Biographie universelle ancienne et moderne/1re éd., 1811/Théophile, moine et poète latin


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THÉOPHILE, moine et poète latin de la fin du xve siècle, était né à Brescia, et appartenait à la congrégation de Sainte-Justine, ordre de Saint-Benoît. Il nous apprend lui-mème que, dès sa plus tendre jeunesse, il s’était voué au culte des muses, et que rien n’avait jamais pu l’en détourner. Il fit quelques voyages dans le Nord, notamment en Hongrie. A cela près, sa carrière fut calme, tranquille, et ne fournit aucun événement marquant à rapporter. On ignore l’époque de sa mort. Tout entier à l’étude et aux devoirs de son état, il ne donna que peu de temps à la composition ; aussi son bagage poétique n’est-il pas considérable. En voici le détail : 1o De Vita solitaria et civili, dialogus (en vers hexametres). Les interlocuteurs sont un ermite nommé Maur et le chevalier Pyrrhus. Chacun vante le genre de vie qu’il a embrassé, et prétend qu’il doit obtenir la préférence. Théophile ne prononce pas entre eux. Il offre son Dialogue à Gui d’Ubaldo de Montefeltro, duc d’Urbin, et, dans une pièce qui le précède, il prie la muse Galliope d’assurer à l’ouvrage la faveur de ce protecteur éclairé des lettres. (Voy. Montefeltro, XXIX, 485). 2o De Vita et moribus S. Bernardi abbatis Claræ vallensis, carmen encomiasticon (en vers élégiaques). Ce poème consiste en un prologue et sept chants ou chapitres, les huit pièces contenant ensemble environ 400 distiques. Dans le prologue Théophile suppose que la Sainte-Vierge lui apparaît en songe, et lui ordonne de célébrer les vertus et les belles actions de saint Bernard, dont elle fait un magnifique éloge. Le premier chapitre est intitulé : Divi Benedicti pro instauratione monasticæ Religionis prolata supplicatio, et accepta à Deo promissio. On se tromperait si l’on pensait que cela n’a point de rapport au sujet du poème. Théophile, dans ce morceau, nous représente saint Benoît, demandant à Dieu par d’instantes prières la réforme de l’ordre dont il fut le fondateur. Le Tout-Puissant se rend aux vœux de Benoît, et lui promet que Bernard sera non-seulement le réformateur de cet ordre, mais encore le restaurateur de l’Église entière. Les quatre chapitres suivants sont consacrés aux diverses circonstances de la vie de Bernard, sa pieuse enfance, son entrée a Cîteaux, son établissement à Clairvaux, la ferveur de son zèle, ses austérités, ses occupations monastiques, ses travaux apostoliques, ses combats contre le schisme, ses voyages, ses miracles, enfin sa mort glorieuse. Dans le sixième chapitre, Bernard est élevé au-dessus des héros de l’antiquité et des plus illustres martyrs de la foi chrétienne. Dans le septième et dernier, on loue les écrits du grand saint, et l’on en recommande la lecture aux gens de tous les états. Par une courte épître en prose, Théophile dédie son œuvre à Louis Martinengo qui avait bien voulu se charger du soin de la corriger. A l’occasion des corrections de son ami, il compare ses vers à Bacchus qui, n’ayant pu recevoir le complément de l’existence dans le sein de Sémélé, le reçut dans la cuisse de Jupiter. Cette comparaison est d’assez mauvais goût, mais c’était le goût du temps. 3o Hymni novem (en vers saphiques), trois pour l’office de saint Benoît, trois pour l’évengéliste saint Luc, et trois pour celui de sainte Justine. Le poète adresse ces hymnes au président de sa congrégation, le R. P. Simon, qui l’avait engagé à les composer. Les poésies que nous venons d’analyser rapidement ont été réunies sous le titre de Theophili Brixiani carmira, en un vol. in-4º de 37 feuilles, à la fin duquel on lit : Impressit Brixiæ Bernardinus Misinta Papiensis… anno theogoniæ mccccxcvi. Avant la souscription, on a placé une lettre d’Élie Cavriolo (Capreolus) à Augustin Æmilio par laquelle on voit que ce fut Cavriolo qui détermina Théophile à rendre public le Dialogue sur la vie solitaire et civile. Cette première édition du Carmina est rare. Du Verdier en cite une de Rome, in-4º (in officina Radulphi Laliseau), dont il n’indique pas la date. Il y en a sûrement d’autres, mais nous ne les connaissons pas. Le P. Mabillon a réimprimé le nº 2 ci-dessus dans le second tome des Opera sancti Bernardi, édit. de 1690 (col. 1293-1304). Il l’a mis sous le nom de Philothée (à peu près synonyme de Théophile), ne sachant, dit-il, si ce nom est feint ou véritable, mais croyant l’auteur, sinon de Brescia, du moins Italien et religieux de Clairvaux. Sur ce dernier point il était dans l’erreur. C’est dans le Specimen var. litterat. Brixiaitæ du savant cardinal Quirini, que nous avons puisé nos principaux renseignements sur la personne du moine-poète de Brescia (voy. les pages 279 à 284 de la seconde partie). Le cardinal ne parle point de la réimpression du Carmen encomiasticon S. Bernardi, par Mabillon. B—l—u.


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