Annales de pomologie belge et étrangère/du Coignassier

du Coignassier

Cydonia. (Linné).


Genre de la famille des Rosacées et dont les caractères sont : un calice monophylle à cinq divisions profondes, concaves, persistantes, grandes et denticulées ; corolle à cinq pétales grands, presque ronds, concaves, insérés sur le calice ; environ vingt étamines à filaments subulés, à anthères simples ; ovaire infère ou adhérent au calice ; cinq styles filiformes à stigmate simple ; fruit pyriforme, tomenteux, charnu, divisé en cinq loges contenant chacune un grand nombre de semences calleuses.

Le Coignassier est originaire des parties méridionales de l’Europe et notamment de Cydon, dont lui vient son nom latin Cydonia. (Cydon est aujourd’hui Candie dans l’île de Crète.) Il passa en Grèce, d’où les Romains l’introduisirent en Italie ; il est maintenant connu dans presque toute l’Europe.

Ce qui le distingue des genres pommier et poirier, auxquels Linné l’avait réuni, c’est le nombre de semences que contiennent ses loges et le duvet qui recouvre ses fruits.

Le genre Coignassier ne contient encore que trois espèces : 1o le Coignassier commun ; 2o le Coignassier de Portugal ; 3o le Coignassier de la Chine. Du premier sont nées deux variétés dites Coing-poire et Coing-pomme. Le Coignassier de Portugal a une variété nommée Coignassier d’Angers.

C’est un petit arbre rameux, diffus, dont la tête s’arrondit naturellement. Les rameaux sont souples ; l’écorce est grise et se détache facilement. Les feuilles sont grandes, alternes, ovales, d’un vert-clair en dessus et recouvertes en dessous d’un duvet cotonneux plus ou moins abondant. Le pétiole, également tomenteux, est muni de deux stipules cotonneuses et caduques. Les fleurs sont solitaires, terminales, belles et d’un rose tendre. Les fruits, nommés coings, sont toujours cotonneux dans leur jeunesse, varient dans le volume et dans la forme ; ils prennent, à leur maturité, une teinte jaune d’or, et répandent une odeur particulière et très-forte, souvent insupportable ; ils mûrissent au commencement d’octobre et se conservent au delà du mois de novembre.

Le Coing a une saveur âcre particulière qui ne permet pas de le manger cru. Par la cuisson et l’addition du sucre, on en fait toutes sortes de préparations d’une saveur agréable, telles que des pâtes, des gelées, du cotignac, espèce de conserve très-estimée dans le midi de la France, des ratafias, etc. « Les pepins de coing contiennent une grande quantité de mucilage : aussi leur décoction sert-elle à préparer des collyres adoucissants. On fait avec 2 livres de suc de ce fruit et 3 livres et demie de sucre blanc, un sirop légèrement astringent, avec lequel on édulcore les boissons toniques que l’on prescrit contre les diarrhées chroniques[1]. »

La beauté et la couleur dorée des coings ont fait penser à plusieurs auteurs, qu’ils ont été les fameuses pommes du jardin des Hespérides ; et ce qui autorise à le croire, c’est qu’il est positif que les oranges étaient alors inconnues des Grecs. Les anciens, qui dédièrent ce fruit à Vénus, en avaient fait l’emblème de l’amour, du bonheur et de la fécondité. De là, l’usage, pour les jeunes mariés, de manger du coing avant d’entrer dans la couche nuptiale. Les temples de Chypre et de Paphos en étaient constamment décorés.

On multiplie le Coignassier de semis, de marcottes, de boutures et de greffe sur ses variétés, sur l’aubépine et sur le poirier. On sème peu, parce que ce moyen est long : cette circonstance est la seule cause du petit nombre de variétés qui existent. On préfère la multiplication par marcottes et boutures, parce qu’on perpétue ainsi les bonnes variétés.

Le principal usage du Coignassier est de recevoir la greffe des poiriers que l’on veut dresser en pyramide, en buisson et en espalier ; et l’on donne alors la préférence au Coignassier de Portugal. Le poirier fructifie plus tôt par ce moyen et donne généralement des fruits plus sucrés et plus savoureux que lorsqu’il est greffé sur sauvageon et même sur franc[2]. Toutes les variétés de poiriers ne réussissent cependant pas sur Coignassier, et il faut beaucoup de circonspection dans le choix de celles qu’on veut cultiver sur cette essence.

On taille fort peu le Coignassier, d’abord parce qu’il pousse très-irrégulièrement, et que, par cette raison, il est fort difficile de lui imposer une forme qui ait quelque régularité, et ensuite, parce que le fruit, se trouvant placé au sommet des rameaux, on ne peut le tailler sans supprimer sa récolte. On parvient toutefois à le dresser en espalier par l’ébourgeonnement à sec et par un palissage soigné. Nous ne conseillons pas de placer en espalier les diverses espèces et variétés de Coignassier, parce que la place qu’elles occuperaient peut être remplie avec avantage par d’autres arbres à fruits. Nous faisons toutefois une exception pour le Coignassier de la Chine, qui, sous notre climat, ne fructifie pas en plein-vent.

On peut élever le Coignassier sur tige pyramidale, c’est-à-dire en pyramide, sauf à abandonner celle-ci à elle-même pour en faire un haut-vent si l’on ne réussit pas. Mais, pour cela, on doit le traiter par l’éborgnage et l’ébourgeonnement, c’est-à-dire qu’il faut détruire les yeux et les bourgeons dont on prévoit l’inutilité. Tous les trois ans, on rabat, à la serpette, le bois qui ne fructifie plus, et l’on répare, le mieux possible, les défauts que l’arbre a contractés, au risque de perdre, cette année-là, la plus grande partie de la récolte. Quand il est en haut-vent ou en buisson, on se contente de le débarrasser du bois mort.

Le Coignassier n’est pas difficile sur la qualité du terrain ; toutes les terres lui conviennent, si elles ne sont pas absolument sablonneuses, siliceuses, crayeuses ou trop argileuses. Il est à remarquer toutefois que, quand il sert de sujet au poirier, il s’identifie avec la nature de ce dernier, et exige alors une terre meuble, très-substantielle, un peu humide et plutôt légère que forte.

  1. Hysten, Dictionnaire de Médecine, verbo Coignassier.
  2. On appelle sauvageon, le sujet provenu spontanément dans les bois, les haies, etc., de pepins ou de noyaux de fruits entièrement sauvages ; et franc, le sujet dérivé de pepins ou de noyaux de fruits à couteau, à cidre, ou adoucis par la culture.