Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 14/Analise transcendante, article 9

ANALISE TRANSCENDANTE.

Essai sur une méthode propre à se délivrer des équations
étrangères que l’on peut rencontrer dans la recherche
des solutions particulières des équations différentielles
du premier ordre à deux variables ;

Par M. J. L. Woisard, répétiteur de mathématiques
à l’école d’artillerie de Metz.
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En cherchant, par les méthodes connues, les solutions particulières d’une équation différentielle à deux variables, on obtient souvent pour résultat des équations qui ne satisfont point aux conditions qu’on a en vue de remplir. Nous nous proposons ici d’examiner à quoi peut tenir l’introduction de ces résultats étrangers à la question qu’on se propose de résoudre, et de donner un procédé que nous croyons propre à les faire disparaître dans tous les cas.

Soit une équation différentielle entre deux variables, et que nous désignerons par et soit son intégrale complète, renfermant et et une constante arbitraire les solutions particulières de l’équation représenteront, comme l’on sait, les diverses enveloppes des lignes, en nombre infini, représentées par l’équation générale et que nous supposons rapportées à deux axes rectangulaires.

Un élément quelconque d’une enveloppée est commun à deux enveloppées consécutives ; et si, dans l’équation on remplace et par les coordonnées d’au point quelconque du plan des axes, les valeurs qu’on en pourra tirer pour feront connaître la direction des divers élémens d’enveloppées qui passent par ce point ; d’où il suit que, si le point dont il s’agit se trouve sur une enveloppe, deux de ces valeurs seront égales ; donc l’équation des enveloppes exprime la relation qui doit exister entre et pour que l’équation donne pour deux valeurs égales ; donc enfin, quand l’équation ne sera pas susceptible de plusieurs formes, par suite des exposans fractionnaires qui pourraient affecter quelques-uns de ses termes, on en obtiendra toutes les solutions particulières en éliminant p entre et [1].

Remarquons présentement qu’en exprimant que deux enveloppées se touchent en un point, nous n’avons pas exprimé encore toutes les conditions nécessaires pour que ce point appartienne à une enveloppe ; il faut de plus, pour cela, que ces deux enveloppées soient consécutives, c’est-à-dire qu’il faut qu’elles répondent à deux valeurs de la constante infiniment peu différentes. Donc notre procédé ne doit pas seulement nous donner les enveloppes cherchées, mais encore toutes les lignes qui passent par les divers points de contact que peuvent avoir entre elles les courbes non consécutives comprises dans l’équation générale

Soit, par exemple, l’équation

en cherchant ses solutions particulières, par le procédé qui vient d’être indiqué, on parvient aux trois résultats distincts,

Mais si, d’un autre côté, on intègre l’équation différentielle proposée, on reconnaîtra aisément que son intégrale appartient à une suite de cercles égaux, dont les centres sont situés sur la droite qui divise en deux parties égales l’angle des coordonnées positives ; et on reconnaîtra ainsi que ces cercles doivent simplement avoir de enveloppes rectilignes, données par les équations

mais si l’on considère deux de ces cercles tellement situés que la distance de leurs centres soit égale à leur diamètre commun, ces cercles, bien que non consécutifs, auront un point de contact sur la droite donnée par l’équation

laquelle contient ainsi les points de contact des cercles non consécutifs ; il n’est donc pas surprenant d’après cela que notre procédé, qui était de nature à nous donner le lieu des points de contact de toutes les sortes, nous ait conduit non seulement aux deux enveloppes, mais encore à la droite qui contient les centres de tous les cercles.

Afin donc de pouvoir discerner, parmi les divers résultats auxquels on parvient, quels sont ceux qui expriment proprement des enveloppes, il ne s’agit que de découvrir quelque propriété de ces enveloppes qui leur appartiennent exclusivement, et voici celle dont l’emploi nous a paru le plus propre à remplir notre but. Menons à chacune des lignes représentées par l’intégrale une tangente parallèle à une droite fixe quelconque, et joignons tous les points de contact par une ligne ; l’équation de cette ligne ne sera autre chose (Annales, tom. XIII, pag. 333-343) que l’équation dans laquelle serait remplacé par la tangente tabulaire de l’angle que fait la droite fixe avec l’axe des Cela posé, les diverses transversales qu’on peut obtenir, en faisant varier la position de la droite directrice, sont tangentes aux enveloppes des lignes représentées par l’intégrale (Annales, ibid.), et par conséquent elles sont aussi tangentes aux enveloppées. Donc on peut obtenir tous les points de l’enveloppe, en cherchant, sur chaque transversale, l’élément qui se confond avec celui de la ligne qu’elle traverse. Mais si, dans l’équation on donne à une valeur particulière on aura l’équation de la ligne qui traverse les élémens qui font avec l’axe des un angle égal à donc les coordonnées de celui de ces élémens qui appartient à l’enveloppe sont déterminées par le système des équations

dans lesquelles serait remplacé par on obtiendra donc tous les points des diverses enveloppes, en éliminant entre ces deux équations, ou ce qui revient au même, en éliminant entre

Par exemple, pour avoir les solutions particulières de l’équation

on la différentiera par rapport à et ce qui donnera

puis, en remplaçant par

d’où Substituant ensuite cette valeur dans l’équation proposée, on trouvera

comme nous avons vu ci-dessus qu’on devait le trouver.

La méthode que nous venons d’exposer est propre à faire trouver toutes les solutions particulières ; mais elle peut aussi conduire à des équations étrangères ; car, en exprimant qu’une transversale est tangente à l’une des courbes représentées par l’équation intégrale on n’a pas exprimé que le point de contact était commun à deux courbes consécutives ; on peut donc obtenir des lignes qui ne soient point enveloppes, et entre autres on obtiendra toutes les intégrales dans lesquelles et ne passent pas le premier degré, puisque ces équations représentent des droites, et qu’une droite se confond avec sa transversale dans toute son étendue.

Mais généralement les équations étrangères introduites dans le résultat final par la seconde méthode seront différentes de celles qu’introduit la première ; de sorte qu’il deviendra extrêmement probable qu’une équation donnée par l’une et par l’autre répondra à une véritable solution particulière de l’équation différentielle proposée. Voici donc très-probablement le procédé qu’il faut suivre pour n’obtenir que de telles solutions :

« L’équation différentielle proposée étant éliminez entre et éliminez pareillement entre et et, si et sont les résultats de ces éliminations, le plus grand commun diviseur entre et égalé à zéro, donnera, sans complication de facteurs étrangers, les solutions particulières de l’équation proposée ».

  1. Cette manière de déterminer les enveloppes nous semble plus simple que celle à laquelle nous nous étions précédemment arrêtés (Annales, tom. XIII, pag. 333-343) ; elle conduira d’ailleurs aux mêmes conséquences pour tout ce qui tient à la recherche des solutions particulières dans lesquelles et ne passent pas le premier degré. Pour y parvenir, il suffira d’observer que les transversales que nous ayons employées à l’endroit cité ne peuvent en même temps être enveloppes qu’autant qu’elles sont toutes droites.

    Les solutions particulières fonctions de seul sont comprises dans la même théorie elles répondent à deux valeurs de infinies et égales entre elles, c’est-à-dire, dont le quotient a l’unité pour limite.