Bulletin de la société géologique de France/1re série/Tome III/Séance du 28 janvier 1833


Séance du 28 janvier 1833.


Présidence de M. de Bonnard.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. le président proclame membres de la Société :

MM. M. Floresi, directeur des mines à Bolanos et Zacatecas, au Mexique ; présenté par MM. Élie de Beaumont et Collegno ;

M. Dupuy, colonel d’état-major en retraite, membre de l’Académie des sciences de Toulouse, et de la Société archéologique du midi de la France, à Toulouse ; présenté par MM. Boubée et Boue ;

M. Morel (Auguste), précepteur à Paris ; présenté par MM. Deshayes et Desnoyers ;

M. Micard (Nicolas), membre de plusieurs Sociétés savantes, à Paris ; présenté par MM. Deshayes et Desnoyers.

La Société reçoit les ouvrages suivans :

1o De la part de M. L.-A. Chaubard :

A. Sa Notice géologique sur les terrains des départemens de Lot-et-Garonne. In-8o. 48 pages et 3 pl., Paris 1830. (Extraits des Annales des sciences d’observations.)

B. Son ouvrage intitulé : Élémens de géologie mis à la portée de tout le monde, et offrant la concordance dés faits géologiques avec les faits historiques, tels qu’ils se trouvent dans la Bible, les traditions égyptiennes et les fables de la Grèce. In-8o, 363 pages et 2 pl., Paris 1833.

2o De la pairie la Société philosophique de Cambridge, la 3e partie du volume IV de ses Transactions. (Transactions of the Cambridge philosophical Society. In-8o 116 pages et 4 pl., Cambridge 1833.)

Cet ouvrage est accompagné du Règlement et de la Liste des Membres de la Société philosophique.

3o Le no 116 (décembre 1832) du bulletin de la Société géographique de Paris.

4o De la part de M. Rozet, le prospectus de son Voyage dans la régence d’Alger, ou Description du pays occupé par l’armée française en Afrique, contenant des observations sur la géographie physique, la géologie, la météorologie, l’histoire naturelle, etc.

Cet ouvrage sera composé de 3 volumes in-8o, et d’un atlas grand in-4o.

M. Bertrand Geslin communique à la Société la description géologique et minéralogique du département de la Loire-Inférieure, accompagnée d’une carte gravée, non encore coloriée, par M. Dubuisson.

M. Boué communique également les deux ouvrages suivans :

1o Élémens de paléontologie (Handbuch des petrefactenkunde), par Fréd. Holl, 1 volume in-12 de 488 pages, Dresde 1831, avec une préface sur la création du monde primitif, par le docteur L. Coulant.

2o Rapport sur la réunion des naturalistes et médecins d’Allemagne à Vienne en septembre 1832 (Bericht uberdie Versammlung, etc.), par le baron Jacquin et F. Littrow, Vienne, in-4o de 131 pages.

On y donne un compte sommaire des travaux des neuf réunions semblables qui ont précédé celle-là.

M. Burat lit un Mémoire sur les terrains volcaniques de la France centrale.

Ce mémoire constate la découverte d’un cratère de soulèvement dans le Haut-Vivarais. Au nord du village du Pal, en suivant le chemin qui mène au Kioutord, on entre dans un défilé de quelques mètres resserré entre deux montagnes abruptes. Ce défilé franchi, l’on se trouve dans un cirque complet, partout encaissé par des montagnes arrondies. Vers le centre de la plaine circulaire qui forme le fond, surgissent trois montagnes coniques, d’inégale hauteur. Tout le cirque est granitique, et ces trois cônes sont composés de déjections ; ce sont trois petits volcans basaltiques : l’on voit en outre des affleuremens basaltiques se dégager en plusieurs points de dessous les masses granitique encaissantes. Le défile d’entrée a été évidemment fermé par une de ces saillies ; vers l’ouest on la voit pointer dans le granite, mais ce barrage céda à la pression des eaux. Il n’y a pas de cours d’eau dans ce cirque dont les pentes intérieures sont plus abruptes que les pentes extérieures qui inclinent en sens contraire ; mais, vers le défilé, on voit jaillir au-dessous d’une masse basaltique une décès sources puissantes, d’une température et d’un volume invariables, qui caractérisent les contrées volcaniques. L’ensemble de ces cratères reproduit tous ceux d’un cratère de soulèvement complet, et la manifestation de l’action volcanique au centre le distingue de ceux qui ont été déjà reconnus dans la France centrale.

Enfin, un dernier fait termine l’action volcanique en ce point ; en descendant la côte de Montpazat, on voit sur la gauche une puissante nappe basaltique qui a percé latéralement le granite, et remplit le fond du ravin. Or, les roches de cet épanchement latéral sont en tout identiques à celles du cratère de soulèvement du sol qui est au-dessous ; de sorte qu’il est évident que cette colonne de lave qui a soulevé le cratère, adonné lieu à l’éruption des trois cônes, a percé ensuite latéralement le granite, et s’est épanchée vers le Bas-Vivarais.

On lit le Mémoire suivant de M. Frédéric Hoffmann sur Les terrains volcaniques de Naples, de la Sicile et des îles de Lipari, dans lequel il annonce à la Société avoir changé entièrement d’opinion relativement à la théorie des cratères de soulèvement qu’il avait cru devoir adopter d’abord ; il fait ensuite quelques observations critiques sur celles publiées dans le Bulletin par M. Constant Prévost, sur la géologie de la Sicile.

Je viens de lire avec intérêt dans le second vol. du Bulletin de la Société (pag. 395) la controverse animée sur l’origine des cratères. Mon nom figurant à la tête de l’article de M. de Montlosier qui a soulevé cette question, je ne puis qu’être flatté de passer pour le champion d’une théorie que le grand mérite de son inventeur recommande à la sérieuse attention des géologues. Néanmoins, pour l’amour de la vérité, je suis obligé d’avouer que j’ai changé depuis long-temps d’opinion, et je me permets de vous soumettre les raisons de ce changement.

Arrivé il y a deux ans en Italie, je n’avais vu presque que le N.-O, de l’Allemagne, je n’étais donc pas très en état de juger les phénomènes des volcans les plus récens. Pénétré de l’importance de la théorie de M. Buch, qui restera dans tous les cas à la science, il était naturel que je fisse d’abord une application de ce que j’avais appris. Les montagnes d’Albano semblèrent se prêter à cette manière de voir, de manière que je finis par y soupçonner un cratère de soulèvement, parce que je voyais ces hauteurs entourées : d’un cercle régulier composé de couches de peperino et de lave basaltique, du milieu duquel s’élevait le mont Cavo, volcan facile à reconnaître, et pourvu d’un cratère d’éruption.

Je ne m’arrêtai au Vésuve que très peu de temps, la Sicile étant le but de mon voyage ; je ne pus donc pas me faire une idée suffisamment exacte des différences réelles de ce volcan d’avec son cercle extérieur du mont Somma. Un peu plus tard, occupé de l’Etna, j’y fus surtout frappé par la vallée circulaire du Val del Bove, cavité peu visitée.

La grandeur de ce dernier accident, dont on ne saisit bien les proportions que de loin, semblait l’éloigner des formes des véritables cratères d’éruption que j’avais vus. De plus, le nouveau cône de l’Etna n’offrant aucune coupe intérieure, venait augmenter la déception. Figurez-vous une vallée circulaire peu profonde, ouverte, du côté tourné vers la mer, d’un diamètre de quatre milles a Au premier moment, sa forme mal rendue dans toutes les cartes, ne me parut guère comparable à l’entonnoir étroit et aux murailles irrégulièrement formées du cratère de l’Etna. Elle s’éloignait encore plus des cratères d’éruption qui, entourés de sable et de scories, forment de nombreuses buttes au pied de l’Etna, et dont le pied a souvent donné issue aux coulées de laves.

Sur le fond et dans la partie la plus inférieure de la bordure de cette grande vallée, des masses plus ou moins grandes, de rochers trachytiques ressortent sous les laves plus récemment coulées. Ces trachytes ressemblent à beaucoup de variétés des anciennes roches amphiboliques, telles que les diorites, les siénites, etc. Or, l’amphibole abondante dans ces roches ne se trouve jamais dans les nouvelles laves de l’Etna.

Enfin, les murailles de la cavité sous forme de précipices de 2 ou 3,000 pieds d’élévation sont composées d’alternats, d’agglomérats solides et de couches de laves dont les affleuremens décrivent des lignes horizontales, comme les couches d’un terrain neptunien secondaire. Ces couches d’agglomérat sont composées de blocs de trachyte ressemblant au trapp, de masses scorifiées et de véritables cailloux d’amygdaloïde, de manière qu’elles présentent une analogie trompeuse avec les agglomérats porphyriques et amygdalaires, du grès rouge du Harz ou du Thuringerwald. De plus, les couches de laves se distinguent autant par leur quantité de feldspath que par la grande régularité de leur dépôt, de la nature et du mode de dépôt des laves actuelles sur les pentes de l’Etna.

Il n’est donc pas étonnant que j’aie été induit à croire que ces agglomérats semblables aux grès secondaires, ces bancs de laves si minces et si réguliers, et à croûte scoriacée, avaient été étendus horizontalement sur le fond d’une ancienne mer, et n’avaient été placés que plus tard dans leur position circulaire excentrique actuelle, par la force qui avait poussé les masses trachytiques subjacentes. Je passe sous silence l’influence qu’ont pu avoir sur ma manière de voir les observations faites ailleurs sur des apparences géologiques jugées alors semblables. Ainsi je ne crus pas devoir hésiter à communiquer à quelques uns de mes amis cette découverte que je croyais intéressante pour l’histoire de la formation de l’Etna ; malheureusement mes lettres furent rendues publiques.

Pendant long-temps je regardais donc comme achevée cette partie de mes recherches, et ma théorie suffisamment prouvée, puisqu’elle paraissait si conforme aux idées que j’avais en entrent en Italie. Les observations faites plus tard à l’ile volcanique surgie de la Méditerranée, ainsi qu’à l’ile de Pantellaria, ne contredisaient en rien mes opinions déjà enracinées ; mais il en a été tout autrement pour mon examen postérieur des iles de Lipari.

Le volcan de Stromboli[1] parut d’abord très favorable à mon idée préconçue. Sa superficie est formée à moitié par un manteau régulier composé d’agglomérats et de bancs de laves, dont les coupes avaient une analogie frappante avec celles du Val del Bove. Au milieu de cette ceinture semi-circulaire est situé le cône d’éruption à moitié formé, dont le côté tourné vers la mer est rongé sans cesse par les vagues. Nous pensions déjà (j’étais avec M. Escher fils, de Zurich) avoir trouvé un volcan normal, avec la ceinture de son cratère de soulèvement. Néanmoins un examen plus exact sur la section si récente du cône d’éruption nous apprit que son intérieur était composé exactement comme celui du prétendu cratère de soulèvement, savoir : de bandes régulières et parallèles de laves et d’agglomérat. Des filons verticaux de lave traversaient les masses dans les deux cas, et il ne manquait à l’identité des apparences que la présence des roches pyroxéniques dans le nouveau cône et celle des masses feldspathiques dans l’ancien.

Quoique ce fait nous étonnât beaucoup, nous crûmes néanmoins sauver la probabilité de nos idées préconçues par l’étude des véritables Barancos ou vallées d’écartement ; car la théorie nous disait qu’elles devaient se trouver dans le pourtour extérieur du cratère de soulèvement.

Les pentes extérieures du volcan de Stromboli ne sont point recouvertes d’éruptions postérieures comme les bords du Val del Bove à l’Etna : or ayant été obligé de séjourner 19 jours à Stromboli, nous eûmes tout le temps de nous convaincre qu’il n’y existe pas de Barancos tels que les suppose la théorie de M. de Buch.

À la vérité, il y a à Stromboli assez de gorges étroites, profondes et partant comme des rayons d’un centre, ou comme M. de Buch nous les présente dans sa carte de l’ile de Palma. Pour se rendue d’un côté de l’ile à l’autre, les pauvres habitans de Stromboli préfèrent gravir toute l’élévation de 2,400 pieds de cette montagne escarpée plutôt que de faire tout le tour de l’ile, et franchir ainsi toutes ces cavités.

Ces dernières portent toutes l’indication distinctive d’avoir été creusées par les eaux ; car les roches solides surplombent en escarpement leurs parties supérieures, sans la moindre trace de fendillement.

Nous dûmes donc renoncer pour Stromboli à toute idée d’un cratère de soulèvement.

Il m’est très agréable de voir que dans les discussions de la société l’on ait insisté sur cette nécessité de trouver dans le système de M. de Buch des fentes partant d’un centre. La vue de la belle carte de l’ile de Palma, dressée par M. de Buch, peut, à la vérité, exciter des doutes sur le mode de leur formation.

Ce que nous n’avions pu trouver à Stromboli, nous ne le vîmes pas non plus dans les autres iles de ce groupe.

Les îlots de Panaria, de Basiluzzo, de Dattolo, etc., sont des rochers trachytiques, probablement les restes d’un volcan peut-être détruit, que je serais disposé à regarder comme le volcan central de tout le groupe.

L’île de Vulcano est le pendant de Stromboli, quoique sur une plus grande échelle ; néanmoins son cône actuel d’éruption n’offre pas de coupes de manière à pouvoir le comparer avec la ceinture demi-circulaire de laves feldspathiques, qui sembleraient être les restes d’un cratère de soulèvement.

Je dis que cela paraît ainsi, car on trouve à Lipari encore, dans leur liaison originaire, exactement les mêmes roches qui forment à Stromboli et à Vulcano la demi-ceinture extérieure autour du cône d’éruption. À Lipari ces masses, alternant fort régulièrement ensemble, constituent le volcan incontestable et maintenant éteint, appelé le mont Sant-Angelo, qui est la sommité principale de l’île. Nous avons visité plusieurs fois les contours bien conservés du cratère de ce mont, et nous y avons trouvé les restes de ses coulées de laves porphyriques, à qui l’influence du temps a fait perdre leur croûte scoriacée. Les mêmes lavés forment au pied de la montagne de longues couches horizontales alternant avec du tufa sableux.

De plus, les couches tufacées, si bien dénudées dans les escarpemens des côtes, sont bien les moitiés que celles qui, plus avant dans le pays, remontent dans tous les sens pour former le pourtour de l’ancien cratère. Nous regardons comme erronée l’assertion de Dolomieu, de Spallanzani, etc., que ces tufas renferment des algues marines, et nous ne voyons aucune possibilité pour retrouver dans les îles de Lipari un cratère de soulèvement.

De retour à Naples, j’y ai étudié sous l’influence de ces nouvelles idées toutes les apparences volcaniques anciennes et modernes des environs de cette capitale déjà si souvent décrits. Je mécontenté donc d’avouer que je partage l’opinion de ceux qui regardent la Somma comme la moilié encore conservée d’un ancien cratère d’éruption. Le Vésuve, formé depuis les temps historiques, n’offre aucune trace d’un cratère de soulèvement, et son intérieur mis à nu depuis 1822 en présente les preuves irréfragables. L’analogie de cet intérieur avec les escarpemens de la Somma est très frappante, et ces derniers nous rappellent si involontairement l’imposant Val del Bove, que nous ne pouvons douter que ces deux vallées circulaires n’aient la même origine. Le Val del Bove ne serait donc qu’un Atrio del Cavallo modifié.

Enfin, dans tous les nombreux et énormes cratères des champs phlégréens ainsi que sur l’île d’Ischia et de Procida, nous n’avons rien vu qui y rendît probable la formation ancienne d’un cratère de soulèvement. Les analogies de ces bouches d’éruption si rapprochées viennent jeter en même temps du jour sur les rapports des vallées circulaires dont on a tant parlé dans ces derniers temps, et sur lesquelles je reviendrai en son lieu.

J’ai cru devoir d’autant plus arquer publiquement mon changement de système sur les cratères de soulèvement en Italie, que je ne me souviens pas d’avoir discuté à fond le sujet avec M. Prévost lors de son séjour à Naples. J’étais alors occupé à annoncer à M. de Buch ce que j’avais vu dans les îles de Lipari, ainsi que mes nouvelles idées.

Dans ce Mémoire, je me gardais bien d’appliquer ce manque de cratères de soulèvement en Italie à la formation des volcans dans d’autres parties de la terre, et je suis encore persuadé que l’existence de ces espèces d’apparences n’est pas tout-à-fait improbable, malgré les objections si vives de M. Cordier. En effet, les vallées de soulèvement nous présenteraient déjà les particularités des cratères de soulèvement. M. Cordier croit que ces derniers exigent « l’existence et le renouvellement multiplié d’un phénomène qui est sans exemple ; » mais on pourrait répondre qu’aucune chaîne n’a été soulevée sous nos yeux, de même que dans la période actuelle il ne s’est formé aucun nouveau volcan véritable, ou une connexion permanente entre l’atmosphère et l’intérieur du globe.

Je me permettrai maintenant quelques observations sur les intéressantes communications de M. C. Prévost concernant la Sicile. (Bulletin de la Société géologique, tom. II, pag. 114 et 405.)

Il ne me semble pas convenable de diviser les dépôts tertiaires de Sicile en deux étages ; car cette séparation devient d’autant plus incertaine que les deux étages sont reconnus même par M. Prévost pour contenir les mêmes espèces de fossiles. Le gisement contrastant des couches sur lequel s’appuie M. Prévost ne me paraît pas suffisant, puisque de pareilles irrégularités peuvent se former aisément dans la série des couches d’un même dépôt, dès que l’on suppose que leur formation a duré un long laps de temps. Or, c’est le cas pour les roches tertiaires de la Sicile, qui ont sur une très grande étendue une puissance de près de 2,000 pieds.

Dans cette île, il est vrai, ces dépôts se présentent sous deux aspects divers, savoir : comme une formation presque uniquement calcaire, comme dans le plateau du Valdi Noto, ou sous la forme de l’argile bleue, ou la Creta de Sienne en Toscane, dépôt recouvert d’agglomérat coquillier avec lequel il alterne. Selon moi, ces deux genres de dépôts sont juxta apposés parallèlement l’un à l’autre ; et ils passent, chacun à sa manière, au sol secondaire, le calcaire, comme M. Prévost l’a observé à Pachino au moyen de marne calcaire crétacée, et l’argile bleue (comme à Girgenti) par des roches plus schisteuses qui lui ressemblent, et dans lesquelles se montrent bientôt des couches calcaires à nummulites et hippurites.

Cette liaison double du sol secondaire et tertiaire est un des faits les plus curieux dans la géologie de la Sicile, d’autant plus qu’il y a mélange des fossiles à la limite des deux formations, et que les coquillages du sol tertiaire présentent les caractères d’un dépôt très récent. En effet, notre collection des fossiles tertiaires de la Sicile présente 80 pour cent d’espèces identiques avec des espèces vivant encore dans la mer Méditerranée ; et il n’y en a qu’un très petit nombre de particulières aux couches inférieures. M. Philippi s’occupe actuellement des déterminations et de leur distribution géologique exacte[2].

Un autre point sur lequel nous différons, a rapport aux formations volcaniques de la Sicile.

M. Prévost lie les roches du cap Passaro avec une partie des roches volcaniques de la partie septentrionale du Val di Noto, entre Palazzolo et la plaine de Catane, et il en sépare les roches de Militello et de Vizzini, comme des produits d’une époque, postérieure, ou de celle des calcaires tertiaires récens. Or, cette séparation ne me paraît pas conforme à la nature des choses.

Nous avons examiné longuement les prétendus volcans éteints du Val di Noto, et nous ne trouvons à en former qu’une grande formation. Toutes les apparences concordent tellement avec celles des dépôts basaltiques que nous les y comprenons. Les roches tertiaires y alternent distinctement avec ces musses étrangères qui empâtent des fossiles tertiaires, ce qui montre la formation sous-marine de ces dépôts, et indique leur âge, d’après ce qui a lieu ailleurs.

Il en est tout autrement des roches volcaniques du cap Passaro ; la nature des masses y est différente, car elles renferment beaucoup de cristaux de feldspath, et passent aux amygdaloïdes ; et les rapports de gisement du calcaire crayeux voisin montrent que les couches secondaires à Hippurites les plus récentes n’ont été déposées qu’après la sortie de ces masses ignées.

On sait que cela a lieu aussi près de Schio dans le Vicentin. Ainsi ce ne sont plus des basaltes proprement dits ; je les appelle Mélaphyre, el les ai reconnus au cap Passaro, près de Catolica, à l’ouest de Girgenti ; et non loin de Contessa, entre Palerme et Sciacca. Ils reposent dans ces derniers lieux sur les couches secondaires les plus récentes, et je suis disposé à croire que l’apparition de ces mélaphyres est liée peut-être à la distribution étendue du gypse, du soufre et du sel. En effet, très près du commencement de l’époque tertiaire, une grande partie de la surface de la Sicile, comprenant le district actuel gypsifère et salifère et à soufre, a été soumise à une vulcanisation très considérable, et probablement cette époque ne coïncide pas tout-à-fait accidentellement avec l’éruption des mélaphyres du cap Passaro, etc.[3].

Quant aux lignes de direction des couches de le Sicile ; je ne puis partager tout-à-fait les idées de M. Prévost, leur direction générale est bien celle du S.-E. au N.-O. ; mais c’est aussi celle des couches primaires de la partie N.-E. de l’île, auxquelles M. Prévost attribue une direction en sens contraire. Quoique la chaîne principale primaire s’étende entre Taormina et Messine du S.-O au N.-E., leurs couches courent toujours dans une direction à angle droit de la précédente. Leur ligne de direction principale est celle tirée de Taormina au cap d’Orlando, ce qui est aussi, en général, celle du contact du sol primaire et secondaire[4].

Je ne regarde que comme un accident local et très subordonné ces masses de gneiss qui, près de Melazzo, s’intercalent au milieu des couches tertiaires, tandis que M. Prévost voudrait en faire un accident igné lié au soulèvement de la chaîne du Pelore[5].

En général, dans cette partie de la Sicile qui a une direction parallèle aux Pyrénées, les plateaux de couches tertiaires toujours horizontales se recourbent sur leurs bords, et paraissent avoir pris part un peu au soulèvement général ; les Apennins présentent le même fait.

Je suis de retour d’une longue course dans les Alpes apuennes du golfe de la Spezia ; grâce à MM. Guidoni et Paréto, j’ai pu dresser une carte géologique passablement complète de cette contrée ; elle aura l’avantage de s’annexer à celle des environs de Pise, levée par M. Paul Savi.

J’admets comme certain que le marbre de Carrare est un calcaire jurassique modifié ; la nature et les progrès de ces altérations ignées s’observent distinctement dans plusieurs endroits de ces montagnes, et j’en donnerai une description complète avec des cartes et des coupes.

J’ai été assez heureux d’ajouter une nouvelle localité de fossiles à celles déjà connues dans le calcaire de Carrare. On n’a trouvé jusqu’ici que de mauvais échantillons de Peigne, d’Avicule, de Cardite, de Corbule, etc. ; M. Guidoni complétera cette liste.

Il est remarquable que le sol secondaire même récent doive comprendre les talcschistes unis intimement aux marbres de Carrare, passant au micaschiste et gneis, et alternant avec ces deux dernières roches. Néanmoins ce fait est tout aussi douteux que celui des alternats du Macigno ou grès vert des Apennins avec les belles ardoises de Lavagna.

M. de La Bêche a donné à votre Société une description des environs de la Spezia, où il indique la présence simultanée, des Orthocères et des Belemnites, dans des couches de ce lieu. Cette assertion m’a surpris, car je n’ai pu trouver ni en place ni dans les collections de MM. Pareto et Guidoni, des Orthocères incontestables. Quant à des alvéoles de Bélemnites changés en pyrite, il y en a beaucoup. Ainsi on pourrait désirer la confirmation d’un fait aussi singulier. M. Savi y avait indiqué un Trilobite, M. Guidoni des Baculites, la Gryphea arcuata, et un petit amphibie, toutes ces assertions sont complètement fausses et reconnues comme telles par leurs auteurs.

A l’occasion de ce Mémoire, M. C. Prévost prend la parole ; après avoir rendu hommage au savoir et au caractère de M. F. Hoffmann, qu’à son retour de Sicile il a eu l’avantage de rencontrer à Naples, et à la manière franche et honorable avec laquelle ce géologue, l’un des plus habiles et des plus consciencieux, vient annoncer qu’il a changé d’opinion relativement à la théorie des cratères de soulèvement, M. C. P. profite de cette circonstance pour faire remarquer à la Société comment, par l’effet d’idées théoriques préconçues, deux observateurs peuvent arriver à tirer des mêmes faits des conséquences différentes et souvent opposées, puisque, ayant visité presque en même temps les mêmes lieux que M. F. H., l’étude géologique de l’île Julia, des volcans éteints de la Sicile, de l’Etna, des îles Lipari, d’Ischia, des Champs phlégréens, du Vésuve enfin, l’avait conduit à ne pas admettre pour ces diverses localités l’application des idées si ingénieuses et si séduisantes de M. de Buch.

Non seulement M. C. P. a fait connaître ses doutes à cet égard dans les premières communications qu’il a eu l’occasion d’adresser, à la Société pendant son absence ; mais depuis il a exprimé son opinion d’une manière formelle dans son rapport à l’Acad. des sciences, sur l’apparition de l’île Julia.

À cette occasion il rappelle aussi le Mémoire que M. Virlet a communiqué à la Société dans l’une de ses dernières séances, relativement à la formation de l’île Santorin, dans la structure de laquelle cet observateur n’a pu voir non plus un cratère de soulèvement, bien que par sa forme et par la disposition des matériaux dont elle est formée, l’île Santorin ait fourni à M. de Buch et aux géologues qui soutiennent sa théorie, l’un des exemples types de ces prétendus cratères.

Déjà M. Cordier a fait connaître à la Société son opinion sur la formation du pic de Ténérife, sur les groupes de terrains volcaniques du Cantal et du Mont-Doze, et sur la théorie des cratères de soulèvement en général, dans la controverse scientifique, à laquelle donna lieu, dans la séance du 7 mai 1832, la lettre de M. de Montlosier (Bulletin de la Société géologique, tome II, page 395).

M. Constant Prévost répond ensuite verbalement aux observations critiques faites par M. F. Hoffmann, sur plusieurs points des extraits de lettres, et de la coupe générale du sol de la Sicile, insérés dans le tome II du Bulletin de la Société géologique, page 114 et 403[6].

Quant au fait de la liaison qui semble exister selon M. F. H., entre le sol secondaire et le sol tertiaire, tant au cap de Passaro qu’auprès de Girgenti, M. C. P. répond à diverses questions qui lui sont adressées par plusieurs membres de la Société, et notamment par MM. de Beaumont, de Bonnard, de Roissy, Rozet. En effet, ainsi qu’il l’a écrit de Sicile, il n’a pu, en allant de Syracuse au cap Passaro, trouver une ligne de démarcation tranchée entre les calcaires tertiaires les plus récens et la craie à nummulites et à hippurites ; le passage apparent lui a semblé se faire aux environs de Noto, au moyen de bancs puissans d’un calcaire blanc tendre, presque entièrement dépourvu de fossiles qui, d’une part, se lie par ses caractères minéralogiques et de superposition, aux couches tertiaires, et qui de l’autre, passe d’une manière non moins insensible à des assises calcaires, qu’avec la plupart des géologues qui l’ont examiné, il rapporte à la craie.

On ne peut donc pas fixer positivement encore l’âge relatif de ces calcaires pour ainsi dire intermédiaires, par rapport aux calcaires parisiens, et ce serait tirer une conséquence forcée et prématurée des faits énoncés, que de croire qu’il existerait en Sicile, soit une liaison immédiate entre la craie et les formations regardées comme plus récentes que les terrains parisiens, soit la preuve que les calcaires, qui renferment près de 8 pour cent de coquilles dont les analogues se trouvent encore dans la Méditerranée, auraient été formés dans le même moment que notre calcaire grossier. M. C. P. proteste, pour lui du moins, contre de telles conséquences, sans toutefois se refuser à croire, si l’on passe d’une question de fait à une question de théorie, que l’on puisse trouver quelque part un passage gradué et insensible entre les terrains secondaires et les terrains tertiaires ; car, selon lui, l’espèce d’hiatus indiqué aux environs de Paris et dans un grand nombre d’autres lieux, entre la craie et les terrains tertiaires, par les superpositions contrastantes et la différence brusque dans les espèces de fossiles, peut n’être considère que comme un phénomène local dû au changement de certaines circonstances qui n’ont pas dû manifester leurs effets partout en même temps. C’est ainsi que l’on voit souvent un dépôt calcaire succéder brusquement à un dépôt argileux ou de grès, une formation d’eau douce à une formation marine, etc., et vice versà, sans, pour cela, que l’on doive admettre de ces différences subites entre les caractères minéralogiques, géognostiques et zoologiques des deux dépôts superposés, qu’il y a eu dans l’histoire de la terre des périodes tranchées, séparées par des intervalles d’agitation générale, pendant lesquelles tout aurait été anéanti, jusqu’à ce qu’un nouvel ordre de choses, et la création de nouveaux êtres, soient venus réorganiser une nature nouvelle.

À priori, on peut avancer qu’entre la craie et les terrains tertiaires parisiens, on trouvera quelque part des passages zoologiques aussi nuances que l’on en trouve entre les différens étages des terrains tertiaires, pendant la formation desquels la surface de la terre a été agitée par des révolutions non moins violentes, sans doute, que celles qui auraient séparé la période crayeuse de la période tertiaire ; mais M. Constant Prévost le répète, les faits observés par lui en Sicile ne sont pas encore de nature à prouver ces passages d’une manière incontestable.

Un membre (M. Rozet), s’appuyant sur cette liaison indiquée par MM. Fr. Hoffmann et C. Prévost entre la craie et les terrains tertiaires de Sicile, et sur la grande analogie qu’il reconnaît entre ces derniers terrains, ceux des collines subapennines et ceux qu’il a observés en Afrique, et qu’il a nommés sub-atlantiques, M. Rozet en conclut que tout cet ensemble de terrains tertiaires est le seul et véritable type des terrains tertiaires supérieurs à la craie. À tort, selon lui, le bassin de Paris aurait été primitivement pris pour type ; à tort il aurait été considéré depuis comme plus ancien que ceux de la Loire, de la Gironde et des bords de la Méditerranée. Il n’y aura à ses yeux qu’un seul groupe tertiaire, et les différences organiques constatées entre ces différens bassins ne seraient que le résultat de modifications partielles contemporaines, apportées dans la grande masse par des influences locales.

M. R. voit un autre exemple du passage de la craie aux terrains tertiaires dans la présence de coquilles indiquées par M. Dufrénoy comme espèces tertiaires dans les mêmes couches de craie supérieure déposées à la base de Pyrénées, et contenant des coquilles propres aux terrains secondaires.

M. Bertrand Geslin dit n’avoir jamais observé la moindre liaison entre les terrains secondaires et les terrains tertiaires de l’Italie. Selon lui, les Gypses qu’il a étudiées dans un grand nombre de localités ne lui ont pas présenté de fossiles, et lui semblent se lier plutôt à la craie qu’aux terrains tertiaires.

M. Boué indique des gypses intercalés entre des couches coquillières auprès de Volterre en Toscane et en Gallicie.

M. Boubée annonce qu’il n’a pu reconnaître le moindre passage entre les terrains tertiaires des environs de Perpignan, et la craie ou d’autres terrains secondaires du pied de Pyrénées.

Il rappelle que les couches tertiaires de Perpignan contiennent des fossiles très modernes, et que la même formation présente des sédimens marins et d’eau douce juxtaposés qui lui paraissent être contemporains.

M. Virlet insiste sur la solution de continuité qui existe entre les terrains tertiaires et les terrains secondaires de la Morée ; et cependant les dépôts tertiaires de ce pays montrent une assez grande analogie avec ceux d’Italie et de Sicile.

M. Desnoyers répond à M. Rozet, que pour établir un parallélisme complet entre les terrains tertiaires méditerranéens (sub-apennins ou sub-atlantiques), et les terrains tertiaires des bassins de Paris, de Londres et quelques autres généralement considérés comme plus anciens, il faut faire tout-à-fait abstraction des différences organiques, et ne tenir aucun compte des proportions d’espèces analogues, si positivement constatées par M. Deshayes. La différence du climat qui pourrait expliquer convenablement ces différences entre des fossiles déposés dans des mers assez éloignées, n’est point applicable à des dépôts aussi rapprochés que le sont, par exemple, ceux du crag de Norfolk et ceux du bassin de Londres ; ceux du bassin de la Loire et ceux du bassin de Paris. Dans la Loire surtout où les dépôts tertiaires modernes sont en gisement contrastant sur les plus récens des terrains parisiens, les fossiles sont presque tous spécifiquement différens, présentent un assez grand nombre d’espèces encore vivantes ; caractères qui se reconnaissent si évidemment dans les terrains tertiaires méditerranéens et manquent dans le bassin de Paris. On pourrait citer plusieurs autres exemples de ces solutions de continuité dans la longue série tertiaire.

M. le trésorier présente le budget pour l’année 1833, tel qu’il a été adopté par le conseil : la société confirme cette

adoption.
BUDGET


présenté à la société géologique de France pour 1833.


RECETTE.


NATURE DES RECETTES. Somme
admises par
la société
Art. 1er. Reliquat de 1831 1,438 20
Art. 2. Arriéré de 1830 Droits d’entrée 100 »
Cotisations annuelles 75 »
Art. 3. Arriéré de 1831 Droits d’entrée 40 »
Cotisations annuelles 540 »
Art. 4. Arriéré de 1832 Droits d’entrée 60 »
Cotisations annuelles 2,035 »
Art. 5. Année de 1833 Droits d’entrée 800 »
Cotisations annuelles 6,360 »
Art. 6 Vente des premiers volumes du bulletin 320 »
────────────
Totaux 11,768 20


DÉPENSES.


NATURE DES DÉPENSES. budget
de
1831
Somme
admises par
la société
Art. 1er. Impressions divers et lithographies 200 » 200 »
Art. 2. Bulletin 1,500 » 2,500 »
Art. 3. Mobilier 200 » 250 »
Art. 4. Ports de lettres et affranchissements 300 » 300 »
Art. 5. Agent de la société 800 » 1000 »
Art. 6. Loyer 1,000 » 1,000 »
Art. 7. Chauffage et éclairage 260 » 250 »
Art. 8. Dépenses diverses 250 » 300 »
Art. 9. Bibliothèque 200 » 200 »
Art. 10. Collections 600 » 600 »
Art. 11. Mémoires 2000 » 2000 »
──────── ─────────
Totaux 7,310 » 8,100 »


RÉSULTAT.
La Recette présumée étant de 11,798 20
La dépense autorisée étant de 8,100 »
─────────
L’excédant de la recette serait de 3,668 20

Proposé et déposé, par le Trésorier soussigné, le 7 janvier 1833

H. MICHELIN.

Approuvé par la Société le 28 janvier 1833.



  1. Voyez les coupes données dans les Annales de Poggendorff.
  2. Je suis bien loin d’accorder plus d’importance que n’en attache M. F. H. lui-méme aux expressions de calcaire tertiaire ancien, et de calcaire tertiaire récent, que j’ai cru devoir employer en parlant des formations de la Sicile ; je n’ai voulu constater qu’un fait qui peut n’être que local, et qui surtout ne saurait indiquer pour moi deux périodes tranchées qu’aurait séparées une révolution générale. En effet, si dans beaucoup de localités de l’intérieur de la Sicile et des côtes, les deux dépôts calcaires superposés d’une manière concordante passent insensiblement de l’un à l’autre par leurs caractères géognostiques et zoologiques, on voit cependant dans beaucoup d’autres points un contraste dans la stratification qui indique qu’un ou plusieurs événemens ont eu lieu entre le dépôt de l’étage inférieur et la superposition de l’étage supérieur : ainsi, à Trapani, au pied du mont Erix, à l’extrémité occidentale de la Sicile, et auprès de Millili, vers le bord oriental de cette île, on voit distinctement le calcaire moderne remplir les anfractuosités du calcaire tertiaire ancien ; bien plus, celui-ci a été traversé par des roches volcaniques dont le contact lui a fait éprouver diverses altérations (Millili, fleuve Agnuni) tandis que les lits nombreux du premier ont enveloppé des fragmens roulés de ces mêmes roches volcaniques. Auprès de Syracuse, plusieurs cavernes creusées dans le calcaire tertiaire ancien ont été remplies par le calcaire tertiaire récent, que l’on retrouve en bancs horizontaux puissans le long de la côte, jusqu’à Noto ; et ces bancs renferment des ossemens d’éléphant, de rhinocéros et d’autres mammifères semblables à ceux que l’on rencontre dans les cavernes.

    Quant au parallélisme des argiles bleues des environs de Girgenti, et des calcaires du Val di Noto, je suis très porté à admettre l’opinion de M. F. H. qu’avait déjà exprimée M. Daubeny, et cela d’autant plus que je ne saurais assigner au calcaire de Noto un âge relatif, bien déterminé, par rapport aux terrains tertiaires connus des autres parties de l’Europe, et notamment de la France et de l’Italie, ainsi que je le dirai ci-après.

    C. Prévost.
  3. Je ne pourrais répondre à cette observation qu’en transcrivant ce que j’ai dit dans le Bulletin, page 404, où j’exprime positivement l’opinion que les produits volcaniques du sud-est de la Sicile, depuis le cap Passaro jusqu’à la plaine de Catane, m’ont paru appartenir à plusieurs époques, l’apparition des plus anciens, ceux du cap Passaro, pouvant avoir précédé le dépôt d’une partie de la craie et celle des autres ayant coïncidé avec la formation des calcaires tertiaires récens.

    En disant que les couches secondaires a hippurites les plus récentes lui ont paru avoir été déposées après la sortie des masses ignées, M. F. H. fait entendre que les couches à hippurites anciennes ont été formées avant la production des roches volcaniques qui sont en contact avec elles ; c’est aussi l’opinion que j’ai émise avec doute, parce que je croyais être en contradiction avec M. F. H. ; mais ce que dit cet excellent observateur, que je regrette bien de n’avoir connu qu’après mon voyage en Sicile, parce que je n’ai pu profiter de ses utiles instructions, vient non seulement lever mes incertitudes à cet égard, mais encore m’autorisera continuer à croire que les dépôts de gypse, de soufre et de sel ont été formés entre la période secondaire et la période tertiaire, ou mieux, à la fin de l’une ou au commencement de l’autre, ainsi que je l’avais avancé dans ma lettre à M. Cordier, mais avec d’autant plus de réserve que M. F. H., lorsque je l’ai vu à Naples, plaçait encore les dépôts gypsifères à la partie inférieure de la craie, et dans les couches correspondantes au grès vert.

    Or M. F. H. disant aujourd’hui que les produits volcaniques du cap Passaro, des environs de Catolica, de Contessa et de Sciacca reposent sur les couches secondaires les plus récentes ; et qu’à l’apparition de ces roches qu’il appelle mélaphyres est liée la distribution étendue du gypse, du soufre et du sel ; il renonce, à ce qu’il me semble, à sa première idée, et mon opinion ne s’éloigne plus de la sienne.

    C.P.
  4. Je n’ai pas voulu parler des lignes de direction des couches de la Sicile, mais bien de la direction des chaînes, car j’ai bien vu, comme M. F. H. le fait observer, que les couches de la chaîne des Pelores vont du sud-est au nord-ouest, tandis que la chaîne court du nord-est au sud-ouest ; ainsi, sur ce point il ne peut y avoir désaccord entre nous.
    C. P.
  5. Sans nier que les rapports curieux que j’ai eu l’occasion d’observer entre les calcaires les plus récens et les roches micacées du cap Melazzo n’appartiennent à un accident local, j’ai trop de faits qui annoncent que cet accident a coïncidé avec des effets de dislocation au sol, pour renoncer à ce que je consens volontiers à appeler mon hypothèse ; et comme un séjour d’une semaine sur ce point m’a permis de l’étudier avec quelques soins, je me hasarderai à me trouver pour ce seul résultat, en contradiction avec M. F. H., dont je saurai imiter le noble exemple qu’il vient de nous donner, en reconnaissant avec franchise que je me suis trompé si j’en acquiers la preuve par les observations qu’il pourra publier, et que j’attends, comme tous les géologues qui le connaissent, avec la plus vive impatience.
    C. P.
  6. Les réponses de M. C. P. sont ajoutées en note dans le Mémoire précédent de F. Hoffmann.