Anthologie des poètes français contemporains/Cladel Léon

Anthologie des poètes français contemporains, Texte établi par Gérard WalchCh. Delagrave, éditeur ; A.-W. Sijthoff, éditeurTome premier (p. 420-422).







Bibliographie. — Les Martyrs ridicules, avec une préface de Baudelaire (1862) ; — Le Bouscassié, nouvelles (1869) ; — La Fête votive de Saint-Bartholomé-Porte-Glaive (1872) ; — Les Va-Nu-Pieds (1873) ; — L’Homme de la Croix-aux-Bœufs (1878) ; — Mon Ami le sergent de ville (1878) ; — Bonshommes (1879) ; — Ompdrailles ou le Tombeau des lutteurs (1879) ; — Par-devant notaire (1880) ; — Crète-Rouge (1880) ; — Eaux-Fortes (1881) ; — L’Amour romantique (1882) ; — N’a qu’un Œil (1881) ; — Le Deuxième Mystère de l’Incarnation (1883) ; — Kerkadec, garde-barrière (1883) ; — Urbains et Ruraux, suite des Va-Nu-Pieds (1884) ; — Petits Cahiers (1885) ; — Celui de la Croix-aux-Bœufs, réédition (1885) ; — Héros et Pantins (1885) ; — Mi-Diable (1885) ; — Léon Cladel et sa Kyrielle de chiens (1885) ; — Titi Foyssac IV (1886) ; — Gueux de marque (1887) ; — Effigies d’inconnus (1887) ; — Raca (1888) ; — Seize Morceaux de littérature (1889).

Léon Cladel a collaboré au Parnasse et à de nombreux journaux et revues.

Léon Cladel, né en 1835 à Montauban, en Quercy, mort en 1892, à Paris, fut surtout un romancier. Il vint de bonne heure à Paris et s’y lia avec les Parnassiens.

Après avoir publié quelques recueils de nouvelles fantasques, un retour qu’il fit dans le Quercy le révéla à lui-même. En revoyant le pays où s’était écoulée son enfance, Cladel retrouva son âme d’autrefois. Dès lors, le raffiné redevint un rustique ; il n’écrivit plus que des romans campagnards, genre où il s’illustra.

Ce qui lui reste cependant de son commerce avec les Parnassiens, c’est le culte de la forme. Il s’applique sans cesse a donner à sa prose du relief, à la rendre harmonieuse, à la rythmer. « Ses recherches quotidiennes de rythme et de facture, dit fort justement M. Anatole France, devaient le conduire à tenter d’écrire en vers. Il l’a fait rarement, mais toujours avec un bonheur presque complet et qui lui était bien dû, car Léon Cladel fut peut-être le plus infatigable de tous les ouvriers en style. »


MON ÂNE


Il avait sur l’échine une croix pour blason !
Poussif, galeux, arqué, chauve et la dent pourrie,
Squelette, on le traînait, hélas ! à la voirie ;
Je l’achetai cent sous : il loge en ma maison.

Sa langue avec amour épile ma prairie,
Et son œil réfléchit les arbres, le gazon,
La broussaille et les feux sanglants de l’horizon ;
Sa croupe maintenant n’est plus endolorie.

À mon approche, il a des rires d’ouragans,
Il chante, il danse, il dit des mots extravagants
Et me tend ses naseaux imprégnés de lavande.

Mon âne, sois tranquille, erre et dors, mange et bois,
Et vis joyeux parmi mes prés, parmi mes bois,
Va, je te comblerai d’honneurs et de provende !