Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 04/Dynamique, article 3

DYNAMIQUE.

Solution nouvelle du problème de la Tractoire plane, et
éclaircissemens sur ce problème ;
Par M. Dubuat, professeur à l’école de l’artillerie et du
génie.
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Lettre de M. Français, professeur à l’école de l’artillerie
et du génie,
Au Rédacteur des Annales ;
Monsieur,

Si j’avais prévu que vous dussiez publier aussi prochainement la solution donnée par feu mon frère du problème de la Tractoire[1], je n’aurais pas omis la phrase suivante, qui vient immédiatement après l’équation

« Il faut faire attention que ces vitesses initiales ne sont pas celles qu’on a pu imprimer au mobile par quelque impulsion ; ce sont les résultats et de l’impulsion imprimée à et de l’action de sur  ; de sorte que, s’il n’y a point d’impulsion, elles sont dues uniquement à l’action de La vitesse n’est pas non plus due à la seule action de la force accélératrice mais à cette action modifiée par l’effet de l’impulsion donnée à  »

Cette phrase aurait servi à éclaircir l’espèce de paradoxe que vous trouvez dans cette équation de condition. Mais voici une note, sur le même objet, qui m’a été remise par mon collègue M. Dubuat ; elle explique complètement la signification de cette équation, et offre un très-bel exemple de la manière de déterminer les vitesses initiales dans les problèmes de mécanique. Vous penserez sans doute comme moi, Monsieur, qu’elle ne sera pas déplacée dans les Annales.

1. L’équation n’est autre chose que l’équation générale de condition dans laquelle on a mis pour les variables les valeurs qu’elles ont à l’origine du mouvement.

2. Or, l’équation générale signifie que les vitesses variables du point dans la direction des axes des coordonnées, sont telles que, si de la vitesse suivant l’axe des , on retranche la vitesse du point la vitesse restante forme, avec la vitesse suivant l’axe des une résultante perpendiculaire au rayon vecteur  ; d’où il suit que la vitesse du point considérée soit au commencement soit dans la suite du mouvement, peut toujours être décomposée en deux vitesses, l’une parallèle à l’axe des constante et égale à l’autre perpendiculaire au rayon vecteur, et dont la valeur peut être quelconque.

3. Donc, si la vitesse imprimée au point à l’origine du mouvement, n’est pas décomposable en deux vitesses suivant la même loi, cette vitesse n’est pas la vitesse initiale d’après laquelle il faut déterminer les constantes d’intégration.

4. Soit, à l’origine du mouvement, la vitesse imprimée au point et l’angle que fait sa direction avec l’axe des  : ses composantes sont dans le sens des et dans le sens des

La première composante est équivalente aux deux vitesses et dont la première subsiste seule, en vertu de l’équation de condition ; mais la vitesse n’est pas détruite en totalité : en la décomposant en deux vitesses, l’une suivant le rayon vecteur, et l’autre perpendiculaire à ce rayon ; celle-ci, dont l’expression est subsiste, tandis que l’autre est détruite.

La vitesse imprimée dans le sens des étant aussi décomposée en deux vitesses, l’une suivant le rayon vecteur, et l’autre perpendiculaire à ce rayon ; la seconde subsiste seule, et son expression est

5. La vitesse initiale, résultant de la vitesse imprimée , est donc composée d’une vitesse parallèle à l’axe des , et d’une vitesse perpendiculaire au rayon vecteur ; ce qui donne pour la composante de la vitesse initiale, suivant l’axe des

et pour la composante de la vitesse initiale suivant l’axe des

6. Mais voici une autre difficulté que présentent les équations (11) et (12).

Si l’on fait, dans la première ou dans la seconde, on a ce qui n’a pas de signification. Pour lever cette difficulté, je remarque qu’en vertu de l’équation de condition l’hypothèse donne et par conséquent ou

Soient d’abord Ces deux équations signifient que la vitesse initiale du point parallèle à l’axe des est nulle, et que sa vitesse initiale parallèle à l’axe des est et égale par conséquent à la vitesse du point dans le même sens ; les deux points et sont donc animés, à l’origine du mouvement, de vitesses égales et parallèles ; l’équation de condition laisse subsister ces deux vitesses dans le premier instant et dans toute la suite du mouvement. Le point décrit donc une droite parallèle à l’axe des , avec une vitesse constante et égale à  ; ce qui donne et

Soit, en second lieu, et Ces deux équations signifient que la vitesse initiale du point parallèlement aux est nulle, et que l’ordonnée du même point est aussi nulle, à l’origine du mouvement, sans rien déterminer sur la vitesse initiale parallèle aux Les deux points à l’origine du mouvement, sont donc sur l’axe des , et le point a une vitesse qui, en vertu de l’équation de condition, ne peut ni augmenter ni diminuer. Il est aisé de conclure de là que le système des deux points se mouvra, dans le premier instant et pendant toute la durée du mouvement, sur l’axe des avec une vitesse commune  ; c’est-à-dire, qu’on aura

Au surplus, le problème peut être résolu de la manière suivante :

7. Les équations de condition sont, en faisant le rayon vecteur =1,

celles du mouvement sont

étant une indéterminée. Soient et  ; en substituant ces valeurs dans les équations du mouvement, on trouve

et, en éliminant

doncet

En déterminant les constantes d’après la vitesse initiale faisant avecl’axe des un angle on a

Ces formules expriment que le point se meut autour du point d’un mouvement uniforme et continu, avec une vitesse

8. Si l’on suppose, comme ci-dessus, que la vitesse initiale du point parallèle à l’axe des est nulle, et que celle parallèle à l’axe des est on trouve, en faisant et  ; résultat conforme à celui du n.o 6. Si l’on suppose encore que la vitesse initiale du point parallèlement aux est nulle, et que l’ordonnée du même point est aussi nulle, à l’origine du mouvement ; on trouvera, en faisant conformément à ces hypothèses, comme ci-dessus.

Metz, le 25 avril 1814.
  1. Voyez la page 305 de ce volume.