Anthélia Mélincourt/La Musique et la Discorde

Traduction par Mlle Al. de L**, traducteur des Frères hongrois.
Béchet (1p. 195-197).


LA MUSIQUE ET LA DISCORDE.


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Les soirées devenues plus longues, annonçaient l’approche de l’hiver ; un grand feu était allumé dans la bibliothèque, où le café fut servi. Sir Forester profita de la circonstance pour déclamer contre l’usage du sucre ; il eut le plaisir de voir qu’Anthélia pensait, à cetl égard, comme lui. Il parla aussi du projet qu’il avait de donner une fête aux membres de la société qui ne faisaient pas usage des denrées coloniales ; il y invita toute la société de Mélincourt ; il observa, pour aller au devant des scrupules, que sa tante, miss Evergrun, serait à l’abbaye, et inviterait les dames dans les formes ordinaires ; il ajouta, que s’il pouvait obtenir les suffrages de quelques ladys à la mode, la nouvelle société aurait fait un grand pas.

Le révérend Grovelgrub se sentit indigné des propositions de M. Forester ; qu’un ennemi réel du commerce des noirs, par des sentimens de morale, se priva des commodités que l’esclavage procure, cela pouvait se concevoir ; mais quand il entendit que la nécessité de ces privations serait démontrée dans un festin, il crut le cerveau de sir Forester, totalement dérangé ; il se détermina néanmoins à suspendre son jugement, jusqu’au moment où il aurait pu apprécier les argumens nouveaux, qui seraient mis en avant dans cette occasion.

L’écuyer O’scarum pressa, comme à son ordinaire, pour qu’on fit de la musique ; Anlhélia chanta, par complaisance, une romance dont les paroles tendaient à établir une comparaison entre l’amour et la rose. Nous nous dispensons d’en rapporter le texte, l’idée, ayant été ressassée par tous les faiseurs de romances.

— J’en suis fâché, dit sir Berrydown ; mais la fleur d’amour moderne, n’est ni la rose, ni l’immortelle, mais bien le bouton d’or. Si miss Danaretta et l’écuyer Oscarum veulent se joindre à moi pour chanter ; nous vous donnerons une ballade à trois, plus conforme à la vérité des choses. Les personnes qu’il avait interpelées ayant accepté son invitation, ils chantèrent le trio suivant :