Vues Scripturaires sur la Question des Anciens/IV

Georges Kaufmann, Libraire (p. 16-39).
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IV.

J’en viens à la brochure : Faut-il établir des Anciens ?

Son auteur, et ceux qui, avec lui, s’opposent à la vérité, peuvent être assurés qu’ils ont tout autre chose à faire qu’à se réjouir de l’occasion, que la phrase mal tournée d’un frère leur a offerte, de fausser et de noircir les principes des frères. Ils ont affaire à Dieu, qui garde sa vérité ; à Celui qui humilie les siens lorsqu’ils en ont besoin, mais qui saura juger ceux qui s’opposent à Lui et à sa vérité.

J’aborde donc le fond de la question[1].

Je dis hautement que je crois le fond de la pensée qui a été mise en question, parfaitement juste, et que

toute la question est là ; question trop sérieuse pour qu’on l’écarte par une discussion personnelle.

L’expression en a été, il est vrai, inexacte, et je crois qu’il y a quelque chose à blâmer en ce qu’elle n’a pas été assez pesée devant Dieu[2]. Mais je crois que rejeter la pensée est un manque de conscience et de cœur

envers Dieu. Ce me semble être la prétention de l’orgueil humain, au moment où Dieu appelle à l’humiliation et à l’abaissement. Si, dans un tel état, l’on eût senti qu’on reconnaîtrait, de fait et de cœur, ceux que Dieu avait manifestés comme de véritables Anciens au milieu de tout le troupeau de Dieu à Genève, je n’aurais eu qu’à m’en réjouir. Les âmes, hélas ! n’en sont pas là. Ce qu’on a fait en est bien loin. On a dit qu’on ne pouvait pas obéir à ses conducteurs spirituels, à moins qu’une commission préparatoire et une élection populaire ne les eussent établis. Sur quel commandement repose l’existence de cette commission ? Sur quel commandement repose le choix qu’on a fait de cette commission, ainsi que l’ancienne commission elle-même qui a arrangé les choses ainsi ?

Insister sur la nomination des Anciens, comme si c’était là un acte d’obéissance, c’est trahir un manque de conscience et de cœur envers Dieu, et une simple similitude le fera comprendre.

Un père veut que ses enfants aillent se présenter à leur grand-père, propres et d’une manière convenable, et il leur donne le commandement formel de marcher sur le trottoir, et de ne pas le quitter, de peur de salir leurs habits. L’aîné des garçons, dont l’orgueil est blessé à l’idée d’aller se présenter à son grand-père comme un jeune enfant, va s’embourber dans la fange en se mettant en chemin ; puis, il commence à insister beaucoup sur le devoir de marcher sur le trottoir afin de se tenir propre. Est-ce là de l’obéissance ? Est-ce là de la conscience ? Est-ce là un sentiment convenable envers son père ? Ou, permettez-moi de le demander, est-ce là l’autorité qu’il réclame à l’égard de ses frères ?

Le fond de la pensée qui a provoqué tant d’indignation, c’est que, vu l’état de l’Église, on ne saurait agir au gré de ceux qui veulent nommer des Anciens ; que cette nomination est une prétention orgueilleuse ; que, la corruption s’étant emparée de tout le système que Dieu avait établi par les Apôtres, les hommes ne sont pas à même d’établir de nouveau un pareil système ; qu’on ne peut pas recommencer l’Église. Je parle seulement de son organisation ecclésiastique. L’Église elle-même subsiste évidemment toujours.

Au fond, ce qu’ils prétendent faire, c’est en effet de recommencer l’Église.

§.

Un principe fondamental dans tout le raisonnement de notre frère, M. Foulquier, c’est que Dieu ne rétablit jamais l’état primitif des choses déchues entre les mains des hommes.

L’auteur anonyme conteste ce principe. Voyons avec quel succès.

Il prend le temps des Juges comme celui de la plus profonde corruption d’Israël, ce qui, sous un certain point de vue, est assez vrai pour que je l’accepte sans faire plus de difficultés. Quel était donc l’état primitif en question ? C’est que Dieu lui-même était leur roi, selon que Dieu lui-même le signale à Samuel (1 Sam. VIII, 7-8, et XII, 12). Le sacrificateur était le point de contact, le lien entre le peuple et Dieu, et Dieu suscitait des Juges lorsqu’il y en avait besoin.

Cet état de choses a-t-il été rétabli ? Jamais ; et, ce qui plus est, il ne le sera jamais. Il serait difficile de trouver un exemple plus frappant et plus incontestable de la vérité du principe contesté par l’auteur anonyme.

En un certain sens, plusieurs choses seront rétablies sous le Messie ; mais les conseils de Dieu à l’égard du Messie lui-même excluent la possibilité du retour d’Israël à l’état où il se trouvait sous les Juges. Quant à la sacrificature elle-même, non-seulement une autre famille en a été investie ; mais la position même de la sacrificature a été totalement changée. La sacrificature a perdu, à tout jamais, la position dans laquelle elle se trouvait antérieurement. Elle a continué, il est vrai, et, sans elle, l’homme ne pourrait subsister devant Dieu. Mais Dieu a dit : « Je me susciterai un sacrificateur fidèle qui se tiendra devant mon Oint[3]. » L’introduction de l’Oint a tout changé. C’est Lui, le Roi, qui devenait responsable du maintien de l’ordre au milieu du peuple, qui le gouvernait, qui le jugeait, et dont la conduite réglait, pour ainsi dire, le jugement que Dieu portait sur le peuple (2 Rois XXIII, 26).

L’auteur anonyme demande : « À quelle époque tomba la royauté ? » Et il répond aussitôt : « Ce fut sous le règne de Saül. »

Évidemment, Saül, demandé par le péché du peuple, quoique permis de Dieu, n’est pas la royauté voulue de Dieu. C’est David et Salomon que nous voyons dans ce caractère. C’est en Salomon que se montre la chute de la royauté. La patience de Dieu a été longue à cause de son serviteur David. La promesse immuable de Dieu à la postérité de David ne saurait manquer dans la personne du Christ ; mais il est parfaitement clair que la royauté n’a jamais été rétablie dans son état primitif, et qu’au contraire, en tant que confiée aux hommes dans la chair, cette royauté a été jugée de Dieu ; qu’après une longue patience, Dieu y a mis fin, et qu’il a mis fin, en même temps, aux relations de son peuple avec Lui.

L’auteur anonyme penserait-il peut-être que l’état primitif du peuple ait été rétabli du temps de Néhémie ?

Pour présenter au peuple le Messie, son Fils venu en chair, et pour placer Israël sous la responsabilité à cet égard, ainsi qu’il en use toujours avant que d’accomplir ses desseins en grâce, Dieu a gardé les restes chancelants d’un peuple asservi aux Gentils. Était-ce là l’état primitif de ce peuple ? Était-ce son état primitif que d’être asservi aux Gentils ? Est-ce pour cela que Dieu l’avait racheté d’Égypte ? Le nom de Lo-Hammi avait-il été révoqué ? Cet état dans lequel Dieu appelait Israël Pas-mon-Peuple (Lo-Hammi) n’était assurément pas l’état primitif du peuple de Dieu. Au commandement de Cyrus, son roi, un résidu du peuple monte à Jérusalem[4], tandis que Daniel, figure et signe de la vraie position du peuple, reste à Babylone et expose, en même temps, devant Dieu leur histoire selon les conseils de Dieu. L’autel a été rétabli par la foi. C’était, d’un côté, la grâce de Dieu, et de l’autre, dans l’homme, la fidélité qui le reconnaissait dans ses difficultés comme sa sauve-garde et sa muraille. Voyez le beau passage : Esd. III, 2-3. Le peuple de Dieu est toujours dans ses droits en adorant Dieu, et en le reconnaissant comme sa sûreté et sa force.

C’est tout autre chose que de prétendre rétablir,

selon l’ordre de l’économie, ce qui a été perdu. Néhémie a-t-il pu rétablir des rois ? A-t-il mis Zorobabel sur le trône ? Nullement. C’aurait été méconnaître le jugement de Dieu qui pesait sur son peuple. Néhémie a-t-il osé même mettre en règle les sacrificateurs qui ne pouvaient trouver leur généalogie ? Non, il les a mis de côté.

Lisez Néhémie, IX, 36-37, et vous verrez jusqu’à quel point l’état primitif avait été rétabli.

L’auteur anonyme veut distinguer entre l’économie et l’état politique. Cela est vraiment trop hardi pour un lecteur de la Bible. L’assujettissement du peuple de Dieu aux Gentils n’était-il donc qu’une affaire politique ? Le roi d’Israël n’avait-il aucun lien avec l’économie ? Dieu avait abandonné son temple et son trône, et avait confié aux Gentils l’autorité sur la terre, en disant de Juda : ce n’est plus mon peuple (parole qui ne sera révoquée qu’au retour de Christ). Et l’on va jusqu’à dire qu’il ne s’agit pas de l’économie, mais de l’état politique du peuple ! C’est par trop fort. Qu’est-ce que c’est que l’état politique du peuple de Dieu sur la terre en dehors de l’économie ?

Faut-il, hélas ! tout bouleverser pour avoir des Anciens ?

Pour ma part, je crois que nous avons la promesse assurée du Seigneur, qui ne change pas, qu’Il sera en tout temps au milieu de deux ou trois réunis en son nom ; de sorte que nous avons toujours le droit de relever notre autel. C’est notre devoir.

Nous sommes toujours tenus à reconnaître Dieu. Aussi, par sa grâce, dois-je faire tout ce qu’il me donne la force d’accomplir pour sa gloire. Pour agir pour lui, il faut qu’il nous envoie dans ce but.

§.

Quant à la présence du Saint-Esprit au milieu du peuple, le sens que l’auteur anonyme prête au passage d’Aggée, II, 5, lui est évidemment tout à fait étranger. Dieu n’avait pas retiré son Esprit du peuple, quoiqu’il eût jugé et puni le peuple (Voyez Néhémie, IX, 20). Cet Esprit instruisait et dirigeait encore le peuple (Comparez És. LXIII, 14). Mais il est certain que, dans un sens autre que celui que nous venons d’attribuer au passage, l’Esprit de Dieu n’a demeuré au milieu de son peuple qu’après la glorification de Jésus[5].

§.

Quant à l’esclavage, il est certain que, sous de certains rapports, le peuple de Dieu peut être en esclavage. À l’époque même de laquelle l’auteur anonyme parle, en disant qu’Israël n’était pas sous l’esclavage de Satan, puisque, etc., Néhémie dit qu’il était esclave des rois que nous savons avoir été les instruments de Satan, comme des bêtes féroces. Lors même que je suis enfant de Dieu, si je me plaçais sous la direction de Rome, entraîné par les séductions de l’ennemi, je serais bien sous l’esclavage de Satan. À tort, si vous voulez, mais j’y serais.

La question est de savoir s’il n’en serait pas de même, dans le cas où l’on se placerait sous des Anciens que l’on aurait élus sans la volonté de Dieu.

Je ne dis ni oui ni non. Rien de plus simple que ce qui en est dit. L’idée qu’un enfant de Dieu ne puisse se placer sous l’esclavage de Satan, est une dangereuse erreur.

§.

La remarque de l’auteur anonyme, au § 17, est entièrement erronée. La sacrificature avait été le centre de l’unité ; elle ne l’était plus. La royauté était devenue ce centre.

§.

Quant au § 20, au sujet de la différence dans les directions de Dieu (És. XXXVII, 33, et Jérém. XXV, 8-9), la force du raisonnement n’est pas saisie par l’auteur anonyme. Les textes sont cités bien à propos pour dé montrer le principe en question ; et ce que les textes démontrent, c’est que ce que Dieu autorise à tel moment donné, ne fait pas nécessairement règle pour ceux qui se trouvent dans un état différent. S’appliquer, dans ce cas, un ordre de Dieu, c’est ne pas avoir la conscience de son péché ; c’est comme prétendre marcher sur le trottoir par obéissance pour se tenir propre, lorsqu’on s’est déjà crotté à dessein hors du trottoir. L’adoration de Caïn était un péché, parce qu’il ne tenait pas compte de sa chute.

Nommer des Anciens, ce n’est pas obéir ; c’est prétendre pouvoir faire ce que l’Église primitive a fait, ce que les Apôtres ont fait[6].

§.

Quant au § 25[7], si nous prenons le Papisme pour exemple, toute la faiblesse des arguments de l’auteur anonyme sautera aux yeux. Là, Satan gouverne bien dans l’Église, sous l’apparence que cette forme-là est voulue de Dieu. Il est évident que l’auteur anonyme ne comprend pas ce que c’est que la puissance de Satan, ni que Satan puisse exercer une puissance affreuse, même sur les enfants de Dieu, s’ils restent dans un système où cette puissance agit, et agit d’autant plus qu’elle leur est voilée, et qu’eux-mêmes prennent consciencieusement ce système pour l’Église de Dieu, pensant qu’y rester, c’est obéir à l’autorité que Dieu avait établie dans l’Église, et garder l’unité qui devait s’y trouver.

Je comprends que l’auteur anonyme prétende échapper, en ce qu’il fait, à cette puissance de Satan. Mais s’opposer en principe à la pensée exprimée dans le

paragraphe de Foulquier qui nous occupe, c’est nier ce que l’intelligence spirituelle doit comprendre et reconnaître pour vrai.

« Il est clair que, si l’Adversaire s’est emparé d’une chose que Dieu avait placée entre nos mains, vouloir la conserver, c’est rester sous son pouvoir de ce côté. » Cela est clair. Si l’on conserve ce dont Satan se sert dans l’exercice de sa puissance, on reste, quant à cela, sous cette puissance. Cela est si simple que la proposition se démontre d’elle-même.

Ceci, néanmoins, n’est pas une réponse suffisante. L’auteur anonyme peut répondre, et il répond, en effet, dans un endroit : Je ne veux rien conserver[8]. L’Église n’a pas conservé le système scripturaire. Le clergé est du Diable. Je n’en veux nullement. Je veux rétablir des Anciens tels qu’ils étaient au commencement. Je veux, moi, commencer de nouveau l’Église à Genève sur le pied primitif.

On peut répondre : Vos Anciens seront toujours le clergé. On peut répondre aussi : Dieu ne vous a pas donné mission pour cela ; réponse qu’il faut justifier quant au premier point. Quant au second, c’est à l’auteur anonyme à produire ses titres, et à prouver sa mission ou celle de ceux qui ont entrepris cette œuvre. S’ils ne rassemblent pas avec Christ, ils dispersent.

Examinons donc, en détail, les objections de l’auteur anonyme.

Hélas ! tout ici est sophisme.

Il demande où a commencé l’apostasie. Eh bien ! disons avec lui que le germe en existait à l’époque de laquelle il est parlé en ces termes : « Le mystère d’iniquité est déjà en activité » (2 Thes. II, 7). Après cette époque, dit-il, l’Apôtre veut qu’il y ait des Diacres. Puis, l’auteur nous fait voir que l’Église était dans un mauvais état moral à bien des égards, lorsque l’Apôtre a ordonné à Timothée et à Tite d’établir des Anciens[9]. — Soit. — Il demande en conséquence : « Comment ce même désordre nous imposerait-il aujourd’hui l’obligation de renoncer à cette institution ? » — Enfin, il ajoute, quant à l’établissement des Anciens : « Cet état de chute ne nous dispense pas du devoir de le conserver à notre tour. »

Quel raisonnement ! Les fidèles étaient dans un triste état. Des officiers ont été établis pour y mettre ordre. C’est pourquoi, lorsque les officiers, s’étant emparés des droits du souverain, sont devenus les sources et les instruments du désordre, il faut les conserver. Voilà qui est fort. Aussi, l’auteur anonyme a-t-il dû changer entièrement ce que Foulquier a dit. Il lui fait dire que cette institution nous met sous le pouvoir de Satan, parce que nous vivons dans une économie en chute. Foulquier a dit : Si l’institution elle-même est sous le pouvoir de Satan, dans ce cas, la conserver, ce serait nous placer sous ce pouvoir. Maintenir l’institution lorsqu’elle était une barrière contre la corruption, ou la maintenir quand elle en est devenue la source, la force et l’expression, ce sont là deux choses bien différentes.

Mais ce n’est pas tout encore.

On veut ne pas renoncer à l’établissement des Anciens, et le conserver à son tour. Eh ! je le demande, qu’est-ce que l’auteur anonyme conserve à Genève ? Y a-t-il des Anciens établis ? Où est l’institution qui lui est si chère ? Elle n’existe pas ; et, selon lui, c’est depuis des siècles qu’elle a cessé d’exister. La tâche consiste donc non à la conserver, mais à la rétablir, à la créer de nouveau. D’autre part, il ne peut donc être question d’y renoncer ; on ne peut renoncer à ce qui n’existe pas. Il n’y a rien à quoi on puisse donc renoncer.

Il faut donc non pas conserver cette institution, mais la produire. Notre auteur pense que ses collègues et lui ont une énergie créatrice suffisante pour faire ce que les Apôtres ont fait dans l’Église. Les faits suivants font voir combien peu ils sont en état de les imiter.

1° Il y a eu une commission chargée d’élaborer une constitution d’Église.

2° Par cette constitution, l’Église confie son administration à l’assemblée des Anciens (art. 14).

Ceux qui ont donné leur adhésion à cette constitution étant censés composer l’Église évangélique à Genève, il faut avoir des Anciens. On les convoque pour élire une commission chargée de préparer la tâche importante et difficile du choix des Anciens. On ne se demande ni s’il y a des hommes propres à être Anciens, ni si les Anciens voulus de Dieu pour son Église à Genève se trouvent au milieu de ce qui prend le nom d’Église évangélique. Pour obéir à la Parole de Dieu, cette Église évangélique est appelée à avoir un presbytère ; elle doit choisir ceux que le Seigneur appelle à être Anciens ou Évêques dans le troupeau. Quel troupeau ? Y a-t-il là plus qu’une secte ? Il est naturel que ceux qui se sont placés à la tête du mouvement le dirigent. Supposons même que quelques-uns chercheront à ajouter quelques personnes dans le but de donner un contre-poids à ce rétablissement du clergé, et que d’autres s’y refuseront. Y a-t-il là la moindre ressemblance entre ceci et les épîtres à Timothée et à Tite ? Sinon, pourquoi parler avec tant de bruit d’un commandement positif ? Ce commandement positif serait-il, à en juger par les faits, de vous réinstaller dans la position cléricale que vous venez de perdre, et que vous aimez encore ? Serait-ce de faire l’essai d’une nouvelle secte, et de s’y attacher pour voir si cet essai réussira ? L’Esprit de Dieu ne fait pas des essais. Pensez-vous que celui qui marche selon l’Esprit en fasse ? Il obéit quand il a de la lumière ; et, quand il n’en a pas, il attend. Pensez-vous que, trouvant des frères occupés, au milieu des chrétiens rassemblés hors du monde, à veiller sur eux, dévoués à leur service, soignant leurs âmes et bénis de la part de Dieu dans leur œuvre, j’aurais mis en question leur service ? Jamais. Mais, lorsque je vois une catégorie spéciale de personnes élever la prétention de fonder une Église ; des commissions préparatoires et autres pour s’installer, et qu’on en appelle aux épîtres à Timothée et à Tite, en m’accusant de désobéissance à la Parole de Dieu si je ne me soumets pas, j’hésite. Je ne puis ni reconnaître une semblable prétention, ni m’y soumettre comme si c’était donner obéissance aux épîtres que l’on allègue.

Si l’auteur se trompe, si ce n’est pas rassembler avec Christ (et si c’est une prétention fausse, ce n’est certes pas rassembler avec Christ), c’est donc disperser. Il nous présente l’unité, que nous désirons tous, sous la condition de reconnaître ses Anciens. Il me pardonnera si j’hésite. Il m’accuse d’être désobéissant en ne reconnaissant pas qu’il a l’autorité suffisante pour en créer ; car c’est bien cela. Que j’obéisse à des conducteurs, à la bonne heure. Je le ferai de tout mon cœur. Mais, qu’un commandement d’obéir implique le pouvoir de créer ce à quoi il faut obéir, c’est aller un peu trop vite.

Ce donc que nous vous demandons, c’est le commandement de faire des Anciens. Nous reconnaissons bien le commandement biblique de leur obéir ; mais, aujourd’hui, les Anciens auxquels il faut obéir n’existent pas, et c’est là ce dont on convient de tous côtés. Ainsi, réclamer, comme vous le faites, que nous vous montrions un commandement biblique pour renoncer à l’institution des Anciens, quand cette institution n’existe plus, c’est vraiment ne rien dire du tout. Je vous le répète. Je ne renonce à rien. Où sont-ils ces Anciens ? Ah ! répond l’auteur, il n’y en a pas. — Comment donc y renoncer ? — Mais nous voulons les créer, dit-il. — Je réponds : C’est là une autre question. Dieu vous a-t-il envoyé pour cela ? Où est son commandement ? J’attends.

Mais, pour que tout s’écroule plutôt que de renoncer à l’établissement des Anciens, l’auteur anonyme nous demande pourquoi, si la ruine de l’Église nous empêche de nommer des Anciens, nous conserverions le Baptême et la Cène.

Je lui demande à mon tour : Ces deux choses ont-elles cessé d’exister ? Non. Je n’ai qu’à m’éloigner des adjonctions et des abus qui les corrompent. En outre, en les pratiquant, je ne crée rien ; je ne nomme ni n’établis personne. Je n’use d’aucune autorité.

Pardonnez-moi, me dira le Papiste ou le Puséyste, et même souvent le Protestant : en consacrant la cène vous usez d’autorité. Vous vous en arrogez en prêchant l’Évangile. Quelle autorité avez-vous pour cela ?

Je m’arrête. La question est grave. Suis-je dans l’alternative ou de renoncer à ces priviléges et à ces bénédictions, ou de les accepter avec toute sorte de corruption et viciées par de graves erreurs ?

J’examine ma Bible sérieusement, et c’est ce que j’ai fait, et je trouve toute liberté. Je l’ouvre, et le clergé qui a corrompu tout cela n’y est pas reconnu. Elle m’enseigne que je puis librement en jouir.

Je dis donc que, quant à ces choses et à d’autres pareilles, je me suis retiré de dessous l’esclavage de Satan.

De plus, je reconnaîtrai, selon mon pouvoir, les personnes qui portent, même à travers bien des imperfections, les signes de surveillants. Si l’on insiste sur le clergé, et si l’on nie l’unité de l’Église, je ne puis marcher dans une telle route.

§.

Quant à la promesse de la présence de Jésus au milieu de deux ou trois réunis en son nom, ce n’est pas moi qui institue quelque chose, si je me réunis avec d’autres personnes. C’est Jésus qui accomplit ce qu’il a promis. L’exégèse de l’auteur anonyme est sûrement entièrement erronée. Il s’efforce de nous priver de tout.

Heureusement qu’avec toute l’Église de Dieu, nous avons trop souvent, tout indignes que nous en sommes, fait l’expérience de la fidélité de Jésus, pour être inquiétés par cette interprétation.

C’est une erreur que de restreindre à la discipline la portée de cette promesse. Elle est, au contraire, une raison pour laquelle la discipline ainsi exercée est reconnue de Dieu ; cette raison, c’est que Jésus s’y trouve. Mais cette précieuse déclaration s’applique, et s’applique plus immédiatement, à des requêtes faites en pareille circonstance, qu’à la discipline. C’est un fait toujours vrai que, là où deux ou trois se trouvent réunis au nom de Jésus, Jésus s’y trouve. C’est une déclaration générale donnée comme raison pour laquelle la discipline est valable. Car, dit le Seigneur, où deux ou trois sont assemblés en mon nom, j’y suis au milieu d’eux. Rien de plus simple. Je n’ai donc rien à reconnaître, sinon que l’interprétation n’est pas bonne.

§.

J’ai déjà parlé de l’autel de Néhémie. Le passage de Jérémie ne prouve rien, sinon ce principe, savoir, que l’Éternel peut mettre de côté ce qu’il avait lui-même établi. De fait, cela est arrivé quant aux Anciens. La question est tout simplement : La volonté de Dieu est-elle qu’on en établisse de nouveau officiellement ? Quant à l’autel, nous l’avons, et nous l’avons restauré par la grâce. Nous adorons avec bonheur autour de la table du Seigneur. Nous en ferons de même en tout ce qui n’est pas prétendre à ce que nous ne possédons pas.

§.

L’auteur anonyme a défiguré le sens du § 28, en l’isolant de la phrase du § 27 à laquelle le § 28 se rapporte, et qui fait voir très-clairement qu’il s’agit de la Parole de Dieu, mais que la puissance et l’opération du Saint-Esprit sont nécessaires pour nous donner du discernement. Le § 27 parle de la lumière de la conscience, de la lumière de la loi et des prophètes, et de la lumière de l’Évangile.

L’auteur anonyme nie-t-il que le témoignage du Saint-Esprit soit nécessaire dans les temps actuels ? S’il en est ainsi, je ne m’étonne de rien[10].

§.

Donner la conduite de Diotrèphe comme une preuve suffisante qu’il était Ancien, c’est là un singulier moyen de nous attirer vers ce genre d’autorité. Félicitons la commission préparatoire de ce qu’un pareil raisonnement n’ait heureusement pas l’ombre de fondement. Il n’y a, hélas ! que trop de Diotrèphes sans qu’il soit nécessaire d’Anciens établis pour en produire. On a vraiment peine à croire que notre auteur ait sérieusement voulu dire que le fait d’aimer à être le premier, et, conséquemment, de ne pas recevoir les Apôtres, prouve à lui seul qu’un homme soit un Ancien. Il demande si nous ne nous serions pas séparés à cause de la présence de Diotrèphe. Et pourquoi se séparer de l’Église par le fait qu’elle renfermait un méchant homme ? Pour ma part, je ne me séparerais jamais de rien dont je puisse avoir la pensée que c’est l’Église après que je l’aurais quitté. Du reste, je ne crois pas que 3 Jean, 10, signifie : « quand je viendrai je lui représenterai ce qu’il a fait ». Martin emploie, il est vrai, cette expression ; mais ὑπομνήσω signifie plutôt : je me souviendrai de ce qu’il a fait, ou : je le ferai se souvenir de ce qu’il a fait, sans préciser ce que l’Apôtre se proposait de faire lorsqu’il serait arrivé.

§.

Quant à l’explication des sept Églises de l’Apocalypse, ce n’est guère ici le lieu d’en donner l’interprétation. Ce serait écrire un livre. Il est clair que, lorsque l’on affirme que « les anges des Églises ne peuvent être que leurs conseils d’Anciens, » on peut en tirer les conséquences que l’on veut. Cette explication du mot ange n’est ni celle de la Parole, ni celle de l’histoire traditionnelle. Il est hors de doute que, dans la Parole, ange ne signifie pas un conseil d’Anciens, et la tradition donne aussi un tout autre sens.

La déchéance croissante des sept Églises est une question d’interprétation dont je ne m’occuperai pas ici. Il y a confusion dans ce que l’auteur anonyme en dit ; car il est évident que le fait d’être un chandelier d’or, n’empêche nullement la déchéance signalée déjà à Éphèse (« souviens-toi d’où tu es tombé »), et n’empêche pas même d’être vomi de la bouche du Seigneur Jésus, ce qui devait être exécuté à l’égard de Laodicée.

Dans ce qui suit, l’auteur fait une telle confusion entre l’état de l’Église universelle, à laquelle la question de déchéance s’applique, et les églises locales, dans lesquelles les Anciens se trouvaient, que peu de mots suffiront pour montrer la faiblesse de son raisonnement.

On peut prendre les sept églises comme des églises ; ou bien, on peut, avec beaucoup de chrétiens, les considérer comme une histoire prophétique de l’Église quant à son état moral ici-bas. L’auteur dit qu’à ce dernier point de vue, les Anciens et les églises doivent subsister jusqu’à la fin ; mais c’est une confusion complète. Car, à ce dernier point de vue, on a cessé de regarder ces chapitres comme s’occupant des sept églises. L’Esprit s’en sert pour montrer l’état de l’Église professante dans la suite des siècles.

  1. Après avoir abandonné sa position normale et ses ordonnances primitives, l’Église est-elle capable, ce péché commis, de rentrer, comme de droit, dans cette position-là, et de rétablir tout ce que les ordonnances longtemps abandonnées avaient établi, sans tenir compte ni de sa chute, ni de la ruine qui en résulte ?

    La question, telle que je l’ai posée, et elle est toute là, fait comprendre, sans aucune difficulté, la phrase de notre frère, M. Foulquier : « Lors même qu’il y aurait un commandement positif, je ne m’y soumettrais pas, vu l’état de l’Église. » La forme de sa proposition me paraît vicieuse, en ce qu’elle prête à l’idée d’un refus de la volonté : mais le sens en est très-évident, savoir, que l’état actuel de l’Église ne permet pas d’accomplir ce qu’exigerait un pareil commandement, s’il existait dans la Parole, et que, dans le cas où, sous prétexte d’obéissance, on prétendrait établir des Anciens d’après un tel commandement, il ne pourrait s’y soumettre, à cause de l’état de l’Église, motif exprimé, d’ailleurs, par notre frère, d’une manière tout à fait explicite. L’autorité de la Parole n’était donc nullement mise en question. Que cette expression ait pu, sur le moment, effrayer une âme droite, ignorant ce dont il s’agissait, je le comprends ; et il aurait été à désirer que notre frère, M. Foulquier, y eût fait attention. Néanmoins, le sens en est évident.

    Le manuscrit de notre frère, M. Foulquier, publié par l’auteur de la brochure : Faut-il établir des Anciens ? fait allusion, dans le passage incriminé, à ce qui a été dit dans une conférence publique, et n’en rapporte qu’une partie. Au reste, tous sont d’accord à l’égard de ce qui y a été dit. Notre frère Foulquier m’a dit avoir ajouté : « ce n’est que rétablir le clergé. »

    Il faut se souvenir que cette parole, à l’occasion de laquelle on a si fort crié au blasphème, a été prononcée à la fin d’une longue discussion sur le rétablissement des Anciens, comme s’il y avait dans la Parole de Dieu un commandement formel à ce sujet. Et c’est à la suite d’une discussion de détails, sur la question de savoir s’il existe un commandement de nommer des Anciens, que Foulquier a dit : « Lors même, etc.… vu l’état de l’Église. » Toute fautive que l’expression ait été, et je l’admets, je ne comprends guère, pour ma part, que, si, de bonne foi, l’on désirait comprendre, on ait pu s’y méprendre, vu le sujet dont on s’occupait et le motif énoncé, savoir : « vu l’état de l’Église. » Sur le moment même, notre frère, M. Kaufmann, dit que chacun savait que notre frère, M. Foulquier, ne rejetait pas un commandement.

    Ayant mentionné la brochure : Faut-il établir des Anciens ? il est nécessaire d’exposer un peu les faits.

    En faisant allusion à quelques circonstances, dont la connaissance jette une lumière nécessaire à l’intelligence de la question que nous traitons, je me borne à ce que la brochure en question a rendu indispensable.

    Dès l’entrée de sa brochure, l’auteur avance que Foulquier a lu le manuscrit auquel il répond, dans une assemblée de personnes qui partagent, comme F., les principes de M. Darby, et il ajoute : « Aucune de ces personnes, à notre connaissance, ne l’a désavoué ni contredit. Ce silence … nous autorise peut-être à l’envisager comme l’expression la plus récente, à Genève, des principes de nos frères de L’Île. »

    Cela fait comprendre ce que l’auteur entend par une assemblée, et son désir de faire retomber sur les frères la responsabilité du manuscrit de M. Foulquier.

    Voici les faits :

    Ce manuscrit n’a jamais été lu ni dans l’assemblée de ces frères, ni dans une assemblée, ni dans une réunion quelconque. Non-seulement cela. L’auteur anonyme avait eu, en présence de plusieurs personnes de son bord, des conférences avec quelques-uns de ces frères, dans lesquelles notre frère, M. Guillaumet, qui s’était occupé de ce sujet, avait lu un tout autre écrit, destiné à exposer les vues des frères sur le point en discussion. Après les conférences, l’auteur anonyme a eu entre les mains l’exposé de M. Guillaumet.

    Ce n’est pas tout.

    L’auteur anonyme revenant, en d’autres occasions, sur les paroles du frère Foulquier, comme décelant les principes du système, et rendant l’assemblée de L’Île responsable du principe qu’il prétendait y trouver, et qu’il dénonçait comme une si grande iniquité, celui qui avait été l’organe principal des frères, dans les conférences, lui adressa le billet suivant :

    « Je viens d’apprendre, avec bien de la peine, que la parole prononcée par Foulquier, dans notre dernière conférence, et qui lui est tout à fait personnelle, a été colportée par plusieurs et présentée comme un principe, et non-seulement cela, mais comme le principe de l’assemblée. Je déclare solennellement que c’est une insigne calomnie, et que les frères de L’Île marchent appuyés sur la Parole de Dieu, et rien que sur cette Parole, rejetant toute tradition et toute organisation humaines. Au reste, notre frère m’a expliqué le sens qu’il donne à ses paroles, sens qui est bien loin de ressembler à celui qu’on leur a donné. Il rejette, non pas le commandement, mais l’application qu’on en fait. Quelle différence ! Je vous prie de faire valoir cette lettre auprès des frères, afin de les rassurer sur notre frère Foulquier. Adieu en Celui qui a dit de pardonner sept fois septante fois, et qui le fait toujours à notre égard. »

    Cette communication a été faite à l’auteur anonyme longtemps avant la publication de sa brochure.

    Du moment où le manuscrit de Foulquier fut tombé entre ses mains, il lâcha l’écrit qui avait été lu à la conférence, pour s’occuper de celui-ci. Il l’a publié, ou, s’il veut, il lui a donné une demi-publicité, sans en demander la permission à Foulquier, sans l’en avertir, en déclarant, sans preuves et sans fondement, qu’il avait été lu dans une assemblée de personnes qui partagent les vues de M. Darby, ajoutant que personne ne l’avait ni désavoué ni contredit.

    Quant au manuscrit de notre frère Foulquier, en voici l’origine et l’histoire.

    Dans un moment où les frères de L’Île refusaient d’assister aux conférences provoquées, un frère, M. L., se rendit auprès de M. Foulquier pour les engager à s’y rendre, ajoutant qu’ils ne seraient pas nets du sang de leurs frères, s’ils refusaient de leur faire part des lumières qu’ils croyaient posséder. En conséquence de cette parole, Foulquier, après les conférences, a communiqué à M. L. un manuscrit de quelques pages, pour exposer son idée générale des voies de Dieu en rapport avec cette question. Plus tard, M. L. ayant demandé s’il pouvait le faire voir à d’autres personnes, Foulquier lui dit qu’il pouvait le faire voir à qui il voudrait, et que lui, Foulquier, en faisait de même de son côté. L’auteur anonyme s’étant adressé à Foulquier lui-même au sujet des paroles dont on a tant parlé, en lui demandant en même temps s’il suivait l’inspiration de l’Esprit sans la Bible, Foulquier lui a répondu que non : qu’il ne maintenait rien que ce qu’il croyait autorisé par la Parole ; qu’il ne savait pas s’exprimer aussi bien qu’il le voudrait ; mais que, pour le fond, il ne pouvait pas le retirer, et que, quelle que fût la forme, les objections de l’auteur anonyme n’en seraient probablement pas moins les mêmes.

    Tout ceci était déjà sous presse, lorsque j’ai reçu de notre frère, M. Foulquier, sans la lui avoir en rien demandée, la confession suivante, avec prière de l’insérer dans ma brochure. Plusieurs considérations me faisaient hésiter à faire cette insertion. Néanmoins, sur la prière positive de notre frère, je ne me sens pas libre de me refuser à son désir. Je me borne donc à y accéder sans ajouter une seule observation, me réservant le droit d’exprimer ce que je pense à l’égard de toute cette affaire, si l’occasion l’exige.

    Voici ce que dit notre frère, M. Foulquier :

    « Je reconnais devant le Seigneur, qui m’éclaire, et devant son Église, que j’ai souvent été une occasion de chute pour plusieurs frères, par mes expressions peu exactes, et j’en demande pardon à tous mes frères, en m’humiliant publiquement de ce mal, que j’ai commis, devant Christ et tous ceux qui confessent son nom, Je me recommande à leurs prières.

    (signé) J. Foulquier. »

  2. Lorsque je parle de blâme, je me doute pas qu’on ne trouvât aussi quelque chose à blâmer dans mes paroles ; mais, l’expression citée ayant été rendue aussi publique, il importe de lui donner sa juste valeur, et de ne pas approuver ce que Dieu n’approuve pas.
  3. C’est ici la grande instruction qui se trouve au commencement du livre de Samuel. Le peuple ayant manqué de fidélité, son infidélité, comme cela a toujours lieu, s’est manifestée le plus dans ce qui était officiellement le plus près de Dieu. Dieu va établir le seul vrai remède à l’incapacité où l’homme se trouve de se main tenir dans la bénédiction. Il va établir un Chef qui ne saurait manquer à la gloire de l’Éternel, et qui assurerait le bonheur de son peuple. C’est le vrai Roi, le Christ. Avant de le faire, et avant de manifester en plein l’iniquité qui rendait cela nécessaire, ou, au moins, avant que de la mettre au grand jour par le jugement, Dieu suscite l’esprit de prophétie, qui communique à son élue (figure d’un résidu chétif, abattu et sans force) sa puissance qui relève et élèvera la corne de son Oint. Ce grand fait change tout. Le Christ doit être manifesté comme l’appui, le soutien de la bénédiction de son peuple. Puis, après avoir montré ces choses, Dieu juge la sacrificature, et lui assigne sa place devant son Oint. Toutefois, il laisse arriver à son comble l’iniquité du peuple, par le mépris de la prophétie et par le mépris de Dieu lui-même, comme Roi immédiat de son peuple. C’est l’histoire de la royauté de Saül. Ce n’est que lorsque le peuple a rejeté Dieu comme son roi, que l’Éternel met à exécution ses conseils dans l’établissement de son Oint. Encore, nous le savons bien, a-t-il placé la royauté elle-même entre les mains responsables de l’homme. Nous savons quel en a été le résultat, et que Dieu a dû dire qu’Israël n’était plus son peuple. À la prise de l’arche, I-Cabod a été écrit sur ce peuple et sur la sacrificature qui se tenait devant l’arche. À la prise de Jérusalem, à la suite de l’iniquité des rois, Lo-Hammi (pas mon peuple) a été écrit sur tout ce qui restait debout des débris d’Israël. L’auteur anonyme y cherche une preuve que Dieu rétablit l’état primitif d’une chose en chute. Et Néhémie, l’a-t-il rétabli ? Est-ce que le fait d’être l’esclave des Gentils, de ces bêtes féroces, objet du jugement final de Dieu, et, en même temps, démonstration de ce que le jugement de Dieu avait fondu sur le peuple dont il avait été lui-même le roi, est une preuve que Dieu rétablisse l’état primitif d’une chose qui est en chute ? Que la conscience de l’homme doué d’intelligence spirituelle en juge.
  4. Il est important aussi de remarquer ici que, si, comme l’affirme l’auteur anonyme, Aggée n’a pas prophétisé avant que l’autel fût relevé, Jérémie, néanmoins, avait auparavant annoncé la durée de la puissance babylonienne, que Daniel avait compris le nombre des années à la fin desquelles devaient finir les désolations de Jérusalem, et qu’il avait reçu, comme réponse de la part de Dieu à son intercession, la révélation de ce qui devait se faire pour le rétablissement de la ville, dont Cyrus lui-même donna l’ordre en ces termes : « L’Éternel, le Dieu des Cieux, m’a donné tous les royaumes ; et Lui-même m’a ordonné de lui bâtir une maison à Jérusalem qui est en Judée. » (Esd. I, 2.) En ceci, je n’en doute nullement, cet homme juste, que Dieu a fait lever de l’Orient (És. XLI, 2, 25 ; XLVI, 11-13), a agi de la part de Celui qui a dit de Cyrus : « C’est mon berger, il accomplira tout mon bon plaisir, disant même à Jérusalem : Tu seras rebâtie, et au temple : Tu seras fondé. » Dieu a voulu que l’ordre partît du lieu où il avait placé le gouvernement de la terre (Dan. II, 37-38), lorsqu’il a dit Lo-Hammi à son peuple. Aggée et Zacharie ont encouragé la foi du peuple en les engageant à bâtir. L’ordre en était déjà donné, et donné de la part de celui à qui Dieu lui-même, par suite de l’infidélité de son peuple, en avait expressément confié le soin.

    L’auteur anonyme a dû oublier toute cette partie de la Parole. Du moins, n’en a-t-il pas profité, et il n’a pas su se rapporter à la sagesse de Celui qui, sur ce point même, a confondu l’iniquité des Juifs, qui se prévalaient des fruits de leur péché pour le mettre dans l’embarras, en l’exhortant à rendre à César ce qui était à César, et à Dieu ce qui était à Dieu. Car, selon la Providence de Dieu, César était l’héritier de Cyrus quant à la puissance du monde, s’il ne l’était pas de sa piété en reconnaissant les commandements de l’Éternel.

  5. Voyez : Jean VII, 39 ; XIV, 16-17, et une foule de passages.
  6. Quant à l’absence de preuves tirées du Nouveau Testament, dont l’auteur anonyme fait un reproche à l’écrit de Foulquier, peu de mots suffiront. Le manuscrit de Foulquier ne contenait qu’un résumé de principes à l’usage d’un frère. L’auteur anonyme avait entendu lire, dans la conférence, un mémoire qui, tout en étant l’œuvre d’un seul frère, revêtait le caractère d’une réponse de la part de tous, mémoire muni de preuves tirées du Nouveau Testament, et qui résumait, avec des citations, tout le contenu du livre des Actes et celui des Épîtres sur la question du ministère. Sur la demande de l’auteur anonyme, ce manuscrit lui a été communiqué, et il l’a examiné. Puis, l’écrit de notre frère, M. Foulquier, est tombé entre ses mains. Ces faits sont la meilleure réponse à l’accusation contenue dans les paroles suivantes de sa brochure, p. 20 : « Ainsi, chers frères de L’Île, vous ne nous laissez pas d’autre alternative que de vous croire sur parole, ou de souffrir, en nous y refusant, les plus terribles jugements de Dieu !!! Nous vous demandons avec instance des commandements bibliques, et vous nous donnez des arguments humains. »
  7. Il est important que le lecteur se souvienne que la division de l’écrit Foulquier en paragraphes n’est pas de lui, et que souvent elle défigure le sens, et coupe le fil des idées.
  8. C’est bien se contredire ; car il insiste ici sur la conservation de l’institution. Le fait est que l’institution n’existe plus. Mais on peut employer le terme conserver d’une manière équivoque, parce que l’institution est mentionnée dans la Bible qui est d’autorité perpétuelle. En fait, ce dont la Bible parle n’existe plus. Preuve en soit que l’auteur anonyme s’efforce, en ce moment, de l’établir de nouveau.
  9. Ce n’était pas la mission de Timothée ; mais nous toucherons ce point plus tard. Il est historiquement très-probable que le déclin de la piété ait fait ressortir l’institution des Anciens.
  10. Quand il dit « qu’il croira, jusqu’à ce que ces chers frères le démentent formellement, que ces frères se dirigent par le Saint Esprit en l’absence du témoignage de la Parole, » voici la réponse : Au moment où il écrivait ces lignes, il avait déjà depuis un certain temps entre les mains le démenti formel qu’il réclame, à telles enseignes que, dans une longue lettre en réponse à ce démenti demandé, il se plaint de la force des expressions dans lesquelles le démenti était conçu. La lettre, qui contient ce démenti, se trouve dans une note précédente.