Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 04/Géométrie transcendante, article 2

Texte établi par Joseph Diez Gergonne (4p. 187-195).
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Tentatives et réflexions relatives au problème proposé
à la page 352 du troisième volume de ce recueil ;
Par M. Kramp, professeur, doyen de la faculté des
sciences de l’académie de Strasbourg.
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Le problème proposé à la page 352 du troisième volume des Annales revient évidemment à celui où il s’agirait de déterminer l’angle au sommet d’une pyramide ou d’un cône donne, à base quelconque. C’est aussi sous ce point de vue que je me propose de l’envisager, dans ce qui va suivre.

1. L’angle au sommet de tout corps pyramidal a pour mesure naturelle de sa capacité le polygone sphérique décrit de son sommet comme centre, avec un rayon arbitraire, dans toutes les faces qui le comprennent ; et le rapport de la surface de ce polygone à celle de la sphère entière, ou bien à la huitième partie de cette sphère, connue sous le nom de triangle sphérique tri-rectangle, et que, dans mes Élémens de géométrie, j’ai désigné par le nom d’orthoèdre.

2. Désignant par la somme des angles externes d’un polygone sphérique quelconque, la surface de ce polygone sera égale à l’angle droit étant l’unité des angles linéaires, de même que l’orthoèdre est celui des angles solides. Ainsi l’angle droit sera à comme l’orthoèdre est à la surface du polygone sphérique.

3. La figure 4 désigne la surface antérieure d’une pyramide, ayant pour base le polygone rectiligne Si du point comme centre, et avec un rayon arbitraire, on décrit, dans les faces de cette pyramide, le polygone sphérique la surface de ce dernier polygone exprimera la capacité de l’angle solide pyramidal dont le sommet est tandis que ses angles exprimeront les inclinaisons mutuelles de ses faces entre elles ; c’est ainsi que, par exemple, l’angle sphérique exprime l’angle plan[1] compris entre les deux faces triangulaires On le trouvera, lorsque l’on connaîtra tous les angles linéaires aux sommets de la base ; c’est ainsi qu’en désignant par l’angle par l’angle et par l’angle on aura le cosinus de l’angle plan ou

4. Mais, pour appliquer ces principes généraux aux conoïdes ; ayant pour base une courbe quelconque, rentrant en elle-même, il faut nécessairement réduire à des coordonnées rectangulaires la position des sommets de cette base, considérée comme polygone rectiligne d’un nombre de côtés fini. Soient donc (fig. 5) trois sommets consécutifs de cette base, que nous rapporterons à l’axe indéfini mené dans le plan de cette même base, par le pied de la perpendiculaire Nous désignerons par cette même hauteur  ; et, prenant le point pour origine des coordonnées, nous exprimerons par les coordonnées du premier sommet  ; par celles du second sommet  ; et par celles du troisième sommet  ; de manière que

Il en résultera

d’où l’on tire

Il faudra aussi se procurer les expressions des sinus des deux premiers et de ces angles. On aura, après les réductions nécessaires,

Le produit exprime le double de la surface du triangle  ; d’où il suit que cette surface aura pour expression

5. Le cosinus de l’angle plan qui exprime l’inclinaison mutuelle des deux faces triangulaires et ayant pour son sommet linéaire l’arête pyramidal est exprimé comme il suit :

Après les substitutions, et les réductions, en assez grand nombre ; qui se présentent, cette expression devient

On trouve ensuite, pour le sinus du même angle,

d’où il résulte enfin

et telle est la tangente de l’angle plan, compris entre les deux faces triangulaires contiguës

6. Pour passer du polygone rectiligne au cas d’une courbe continue, prenons sur son périmètre les trois points à des distances infiniment petites l’une de l’autre ; et, en continuant de désigner par les lettres les deux coordonnées du point intermédiaire nous aurons respectivement pour les coordonnées du point suivant  ; tandis que seront, respectivement, les expressions complètes des coordonnées du point précédent Comme, dans le problème que nous nous proposons, il suffira de nous arrêter aux secondes différentielles, nous aurons

En faisant ces substitutions, dans l’expression ci-dessus, nous aurons pour la différentielle de la somme des angles extérieurs, différentielle que nous représenterons conséquemment par et de laquelle dépend la solution de notre problème, l’expression suivante

7. Si nous désignons, en outre, par la portion de la surface convexe de ce corps conique ; comprise entre les deux arêtes nous aurons

d’où

L’expression de est donc beaucoup plus compliquée que celle de  ; et, comme cette dernière n’est intégrable que dans un nombre de cas très-borné, desquels celui du cône oblique, à base circulaire, est formellement exclu ; on voit que l’on doit encore moins se flatter d’une solution complète du problème qui concerne la capacité des angles au sommet.

8. À la place des coordonnées rectangulaires et essayons de substituer le rayon vecteur et l’angle qu’il fait avec l’axe des ce qui donne . On trouvera ainsi

et si l’on fait constant, d’où on aura

9. Prenons pour premier exemple le cône droit ayant pour centre de sa base, et pour rayon de cette base. Ici on aura  ; la différentielle de la surface conoïdique deviendra donc

ayant pour intégrale

ce qui donne, pour la surface entière du cône . Faisant, pour abréger, le côté du cône ou on aura et Ainsi, la somme des angles extérieurs, pour le cône entier, étant d’après cela la capacité de l’angle au sommet deviendra On aura donc la proportion : l’angle droit, ou est à comme l’orthoèdre est à la capacité de l’angle qu’on cherche, lequel, par conséquent, sera égal à l’orthoèdre multiplié par Effectivement, l’angle en question occupe, sur la surface d’une sphère du rayon une calotte sphérique de la hauteur dont la surface sera, par conséquent, d’un autre côté, l’orthoèdre, égal au huitième de cette sphère, sera divisant donc la première expression par la seconde, on aura la fraction que le précédent calcul nous a fait obtenir.

10. On sait que la surface du cône oblique se refuse à tous les moyens connus d’intégration. On peut en conclure, à plus forte raison, que la capacité de son angle au sommet se trouvera hors du domaine de l’analise actuelle. Soit (fig. 6) la hauteur d’un tel cône, ayant pour base le cercle décrit du centre avec le rayon  ; soient, de plus, ce qui nous fournit l’équation On aura, d’après cela

différentielle qui n’est intégrable dans aucun cas. On trouvera ensuite

D’après l’essai que j’en ai fait, cette différentielle m’a paru aussi peu intégrable que la précédente.

En faisant

et posant de plus, pour abréger

cette différentielle deviendra

formule qui n’est pas susceptible d’être intégrée.

11. L’une des courbes qui semblerait promettre des résultats plus favorables, c’est la développée de l’ellipse, comprise sous l’équation

[2]

il en résulte, en posant

La racine quarrée de cette formule est entièrement intégrable ; il en résulte que l’arc de la développée elliptique, pris depuis est

ce qui donne, pour la longueur du quart de cette développée,

cette courbe est donc rectifiable comme le sont les développées de toutes les courbes algébriques. Mais cet avantage est perdu, tant pour la surface que pour la capacité angulaire du cône dont elle est la base. Les différentielles dont dépendent ces deux problèmes sont aussi peu intégrables que dans le cas du cône oblique à base circulaire.

  1. Il est presque superflu d’observer que l’auteur emploie ici les anciennes démonstrations d’angles linéaires, plans et solides, correspondant aux dénominations nouvelles d’angles plans, dièdres et polyèdres.
    J. D. G.
  2. Dans cette équation et ne sont point les demi-axes, mais des troisièmes proportionnelles à ces demi-axes et à l’excentricité.
    J. D. G.