Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 16/Analise transcendante, article 3

ANALISE TRANSCENDANTE.

Exposition des principes du calcul des variations[1] ;

Par M. Ampère, de l’Académie royale des sciences de Paris,
de celles d’Édimbourg, de Cambridge, de Genève, etc.,
professeur au Collége de France et à l’École polytechnique.
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§. I. Notions Générales.

I. Dans le calcul différentiel proprement dit, on ne fait varier, dans les fonctions qu’on y considère, que les seules variables c’est-à-dire, les coordonnées de certaines courbes ou surfaces déterminées, ce qui répond à des points déterminés de ces mêmes surfaces, pour lesquels on enseigne ce que signifient les différentielles de ces coordonnées ; et on y enseigne également à déterminer les différentielles de toutes sortes de fonctions.

Mais, dans une fonction telle, par exemple, que

rien n’empêche de faire varier les paramètres et dès lors on sort de la courbe où l’on était d’abord, pour passer à une autre courbe voisine de celle-là. On peut obtenir ainsi une infinité de nouvelles courbes, suivant les valeurs diverses qu’on attribuera à On rencontre déjà des exemples de pareils changemens dans la recherche des solutions particulières des équations différentielles, où l’on différentie les équations des courbes par rapport à leurs paramètres, afin que les nouveaux coefficiens différentiels ainsi obtenus donnent, en les égalant à zéro, les solutions particulières demandées.

Si on ne fait varier que les paramètres, dans une courbe

cette courbe se trouvera transportée, suivant ses ordonnées, de en (fig. 1). On peut alors chercher l’augmentation de l’ordonnée ou de qui est On peut aussi demander l’augmentation de d qui de est devenue l’augmentation du rayon de courbure, etc. On pourrait bien se contenter, pour les questions de géométrie, de faire varier les courbes de la sorte, en suivant les ordonnées ; mais ce point de vue n’est pas assez général pour les questions de mécanique. On suppose alors que tous les points d’une courbe se transportent sur une autre courbe, en décrivant eux-mêmes des courbes intermédiaires (fig. 2). Alors, en même temps qu’on fait varier les paramètres, on fait aussi varier l’abcisse. Ce sont les accroissemens que l’on donne, soit aux paramètres soit aux variables dépendantes, que l’on appelle leurs variations, et que l’on désigne par la caractéristique Par analogie avec les dénominations admises dans le calcul différentiel, nous appellerons variation de la fonction la quantité à laquelle se réduit son accroissement total, lorsqu’on en supprime les termes affectés des puissances supérieures de D’après cette définition, étant une fonction quelconque de de même qu’on a

on aura aussi

Il est inutile de mettre au lieu de parce que ces derniers rapports, étant indépendans des accroissemens donnés à restent les mêmes, quels que soient ces accroissemens.

La courbe sur laquelle on transporte la courbe n’a pas besoin d’être de même forme que celle-ci, pour qu’on puisse prendre sur elle les variations comme nous venons de le dire. En effet, on peut développer en séries les ordonnées de ces deux courbes, comme on le voit ici

pour la courbe

pour la courbe

Elles sont ainsi présentées sous la même forme, ayant un nombre infini de paramètres Or, ce que nous avons dit tout à l’heure, étant tout-à-fait indépendant du nombre des paramètres, rien n’empêche de supposer et par conséquent de regarder la courbe comme étant la variation de la première [2].

§. II. Construction des formules.

Soient on aura (fig. 2)

d’où l’on conclura

c’est-à-dire que la différentielle de la variation est égale à la variation de la différentielle.

Le même théorème a lieu pour les fonctions. En effet, soit

qui donne

Si nous appliquons à cette équation une variation, en nous rappelant que, d’après la définition de la variation, semblable à celle de la différentielle,

nous aurons

c’est-à-dire,

Mais, d’un autre côté

En différentiant cette dernière équation et observant que, puisque la différentielle se prend le long de la courbe, en ne faisant varier que et il s’ensuit que doivent ici être considérées comme des constantes, on aura

En comparant entre eux les développemens de et de en observant que, d’après ce qui a été prouvé ci-dessus,

et que d’ailleurs, parce que l’ordre des différentiations est indifférent,

on verra que ces deux développemens sont égaux, et qu’ainsi

On peut tirer de ceci une conclusion semblable, par rapport au signe d’intégration. Soit, en effet

d’où

donc

d’où, en intégrant

Ainsi, on peut intervertir l’ordre des signes et

La courbe ayant été transportée sur (fig. 3), de manière que les points et soient venus en et si nous menons les tangentes et aux courbes et il est clair, d’après la définition que nous avons donnée de qui est, du reste,

il est clair, disons nous, que puisque ce doit être la partie de qui ne contient pas les termes infiniment petits par rapport aux premiers. Mais, si l’on suppose que la position soit infiniment voisine de la position on aura, à la limite,

ou

donc

De même

sera, à la limite, la distance des deux courbes. Or, on sait déjà que

Nous représenterons désormais par cette quantité, dépendant seulement de la variation des paramètres ; quantité qui, lorsque les variations deviennent infiniment petites, représente, ainsi que nous venons de le voir, la distance entre les deux courbes. Nous aurons donc ainsi

c’est cet qui reste seul, quand on suppose et que les paramètres seuls varient.

Comme est une fonction de de même qu’on a établi

on peut poser aussi

Enfin si est une fonction de comme on peut toujours exprimer en fonction de seul, et par conséquent aussi ; on aura de même

représente la différentielle de par rapport aux non seulement en évidence, mais même contenus dans

Il existe des relations remarquables entre ces

Soit, en effet, comme ci-dessus

et

d’où

et

On entend par la dérivée de cette fonction de en n’y faisant varier que parce que

sont constantes, quand le sont. Ainsi

D’un autre côté, étant une fonction de on a

en se rappelant donc que

et qu’en outre

on trouve

On trouvera de même

. . . . . . . . .

d’où l’on voit que

[3]

Pour où les paramètres entrent implicitement, on a

mais, en désignant par les coefficiens différentiels de par rapport aux en évidence, on a

et il en résulte

Si nous substituons pour les valeurs précédemment obtenues, il en résultera

valeur qui, comparée à

fait voir que

La variation de savoir :

une fois trouvée, celle de l’intégrale est facile à en déduire. On sait en effet que

substituant pour la valeur que nous venons d’obtenir, on aura

Or, en premier lieu,

on trouve ensuite, en intégrant par parties,



réunissant alors tous ces termes, on aura finalement

§. III. Application aux questions de maxima et minima.

La dernière formule que nous venons d’obtenir sert à résoudre une des questions les plus importantes du calcul des variations, celle des maxima et minima. Une partie de cette question ressort du calcul différentiel ; mais cette partie est peu étendue ; elle ne comprend que le cas où l’on demande le maximum ou le minimum d’une fonction dans laquelle on ne fait varier que les variables courantes Ainsi, ce sera la détermination de l’ordonnée maximum ou minimum d’une certaine courbe ou d’une certaine surface. Mais si, dans une fonction, on fait varier les constantes ou paramètres, on peut se demander quelles sont les valeurs à leur attribuer, pour que la fonction jouisse d’une certaine propriété à un degré maximum ou minimum. Cette importante question a beaucoup occupé les géomètres du dernier siècle. Euler l’a résolue, en partie, dans un ouvrage ayant pour titre : Methodus inveniendi, etc.

Or, la série de Taylor donne, comme on sait, dans le cas de plusieurs variables, et conséquemment pour




ou bien

en désignant par la variation de par celle de et ainsi de suite.

Or, si est un maximum ou un minimum, on sait que doit être nul, puisqu’il ne contient que les premières puissances des variations et change conséquemment de signe avec elles. Au contraire n’en devra pas changer, puisqu’il contient ces variations à la seconde puissance.

Quand on demande le maximum ou le minimum d’une fonction, on ne peut souvent exprimer cette fonction que par des intégrales définies, entre les limites où la fonction doit avoir lieu. Il faut alors considérer le développement de la série de Taylor relatif à savoir :

S’il y a maximum ou minimum, il faut que Les valeurs de qui satisfont à cette condition, devront rendre, en outre, négatif dans le cas du maximum, et positif dans le cas du minimum.

Il est encore à remarquer que, si le maximum ou le minimum doit avoir lieu entre certaines limites, non seulement mais aussi

devront être pris entre ces limites. Or nous avons trouvé ci-dessus


et si nous nous rappelons que

il viendra, en substituant,



qu’il faudra prendre entre les limites données.

Il se présente ici plusieurs cas à examiner.

1.o Supposons d’abord que l’on donne, pour les deux limites, les valeurs de Alors, ces valeurs extrêmes étant fixes, leurs variations seront nulles, de sorte que l’équation à laquelle nous venons de parvenir se réduira simplement à

Or, on ne peut supposer parce que, sous le signe c’est le courant, et qu’il ne peut être nul qu’aux limites ; il faut donc que

(A)

de sorte que cette équation sera l’équation différentielle du maximum ou du minimum cherché. Mais si

contient un coefficient différentiel de l’ordre il est clair que cette équation sera de l’ordre de sorte qu’en l’intégrant elle donnera constantes arbitraires ; or ; comme aux deux limites il faut qu’elle reproduise [4] en nombre on aura relations pour déterminer les constantes arbitraires introduites par l’intégration ; et on le pourra aisément.

2.o Supposons qu’on ne donne que les deux limites sans assigner, pour ces limites, les valeurs de Il faudra toujours, dans le développement de égaler séparément à zéro la partie contenue sous le signe et la partie en avant de ce signe. En effet, supposons que nous ayons trouvé la courbe qui satisfait au maximum ou au minimum, entre les deux points donnés, et prenons, pour les points limites, les valeurs de cherchons ensuite la courbe qui satisfait au maximum ou au minimum, pour ces valeurs fixes de il est manifeste que nous devrons retomber de nouveau sur la courbe dont il s’agit ; or, en fixant tout aussi bien que il faut, comme nous l’avons vu ci-dessus, que l’on ait l’équation (A) ; donc, cette équation devra encore avoir lieu, lorsqu’on ne fixera pas [5]. Comme ces quantités sont indépendantes entre elles, pour que la première partie de soit nulle, il faudra égaler séparément à zéro les coefficiens

de de

de de

de de
,  ;

Les équations résultantes ne seront qu’au nombre de parce que le du dernier coefficient différentiel manque dans la première partie de comme le fait voir bien évidemment la forme des coefficiens de Par exemple, s’il n’y a que cinq coefficiens différentiels la première partie de finira par et ne contiendra point Mais il faut qu’aux deux limites l’intégrale de l’équation donne pour ou ou Cela fournira deux nouvelles relations qui, jointes aux dont il vient d’être question, compléteront le nombre total de celles qui seront nécessaires pour la détermination des constantes arbitraires introduites par l’intégration de (A).

Il est presque superflu d’observer que, si quelques-unes seulement des quantités étaient données, il n’y aurait à égaler à zéro que les coefficiens des non donnés. Les autres relations nécessaires pour déterminer les constantes arbitraires de l’intégrale de (A), seraient fournies par celles des quantités dont les valeurs seraient connues.

Nous remettons à traiter plus tard du cas où les limites ne seraient pas invariablement fixées, mais assujetties seulement à la condition de se trouver sur deux lieux géométriques donnés ; et nous nous occuperons, pour le présent, des cas où l’équation (A) est susceptible de quelques simplifications.

§. IV, Simplifications du procédé général.

Il est de cas où l’équation

(A)

peut être simplifiée.

1.o Quand ne contient pas on a et par suite

ce qui donne, en multipliant par et intégrant,

(C)

équation de l’ordre Si en outre manquait dans l’équation pourrait, par un procédé analogue, être amenée à l’ordre et ainsi de suite.

2.o Quand ne contient pas et que l’on a conséquemment

et par suite

Si nous substituons ici la valeur de tirée de l’équation (A), qui est

nous aurons

multipliant par et observant que

il viendra

et par conséquent

Or, en intégrant par parties, on trouve

ce qui donne, en subtituant,

(D)

qui n’est plus que de l’ordre

3.o Quand ne contient ni ni on peut abaisser l’équation (A), qu’on appelle quelquefois l’équation indéfinie, parce que son intégrale donne l’équation du maximum ou du minimum, avec des constantes arbitraires. On a alors, à la fois,

l’équation indéfinie se réduit donc à

et donne, en intégrant

puis, en substituant

et ensuite, en multipliant par et intégrant,

mais, nous avons trouvé ci-dessus, en intégrant par parties

il viendra donc, en substituant,

(E)

équation qui ne s’élève qu’à l’ordre seulement, et qu’on pourrait abaisser encore si était nul.

§. V. Applications diverses.

Soit proposé d’assigner la courbe, joignant deux points donnés, dont la révolution autour de l’axe des engendre une surface minimum ?

La surface de révolution considérée comme indéfinie, étant exprimée par il faudra qu’on ait

on a donc ici

et les quantités sont toutes nulles. Puis donc que n’entre pas dans on peut faire usage de l’équation (D), qui est simplement ici

et qui devient, par les substitutions,

ou encore

d’où on tire

et par suite

ce qui donne, en intégrant

Il resterait à déterminer et par la condition que la courbe passe par les deux points donnés ; mais leur détermination ne peut avoir lieu, parce qu’elle entraînerait la résolution d’une équation exponentielle.

Toutefois, on peut reconnaître quelle est la nature de cette courbe. En effet, il est visible que ne saurait être moindre que de manière que est l’ordonnée minimum. Si donc nous prenons cette ordonnée pour axe des il faudra qu’en posant on trouve d’où donc

donc aussi

ou

cela donne


d’où en ajoutant,

équation que l’on reconnaît pour celle d’une chaînette dont l’axe principal est celui autour duquel la révolution s’exécute[6].

Soit proposé, en second lieu, de trouver la courbe pour laquelle l’aire comprise entre un arc, les deux normales extrêmes et l’arc correspondant de la développée soit un maximum ?

Soit l’aire dont il s’agit, et le rayon de courbure ; on aura

d’où

de sorte qu’il faudra poser

on aura donc ici

seront nuls ; et comme ni ni n’entrent dans nous pourrons faire usage de l’équation (E) qui se réduira à

et deviendra, par les substitutions,

Il faudra intégrer cette dernière équation, et déterminer les quatre constantes arbitraires, en exprimant que la courbe passe par les deux points limites, et qu’en ces deux points et sont nuls.

Mais si l’on veut seulement savoir quelle est la nature de la courbe, on remarquera que, désignant toujours le rayon de courbure, son équation différentielle revient à

ce qui donne successivement

c’est-à-dire,

d’où, en intégrant et transformant les constantes,

(1)

On peut faire disparaître ces constantes, en choisissant les axes d’une manière convenable. On peut d’abord porter l’origine au point pour lequel le rayon de courbure est nul. En désignant alors par les coordonnées de ce point, on aura

(2)

Nous pourrons ensuite faire tourner le système des axes autour de la nouvelle origine Les formules générales de cette transformation étant, comme l’on sait

on trouvera, en substituant dans (1) et ayant égard à la relation (2)

L’angle étant arbitraire, on pourra en disposer de manière que

il en résultera

on aura conséquemment

ou, en transformant les constantes

Soient faits

d’où

il en résultera

et

d’où, en intégrant,

équation qui appartient à une cycloïde engendrée par un cercle dont le diamètre est égal à

Souvent la courbe qui doit donner le maximum ou le minimum est assujettie à certaines conditions de constance, comme d’être d’une longueur donnée, de produire une aire de révolution de grandeur donnée, etc. On exprime ces conditions en écrivant que les variations des expressions des fonctions qui doivent demeurer constantes sont nulles. Ainsi, soient les conditions

en nombre quelconque, on écrira

Soit, du reste,

la condition du maximum ou du minimum.

Il est clair que, si une fonction a un maximum ou un minimum, elle en aura encore un si on lui ajoute des quantités constantes ; puis donc que sont constantes, il en sera de même de représentant des constantes indéterminées ; donc on devra avoir

Nous pourrons traiter comme nous avons traité dans ce qui précède, et nous trouverons ainsi le maximum ou le minimum cherché, avec les conditions auxquelles il doit satisfaire. Mais, une fois parvenus à l’équation indéfinie, il faudra la déterminer de manière à satisfaire non seulement aux conditions que nous avons indiquées, en traitant du maximum et du minimum de mais encore aux conditions et c’est à quoi serviront les constantes Il était nécessaire de les introduire, pour n’avoir pas moins de quantités à déterminer que de conditions à remplir. Du reste, nous aurons ici autant de conditions qu’il en faudra pour en assigner les valeurs.

Soit, par exemple, à trouver, parmi toutes les courbes isopérimètres, celle qui à la plus grande aire.

On a, en général, pour la courbe de plus grande aire.

Si est la longueur donnée, on aura, en outre

nous poserons donc

nous aurons ainsi

et tous les coefficiens ultérieurs seront nuls. L’équation (D) qui est celle qui convient au cas actuel, et qui se réduit à

deviendra, en substituant

ou bien

d’où

et, par suite

ce qui donne, en intégrant

c’est-à-dire

équation du cercle. Il restera à déterminer les constantes par les conditions que l’arc se termine à deux points donnés, et que sa longueur entre ces deux points soit égale à

Il est à remarquer qu’ayant dû poser ici

ce sont aussi les mêmes équations que nous aurions posées s’il avait été question d’assigner, parmi les arcs de courbes qui comprennent une aire donnée, celui de moindre longueur ; de sorte que le cercle doit résoudre, à la fois, les deux problèmes. Il est clair, en effet, que si, à longueur égale, le cercle embrasse la plus grande aire, il s’ensuit qu’il contient le plus de surface sous le moindre développement possible ; et, par suite, à aire égale, il aura la moindre longueur.

Proposons-nous encore d’assigner, parmi les courbes isopérimètres, celle qui engendre l’aire de révolution minimum ?

Nous aurons ici l’équation

En faisant

d’où ou

notre équation deviendra

équation que nous avons déjà traitée ci-dessus, et qui nous a conduit à l’équation de la chainette ; c’est donc encore cette courbe qui résout ce dernier problème. Il arrive seulement ici que son axe principal se trouve à la distance de l’axe de révolution. Du reste, la constante ainsi que les autres qu’introduira l’intégration de l’équation indéfinie, provenant de se détermineront comme dans l’exemple qui précède celui-ci.

§. VI. Application aux fonctions de trois variables.

Si, dans l’équation

contenait, outre et une troisième variable, liée aux deux premières par une équation de relation, on l’exprimerait au moyen de celles-ci, et on ramènerait à ne plus contenir ainsi que

Qu’il soit question, par exemple, de trouver la courbe la moins longue que l’on puisse tracer sur un cylindre, entre deux points de sa surface. En prenant l’axe du cylindre pour axe des et désignant par son rayon, l’équation de sa surface sera

d’où

On aura ensuite, pour la longueur de l’arc

de sorte que la condition du minimum sera

On aura donc ici

Comme manque dans nous pourrons prendre pour équation indéfinie l’équation (C) qui, dans le cas actuel, est simplement c’est-à-dire, en substituant,

d’où

ce qui donne, en intégrant,

Si l’on prend l’une des extrémités de l’arc dans le plan des à une distance de l’axe des on devra avoir, en même temps, en mettant donc simplement pour on aura

dans laquelle se déterminera en fixant la situation de l’autre extrémité de l’arc demandé.

L’équation que nous venons d’obtenir est celle d’une hélice ; et c’est ce qu’il était facile de prévoir à l’avance. La plus courte ligne qu’on puisse tracer sur un cylindre, entre deux points de sa surface, doit être telle, en effet, qu’elle demeure encore la plus courte, en développant la surface de ce cylindre sur un plan ; il faut donc que, par l’effet du développement de cette surface, elle devienne une ligne droite, ce qui est la propriété caractéristique de l’hélice.

§. VII. Examen du cas des limites variables.

Nous avons vu, dans ce qui précède, comment, quand on fixe les deux limites entre lesquelles le maximum ou le minimum doit avoir lieu, on peut déterminer les constantes qu’introduit, en général, l’intégration de l’équation indéfinie

On pourrait ne pas donner proprement les deux limites, mais seulement les assujettir à la condition de se trouver sur deux courbes données. Il y aura alors inconnues à déterminer, savoir, les constantes introduites par l’intégration de l’équation indéfinie, et les quatre coordonnées des deux extrémités de la courbe cherchée. Or ici les ne sont plus nulles ; mais, puisqu’elles ont lieu le long des courbes données, ce sont les différentielles des coordonnées de ces courbes. En prenant donc les différentielles de leurs équations, nous pourrons exprimer et respectivement, en fonction de et En faisant la substitution de leurs valeurs dans la première partie du développement de il s’y trouvera variations dont nous pourrons séparément égaler les coefficiens à zéro. Ensuite, devront satisfaire aux deux courbes données, ce qui fournira deux relations ; ils devront enfin satisfaire à la courbe trouvée, ce qui en fournira deux autres ; de sorte qu’on aura en tout conditions pour déterminer les inconnues.

Supposons, par exemple, que l’on demande une courbe, qui se terminant à deux hyperboles équilatères

produise une aire de révolution maximum autour de l’axe des On posera toujours

ce qui donnera, en opérant comme ci-dessus

Pour déterminer les deux constantes ainsi que les points extrêmes de la courbe, c’est-à-dire, pour déterminer les six inconnues nous écrirons les premiers termes du développement de qui sont ici

Or, la différentiation des équations des deux hyperboles donne

en substituant donc, il viendra

Il faudra donc poser

et comme d’ailleurs

cela reviendra à

équations qui expriment qu’aux points limites la chainette génératrice doit être normale aux deux hyperboles données.

En remplaçant, dans ces équations et par leurs valeurs, déduites de l’équation de la chainette ; savoir

elles deviennent

On a d’ailleurs


on se trouve donc avoir six équations, pour déterminer

Si la courbe qui doit satisfaire au maximum ou au minimum était assujettie à des conditions de constance, comme d’avoir une aire, une longueur, etc., déterminée, il serait facile d’opérer comme il a déjà été dit.

Si cependant ces conditions, au lieu d’être exprimées par des intégrales, l’étaient par des équations algébriques ; si, par exemple, au lieu de donner on donnait on remplacerait d’abord et par leurs valeurs en et ce qui donnerait d’où Remplaçant donc par cette valeur, on n’aurait plus que le coefficient de à égaler à zéro, ce qui ne laisserait plus que relations ; mais celle qui aurait disparu se trouverait alors suppléée par l’équation donnée C’est ainsi, par exemple, qu’on en agirait, si la chaînette qui doit se terminer aux deux hyperboles était assujettie à avoir une corde d’une longueur donnée. L’équation de condition serait ainsi

  1. Cette exposition a été rédigée par l’auteur, pour son cours d’analise à l’École polytechnique. On peut aussi consulter, sur le même sujet, un mémoire inséré au commencement du XIII.e volume du présent recueil.
    J. D. G.
  2. Il est bien essentiel de remarquer que les courbes pour lesquelles il s’agit de prouver que l’une peut être considérée comme la variation de l’autre, sont des courbes individuelles, c’est-à-dire, à paramètres invariables ou numériques. Il est bien clair alors que les coefficiens du développement, par la suite de Maclaurin, doivent être regardés comme indépendans les uns des autres, puisque ces sont numériques. Si l’on pouvait donner diverses valeurs aux paramètres des deux courbes que nous considérons, les coefficiens du développement dépendraient les uns des autres, et on ne pourrait plus regarder les coefficiens du second développement comme résultant de la variation de ceux du premier.
  3. Il est essentiel de remarquer que étant de nouvelles valeurs de sont constantes, dans les différentiations relatives à et que parce que, dans les différentiations relatives à les quantités sont, dans la fonction, et dans ses dérivées, des variables indépendantes, pour lesquelles les différentielles marquées par sont la même chose que les différences entières représentées par
  4. On ne donne que coefficiens différentiels s’il doit y en avoir dans l’équation indéfinie ; parce que les conditions de et lorsque et fournissent des relations restantes, le cas où l’on donnerait coefficiens différentiels ou plus n’a pas encore été traité.
  5. M. Ampère est ici le premier qui ait expliqué nettement pourquoi, dans tous les cas, la quantité sous le signe que contient l’équation commune au maximum et au minimum doit être séparément nulle. C’est le seul point sur lequel notre mémoire du tom. XIII, déjà cité, nous avait semblé vulnérable.
    J. D. G.
  6. Voyez Annales, tom. 1, pag. 58.
    J. D. G.