Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 02/Géométrie, article 8

QUESTIONS RÉSOLUES.

Solution du premier des deux problèmes proposés à
la page 32 de ce volume ;
Par M. Lhuilier, professeur de mathématiques à l’académie
impériale de Genève.
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Lemme I. Partager deux droites données de grandeur, l’une et l’autre en deux parties, de manière que le rectangle d’une partie de l’une de ces droites par une partie de l’autre soit donné de grandeur, et que le rectangle des deux autres parties soit aussi donné de grandeur ?

Soient (fig. 2) deux droites données de grandeur ; on demande de couper ces droites l’une et l’autre en deux parties aux points et, de manière que les rectangles et soient l’un et l’autre donnés de grandeur ?

Soient

on aura

donc

donc aussi

ce qui donne

On connait donc la somme des deux distances et le rectangle de ces mêmes distances ; ainsi elles sont données de grandeur et conséquemment le point est donné de position.

Remarque I. Pour fixer l’attention sur un cas déterminé, j’ai supposé que les positions des points donnés et des points cherchés sont respectivement , et que les droites sont données de grandeur de manière à répondre à cette supposition. Si l’on voulait faire rémunération de toutes les positions dont ces points sont susceptibles, il paraît d’abord qu’il y aurait neuf cas à examiner ; mais quelques-uns de ces cas rentreraient les uns dans les autres ; ils dépendraient de la grandeur des droites données et des directions suivant lesquelles on les porterait depuis les points et La géométrie et l’algèbre indiquant la liaison qui règne entre ces différens cas, par les changemens de directions et de signes des lignes obtenues, j’ai cru devoir me borner à l’exposition sommaire de l’un de ces cas.

Remarque II. On obtient, comme il suit, la condition de possibilité du problème proposé :

LEMME II. Partager trois droites données de grandeur chacune en deux parties de manière que l’on connaisse de grandeur chacun des rectangles suivans : savoir, le rectangle d’une partie de la première par une partie de la seconde ; le rectangle de l’autre partie de la seconde par une partie de la troisième ; enfin le rectangle de l’autre partie de la troisième par l’autre partie de la première ?

Je vais montrer comment le problème proposé, sur trois droites, peut être ramené au problème correspondant sur deux droites seulement.

Soient (fig.3), trois droites données de grandeur, à couper en de manière que l’on connaisse de grandeur chacun des rectangles

Soient

on aura

donc

et par conséquent

d’où résulte

ou

Donc on connaît les droites et en outre les rectangles sont donnés de grandeur ; donc le problème sur trois droites données de grandeur et sur trois rectangles formés par leurs parties, d’une manière conforme à l’énoncé, est ramené au problème correspondant sur deux droites seulement.

Remarque. On ramènera précisément de la même manière le problème proposé sur quatre droites, au problème correspondant sur trois droites ; et généralement, le problème étant proposé sur un certain nombre de droites, on le ramènera au problème correspondant sur un nombre de droites inférieur d’une unité.

Problème. À un triangle donné, inscrire un triangle dont les côtés passent par des points donnés ?

Soient les sommets d’un triangle donné ; soient trois points donnés sur le plan de ce triangle. On demande d’inscrire au triangle donné, un triangle , dont les côtés passent respectivement par les points  ?

Par soient menées aux côtés les parallèles

Les rectangles

sont égaux deux à deux ; ainsi ceux de la première ligne sont donnés de grandeur ; et, comme on connaît en outre les distances le problème se trouve ramené au lemme précédent.

Remarque. À l’aide de l’extension dont on a vu tout à l’heure que ce lemme est susceptible, on résoudra d’une manière semblable le problème général. À un poligone donné, inscrire un poligone de même nom, dont les côtés (ou leurs prolongemens) passent respectivement par des points (en même nombre) donnés de position ?

Séparateur
Autre solution du même problème ;
Par M. Servois, professeur de mathématiques aux écoles
d’artillerie de Lafère.
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1.o Si l’on construit une suite de poligones de côtés dont les côtés ou leurs prolongemens passent respectivement par points donnés et dont les sommets, excepté le dernier, soient respectivement sur droites données, le lieu des derniers sommets de ces polygones sera en général une courbe du second degré (Voyez, pour la démonstration de cette proposition, la Correspondance sur l’école polytechnique, tome 1.er, n.o 8, page 309). À quoi il faut ajouter qu’avec la règle seulement il sera facile de déterminer cinq ou un plus grand nombre de points de la courbe.

2.o Si donc le dernier sommet est assujetti, comme les autres, à se trouver sur une droite donnée ou, ce qui revient au même, s’il s’agit d’inscrire à un polygone donné de m côtés un polygone d’un pareil nombre de côtés, dont les côtés, ou leurs prolongemens, passent par m points donnés, l’un quelconque des sommets du polygone cherché devra se trouver à l’intersection du côté correspondant du polygone donné avec une courbe du second degré dont cinq points au moins seront déterminés ; d’où l’on voit que le problème ne pourra admettre que deux solutions au plus.

3.o On voit, en outre, que la résolution de ce problème se trouvera réduite à celle du problème suivant : cinq points étant donnés de position par rapport à une droite indéfinie, construire les intersections de cette droite avec la courbe du second degré passant par les cinq points donnés ? Or ce problème a été résolu (Voyez la Correspondance sur l’école polytechnique, tome 1.er, n.o 10, page 435) ; et il peut l’être facilement de diverses autres manières.

4.o Dans des cas particuliers, il peut arriver que, par la nature du polygone donné et la situation des points donnés, l’un des sommets du polygone cherché cessant d’être assujetti à se trouver sur un côté du premier, ce sommet décrive une ligne droite ; alors le problème rentre en totalité dans le domaine de la géométrie de la règle. Ces cas sont en très-grand nombre dans le problème général ; car seulement le problème particulier du triangle présente celui des trois pôles en ligne droite, celui de deux pôles en ligne droite avec un sommet, etc.