national, ou par la demande et l’offre, voulait dire exactement la même chose que la loi que j’avais développée, et qu’on avait seulement masqué le tout sous des phrases hypocrites, trompeuses, incompréhensibles pour le peuple, et M. Max Wirth lui-même, depuis, n’a rien pu répondre à cette preuve.

Je démontrai plus loin, par une suite de citations, que toutes les autorités économistes, et non seulement les autorités, mais M. Max Wirth lui-même, avaient toujours ouvertement reconnu cette loi.

En rendant justice à M. Max Wirth et ses collègues, je croyais toujours être juste même jusqu’à l’exagération !

Je n’avais pas lu dans les rapports des journaux sur vos discours que vous aviez poussé l’audace jusqu’à démentir cette loi. J’avais encore de vous l’opinion que vous préféreriez laisser cette sale besogne à vos complices.

C’est pourquoi je me fis un devoir de le constater.

Pour démentir cette loi, dis-je dans mon discours de Francfort (Manuel des travailleurs, p. 32), M. Schulze-Delitzch n’avait pas la dose de fausseté nécessaire pour cela ; il ne l’a pas fait. C’était un régal de M. Max Wirth, etc., etc.

J’étais de nouveau dans une grande erreur, monsieur Schulze, comme me l’apprend votre Catéchisme. Vous y démentez cette loi d’une manière très définie et en forme drastique !

Encore une observation avant d’examiner les termes par lesquels vous exprimez cette contradiction.

Il ne s’agit plus de vous prouver la vérité de cette loi. Je l’ai fait dans mon Manuel des travailleurs, et en outre encore une fois plus haut en connexion systématique et d’une manière raisonnée (p. 229 et suiv.).

Ici je ne veux que vous démontrer que vous connaissez parfaitement vous-même la vérité de cette loi, que vous niez.

Cette preuve se trouve au fond d’une phrase de votre Catéchisme (p. 97) :

« Il s’ensuit — dites-vous — que de l’accroissement des capitaux dépend l’augmentation du travail et du salaire des travailleurs, et que le salaire et le travail augmentent à moins que l’accroissement des travailleurs n’ait lieu en proportion encore plus grande que relie des capitaux. »

Vraiment ! à moins que ! à moins que l’accroissement des travailleurs n’ait pas lieu en proportion encore plus grande, le salaire monte. Mais si le nombre des travailleurs s’est agrandi en proportion encore plus grande, le salaire de travail ne monte pas, au contraire il baisse, bien qu’il ait peut-être haussé provisoirement.

Tout l’intérêt se concentre sur le point de savoir, si le à moins que a lieu ; c’est-à-dire, si avec l’accroissement des capitaux et la hausse des salaires, n’a pas lieu en effet un accroissement encore plus grand des travailleurs qui fait que le salaire de travail baisse et retombe encore plus bas.

Quand ma Lettre ouverte eut paru, le professeur Rau de Heidelberg fut engagé à s’opposer à ma loi du salaire de travail. On sentait que MM. Schulze, Faucber, Wirtb, Michaëlis ne pouvaient y suffire ; et on voulut m’opposer une autorité professorale.

M. le professeur Rau se décida réellement, par une déclaration dans le Journal allemand du Sud et dans la Vossische Zeitung, à me réfuter en apparence. Il le fit par le même à moins que ! Ma loi du salaire de travail était injuste, à moins qu’un trop grand accroissement de population n’ait pas eu lieu.

Ce trop grand accroissement doit-il avoir lieu ou non ?

Je répondis à M. le professeur Rau par une réplique du 10 mai 1863, dans la Vossische Zeitung, que je joins à cet écrit comme pièce additionnelle B.

J’y démontrai à M. le professeur Rau, par ses propres écrits, que cet accroissement devait, et pourquoi il devait avoir lieu, et que, précisément, ce à moins que prouve qu’il connaît exactement la vérité de cette loi, qu’il combat en apparence avec des tours de phrases trompeurs. Je lui montrai en même temps comme il était peu honnête et peu honorable de duper ainsi le peuple par des phrases trompeuses et combien il devait rougir de son objection.

M. le professeur Rau, malgré la rudesse des reproches qui rendaient sa réponse indispensable, si toutefois une réponse était possible, n’objecta pas un mot.

Après cette leçon, il se retira tranquillement du combat. M. le professeur Rau avait encore du moins une conscience qu’on pouvait frapper, qu’on pouvait atteindre.

Mais où pourrait-on vous frapper, vous ?

Mon article contre le professeur Rau, ci-joint comme pièce additionnelle B, vous prouve en même temps que par ce à moins que vous découvrez que vous connaissez parfaitement cette loi. Quiconque fait l’observation que le salaire de travail monte avec l’accroissement des capitaux, à moins que l’accroissement de la population ouvrière n’ait lieu dans une proportion plus considérable, sait (et montre par cela même qu’il sait) que le salaire ne peut pas monter pour longtemps ; mais, selon la circonstance, il ne monte pas du tout ou retombe bientôt aussi bas qu’auparavant (si ce n’est plus bas encore comme il arrive quelquefois) parce que l’augmentation des capitaux occasionne un accroissement encore plus considérable de la classe ouvrière.

Il le sait, car les économistes traitent toujours ces deux questions en même temps et ce à moins que prouve qu’il les connaît toutes les deux. Après nous être persuadé d’avance que vous connaissez vous-même la vérité de cette loi que vous démentez devant les travailleurs avec une impudence sans pareille, nous allons observer encore la forme définie dans laquelle vous revêtez cette contradiction.

Vous dites en examinant ma Lettre ouverte dans votre Catéchisme (p. 150) :

« Suivant cette loi, dans les conditions actuelles, la moyenne du salaire de travail est toujours nécessairement réduite à l’entretien usuel indispensable chez le peuple pour la conservation de la vie et la reproduction. Comme gens vivant dans ces conditions, vous devez sentir vous-mêmes toute la fausseté de cette proposition, si vous jetez un coup d’œil dans vos rangs, et il faut avoir toute l’audace^ tout le demi-savoir de M. Lassalle pour vous faire de pareils discours et affirmer en môme temps que toutes les autorités de la science économique sont pour lui[2]. »

En alléguant le demi-savoir qui selon vous me caractérise, monsieur Schulze, vous me forcez de toucher à ce sujet ; eh bien, je n’ai pas à rougir de mes études ! J’ai élaboré de grandes œuvres de l’application et du savoir humains, et je puis m’en rapporter au témoignage de Humboldt, Boeckh, Savigny et de beaucoup d’autres !

Mais pensiez-vous, rien de tout cela ne pourra pénétrer dans le milieu ouvrier ! En même temps vous aviez l’appui d’une centaine de journaux, trop stupides pour voir la différence entre vous et moi, et trop menteurs pour s’en occuper quand même ils la voyaient !

Quant à mon demi-savoir dans la spécialité économique, je venais justement de publier mes Impôts indirects, une œuvre que j’avais écrite, comme la présente, au milieu de l’agitation, des discours, des commentaires des journaux et des procès criminels, sans le moindre loisir théorique, dans le simple but de défense, et où, néanmoins, je mis au jour comme simple essai ajouté à mes extraits économiques, la connaissance intime de séries entières d’œuvres économiques dont vous n’avez jamais lu seulement les titres, dont vous n’avez pas même entendu les noms d’auteurs !

Mais qu’importait tout cela ? Vous aviez cent journaux décidés à vous défendre, à répéter journellement tout ce que vous disiez ; décidés à se taire obstinément sur toute autre chose, et à renoncer à toute honte, avec une impudence sans exemple ! Moi je n’avais pas de journal, j’étais seul, et vous ne doutiez plus, vous et votre crapule (car vous connaissiez si peu la puissance d’un homme), vous étiez sûr que vous réussiriez à me tuer !

Alors pour me perdre plus sûrement, vous résolûtes de prendre envers moi, devant les travailleurs, l’attitude superbe d’un homme de la science qui daigne s’occuper d’un demi-savant[3] !  !

Que le ciel me préserve qu’il soit donné à un adversaire comme vous d’exciter mon orgueil !

C’est pourquoi je veux être très modéré et très modeste, monsieur Schulze. Mais avec la plus complète modération, je puis vous dire une chose : interrogez sur moi amis et ennemis, et si parmi les ennemis vous trouvez des hommes instruits qui ont étudié quelque peu, amis et ennemis seront d’accord pour vous dire que chaque ligne que j’écris, je l’écris armé de tout le savoir de mon siècle !

Et un homme qui, pour parler comme Schelling, n’a que l’instruction d’un harbier, ose me reprocher le demi-savoir et l’effronterie !

  1. Manuel des travailleurs, p. 48.
  2. Quant aux autorités, outre Ricardo, j’ai cité dans mon Manuel des travailleurs des passages d’Adam Smith, de J.-B. Say, de John Stuart Mill, du professeur Hocher, du professeur Itau, du professeur Zachariae, qui tous littéralement disent la même chose. Une autre série de noms figure encore dans mes Impôts indirects (Tooke. Mallehus, Sismondi, etc.), et leur nombre pourrait non seulement être doublé, mais triplé. Mais, selon M. Max Wirth, j’aurais commis une falsification ! Dans un endroit de ma Lettre, où je parle de l’unanimité avec laquelle celte loi de salaire a été reconnue par tous les économistes, entre autres je mentionne aussi Bastiat comme reconnaissant cette loi. Et voilà que M. Max Wirth, quoique forcé d’en convenir aussi, vient cependant affirmer que Bastiat, le grand Bastiat, l’inappréciable Bastiat, ne l’a jamais fait ! Bastiat n’a jamais été assez téméraire ni assez stupide pour avancer de pareilles sornettes, dit M. Wirth. C’est pourquoi, dans un article de son Arbeitgeher. M, Wirth m’accuse de falsification ; selon lui, je m’appuie avec une impudence sans pareille sur Bastiat, pour avoir de mon côté un aussi grand nom que celui de M. Bastiat. Dans l’œuvre présente, j’ai suffisamment réduit ce grand Bastiat à sa nullité, et naturellement je suis plus qu’indifférent à ce que Bastiat accepte ou démente une chose.
    Mais voici toutefois, monsieur Schulze, l’endroit de Bastiat que j’avais en vue, quand je faisais observer que même Bastiat, le plus menteur des économistes avant vous, ne niait pas cette loi. En résumant ce qu’on avance contre là concurrence libre {Harm. écon., p. 392), il fait mention de cette loi du salaire de travail et en juge de la manière suivante : « Il en résulte que le salaire tend à se mettre au niveau de ce qui est rigoureusement nécessaire pour vivre, et, dans cet état de choses, l’intervention du moindre surcroît de concurrence entre les travailleurs, est une véritable calamité, car il ne s’agit pas pour eux d’un bien être diminué, mais de la vie rendue impossible. — Certes, il y a beaucoup de vrai, beaucoup trop de vrai en fait dans celle allégation. Nier les souffrances et l’abaissement de cette classe d’hommes, qui accomplit la partie matérielle dans l’œuvre de la production, ce serait fermer les yeux à la lumière. A vrai dire, c’est à cette situation déplorable d’un grand nombre de nos frères que se rapporte ce qu’on a nommé avec raison le problème social. »
    Il continue bientôt après : « Et comme c’est ce qui constitue principalement le nœud du problème social, le lecteur comprendra que je ne puis entreprendre de le résoudre ici. « Plût à Dieu que la solution ressortît de tout le livre, mais assurément elle ne peut pas ressortir d’un chapitre. » Mais Dieu n’a pas voulu que la solution du problème social ressortît du livre de Bastiat, car elle ressort aussi peu de tout le livre que de ce seul chapitre, et ces mots de Bastiat ne sont qu’une manière d’éluder la solution du problème indissoluble pour lui. Mais que l’on compare seulement ce que dit Bastiat de cette loi du salaire de travail et ce qu’en dit M. Schulze, et on verra en combien le disciple surpasse le maître. Beaucoup de vrai, beaucoup trop de vrai en fait, dit Bastiat, et il pense que ce serait former les yeux à la lumière que de nier la triste situation des travailleurs.
    « C’est completement faux, » et « cela ne peut être expliqué que par mon demi-savoir et mon audace dans les discours, » dit M. Scliulzo, et tous se » complices, MM. Hernslein, Wirlh, Michaelis, Faucher et une centaine d’autres, l’ont fidèlement répété sur tous les tons, et pour démontrer celle fausseté, M. Schulze ose engager les travailleurs à jeter un coup d’œil dans leurs propres rangs.
    On voit que, de l’habitude du mensonge chez M. Bastiat à la bassesse de M. Schuize et de ses complices qui déshonorent l’Allemagne, il y a encore une distance énorme.
  3. Pour le temps où la Volkszeitung aura rempli sa destination et cessé d’exister, je veux pour l’édification de la postérité immortaliser un endroit de cette feuille de honte (Schandblatt), donner une idée de l’impudence cynique de nos journalistes d’aujourd’hui. Dans le premier numéro de son ténia (Bandwurm), composé de treize articles dont elle m’enveloppe, la Volkszeitung dit littéralement en parlant de moi (n° 94 du 23 avril 1863) : « Aimant l’effronterie, comme tous les esprits à moitié mûrs, M. Lassalle a heureusement le caprice de vouloir paraître savant, devant un public étranger au savoir, et il se mêle de si grandes doses de demi-savoir à ses ouvrages destinés au peuple, qu’il reste incompréhensible et sans danger pour lui. »