Bulletins d’arboriculture, de floriculture et de culture potagère/Poire Colmar Darras

Poire Colmar Darras
Bulletins d’arboriculture, de floriculture et de culture potagère (p. 80-81).

Poire Colmar Darras.

Dans la collection de fruits nouveaux ou peu connus que nous envoyâmes à l’Exposition ouverte à Gand, en octobre dernier, se trouvait le Colmar Darras.

Le Comité du Cercle d’Arboriculture ayant dégusté ce fruit, résolut de le faire paraître dans la Nouvelle Pomologie Belge, et nous demande d’en faire la description et l’historique. Nous satisfaisons volontiers à ce désir : Le Colmar Barras obtenu par M. Robert Darras de Naghin, un de nos éminents arboriculteurs, provient des semis faits par M. Gabriel Éverard, jardinier-pépiniériste, rue des Augustins, à Tournai.

Chaque année, ce jardinier formait une longue plate bande de semis de pépins de poires, qu’il recourrait de fiente de lapins, séchée et réduite en poudre, ce qui donnait à ses égrains une telle vigueur que, dès la première année, ils acquéraient près d’un mètre de hauteur. — C’est un procédé que nous enregistrons en passant, et sur lequel nous appelons l’attention de tous les semeurs. Nous l’avons employé depuis quelques années, et il nous a donné les mêmes résultats. — L’année suivante, les jeunes semis étaient plantés en pépinière, où ils restaient jusqu’à ce qu’ils fussent assez forts pour être greffés. C’est alors que M. Éverard faisait son choix et transplantait ceux qui lui paraissaient devoir donner de bons fruits.

M. Darras de Naghin, ancien semeur, prenait son plaisir à parcourir les péninières de M. G. Éverard, et là, quand il trouvait un sauvageon offrant de belles espérances, il l’achetait et le transplantait chez lui. C’est ainsi qu’il obtint également la Poire Beurré de Naghin.

Vers 1845, M. Darras, visitant les pépinières de M. Éverard, découvrit un pied d’une apparence séduisante, il en fit l’acquisition et le transplanta dans son jardin. L’arbre reprit avec une vigueur extraordinaire et ce n’est qu’en 1855 qu’il porta ses premiers fruits, encore peu nombreux, par le fait de cette extrême vigueur. À l’exposition organisée par la Société royale d’Horticulture de Tournai, en septembre 1864, des spécimens de cette poire furent présentés au Jury, qui en admira la beauté et la grosseur, mais qui ne put la juger, puisqu’elle était encore loin de son époque de maturité. Ce n’est que quatre ans après, c’est à dire en 1868, qu’elle fut couronnée et nommée définitivement Colmar Barras.

Elle avait été propagée dès son origine sous la dénomination de Delphine de Tournai.

L’arbre, dit le savant auteur de la Pomone Tournaisienne, est de première vigueur, à rameaux fastigiés, dressés, élancés. Scions vigoureux, très forts et très allongés. Bourgeons coniques, pointus, rapprochés, mais séparés du scion. Bouton à fruit assez gros, ovale, obtus, souvent terminal.

Les feuilles sont assez grandes, aplaties, ovales, aiguës, assez courtement pétiolées. Stipules filiformes, amplexicaules.

Les fleurs sont grandes, en bouquet serré, souvent semidoubles. Pédicelles courts. Pétales larges, étalés.

Le fruit est gros, pyramidal allongé, peu renflé vers la base, atténué au sommet, arrondi à la base, à peine ombiliqué aux deux extrémités. Pédoncules courts, robustes. Calice affleurant, large, à sépales étalés. Peau jaune citron, brillante, parfois un peu tachée de roux. Chair fine, beurrée, très fondante, très juteuse, très sucrée, exquise.

Le Colmar Barras peut être greffé sur franc comme sur coignassier. Sa production est régulière, mais tous les sols ne conviennent pas à ce fruit ; possédant toujours une eau abondante, une chair fine et très fondante, elle acquiert cependant beaucoup plus de saveur, beaucoup plus de suc, dans un terrain chaud, léger et de bonne nature, que dans un terrain froid et humide.

Quant à sa maturité, il est rare qu’elle commence avant les premiers jours de novembre et plus rare encore qu’elle se prolonge au delà des derniers jours de ce mois.