Trois douzaines de Cupidons,
Qu’une actrice a mis sur la paille,
Hier mendiaient, et la marmaille
Les poursuivait de gais lardons.
Chez Lise ils frappent d’un air triste ;
Lise répond : Nous sommes sourds.
Quoi ! vivrez-vous donc toujours,
Vieux petits culs nus d’Amours ?
Allez, Dieu vous assiste ! (bis.)
Partout en France on vous fourra.
Vous avez guindé la sculpture,
Vous avez fardé la peinture,
Vous affadissez l’Opéra.
Des Anacréons j’ai la liste ;
Ils encombrent ville et faubourgs.
Vous les couronnez toujours,
Vieux petits culs nus d’Amours ;
Allez, Dieu vous assiste !
Quittez votre Olympe en débris.
Que Mars, Phébus, Bacchus, Minerve,
Voguent avec vous de conserve ;
À Gnide remmenez Cypris.
Les Grâces suivront à la piste,
Phébé guidera votre cours.
Émigrez, mais pour toujours,
Vieux petits culs nus d’Amours ;
Allez, Dieu vous assiste !
Emballez avec tous vos dieux
Flore et l’Aurore aux doigts de roses ;
Par leur nom appelons les choses,
Les choses n’en plairont que mieux.
Mon cœur à l’amant qui persiste
Se rend bien sans votre secours.
Sans vous j’aimerai toujours,
Vieux petits culs nus d’Amours ;
Allez, Dieu vous assiste !
En leur fermant la porte au nez
Parlait ainsi la tendre Lise,
Quand près d’eux passe une marquise
Dont à peine ils sont les aînés.
La dame, quoique moraliste,
Leur dit : Rendez-moi mes beaux jours.
Dans ma chambre et pour toujours,
Chers petits culs nus d’Amours i ,
Venez ; Dieu vous assiste !
On ne se scandalisera pas de certain mot placé dansce refrain, si l’on se rappelle que ce mot était employé par les dames de la cour, avant la révolution, pour désigner une mode du temps. Madame de Genlis raconte à ce sujet, dans ses Mémoires, une anecdote on ne peut plus gaie.