Zazpiki ou le Malade d’amour

Traduction par E. Contamine de Latour et R. Foulché-Delbosc.
Société de Publications Internationales (p. 43-48).

VICENTE DE ARANA


——


ZAZPIKI

ou
LE MALADE D’AMOUR


——




I


Mère, — dit Zazpiki, qui revient de la chasse, — fais du feu dans le foyer, car je me sens transi.

Dans la montagne j’ai vu Marie et je l’ai embrassée… Ah ! qu’elle est belle ! Si tu la voyais !

Sa taille est d’osier, sa physionomie angélique, ses yeux rendent fou.

Mais je ne puis être son époux !

Mère, l’amour que je ressens pour elle me fait languir. Que je souffre !

Ah ! mère chérie ! Prie pour le pauvre Zazpiki, malade d’amour !


II


— Mère, — dit Zazpiki qui revient de la chasse, — avive le feu qui brûle dans le foyer, car le froid de la montagne m’a saisi jusqu’à la moëlle des os.

J’ai revu Marie, et je l’ai embrassée pour la deuxième fois… Mon Dieu, qu’elle est belle !

Si tu sentais l’arôme de son souffle, si tu entendais le timbre argentin de sa voix !

Quel malheur qu’elle ne puisse être mon épouse !

Chaque jour s’augmente ma langueur ; mes joues pâlissent et mes yeux se sèchent à force de pleurer.

Prie, ma mère, prie pour le pauvre Zazpiki, malade d’amour !


III


— Mère, — dit Zazpiki qui revient de la chasse, — approche-moi ce banc pour que je m’asseye à côté du feu, car mes membres sont gelés.

J’ai embrassé Marie pour la troisième fois, mère… car je l’aime de toute mon âme.

La sienne est grande et belle comme celle d’une sainte.

Grand aussi est son cœur, dont jaillissent des torrents de tendresse. Ange, et non femme, est la vierge que j’adore.

Quel malheur que son père s’oppose à notre union !

Ma langueur est extrême ; vois mes yeux caves, mes joues pâles et mes lèvres livides.

Élève au ciel tes prières, mère ; prie pour le pauvre Zazpiki, malade d’amour !

. . . . . . . . . . . . . .

Et Zazpiki se tait, laisse tomber sa tête sur ses genoux, pousse un profond soupir, et expire…

La mère le prend dans ses bras, l’embrasse, folle de douleur ; mais bientôt elle s’agenouille, pleure, et levant les yeux au ciel s’écrie :

— Vierge Marie ! Reçois l’âme de mon pauvre Zazpiki, victime de l’amour !