Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 04/Algèbre élémentaire, article 2

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Par M. Gergonne.
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La forme

est loin, ce me semble, d’être la plus générale que puissent affecter les fonctions d’imaginaires. D’abord un radical imaginaire peut excéder le second degré. À la vérité, dans ce cas, il peut toujours être ramené au second degré, puisque mais c’est là une observation qui vaudrait bien la peine d’être faite aux commençans, à qui on ne parle jamais, dans les élémens, que de la racine quarrée de moins un.

En se bornant même aux seuls imaginaires de la forme , ne peut-on pas considérer des fonctions telles, par exemple, que

le nombre des sinus, cosinus ou logarithmes étant quelconque, fini ou infini, positif ou négatif, entier ou fractionnaire, commensurable ou incommensurable, et pouvant même être imaginaire de la forme  ? Ne peut-on pas également considérer des fonctions de la forme

 ?

Ne peut-on pas aussi considérer des fonctions de la forme

ou de la forme

les étant liés par une loi connue quelconque, et leur nombre pouvant être indifféremment fini ou infini, positif ou négatif, entier ou fractionnaire, commensurable ou incommensurable, ou même encore imaginaire de la forme  ? Ne peut-on pas enfin considérer des fonctions d’imaginaires, composées de toutes celles-là et de beaucoup d’autres encore, telles que seraient, par exemple, des différentielles ou intégrales dont l’ordre serait imaginaire de la forme  ?

Il me semble que, dans tous les cas, la voie la plus simple pour parvenir, s’il est possible, à la démonstration du théorème, est celle que voici.

Soit posée l’équation

et supposons, en premier lieu, que la fonction soit algébrique. On pourra toujours, en chassant les dénominateurs et les radicaux, ramener cette équation à la forme

or, il est démontré, par les éîémens, que toutes les racines d’une telle équation sont de la forme sans en excepter même les racines réelles, puisqu’elles répondent à  ; puis donc que la fonction est du nombre de ces racines, elle doit être aussi de cette forme.

Supposons, en second lieu, que la fonction soit transcendante, mais développable en une suite de termes qui soient algébriques ou du moins développables eux-mêmes en séries, et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’on n’ait plus qu’une suite de termes algébriques ; ces termes, d’après ce qui précède, seront tous de la forme  ; donc leur somme, c’est-à-dire, la fonction sera aussi de la même forme.

Toute la difficulté est donc maintenant réduite à savoir si vraiment toute fonction non algébrique est développable en série. Je regarde la chose comme extrêmement probable ; mais je ne crois pas qu’elle ait encore été jusqu’ici généralement et rigoureusement démontrée.