À travers les grouins/Candidats à l’Immortalité

P.-V. Stock, éditeur (p. 75-77).


CANDIDATS À L’IMMORTALITÉ



Quand au poète Dierx incombe ce bonheur,
Bien des forts sont tombés dans l’arène tragique :
Ils ne t’ont point élu, barde pédagogique,
Sully-Prudhomme, honneur des Légion d’honneur ;

Ni Coppée — un François d’Assise tricolore —
Ni le comte Robert, ni ma tante Lorrain,
Ni Jean Rameau qu’on exhibe pour un florin.
Après ces chefs, d’autres, moins grands, restent encore.


Plus nègre que ce freux où vit le preux Arthus,
Moréas qui, le soir, au compte-goutte, urine,
Fait couver par Maurras d’innommables fœtus.

Mais le Pierre Puget du suif, des margarines,
Jean Richepin donna l’être à Jehan Rictus
Qui peint son âme d’or sur le mur des latrines.



Or ces guerriers ayant poussé le cri d’alarme
Et déterré la hache au seuil de leur gourbi,
Élèves de Barrès et poteaux de Bibi
La Purée, en tous lieux dégobillent leurs carmes.

Les symbolistes, les simplistes, les romans,
Ceux qui riment, à soixante ans, leurs pucelages
Et ceux dont les neurasthéniques mucilages
Pour Monsieur de Voguë sont emplis d’agrément ;


Frémine plus hideux que les têtes de l’Hydre,
Et Vicaire pochard comme une pomme à cidre,
Et ceux qui font des vers pour les cafés de nuit :

Tous veulent sur leur front le diadème esthète,
Ces palmes dont la fleur améthyte leur duit,
Et l’orgueil des festins à douze francs par tête.