Biographie universelle ancienne et moderne/1re éd., 1811/Théophylacte
THÉOPHYLACTE, célèbre écrivain ecclésiastique grec, naquit, suivant l’opinion la plus commune, à Constantinople, non pas au neuvième siècle, comme le soutenaient le cardinal Duperron et quelques autres, mais dans la première moitié du onzième. Après avoir fait d’excellentes études dans sa ville natale, il reçut les ordres sacrés, puis professa longtemps la rhétorique avec distinction. Il mérita par sa piété et ses lumières l’estime de l’impératrice, femme de l’empereur Michel Ducas, surnommé Parapinace. Il paraît que c’est à cette princesse qu’il dut la haute dignité à laquelle il parvint. Nommé archevêque d’Acride (aujourd’hui Okri ou Okrida)[1], métropole de la Bulgarie, vaste province, qui venait d’être soumise à l’empire d’0rient, Théophylacte travailla avec le plus grand zèle à la propagation de la foi dans cette contrée encore en partie barbare. L’époque précise de sa mort est inconnue. Schœll la place vers 1107 (Hist. abrég. de la Littér. gr., sacrée et ecclésiast., 2e édit. p. 293) ; d’autres, vers la fin du siècle précédent. L’archevêque d’Acrise avait composé beaucoup d’ouvrages qui ne sont pas parvenus jusqu’a nous. Ceux que nous possédons consistent en divers traités de Théologie, et en Commentaires qui s’étendent sur presque tout le Nouveau Testament et sur quelques livres de l’Ancien, notamment sur les petits prophètes, Jonas, Habakuc, Nahum et Osée. On regarde l’auteur comme un des principaux interprètes de l’Ecriture sainte. Son style est assez remarquable pour le temps de décadence, de troubles et de confusion où il a vécu. Sa doctrine en général est pure, mais il n’eut pas le courage, dit Feller, de se déclarer entièrement contre le schisme et les erreurs des grecs, comme il paraît par son Commentaire sur le troisième chapitre de saint Jean, où il blâme les latins de ce qu’ils disent que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Les PP. dominicains Jean-Bernard-Marie de Rubeis et Boniface Finetti (Voy. ces noms, XXXIX, 217 et LXIV, 162), ont réuni les écrits de l’archevêque et les ont publiés, avec une traduction latine, sous le titre d’0pera omnia… Venise, Bertella, 1754–63, 4 vol. in-fol. C’est donc par erreur que M. l’abbé Caillau, missionnaire de France, a avancé dans son Introductio ad sanctorum Patrum lectionem[2], p. 427, qu’il n’existe aucune édition générale de Théophylacte. Les meilleures éditions séparées des productions les plus marquantes contenues dans la collection de Venise, sont : 1. Enarrationes in quatuor Evangelia (gr.), Romæ, (par Ant. Bladum), 1542, in-fol. Il y a de cette belle édition des exemplaires imprimés sur vélin. — Les mêmes Enarrationes sous le titre de Commentarii, etc. (gr. et lat.), editi studio J.P. (Joanne Pico, suivant Barbier, anonymes, 21549), Paris, 1631, in-fol. (L’édition que cite le savant bibliographe est de 1635, cum notulis et variis lectionibus.) La bibliothèque de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés possédait un manuscrit renfermant la traduction en langue slave de ces commentaires sur les Evangiles : c’était un des livres légués à cette bibliothèque, par Monseigneur de Coislin, évêque de Metz (Voy. Biblioth. Bibliothecarum manusc. nova, du P. de Montfaucon, p. 1042). II. Commentarium in Acta Apostolorum, (gr. et lat.) a Laur. Sifanio, Cologne, 1568, in-fol, édition rare ; si l’on en croit Ch. Nodier (Biblioth. sacrée grecque-latine, p. 347). III. Commentarii in epistolas S. Pauli (gr. et lat.) ab Augustino Lindsello, Londres, 1636, in-fol. — Environ soixante ans auparavant, le littératcur Christophe Persona (Voy. ce nom, XXXIII, 438) avait déjà publié une version latine de ces commentaires, ainsi intitulée : Anastasius (Theophylactus) in epistolas S. Pauli, e græco in latinum translatus, Romæ, per Uldaricum Gallum, alias Han 1477, in-fol, édition recherchée et peu commune, mais moins chère qu’autrefois. Pour ce commentaire sur saint Paul et pour les précédents, Théophylacte a largement mis à profit les Homélies de Saint-Jean Chrysostome. IV. Epistolæ (gr.) ; Joan Meursius nunc primum é tenebris erutas edidit, cum notis… Leyde, 1617, in-4º. — Les mêmes, avec une traduction latine, par Vincent Marinier, de Valence, Cologne, 1622, in-4º. Ces lettres, au nombre de 75, ont été aussi insérées dans la Bibliothèque des Pères. V. Institutio regia (Paideia basilikê), Paris, Impr. royale, au Louvre, 1651, in-4º, bonne édition, donnée par le savant P. Poussines, jésuite (Voy. ce nom, XXXV, 586) ; réimprimée dans le premier volume de Banduri Imperium orientale, faisant partie de la Byzantine, et dans le dix-neuvième volume de cette même Byzantine, édition de Venise. Ce traité de l’éducation d’un prince a été composé pour l’instruction du jeune Constantin Porphyrogénète, à la prière de l’impératrice Marie, sa mère, dont nous avons parlé ci-devant. Enfin, on trouve quelques opuscules de Théophylacte dans le Fasciculus anecdotorum, de Jean-Louis Mingarelli (Voy. ce nom, XXIX, 79).
Pour un épître de l’archevêque, traduite en latin par Alard d’Amsterdam, et publiée avec des poésies de la façon du traducteur, dans la dernière moitié du xvie siècle, consultez le Bulletin du Bibliophile, neuvième série, p. 607. B—l—u.
- ↑ On trouve des détails intéressants sur cette ancienne ville, dans le Voyage de la Grèce, par Pouqueville, liv. VII, chap. 6.
- ↑ Le savant et respectable auteur de ce livre estimable (qui fait partie du tome VIII du Thesaurus Patrum), termine ainsi l’article substantiel qu’il a consacré à l’archevêque d’Acride : « Hic Cloditur Græcorum Latinorum series, nihil que jam in his tam fæcundis Græcia plugis, nisi sterilitas ; nihil sub tam splendido quondam cælo, nisi tenebræ deprehenduntur. »