Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 15/Géométrie transcendante, article 7

GÉOMÉTRIE.

Réclamation relative à l’article de la page 257
du présent volume ;

Par l’Auteur de l’article de la page 132, du tome XIII.e
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À Monsieur le Rédacteur des Annales ;
Monsieur,

J’ai lu, dans le numéro des Annales de février 1825, les réflexions d’un anonyme sur la propriété de minimum dont jouit la surface de la sphère, entre celles de tous les corps de même volume.

L’auteur (pag. 260) s’exprime ainsi : « or, en appliquant littéralement le raisonnement que l’auteur de la démonstration dont il s’agit applique à la surface de la sphère, on serait conduit à conclure que la surface minimum doit être telle, dans tous les cas, que les plans tangens aux deux extrémités de l’une, quelconque de ses cordes et le plan perpendiculaire sur son milieu, se coupent tous trois suivant une même droite ».

L’objection de l’auteur des réflexions serait concluante, si l’on cherchait à appliquer les propriétés du tronc de prisme triangulaire isocèle au corps qu’il considère, et dont une section est une ellipse ; mais il est évident que les propriétés de ce tronc de prisme ne sauraient être susceptibles d’une telle application, puisque ses faces latérales sont des trapèzes isocèles qui ne sauraient être inscrits à une ellipse qu’autant que ses arêtes latérales seraient parallèles à l’un des diamètres principaux de cette courbe ; l’objection tombe donc d’elle-même, toutes les fois que la base donnée est différente d’un cercle ; puisque le cercle est la seule figure plane à laquelle on puisse inscrire un trapèze isocèle dans toutes sortes de directions. On voit en même temps que le corps de volume donné dont la surface est minimum doit avoir toutes ses sections planes circulaires ou n’en doit avoir aucune ; et il n’en faut pas davantage pour prouver, sans calcul, que, lorsque sa base plane est une ligne du second ordre, différente du cercle, sa surface ne saurait être une surface du second ordre ; puisqu’une telle surface peut toujours être coupée circulairement par des plans, dans deux directions différentes.

Je partage d’ailleurs pleinement, Monsieur, l’opinion de l’auteur des réflexions, sur l’abus que l’on fait des notations fonctionnelles, et je pense comme lui qu’une question ne doit être réputée résolue qu’autant que ces symboles ont été éliminés des résultats obtenus.

J’ignore si vous avez appris la mort de M. Durrande, enlevé par une maladie de poitrine, dans la nuit du 6 au 7 de ce mois. C’est une véritable perte pour les sciences mathématiques qu’il cultivait avec tant de succès ; il peut même en être regardé comme le martyr ; car il ne cessait de s’en occuper, au milieu de ses souffrances ; ce qui, joint au trop de confiance qu’il accordait peut-être aux médecins, n’aura pas peu contribué à abréger ses jours[1].

Agréez, etc.

Marseille, le 22 février 1825.

  1. M. Durrande, âgé de moins de 28 ans, s’était formé absolument seul, dans une très-petite ville de la Guienne, où il n’avait d’autres secours que celui des livres. Il préparait un traité purement géométrique des surfaces du second ordre ; nous ignorons dans quel état il aura laissé cet ouvrage.
    J. D. G.