Les Ailes d’or : poésies nouvelles, 1878-1880Bibliothèque-Charpentier (p. 140-141).

AIR À BOIRE

Le vigneron met dans la tonne,
Mêlés aux flots du vin vermeil,
Toutes les chansons de l’automne
Et tous les adieux du soleil !

Fêtons la bouteille fidèle !
C’est la pourpre d’un horizon
Qu’on entrevoit au travers d’elle
Et c’est avec un frisson d’aile
Que le vin sort de sa prison !

Dans le cristal vibrant du verre
Écoute rire à belles dents
La vendangeuse peu sévère
Qui gravit le joyeux calvaire
Où saignent les pampres ardents !

Dans le gai reflet de la coupe
Regarde passer, en chantant,
Les vignerons, joyeuse troupe,
Et le soleil dorer la croupe
De la colline qui s’étend !

Le vigneron met dans la tonne,
Mêlés aux flots du vin vermeil,
Toutes les chansons de l’automne
Et tous les adieux du soleil !