Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 04/Astronomie, article 1

ASTRONOMIE.

Essai d’une nouvelle solution des principaux problèmes
d’astronomie ;
Par M. Kramp, professeur, doyen de la faculté des
sciences de l’académie de Strasbourg.
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1. Soient, le temps périodique d’une planète ; le demi-grand axe ; le demi-petit axe ; l’excentricité ; l’anomalie vraie ; l’anomalie de l’excentrique ; le temps, compté depuis l’aphélie ; ce qui donne pour l’anomalie moyenne. On parviendra de à et de là à moyennant les équations connues

2. PROBLÈME I. Connaissant le temps et par conséquent l’anomalie moyenne  ; on demande l’anomalie vraie exprimée par une série disposée selon les puissances ascendantes de l’excentricité , telle que  ; les coefficiens étant des fonctions de qui ne renferment point et qu’il s’agit de déterminer ?

À cet énoncé, on reconnaît le Problème de Kepler. Pour le résoudre, on a employé jusqu’ici la série Ici les coefficiens étaient des séries, ordonnées selon les puissances ascendantes de l’excentricité ; convergentes, à la vérité, mais pourtant infinies, et qui ne sont sommables dans aucun cas. Les coefficiens de la nôtre seront des expressions finies ; et elle se trouvera ainsi exempte du défaut de l’autre.

3. Solution. Le premier terme est ce que devient dans le cas de ce qui donne . Ainsi . Les autres coefficiens seront ce que deviennent, dans ce même cas de les coefficiens différentiels partiels pris en regardant comme la seule variable, et le temps comme exempt de différentiation. Cherchons d’abord l’équation différentielle complète entre et

4. De ou de

on tire en différentiant

En mettant à la place de et de leurs expressions en et en cette équation deviendra divisible par et fournira, après les réductions

L’autre équation

donne, après avoir été différentiée et réduite

Égalant entre elles les deux expressions de on aura une équation entre les trois différentielles , d’après laquelle

d’où il résulte

5. Considérant ici le temps et l’anomalie vraie comme les seules variables, on aura l’équation très-connue

d’où l’on pourrait tirer, sur-le-champ, l’anomalie vraie moyennant une série ordonnée d’après les sinus des angles multiples de l’anomalie moyenne. Mais, si l’on regarde comme la seule variable, et le temps comme exempt de différenciation, on aura d’abord

pour le premier de nos rapports différentiels partiels. Faisons ici on aura et Il en résulte  ; et tel est le coefficient du second terme de la série.

6. Pour faciliter les différentiations ultérieures, et les développemens qui, dès le troisième terme deviennent assez compliqués, faisons et  ; ce qui donne

Remarquons, de plus, que le rapport différentiel est constamment de la forme la lettre désignant une fonction entièrement algébrique, ordonnée selon les puissances ascendantes de et de Si l’on désigne par la différentielle de celle fonction on aura, après les réductions

Ainsi, pour trouver ces coefficiens, il faudra effectuer les multiplications ; c’est la seule difficulté qu’il restera à surmonter.

7. D’après cela, pour passer du premier au second on aura d’où il résulte

On en tire

donc

Faisant ensuite et

d’où il résulte

Et ainsi des autres.

8. Il ne reste donc qu’à faire, dans tous ces rapports différentiels, et par conséquent On aura

et ainsi des autres. On aura La série, ordonnée selon les puissances ascendantes de la petite fraction angulaire est convergente par elle-même ; et les coefficiens nutnériques qui accompagnent les puissances de ne mettent aucun obstacle à cette convergence.

9. La série donnée par l’illustre auteur de la Mécanique céleste (tome I, page 181), est

Pour la transformer dans la nôtre, il suffira de mettre à la place de les formules connues, ordonnées selon les puissances ascendantes de  ; il faudra faire de plus et changer enfin les signes de et de toutes ses puissances impaires, attendu que, dans notre formule, les anomalies sont comptées, non du périhélie, mais de l’aphélie. On reconnaîtra bientôt ainsi l’identité absolue entre l’une et l’autre.

10. Faisant, dans cette formule, ou on aura Etsî l’on fait il résultera . On aura donc et telle est aussi, à très-peu près, la plus grande équation du centre.

11. PROBLÈME II. On demande d’exprimer le rayon vecteur par une série analogue à la précédente, savoir le demi-grand axe étant supposé égal à l’unité ?

12. Solution. On a, par la théorie connue de l’ellipse,

Le premier terme de la série étant ce que devient dans le cas de c’est-à-dire, égal à l’unité ; pour trouver , faisons encore

donc

de plus

d’où, on conclura, après les réductions, la formule très-simple

13. Pour effectuer, avec facilité, les différentiations ultérieures, remarquons que le rapport différentiel aura généralement la forme la lettre désignant un polynôme ordonné selon les puissances ascendantes de et de et dont la différentielle complète pourra être supposée Il en résultera, après les réductions, le rapport suivant

Aidé de cette formule générale, on passera facilement d’un rapport différentiel à l’autre ; les multiplications à faire seront la seule difficulté qu’il faudra surmonter.

Ainsi, ayant eu on aura d’abord, par la différentiation,

et dès lors on pourra se servir de la formule générale. Pour trouver on aura

d’où on conclura

Par un semblable procédé, on fera ensuite

d’où on conclura

et ainsi du reste.

14. Ainsi donc, pour trouver les coefficiens de la série , il faudra voir ce que deviendront ces rapports différentiels dans le cas de qui donne , et et l’on aura

et ainsi des autres.

15. Dans le cas de on aura et , ou bien, Dans le cas de on aura et ou bien, Il est presque superflu de remarquer que ces deux expressions sont effectivement celles des distances du foyer de l’ellipse à ses deux apsides. Faisant enfin on aura, et ou bien, Ainsi, le rayon vecteur qui répond au quart de la révolution est une fonction algébrique de la quantité angulaire

16. Nous nous proposerons, en troisième lieu, de déterminer, pour un temps quelconque proposé, la longitude géocentrique d’une planète, moyennant une série double, ordonnée selon les puissances ascendantes des excentricités de la planète et de la terre. L’extrême complication des calculs auxquels nous conduit le développement des coefficiens nous oblige à faire une supposition qui heureusement est admissible, et qui ne restreint en aucune manière la généralité du problème. Nous supposerons que, la terre étant dans l’aphélie de son orbite, la planète soit en même temps à une très-petite distance de l’une de ses deux apsides. De pareilles époques sont toujours assignables, et leurs retours doivent former des périodes que l’on peut déterminer avec toute la précision qu’on désire. Soient, en effet, et les durées des révolutions anomalistiques des deux planètes et leurs anomalies vraies, pour une époque quelconque. Il est clair que la première des deux planètes passera par l’une de ses apsides au bout d’un temps égal à tandis que l’autre passera par l’un des siens au bout d’un temps  : les deux nombres étant des nombres entiers quelconques, positifs ou négatifs. Donc, pour déterminer une des époques où les deux planètes auront été ou seront, à la fois, dans l’une de leurs apsides, il faudra déterminer les deux nombres entiers et de manière qu’ils remplissent le plus exactement que possible la condition

ou

et l’on sent que la solution de cette question ne peut présenter de difficulté.

17. PROBLÈME III. On demande, pour un temps quelconque proposé, la longitude géocentrique d’une planète généralement exprimée par une série double, ordonnée selon les puissances ascendantes des excentricités de l’orbite de la planète et de celle de la terre ?

18. Solution. Supposons que la terre et la planète ayant quitté au même instant leurs aphélies (fig.1), soient arrivées, au bout du temps aux points de leurs orbites respectives. en désignant par le foyer commun ou le centre du soleil, et supposant que la ligne des équinoxes soit , l’angle sera la longitude géocentrique de la planète. Désignons de plus ;

par et les durées des révolutions anomalistiques,

par et les demi-grands axes des deux orbites,

par et leurs demi-petits axes,

par et leurs excentricités,

par et les longitudes des deux aphélies,

par et les deux anomalies vraies , à l’époque

par et les deux anomalies de l’excentrique,

par et les deux rayons vecteurs

et enfin par la longitude géocentrique demandée

19. Les deux longitudes héliocentriques seront ainsi les angles et l’on aura

ce qui donne

On aura de plus, pour les deux rayons vecteurs et ou et

On aura enfin les équations, déjà employées dans le premier problème, par lesquelles on passe de l’anomalie vraie à l’anomalie moyenne, et réciproquement : savoir,

20. Comme on demande pour une série double, ordonnée selon les puissances ascendantes des deux excentricités, telle que

on voit que son premier terme sera ce que devient l’angle dans le cas de  ; ce qui donne  ; d’où il résulte

21. Les deux coefficiens qui suivent, et , seront ce que deviennent les deux rapports différentiels , dans la même supposition de  ; et l’on voit que la différentiation doit porter uniquement sur les deux excentricités et et que le temps, doit être regardé comme exempt de différentiation. On aura ainsi

22. Enfin, de l’expression de donnée ci-dessus, on tire l’expression générale de ainsi qu’il suit

ce qui donnera, pour les deux coefficiens partiels

24. Pour en tirer les deux coefficiens il faudra faire, dans les deux expressions, on aura ainsi

25. La forme, très-compliquée, des deux différentielles partielles ne permet guère de procéder, avec quelque espérance de succès, au développement des coefficiens ultérieurs ; et nous avouons que la formule que nous venons de trouver ne pourra guère être regardée que comme le résultat d’une première approximation, à laquelle il nous paraît convenable de nous arrêter. Pour trouver la longitude géocentrique, avec une plus grande précision, il faudra encore recourir, dans chaque cas particulier, à l’emploi des tables, et renoncer aux avantages qui pourraient résulter d’une formule générale.

26. Connaissant la position des deux aphélies, ou les angles  ; et les deux longitudes héliocentriques et par conséquent aussi les deux rayons vecteurs on trouvera la longitude géocentrique, ou l’angle par la formule

Ici la ligne rayon vecteur de la terre, peut toujours être regardée comme donnée ; mais, pour trouver rayon vecteur de la planète, il faut connaître l’anomalie vraie de cette dernière, ou l’angle qui est lui-même égal à la longitude de l’aphélie, moins la longitude héliocentrique  ; ce qui fait naître une difficulté, lorsque, de la longitude géocentrique, qui est la seule donnée ; tant par les tables que par l’observation, on veut repasser à la longitude héliocentrique. La difficulté sera levée, par la résolution du problème que voici.

27. Connaissant, outre les longitudes des deux aphélies, aussi bien que les grands axes et les excentricités des deux orbites, la longitude géocentrique d’une planète, pour un instant donné, trouver sa longitude héliocentrique ?

Désignons par

l’angle longitude de l’aphélie de la planète ;

le côté demi-grand axe,

l’angle longitude géocentrique de la planète,

le rayon vecteur

l’angle longitude héliocentrique de la terre,

l’angle longitude héliocentrique de la planète ;

donc,

L’angle anomalie vraie de la planète, sera  ; et l’angle formera ainsi l’inconnue du problème.

Le triangle donnera  ; donc

Mais, parce que est un rayon vecteur de l’ellipse ; on a aussi

donc, si l’on pose, pour abréger,

on aura l’équation

Pour la résoudre, il suffira de faire

et l’on aura finalement

Le problème sera résolu.

28. PROBLÈME VI. On demande de comprendre les époques des conjonctions et des oppositions d’une planète dans une seule série double, ordonnée selon les puissances ascendantes des deux excentricités ?

29. Solution. Par les mêmes raisons exposées au sujet du précédent problème, le temps, sera compté d’une époque où, la terre étant dans son aphélie en la planète était très-près de l’une de ses deux apsides ou . Les quantités données du problème seront donc : savoir, les demi-grands axes des deux orbites ; les deux demi-petits axes  ; les deux révolutions anomalistiques,  ; enfin l’angle que les deux grands axes font entre eux, et que nous désignerons par  ; et les lettres et continueront à désigner les anomalies vraies des deux planètes au bout du temps On aura ainsi  ; ce qui donne, pour le cas du problème  ; la lettre désignant un nombre entier pris à volonté, pair dans les conjonctions, impair dans les oppositions. Il en résulte l’équation différentielle  ; c’est la première des équations différentielles qui nous conduiront à la connaissance des coefficiens.

30. La série étant supposée de la forme

Le premier terme sera ce que devient dans le cas de or, on a, dans ce cas, ce qui fournit l’équation  ; donc

Telle est la valeur du premier coefficient de la série.

31. Les coefficiens seront ce que deviennent, dans le cas de les deux rapports différentiels partiels On a trouvé (4), dans le premier problème, pour la différentielle complète de

on aura de même, pour la seconde orbite,

Égalant entre elles ces deux différentielles, ce qui est effectivement l’équation de condition (29) des syzygies, on en tirera la différentielle complète de qui doit répondre à la nature du problème ; ce qui donnera ensuite, pour les rapports différentiels

32. Il ne restera qu’à faire, dans ces expressions, ce qui donne , pour avoir les deux coefficient On trouvera ainsi

33. Les coefficiens des termes du second ordre seront ce que deviennent, dans le même cas de les trois rapports différentiels partiels . Faisant, pour abréger

ce qui donne

on parviendra ainsi à donner une forme un peu plus abrégée aux deux rapports lesques deviendront

Mais il est convenable d’abréger encore. Désignons par le dénominateur commun et les numérateurs de ces deux valeurs, de manière qu’on ait

les différentiations partielles nous apprendront que

,
,

Reste donc à trouver les expressions littérales de et , et à effectuer ensuite les développemens. Or, ayant déjà exprimé en et , de même que en et , on n’aura qu’à substituer, dans l’une de ses expressions, la valeur de en et  : on aura ainsi la différentielle complète de ou , d’où on conclura

34. Après avoir effectué ces développemens, on pourra procéder ; sans difficulté, à la détermination des rapports différentiels . Ayant il en résultera

35. Ainsi donc, pour trouver les coefficiens de nos termes du second ordre, il faudra voir ce que deviennent ces rapports différentiels partiels, dans le cas de On tire de cette supposition et en continuant, par abréviation, d’employer les lettres et à la place de leurs valeurs, on aura, dans la même supposition de ,

et ensuite

36. De là on pourra passer immédiatement aux rapports différentiels du second ordre . On aura, toujours dans le cas de

d’où l’on tire enfin

37. Pour trouver pareillement les coefficiens des termes du troisième ordre, il faudra différencier de même, par rapport à et les rapports différentiels dont nous avons donné la liste (33). Nous n’exécuterons pas ces développemens ; mais la route est tracée, et, en attendant, la série

fera connaître, à peu près, les époques auxquelles il arrivera quelque conjonction ou opposition de la planète à laquelle se rapporte l’ellipse de la figure.

Nous poursuivrons ces recherches dans un prochain article.


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