Voyage de l’Atlantique au Pacifique (1866, Le Tour du monde)/02

Deuxième livraison
Traduction par Jules Belin de Launay.
Le Tour du mondeVolume 14 (p. 225-240).
Deuxième livraison
Le fort Edmonton. — Dessin de Bellel d’après MM. Milton et Cheadle.

VOYAGE DE L’ATLANTIQUE AU PACIFIQUE,

(ROUTE DU NORD-OUEST PAR TERRE),


PAR LE VICOMTE MILTON ET LE DOCTEUR CHEADLE[1].


1862-1864. — TRADUCTION INÉDITE. — DESSINS INÉDITS.




La vie du trappeur (suite). — Les voyageurs quittent leurs quartiers d’hiver. — Le fort Pitt. — Les castors. — Edmonton. — M. O’B. — On nous conseille de ne pas persévérer à passer par le col Leather. — La contrée est inconnue à l’ouest des montagnes. — Cols et passages.

Dans les nuits d’hiver, les aurores boréales sont souvent admirablement belles. Nous en vîmes deux dont la forme était celle d’une arche, semblable à un arc-en-ciel de teintes rosées, qui envoyaient des courants de lueurs changeantes et incertaines se rencontrer au zénith.

Le campement du trappeur dans les bois a toujours pour hôte la petite pie noire et bleue ; perchée sur un buisson voisin, elle attend qu’on lui donne pour sa part quelque débris du festin. Ces oiseaux sont si hardis qu’ils viennent, jusque dans le pot où bout le dîner, voler un morceau.

La neige n’avait pas encore plus de huit pouces de profondeur et nous ne nous étions pas jusqu’alors servis de nos raquettes dans les bois, où l’usage en est rendu assez embarrassant par les broussailles et les arbres renversés[2]. Il s’ensuivait que la marche était très-fatigante et que nous rentrions chez nous harassés, épuisés par une absence de cinq ou six jours.

La supériorité des Indiens, comme marcheurs, nous semble avoir pour cause leur habitude de porter le moccasin. Cette chaussure laisse la liberté à l’élasticité du cou-de-pied[3] qui, chez nous, est gêné par la dureté de la semelle de nos bottes. Les muscles du pied d’un Indien sont si développés qu’ils lui donnent l’air dodu et potelé qu’a le pied d’un enfant. On se moquait de la maigreur de nos hauts pieds et on croyait qu’ils devaient avoir été mal faits dès l’origine.

— Il faut, à regret, passer par-dessus beaucoup d’aventures et d’observations intéressantes des deux voyageurs pendant le reste de leur séjour à la belle prairie.

Le 3 août, ils quittèrent leur quartier d’hiver avec un sentiment de tristesse. Le 6 ils atteignirent la Saskatchaouane. Elle était encore bien prise et ils la passèrent sur la glace. Ils remontèrent ensuite la rive gauche de la Saskatchaouane du Nord dans la direction du fort Pitt où ils arrivèrent le 20 avril. Ils y restèrent huit jours, puis, avançant vers le nord, ils traversèrent un des plus beaux paysages du monde. Ils engagèrent un nouveau serviteur Louis Battenote, surnommé L’Assiniboine, homme d’une force athlétique et qu’on aurait pris pour l’un des Indiens parmi lesquels il avait toujours vécu. La femme et le fils de L’Assiniboine se joignirent à la caravane. —

Chemin faisant, poursuivent les voyageurs, nous rencontrâmes souvent les marques des travaux du castor à des époques déjà éloignées de nous, lorsque sa race était nombreuse et puissante. Entre autres, dans un endroit, il y avait une longue chaîne de marais qu’avait causés un endiguement construit à travers un ruisseau qui dès lors avait cessé d’exister. Les demeures des castors paraissaient abandonnées depuis plusieurs siècles ; car leur maison n’était plus qu’une levée herbeuse sur la terre sèche, et la digue qui la précédait avait la forme d’un remblais solide et recouvert de gazon. La rivière du Chien (Dog River)[4], petit affluent de la Saskatchaouane, conserve encore un établissement de ces animaux. Le long des rives nous en vîmes des traces fraîches, et même quelques petits arbres venaient d’être coupés. Ces indications que nous suivîmes, en remontant le cours, nous conduisirent à la digue. C’était un barrage formé de troncs et de branches, par-dessus lequel l’eau passait doucement pour aller reprendre à l’aval une course plus rapide. Dans la paisible mare qu’il formait en amont et tout proche de la rive opposée, s’élevait la demeure des castors, construction conique de six ou sept pieds de hauteur et formée de perches et de branches recouvertes d’un plâtrage de boue. Cet établissement doit remonter aussi à de bien lointaines années, car nous vîmes des troncs d’arbres que les castors avaient abattus et qui se trouvaient actuellement pourris et couverts de mousse. Il y en avait de grande taille et l’un d’eux avait plus de deux pieds de diamètre. Cela nous permit de constater que le castor a bien déchu de la gloire de ses ancêtres : non-seulement ses communautés sont moins nombreuses et moins étendues, mais encore ses entreprises ont perdu leur importance.

Ainsi les arbres coupés récemment étaient petits en comparaison des anciens ; ils semblaient indiquer que

plusieurs castors avaient attaqué à la fois le même arbre
Gravé chez Ehrard R. Duguay-Trouin 12
et que la faiblesse de leur colonie ne leur permettait

plus de s’en prendre à un de ces géants que leurs ancêtres n’auraient pas hésité à abattre. Il nous fut impossible de découvrir un seul courant considérable qui eût été intercepté par les travaux des castors de nos jours. Une pareille digue exige des arbres de trop haute futaie et un nombre d’ouvriers trop considérable. Cependant nous rencontrions fréquemment des remblais gazonneux, ouvrage d’un âge d’or écoulé, jetés au travers de cours d’eau qui avaient eu trente à quarante mètres de large.

À un endroit nommé les Collines des Serpents (Snake Hills), nous repassâmes la Saskatchaouane sur un radeau construit par L’Assiniboine. C’était un frêle châssis fait avec du saule vert, attaché par des bandes de cuir ; le tout couvert d’une peau de bison cousue à petits points et bien graissée à tous les trous. Ce léger canot n’avait que six pieds de long sur deux de large et autant de profondeur. Nous faillîmes sombrer.

Le 14 mai, nous étions en vue d’Edmonton[5]. C’est un fort agréablement situé sur la falaise élevée qui domine au nord le cours de la Saskatchaouane septentrionale. La barque de la Compagnie ne tarda pas à venir nous prendre et nous reçûmes, dans le bâtiment, la plus aimable hospitalité.

L’établissement d’Edmonton est le plus important du district de la Saskatchaouane ; il y réside un facteur en chef qui a la direction de tous les postes inférieurs. Edmonton possède un moulin à vent, une forge et un atelier de charpentiers. On y construit et on y répare les bateaux qui font annuellement le voyage de la factorerie d’York, dans la baie d’Hudson ; on y fabrique les charrettes, les traîneaux et les harnais, ainsi que tous les objets nécessaires au trafic de la Compagnie entre ses différents postes.

Le blé y est magnifique, les pommes de terre et les autres racines y poussent aussi merveilleusement bien que dans toute la vallée de la Saskatchaouane. Le fort est habité par une trentaine de familles dont les membres sont engagés au service de la Compagnie ; un corps considérable de chasseurs est perpétuellement employé à fournir de la viande à l’établissement.

Près du lac Saint-Alban[6], à neuf milles environ au nord d’Edmonton, se trouve une colonie d’hommes libres, c’est-à-dire de métis qui ont quitté le service de la Compagnie. Elle est dirigée par un prêtre catholique. Puis, à une quarantaine de milles plus loin, dans l’ouest, est une colonie plus ancienne encore, celle du lac Saint-Anne, ayant les mêmes caractères, mais des habitants plus nombreux.

Nous vîmes M. Macaulay, de Jasper-House[7], qui venait y chercher ses provisions d’hiver.

Il vint aussi à Edmonton une compagnie de mineurs qui avaient lavé de l’or au ruisseau de la Boue Blanche (White Mud Creek[8]), situé à une cinquantaine de milles vers le haut de la Saskatchaouane. Leur chef était un Kentuckien nommé Love. Il rapportait un petit sac de belle poudre d’or, et nous assura que chaque homme avait déjà, depuis le commencement de l’été, recueilli quatre-vingt-dix livres sterling (deux mille deux cent cinquante francs).

Nous fîmes enfin la connaissance d’un monsieur O’B…, homme très-versé dans la connaissance des études classiques, irlandais, de quarante à cinquante ans, d’une taille moyenne et d’une constitution robuste. Il avait la figure longue et les traits larges ; une bouche en retraite et presque sans dents augmentait la valeur de son nez un peu long. Il portait un long vêtement d’alpaga, de forme ecclésiastique, et un large chapeau noir, qui ne s’accordait guère avec la barbe longue d’une semaine qui recouvrait son menton, ni avec ses culottes de futaie et ses bottines attachées avec de la paille. Il tenait à la main un énorme bâton. Bref, toute sa personne annonçait un singulier mélange de l’homme d’église et du paysan. Il se présenta à nous en nous faisant un petit speech flatteur à la fois pour lui-même et pour nous, où il nous apprenait qu’il était petit-fils du célèbre évêque O’B…, et qu’il avait pris ses grades à l’université de Cambridge. Il nous pria de l’admettre dans notre compagnie jusqu’à la Colombie Britannique. Ce fut le personnage comique de l’expédition.

M. Hardisty, le négociant en chef, et les autres officiers d’Edmonton s’efforcèrent de nous faire renoncer au dessein de prendre le col Leather, affirmant que la saison n’était pas encore assez avancée et que les rivières, enflées par la fonte des neiges des montagnes, couleraient à pleins bords. Ils nous disaient que la plupart des cours d’eau étaient des torrents écumeux remplis de roches, très-dangereux à franchir, excepté à l’automne quand les eaux sont basses ; que la région à l’ouest des Montagnes Rocheuses était, autant que l’on pouvait savoir, inhospitalière, hérissée de rochers, couverte partout de forêts impénétrables ; que même, si nous descendions le Fraser au lieu d’essayer de gagner le Caribou, nous trouverions cette rivière pleine de rapides et de tourbillons, qui souvent avaient été mortels aux canotiers les plus experts. Ce passage, connu sous les noms divers de col Leather, ou de col de Jasper-House, du lac Cowdung, de la Tête-Jaune[9], avait été jadis employé par les

voyageurs de la Compagnie de la baie d’Hudson
Étangs à castors : Hutte et digue construits par ces animaux. — Dessin de Bellel d’après MM. Milton et Cheadle.
comme un portage[10] de l’Athabasca au Fraser ; mais il

se trouvait aujourd’hui abandonné depuis longtemps, à cause des difficultés insurmontables que présentait la navigation du dernier fleuve.

Un parti de cinq aventuriers avait quitté Edmonton à la fin de l’automne de la même année 1862, avec l’intention de se procurer des canots à la Cache de la Tête-Jaune, et de descendre le Fraser jusqu’au fort George[11]. Personne ne savait ce qu’ils étaient devenus.

Nous résolûmes toutefois de nous en tenir à notre premier projet d’essayer de passer par le col Leather, de suivre autant que possible la route des émigrants, et ensuite de nous fier à nos cartes, toutes imparfaites qu’elles étaient, et à la sagacité de nos gens, pour gagner soit le Caribou ou le fort Kamloupz, à la fourche et au confluent des deux Thompsons, suivant les circonstances.


Départ d’Edmonton. — On n’y croit pas à notre succès — Lac Sainte-Anne. — Entrée dans la forêt. — La rivière Pembina. — Le charbon de terre. — Gibier — Curieuse coutume des tétras de saule. — Changements effectués par le castor. — Le coude du Mac Leod. — La forêt en feu. — Sauvés ! — La rivière Athabasca. — Premier aperçu des Montagnes Rocheuses. — Sur les montagnes. — Admirable paysage. — Jasper-House.

Le 3 juin 1863, nous partions d’Edmonton, accompagnés des bons souhaits des excellents amis que nous nous y étions faits. Mais, bien qu’ils appelassent de tout leur cœur l’aide de Dieu sur nous, l’opinion publique, à ce que nous dirent nos gens, considérait, dans le fort, notre expédition comme destinée à une fin désastreuse.

Le 5 juin, partis de Saint-Alban, nous suivîmes, durant une cinquante de milles, la route qui conduit au lac Sainte-Anne. Le pays est fertile et pareil à un parc ; mais ici commence la profonde forêt qui se prolonge dans le nord et ne finit qu’aux montagnes à l’ouest. Il est vraisemblable que les rives de ce lac ont été choisies comme le site d’une colonie à cause de l’immense quantité de coregonus ou de poissons blancs qu’il fournit et qui forment le fond de la nourriture de leurs habitants. C’est une jolie pièce d’eau qui a plusieurs milles de long et dont les rives occidentales sont égayées par une église et une cinquantaine de maisons.

À notre départ du lac Sainte-Anne, le chemin nous conduisit immédiatement au cœur de la forêt, dans un terrain marécageux, pourri et profondément couvert d’arbres tombés de vieillesse. Les chevaux y enfonçaient jusqu’au poitrail, et, de distance en distance, avaient à franchir les obstacles qui encombraient la voie.

À deux jours du lac, la route parut s’améliorer : on trouvait quelques places de pays ouvert, les arbres étaient moins élevés, et ils formaient des groupes sur les penchants de basses collines. À midi, nous étions près d’un grand lac, que nous côtoyâmes tout le reste de la journée. Il paraissait bien peuplé de poisson et de volaille sauvage. Les poissons dans les eaux basses se reposaient au soleil, daignant à peine se déranger à l’approche de nos chevaux.

Le 11 juin, nous étions près de la rivière Pembina. Elle a des eaux claires, peu profondes, coulant vers le nord-ouest, sur un lit de cailloux, entre des berges perpendiculaires qui ont bien quatre-vingts pieds de haut. Ces bords laissaient voir la section d’un magnifique gisement de charbon, ayant quinze à vingt pieds de profondeur. Nous passâmes aisément la rivière à gué.

Pendant deux ou trois jours encore, le pays présentait la même surface légèrement onduleuse, aux bois épais, n’ayant presque aucune éclaircie ni éminence d’où la vue pût s’étendre à distance. Le sol ferme ne se trouvait qu’au faîte des collines étroites et basses qui séparaient des vallées larges et peu profondes. Celles-ci étaient occupées par des muskegs, sortes de marais unis et recouverts d’une croûte moussue qui a cinq ou six pouces d’épaisseur ; le grand nombre de sapins qui ont poussé dru et d’arbres qui sont tombés y ajoute aux difficultés de la route.

De temps en temps, nous traversions des pistes d’élans et d’ours noirs. Les premiers jours, on voyait quelques canards sur les cours d’eau et sur les lacs ; mais, à mesure que nous pénétrions plus avant dans l’intérieur de la forêt, la volaille sauvage disparaissait des eaux. D’autre part, les pigeons, les perdrix de bois et les perdrix de pin se montraient en abondance et nous en tuions d’abord en quantité. La perdrix de bois ou tétras de saule fréquente les bois épais et les terrains bas, aux deux côtés des Montagnes Rocheuses. Si elle est effrayée, elle s’envole dans un arbre et y sert de but. Quand plusieurs tétras sont groupés, ils se laissent abattre l’un après l’autre au lieu de partir. Au printemps, le mâle, pour plaire à la femelle, se livre à l’exercice suivant : il se pose sur une branche, ébouriffe ses plumes, étend sa queue comme un dindon fait sa roue, ferme ses paupières et bat le tambour contre ses flancs à l’aide de ses ailes, produisant un bruit fort semblable à celui d’un tonnerre lointain. Dans cette occupation, il s’absorbe au point de se laisser approcher assez près pour qu’on puisse lui jeter au col un nœud coulant attaché au bout d’un court bâton.

Vers le milieu de juin les perdrix étaient entourées par leurs jeunes couvées, et nous cessâmes de les tirer. Quand nous en rencontrions, la femelle, et quelquefois même le mâle, s’élançait en avant, jusqu’à près de deux mètres de nous, les ailes étendues, les plumes hérissées, absolument comme les poules de nos fermes pour défendre leurs poussins. La perdrix de pin est un peu plus grosse que le tétras de saule, plus foncée en couleur, comme un tétras anglais, avec une bande écarlate au-dessus des yeux. On ne la rencontre que dans les muskegs ou marais à sapins. Le pigeon est le beau pigeon voyageur, à longue queue, si commun dans les forêts américaines ; nous l’avons rencontré dans l’ouest jusqu’aux sources de la Thompson septentrionale.

« Un curieux oiseau, que nous n’avons trouvé qu’entre la Pembina et l’Athabasca, et que nous avons appelé l’hirondelle retentissante, a attiré notre attention, mais nous n’avons jamais pu nous en procurer un échantillon. Il était à peu près de la taille d’un pigeon, avec des ailes longues et étroites comme celles du martinet. Il s’élançait comme lui çà et là dans les airs, paraissait prendre des mouches et, quand il était à une grande élévation, il tombait comme une flèche, faisant un singulier retentissement qu’on ne peut bien comparer qu’au bruit grandissant que produit une machine à battre le blé lorsqu’on y met une gerbe de grain. Nous n’avons jamais vu cet oiseau ailleurs en Amérique.

Trois jours après avoir passé la Pembina, nous nous arrêtâmes pour dîner dans une prairie marécageuse qu’avait formée une digue construite par les castors à travers un cours d’eau ; elle ressemblait tout à fait à celles que nous avions remarquées près de la rivière du Chien et à Edmonton. Ces endroits avaient maintenant beaucoup de valeur pour nous, car ils étaient les seuls espaces ouverts où il fût possible de faire paître nos chevaux, jusqu’à notre arrivée aux montagnes. Ils étaient fort communs le long de notre route et, le plus souvent, un monticule herbeux et un terrassement au travers de la prairie nous signalaient la vieille maison des castors et leur digue. Entre la Pembina et l’Athabasca, il n’y a presque aucun cours d’eau, hormis la grande rivière Mac Leod, qui n’ait l’air d’avoir été détruit par le travail de ces animaux.

Le Mac Leod est une belle rivière qui a environ cent cinquante mètres de large. Il roule ses eaux claires et peu profondes, comme la Pembina, sur un lit de rocs et de cailloux.

La chaleur était accablante. Les moustiques et une espèce de taons, que les métis appellent des bouledogues, tourmentaient les chevaux, et bien que nous eussions fait un grand feu de bois vert à leur intention (la fumée écartant les insectes), nos bêtes ne pouvaient paître et s’élançaient en tous sens, affolées par leurs douleurs.

Quand nous eûmes passé le Mac Leod, nous continuâmes à remonter le long de la rive gauche ou occidentale. La route était devenue plus mauvaise qu’aucune de celles que nous eussions vues encore. Le sol était marécageux et les sapins trop rapprochés.

Le 16, nous atteignions un endroit où, la rivière remontant par un coude qu’elle fait vers le sud, le chemin s’en éloigne à angle droit pour l’éviter. Il y a ici une petite rivière qui tombe dans le Mac Leod, et les collines grossissent et s’élèvent vers l’ouest.

Deux jours après, nous retrouvâmes le Mac Leod. Mais le petit sentier qui en suivait le cours s’effaçant de plus en plus, L’Assiniboine eut l’idée que nous avions quitté le bon chemin allant à Jasper-House, et partit à la recherche d’une meilleure route ; sa femme et son fils descendirent à la rivière laver quelques vêtements et nous restâmes seuls avec M. O’B.

Les taons étaient fort nombreux : nous fîmes, dans l’éclaircie que nous avions pratiquée, un grand feu dans l’intérêt de nos chevaux, puis un plus petit pour notre usage particulier. Nous étions tranquillement assis à l’entour, occupés à faire cuire le pemmican. M. O’B. avait retiré ses bottes et prenait un grand plaisir à fumer sa pipe. Tout à coup, l’autre feu se mit à petiller et à ronfler plus fort. Nous regardâmes, et nous fûmes frappés d’effroi en voyant que plusieurs des arbres qui entouraient notre clairière s’étaient enflammés. Il est probable que les chevaux, en se poussant mutuellement pour se mettre au plus épais de la fumée, avaient d’un coup de pied envoyé quelque tison parmi les sapins. Ceux-ci, bien que verts, brûlent avec plus d’intensité que le bois le plus sec. C’était un moment critique. Cheadle saisit la hache et abattit arbre sur arbre pour isoler des autres ceux qui avaient pris feu. Milton s’épuisait en courses pour apporter des seaux d’eau, qu’il allait prendre dans une mare, heureusement à proximité, et pour en inonder la mousse épaisse et sèche qui communiquait rapidement le feu à la surface du sol. Déjà cependant nous nous trouvions presque environnés par les arbres incendiés ; les flammes étincelaient et filaient de branche en branche, d’arbre en arbre, de la façon la plus épouvantable. Elles pétillaient et criaient. Elles dévoraient avidement la résine des troncs. Elles éclataient et sifflaient. Les feuilles inflammables des branches largement développées les attiraient. La peur rendait nos chevaux indociles. Plusieurs, en dépit des flammes, s’élançaient dans l’épaisseur de la forêt qui les environnait, et l’un d’eux, brûlé aux jambes, se jetait par terre et se roulait de douleur au plus fort du brasier. Jetant la hache et le seau, nous nous mîmes à le tirer par la tête et par la queue, mais en vain ; alors nous le battîmes férocement à la tête ; il fit un saut et s’élança dans le bois. Mais le retard causé par cet incident fut près de nous devenir fatal. Le feu en avait rapidement pris avantage ; l’air devenait brûlant, la fumée étouffante ; les flammes rugissaient avec fureur : un instant, nous nous demandâmes s’il ne valait pas mieux laisser tout là et nous réfugier dans la rivière. Cependant le courage nous revint ; nous reprîmes la hache et le seau, et, à mesure que nous abattions des arbres et que nous éteignions des espaces de mousse, nous recommencions à espérer. Au milieu de ces frénétiques efforts, l’idée nous vint que notre ami, M. O’B., ne nous avait encore donné aucune assistance. Regardant autour de nous, nous le vîmes assis où nous l’avions laissé, tiraillant faiblement une botte qu’il avait l’air d’avoir la plus grande difficulté à mettre. Nous lui criâmes de venir, au nom de Dieu, nous aider, s’il ne voulait pas que nous mourussions tous dans les flammes. Il répondit d’une manière assez indécise qu’il allait arriver tout de suite, dès qu’il aurait mis ses bottes. Enfin, excité par nos représentations, par la réflexion qu’il brûlerait aussi facilement avec ses bottes que déchaussé, il accourut tremblant, hors de lui, nous apportant une assistance aussi tardive que peu utile, sous la forme de demi-pintes d’eau qu’il puisait dans sa petite bouilloire d’étain. Néanmoins, peu à peu, nous réussissions à couper le feu qui continuait à faire rage loin de nous. Quand nous rassemblâmes nos chevaux, nous vîmes que celui-la même qui nous avait causé tant d’inquiétude n’était pas trop maltraité, bien que roussi par tout le corps et sérieusement brûlé aux jambes.

L’Assiniboine revint peu après. Il avait trouvé le bon chemin.

Un des jours suivants, à notre campement du soir, nous lûmes, sur un arbre, une inscription où nous apprîmes que les trois mineurs qui avaient quitté leur compagnie dans le district de la Saskatchaouane, pour découvrir les sources de cette rivière, s’apercevant qu’ils étaient près de l’Athabasca, s’étaient détournés pour aller chercher les sources du Mac Leod.

Le sur lendemain, une marche d’un demi-mille nous conduisit aux rives de l’Athabasca. Comme la Saskatchaouane, elle coulait dans un canal qu’elle s’était creusé au fond de la large vallée de la rivière. Les coteaux escarpés qui la bordaient avaient deux cents pieds de haut et étaient couverts de bois épais de pins, de sapins et de peupliers, qui ressemblaient fort à ceux du Mac Leod. Cependant la vallée de l’Athabasca est plus enfoncée et plus large. Les eaux de la rivière étaient troubles, profondes et rapides. Elles avaient alors, étant gonflées dangereusement, toute l’élévation du printemps et contrastaient vivement avec les cours d’eau clairs et bas que nous avions récemment traversés. L’Athabasca remplissait son lit jusqu’aux bords, avait deux cents mètres de large, se précipitait, enflait ses grosses vagues par-dessus les roches dont son lit est semé, et entraînait dans le courant de larges pins de cinq ou six pieds de diamètre, qu’elle faisait sautiller et tournoyer comme les pailles qui descendent un ruisseau.

En montant. — D’après MM. Milton et Cheadle.

Bientôt le sommet d’une butte ronde et dégarnie nous donna la première occasion d’apercevoir les montagnes Rocheuses. C’était un magnifique point de vue et le plus encourageant que nous pussions rencontrer. Il y avait si longtemps que nous vivions dans une contrée plate ! Depuis trois semaines, nous avions vécu ensevelis dans les profondeurs de la forêt, qui nous fermait toute perspective et nous privait presque de la clarté du jour.

Des chaînes de collines couvertes de sapins, courant presque du nord au sud, s’élèvent, par gradins toujours plus hauts, vers l’occident ; à l’horizon, nous voyions, parallèlement à ces hauteurs, une chaîne de pics sourcilleux et rocheux, que dominaient les têtes neigeuses de quelques géants. Cette neige, qui couronne les sommets les plus hauts, demeurait encore dans les creux des parties moins élevées ; elle étincelait au soleil à travers la vapeur d’un bleu pâle qui fondait les tons du paysage et rapprochait, presque jusqu’à nous, ces montagnes éloignées. Dans la chaîne, une entaille, aussi nette que si elle avait été faite au couteau, montrait, à notre imagination, l’ouverture de la gorge par laquelle nous devions passer. Un rocher bizarre situé sur le côté gauche ou oriental de ce passage, et fort semblable

à la moitié d’un gâteau de Savoie coupé
Incendie dans la forêt — Dessin de Émile Bayard d’après MM. Milton et Cheadle.
verticalement, devait être celui nous avions entendu par

sous le nom de la Roche à Miette, non loin de Jasper-House.

Un des jours suivants, L’Assiniboine nous conduisit sur un petit plateau découvert, où il n’y avait que des fleurs sauvages, et situé à la base de la Roche à Miette qui s’élevait perpendiculairement au-dessus. Nous y déchargeâmes les chevaux et nous nous y arrêtâmes pour prendre du repos.

Dans l’après-midi, nous vîmes des traces nombreuses et fraîches du bighorn ou mouton gris, qui vit à l’état sauvage dans les montagnes Rocheuses[12]. L’Assiniboine et Cheadle entrèrent en chasse et escaladèrent les pentes roides des montagnes qui alors fermaient complétement la vallée. Le reste de la bande suivit un chemin bien frayé et montant brusquement, pour éviter une falaise escarpée qui en cet endroit penchait au-dessus de la rivière. Ce chemin s’élevait de plus en plus, longeant les saillies rocheuses ou escaladant des pentes abruptes, vertes et glissantes. Enfin il atteignait le terme de la végétation et n’était plus séparé que par un précipice de la hauteur où se tenaient les neiges perpétuelles. Nos chevaux s’arrêtaient souvent ; ils cherchaient à se dérober à leur tâche ardue.

Nous eûmes bientôt en plein la vue des Montagnes Rocheuses. C’était un paysage admirable. De toutes parts des pics aux formes les plus étranges s’élançaient dans les airs. À l’ouest, la Roche du Prêtre, pyramide de glace, s’élevait éclatante au-dessus d’une sombre montagne recouverte de sapins ; à l’est, la remarquable Roche à Miette ; en face et derrière, des montagnes coniques, crénelées, hérissées ; à des centaines de pieds au-dessous de nous, courait la tortueuse Athabasca. Sortant du cœur des montagnes à travers une gorge resserrée, elle pénètre dans une assez large vallée où elle s’étale en un lac de trois à quatre milles de long, puis elle se rétrécit de nouveau et se divise en plusieurs bras qui enveloppent des îles boisées ; après quoi, elle se développe encore dans un second lac plus petit que le premier. C’est là, entre ces deux lacs, sur la rive gauche de l’Athabasca, que gisait au fond de la vallée, comme une tache, le petit bâtiment de bois que nous avions si longtemps désiré d’atteindre. Avec quelle joie nous l’aperçûmes ! Il était là, sous nos yeux ! Jusqu’alors nous avions pu nous demander si, au lieu de la route de Jasper-House, nous ne suivions pas en effet un sentier tracé dans les montagnes par les chasseurs.

Nous descendîmes dans la vallée par un chemin pareil à celui qui nous avait fait gravir la montagne.

Jasper-House est un petit bâtiment propret et blanchi, entouré d’une basse palissade et situé au milieu d’un vrai parterre de fleurs sauvages. Évidemment le fort n’avait point d’habitants ; mais, comme la voie ne semblait pas conduire ailleurs, nous nous décidâmes à passer la rivière, et nous nous mîmes à couper des arbres pour faire un radeau.


Construction d’un radeau. Les Chouchouaps des Montagnes Rocheuses. — Passage de l’Athabasca. — La Roche du Prêtre. — Site du vieux fort Henry-House. — La vallée de la Miette. — Passage des rapides. — La ligne de faîte. — Le lac de la Bouse de Bison. — Le Fraser. — Une journée de marche dans l’eau. Le lac de l’Élan. — Chutes Rockingham. — Le Pont de Mahomet. — Fourche du Fraser, jadis appelée Cache de la Tête-Jaune. — Pic de Robson. — Inondation et forêt. — Perte de Giscouékarn. — Nous arrivons à la Cache.

Le 30 juin, nous travaillâmes dur avec nos deux hachettes, abattant les pins desséchés. L’après-midi s’avançait sans que nous eussions coupé assez de bois, et nous avions à le transporter à quelques centaines de mètres sur le bord de l’eau. Il fallut remettre au lendemain le passage de la rivière.

Milton et le jeune Assiniboine s’étaient volontairement offerts pour traverser, à la nage, avec les chevaux, l’Athabasca, afin de porter à l’autre rive des cordes dont nous nous servirions pour guider le radeau. C’était une entreprise qui ne manquait pas de dangers, car la rivière était large et le courant extrêmement rapide. Or, le lendemain matin, avant que nos préparatifs fussent terminés, un métis entra dans notre camp. Il était le bienvenu auprès d’hommes qui avaient voyagé trois semaines sans voir leurs semblables. Il nous conseilla de ne traverser l’Athabasca que quelques milles plus haut, en amont du lac.

Chemin faisant nous dûmes passer plusieurs courants ou très-probablement plusieurs bouches d’une seule rivière qui, très-enflée et très-rapide, venait du sud se jeter dans l’Athabasca.

Nous les franchîmes à cheval, très-malaisément et en suivant pas à pas notre guide. Il n’y eut que M. O’B. qui, ayant pris en un dégoût invincible l’équitation, depuis que son cheval s’était couché sous lui en gravissant la montagne, s’obstina à traverser à pied et courut grand risque de se noyer.

Nous gagnâmes peu après une plaine sablonneuse richement couverte de fleurs ; nous y campâmes près d’un lac clair et peu profond, qui communiquait par une issue étroite avec le lac supérieur de l’Athabasca. Nous décidâmes d’y attendre l’arrivée de M. Macaulay.

Dans la soirée, deux Indiens Chouchouaps vinrent nous trouver et essayèrent de percer de leurs dards des poissons blancs à la lumière d’une torche. Ils en prirent quelques-uns et nous les vendirent volontiers pour un peu de munitions et de tabac. Maigres, décharnés, de moyenne taille, ils étaient moins robustes que les Indiens que nous avions rencontrés auparavant. Leurs traits plus délicats étaient bien dessinés et avaient une expression plus douce, mais aussi intelligente que ceux des autres. Ils ne portaient qu’une chemise et une robe de peau de marmotte ; leurs jambes et leurs pieds étaient nus et ils n’avaient pour coiffure que leur longue chevelure noire. Ces Chouchouaps des Montagnes Rocheuses habitent le pays entre Jasper-House et la Cache de la Tête-Jaune, sur le versant occidental. Ils appartiennent à la grande nation Chouchouap, qui habite les environs du lac Chouchouap entre les deux bras de la rivière Thompson, dans la Colombie Britannique. Séparés du gros de leurs tribus par une distance de trois à quatre cents milles, que couvrent des forêts presque impénétrables, ils n’ont avec lui que peu de relations.

Le 3 juillet, M. Macaulay arriva et fit poser sa tente près de notre loge. Nous fîmes avec lui un excellent souper de truites délicieuses, qu’il avait pêchées la veille dans les lacs de la montagne. Il nous apprit que les trois mineurs dont on avait parlé à Edmonton, comme ayant conçu le projet d’examiner les sources de la Saskatchouane septentrionale, et dont nous avions lu l’avertissement écrit sur un arbre quand nous étions arrivés à l’Athabasca, étaient déjà passés se dirigeant à travers les montagnes sur le Caribou.

M. Macaulay nous engagea aussi à prendre pour guide, jusqu’à la Cache de la Tête-Jaune, un vieux métis iroquois.

Le 4 juillet, nous nous remîmes en route sous la conduite de cet Iroquois. M. Macaulay et deux de ses gens nous accompagnèrent jusqu’au point où nous devions traverser l’Athabasca. Quand le chemin n’était pas sous l’eau, qui montait souvent jusqu’au poitrail des chevaux, il longeait les flancs escarpés de la vallée qui allait en s’étrécissant, et nous ne parvînmes à notre destination qu’à la nuit tombante. Nous campâmes pour la nuit au bord de la rivière, à un endroit où il y avait une abondance de bois sec, dont les émigrants canadiens avaient déjà coupé une certaine quantité pour faire leur radeau. L’un des arbres portait inscrits les noms de ceux dont nous avait parlé M. Macaulay comme nous ayant précédés ; il nous apprenait en outre que leur passage avait eu lieu le 16 juin, c’est-à-dire environ trois semaines auparavant.

Au matin suivant, nous nous mîmes tous à l’œuvre, abattant et transportant le bois. À midi, le radeau étant prêt, nous fîmes entrer les chevaux dans l’eau. Quand ils furent arrivés en sûreté sur l’autre bord, nous récompensâmes nos amis les métis en leur distribuant ce qui nous restait de rhum, politesse qu’ils préféraient à toute autre, et, faisant notre adieu cordial à M. Macaulay et à ses compagnons, nous continuâmes notre entreprise.

À cette place, la rivière était profonde, large et paisible ; nous la franchîmes heureusement et sans difficulté. Avant d’avoir atteint la rive opposée, nous découvrîmes que nous avions laissé sur celle que nous venions de quitter une des deux hachettes qui nous restaient ; cependant nous ne revînmes point sur nos pas, parce que ce n’était pas une petite affaire que de diriger un si grand radeau. Si nous avions su combien nous regretterions par la suite la perte de cet instrument, nous n’aurions certes rien épargné pour le recouvrer.

Le lendemain vers midi, en remontant toujours le long de l’Athabasca, nous trouvâmes une belle petite prairie environnée de hauteurs que couvraient des sapins verts presque jusqu’au sommet et que dominaient des pics élevés tout revêtus de neige. L’un de ces pics, qui a reçu le nom de la Roche du Prêtre, a une forme curieuse : son sommet ressemble à celui d’une pyramide enveloppée de neige. La prairie était richement émaillée de fleurs, et un âpre monticule y marquait l’emplacement de Henry-House, l’ancien fort des Montagnes Rocheuses.

À cet endroit, le chemin quittant la vallée de l’Athabasca, tournait vers le nord-ouest et pénétrait dans un ravin étroit et rocailleux qu’on appelle la vallée de la Miette[13]. Ce cours d’eau n’avait pas plus de trente mètres en largeur, mais il était profond et rapide, et son lit était semé de grosses pierres et de rochers. Le chemin était souvent coupé par de larges pierres et de grands arbres tombés formant des abatis si épais que nos deux hommes eurent toute l’après-midi une rude besogne et que nos chevaux n’avançaient qu’en sautant continuellement. Nous fîmes à grand-peine peu de chemin et nous campâmes pour la nuit sur le bord de la Miette.

Pendant toute la matinée suivante, la route présenta les mêmes difficultés et nous avançâmes aussi lentement que la veille. À midi, nous atteignîmes la place où il fallait passer la rivière, et nous nous y arrêtâmes pour construire un radeau. Arrivés sur l’autre côté, nous marchâmes péniblement à travers un ravin étroit, et où les montagnes descendaient si près du bord de l’eau que, pour avancer, nous eûmes à traverser encore six fois la rivière avant la soirée.

Au dernier gué, les eaux s’élançaient sur une telle pente dans une chute pleine d’écume et de colère, elles faisaient de si terribles bouillons autour des grandes roches qui encombraient le chenal, que nous hésitâmes avant de nous aventurer à y pousser nos chevaux. Mais l’Iroquois ouvrit la marche et traversa heureusement, quoique son cheval bronchât, chancelât et pût à peine se tenir. Alors nous lançâmes nos chevaux de charge devant nous et nous entrâmes dans l’eau. Elle montait par-dessus les épaules de nos chevaux pendant qu’ils luttaient contre le courant, qu’ils glissaient sur les pierres plates, choppaient et se raffermissaient sur leurs jambes de la façon la plus extraordinaire.

Le lendemain, nous remontions la rive droite ou méridionale de la Miette, dernier endroit où l’on traverse cette fatigante rivière. Nous découvrîmes un petit radeau ou cajot, amarré de l’autre côté près de quelques saules, et laissé là sans doute par les trois Américains qui avaient traversé ce torrent peu de semaines avant nous.

Au delà nous continuâmes notre route en longeant le pied de hauteurs couvertes de sapins et qui commençaient à s’éloigner davantage de l’eau. Un des pics neigeux les plus proches nous rappelait la pyramidale Roche du Prêtre et le nombre des montagnes au blanc sommet augmentait autour de nous.

Cette nuit notre bivac fut établi près d’une petite rivière que notre Iroquois appelait Pipestone et qui est une des sources de la Miette. L’endroit, fort pittoresque, n’était qu’une plaine couverte de fleurs et qu’entouraient les Montagnes Rocheuses déployées dans toute leur grandeur.

Le lendemain 9 juillet, le chemin était plus facile. Depuis cinq jours déjà, nous étions partis de Jasper-House. Dans la matinée, nous fûmes fort surpris de rencontrer un ruisseau qui se dirigeait à l’ouest. Nous avions donc, sans nous en apercevoir, passé la ligne de séparation des eaux et nous étions entrés dans le versant de l’océan Pacifique.

Dans l’après-midi nous arrivions au lac de la Bouse de Bison[14] où nous vîmes des truites en abondance.

Le 10, nous atteignîmes le Fraser. Il descendait du sud-ouest par une gorge étroite et, à quelques milles plus bas, il se déployait et formait le lac de l’Élan. Notre route longeait la rive droite ou septentrionale du Fraser qui était débordé, et notre marche devint extrêmement embarrassée et pénible. La plus grande partie de la journée fut occupée à marcher dans l’eau ; le reste, à se traîner dans des marais encombrés de futaie renversée.

Le 11 juillet fut pire encore : nous eûmes à passer à gué la rivière de l’Élan, opération difficile : l’eau, dans ses parties profondes, dépassait les épaules des chevaux.

Gorge et lac du haut Athabasca. — Dessin de Bellel d’après MM. Milton et Cheadle.

Nous atteignîmes avant midi le lac de l’Élan ; ses eaux touchaient la base des montagnes qui l’entourent. Ce fut encore une journée employée à marcher dans l’eau, où les chevaux tombaient dans les trous et nageaient au hasard, imbibant d’eau notre farine et notre pemmican. Le soleil se coucha quand plusieurs milles nous séparaient encore de notre but, et nous fûmes forcés de passer la nuit dans une espèce de sablonnière où il n’y avait pas un brin d’herbe pour nos animaux fatigués et affamés. Ils y piétinèrent çà et là toute la nuit, jusqu’au matin.

Le lac de l’Élan est une belle pièce d’eau d’environ quinze milles de long, sur trois milles à sa plus grande largeur. Le paysage est grand et fort sauvage. Sur le bord se brisaient avec tapage des ruisseaux sans nombre. Nous avons donné à cette belle série de cascades le nom de Chutes Rockingham.

La descente du versant occidental était continuelle et fort rapide quoiqu’elle ne fût nulle part escarpée. La végétation se modifiait à mesure que nous entrions dans le bassin du Pacifique. Nous commencions à voir le cèdre et le pin argenté. Nous regardions avec étonnement une espèce d’aralis, une grande liane épineuse, plusieurs genres de rosacées, et quelques plantes annuelles. Dans son ensemble, la futaie était plus élevée et les énormes troncs qui nous barraient la route rendaient notre marche extrêmement laborieuse.

Dans l’après-midi du 13, nous arrivâmes à un endroit où le chemin passait sur une corniche, le long d’une haute falaise composée de schiste tombant en poussière. Le sentier n’avait que quelques pouces de largeur et suffisait à peine au pas des chevaux.

Ce passage était si étroit et si dangereux, que nous l’appelâmes le Pont de Mahomet.

Le paysage avait alors une véritable beauté. Les montagnes fermaient la vallée de très-près et tout à l’entour. En bas, la rivière rugissait, en se déchirant avec emportement sur les rochers qui semaient son lit.

Dans la matinée du 14, quelques heures de marche nous conduisirent à la Grande Fourche du Fraser. C’est là qu’une branche considérable, venant du nord ou du nord-est, se réunit par cinq bouches différentes au courant principal du Fraser que nous avions jusqu’alors suivi. Il fallut faire une halte pour examiner les gués où nous pourrions en sécurité traverser ces eaux enflées. Cette Grande Fourche du Fraser est ce qu’on appelait d’abord la Cache de la Tête-Jaune, parce que c’est là qu’un trappeur iroquois, surnommé la Tête Jaune, avait établi la cache où il serrait les fourrures prises sur le versant occidental des montagnes.

Le site est magnifique et d’une grandeur qui défie toute description. Au fond d’une gorge étroite et rocheuse, dont les flancs étaient revêtus de sombres sapins

Passage de l’Athabasca. — D’après MM. Milton et Cheadle.

et, plus haut, d’arbustes au feuillage d’un vert clair, filait comme une flèche le Fraser impétueux. De toutes parts les sommets neigeux des puissantes montagnes couronnaient le ravin, et immédiatement derrière nous, géant parmi les géants, s’élevait dans sa domination incommensurable, le Pic de Robson. Ce mont est magnifique, hérissé de rochers couverts de glaciers ; il a une forme conique.

Nous eûmes de nouvelles difficultés après avoir dépassé la vieille Cache : torrents profonds à franchir, abatis à sauter à chaque dizaine de mètres et la vallée couverte par l’inondation !

Le lendemain 15 juillet, nous continuâmes notre lutte contre les inondations, les abatis d’arbres et les débris de toute sorte ; mais nous fîmes une perte irréparable. Nous avions pris en main les chevaux qui portaient la farine et le pemmican afin d’empêcher qu’en se jetant, comme la veille, dans l’eau profonde, ils n’endommageassent et même ne nous fissent perdre nos approvisionnements. Deux des autres qui n’étaient pas tenus, Bucéphale et celui que nous avions trop justement surnommé Giscouékarn ou le fou, perdirent la rive, tombèrent dans le courant et furent emportés en un instant. Bientôt ils étaient hors de vue. L’Iroquois et le jeune Assiniboine s’élancèrent à leur poursuite, tandis que nous marchions avec le reste des chevaux. Environ un demi-mille plus bas, nous revîmes nos animaux qui avaient pris pied sur un haut fond au milieu du torrent. Comme nous arrivions alors dans un de ces rares jardins que la nature a pris soin d’embellir de fleurs et d’enrichir de fraises au cœur des montagnes, nous y fîmes notre bivac. Nous étions en pleine vue des deux bêtes qui se tenaient dans le fleuve, et nous espérions qu’elles seraient tentées de rejoindre leurs compagnons sur le rivage. Bucéphale en effet, après avoir henni, se mit à nager vers nous ; mais Giscouékarn le fou, au lieu de prendre la bonne direction, s’étant lancé au milieu du torrent, Bucéphale, après un moment d’hésitation, se détourna et le suivit dans le courant dont la force était irrésistible. Tous deux s’en allaient à la dérive, bien plus rapidement que nous ne pouvions marcher ; nous ne voyions plus au loin que leur bagage, sautant comme des bouchons dans le bouillonnement des eaux.

L’Assiniboine courait en avant ; il nous laissa bientôt tous loin derrière lui, car il avait une merveilleuse adresse pour surmonter les obstacles. Nous ne comprenions rien à l’étonnante agilité avec laquelle il se glissait au milieu des troncs les plus rapprochés ou dépassait les barricades d’arbres renversés. Aucun obstacle ne semblait arrêter sa course. Quant à nous, empêchés de toute façon, nous ne parvenions que, de loin en loin, à revoir nos chevaux comme des taches sur la surface du torrent. Environ deux milles plus bas, un autre haut-fond leur permit encore de prendre pied et donna le temps à l’Assiniboine de les rejoindre. Cependant le torrent avait une telle force qu’il ne tarda pas à les entraîner de nouveau. Mais Bucéphale qui avait vu L’Assiniboine, tourna de son côté. L’endroit formait un épouvantable rapide où les eaux se précipitaient en faisant d’énormes bouillons sur les grosses pierres qui obstruaient leur course. À l’instant ou Bucéphale passait non loin du rivage, L’Assiniboine, sautant dans l’eau, jeta ses bras au col de l’animal qui hennit de plaisir en voyant son libérateur venir à son aide ; et tous deux, l’un supportant l’autre, finirent par gagner le bord. Le succès de L’Assiniboine nous sembla miraculeux et nous eûmes soin de récompenser amplement l’intrépidité qu’il avait déployée en cette circonstance.

Giscouékarn fut perdu, emporté par le courant : nous n’entendîmes jamais plus parler de lui. C’était un véritable désastre. Il ne nous restait plus ni thé, ni sel, ni tabac, car notre provision entière de ces délicatesses avait été emportée par ce cheval. Nous n’avions plus, en fait de munitions, d’allumettes et de vêtements, que ce que nous portions sur nous. Papiers, lettres de crédit, objets de valeur, instruments et montres, l’herbier de Cheadle, la robe de buffle et la couverture de Milton, tout cela de conserve s’était mis à descendre vers l’océan Pacifique. Et pourtant, dans notre infortune, nous trouvions encore quelques motifs de consolation, car nous n’avions rien perdu des objets absolument nécessaires à notre existence : notre farine et notre pemmican nous restaient ; grâce à Bucéphale et à L’Assiniboine, nous avions sauvé notre journal sans lequel le présent ouvrage n’aurait jamais pu être publié. M. O’B. avait aussi perdu ses lettres de recommandation, sa bouilloire d’étain et une paire de lunettes.


La Cache de la Tête-Jaune. — Nature du pays. — Vue admirable. — Versant occidental des Montagnes Rocheuses. — La poire ou la sorbe. — Peu de renseignements. — L’Iroquois retourne à Jasper-House. — Le cheval de M. O’B. est perdu. — Départ de la Cache. — Les Versants. — Rivière du Canot. — Périlleuse aventure sur un radeau.

Nous arrivâmes à la Cache de la Tête-Jaune le 17 juillet : dans la matinée du 18, nous traversâmes le Fraser. L’eau roulait avec rapidité sur son lit de gros cailloux et s’enflait en énormes vagues qui faisaient sauter comme une coquille de noix le léger canot que les Chouchouaps avaient creusé dans un arbre.

À quelques milles au-dessous de la Cache de la Tête-Jaune, le Fraser qui, depuis le lac de l’Élan, a presque toujours coulé droit vers l’ouest, reçoit un tributaire qui vient du sud-est et fait un coude subit vers le nord. Si l’on en croit les Indiens, il reçoit un peu plus bas une rivière importante descendant du nord-est. La Cache est située dans une vallée de forme triangulaire. Elle paraît en partie fertile ; mais, immédiatement au sud, s’étend une bande de terrains sablonneux et onduleux où poussent de petits sapins et que termine cette rangée de hauteurs qui divisent les bassins. Au delà commencent les épaisses forêts qu’arrose la Thompson septentrionale.

En regardant vers l’ouest, la perspective qu’on a de la Cache est, à notre avis, une des plus merveilleuses qui existe au monde. Aussi loin que l’œil peut atteindre, au nord, au sud, à l’ouest, les montagnes s’élèvent par-dessus les montagnes ; la plupart, couvertes de neige, ne sont séparées que par des vallons très-étroits, et elles ont l’air de s’étendre jusqu’au Pacifique.

Nous venions de traverser la chaîne principale des Montagnes Rocheuses ; nous étions certainement dans la Colombie Britannique, et pourtant, à notre grande surprise, nous nous trouvions encore au beau milieu des Montagnes Rocheuses. En réalité, les montagnes qui, des prairies du côté oriental, paraissent s’élever comme une muraille, se prolongent jusqu’à l’océan occidental. La répétition exacte de cette vue n’est aperçue que des Monts Chauves, en Caribou. M. Fraser, de Victoria, qui avait visité les Andes et les Himalayas, nous a assuré qu’il n’a rien vu de comparable à ces centaines de milles de montagnes qui existent dans la Colombie Britannique[15].

Le pâturage était en cet endroit bon pour les chevaux, et nous résolûmes d’y rester une journée que nous emploierions à faire sécher nos approvisionnements et à recueillir tous les renseignements que les Chouchouaps pourraient nous donner, concernant la suite de notre voyage. Les Indiens nous apportèrent en grande quantité ce qu’ils appelaient des poires : ce sont des espèces de poires sauvages, sorbes ou cormes, que nous échangeâmes contre quelques aiguilles et du fil. Ce fruit vient sur un arbuste qui a deux ou trois pieds de haut et dont les feuilles ressemblent à celles du poirier. Les gens de la baie d’Hudson assurent que, partout où pousse cet arbuste, le blé peut être avantageusement cultivé. Les fruits qu’il porte ont à peu près la grosseur du cassis et la forme de la poire ; leur goût est exquis. Ils sont fort recherchés des deux côtés des montagnes par les Indiens, qui les font sécher pour l’hiver. Milton remplaça la robe de bison qu’il avait perdue dans notre récente mésaventure par une paire de robes de marmotte pour se couvrir la nuit. Il acheta encore aux Indiens quelques gros cubes de pyrite jaune dont ils se servaient comme de pierres à briquet[16], et deux singulières pipes en pierre qu’ils lui cédèrent d’autant plus volontiers que le tabac leur manquait tout comme à nous.

Le 19, nous étions prêts à partir lorsqu’une grande pluie vint à tomber ; elle nous retint jusqu’au lendemain. Depuis six semaines que nous avions quitté Edmonton, deux tempêtes accompagnées de tonnerre avaient été les seules qui eussent troublé une saison d’ailleurs toujours chaude et belle. Le lendemain matin, le temps se remit, et l’Iroquois partit pour retourner à Jasper-House. Peu après, nous voulûmes rassembler nos chevaux pour commencer notre voyage vers le Caribou ; mais on ne retrouva pas celui de M. O’B., malgré plusieurs heures passées à le chercher.

Bucéphale est sauvé. — D’après MM. Milton et Cheadle.

Un des jeunes Chouchouaps consentit à nous accompagner durant une journée, pour nous montrer le chemin pris par les émigrants ; nous avions dessein de le suivre aussi loin que possible avec l’espoir de finir par arriver au Caribou. D’abord il traversait un pays facile, sablonneux, onduleux et légèrement garni de jeunes sapins. Nous passâmes un petit affluent du Fraser, longeâmes les rives d, un petit lac et, vers le soir, nous avions, sans nous en apercevoir, franchi la ceinture qui sépare les bassins du Fraser et de la Columbia. Le Chouchouap passa la nuit avec nous, nous mit le lendemain sur la trace des émigrants, et retourna chez lui. Nous lui dîmes adieu, ne nous doutant guère des fatigues que nous aurions à vaincre et du temps qui s’écoulerait avant que nous eussions la bonne fortune de rencontrer la face d’un autre homme.

Ici la trace prenait à droite, pour entrer dans la plus occidentale des deux étroites vallées entre lesquelles est divisée celle de la Cache par la ligne de hauteurs qui se dirige au sud et qui porte sur la carte le nom de Chaîne Malton. Au bout d’un mille environ, nous étions arrivés à la rivière du Canot, affluent de la Columbia et qui coule vers le sud-est. Il s’est creusé, dans ce sol sablonneux, un canal profond, et nous descendîmes une falaise escarpée pour atteindre la vallée de la rivière que nous coupions presque à angles droits. Les eaux enflées rendaient le courant très-fort. Les bords étaient embarrassés de bois flott& et d’arbres surplombants. Il fallut remonter un peu la rivière pour trouver une place où nous pourrions la passer en radeau. Nous arrivâmes enfin à un petit endroit découvert près duquel il y avait quelques sapins morts et où la rive opposée était moins encombrée de troncs, de roches et de broussailles.

Après avoir fait traverser les chevaux, nous commençâmes à abattre du bois, à faire le radeau. Quand il fut prêt on se prépara au passage ; mais le courant était si violent qu’à peine à bord et avant que nous eussions pu nous servir convenablement de nos perches, le radeau était emporté. Enlevés dans un rapide furieux, nous le passâmes comme une flèche et nous nous vîmes lancés contre un gros sapin, à travers les branches inférieures duquel l’eau entrait en bouillonnant comme sous la roue d’un moulin. À terre ! à terre avec la ligne ! s’écria L’Assiniboine, et, au moment où nous passions près du bord, faisant dans l’eau un saut désespéré, il saisit les arbustes, escalada la rive et enroula sa corde autour d’un arbre. Au même instant, Cheadle sautait de son côté et avec sa corde en faisait autant. Malheureusement ces cordages, pourris par l’humidité, se brisèrent comme du fil, et le radeau, entraîné sous le sapin, disparut dans l’eau. Milton et la femme furent enlevés par les branches comme des mouches. Quant à M. O’B., par un hasard inexplicable, il réussit à s’accrocher au radeau et nous le vîmes plus bas reparaître avec lui à la surface de l’eau, assis, en silence, immobile. L’Assiniboine et son fils, qui avait en même temps que son père sauté à bord, s’élancèrent à la poursuite du radeau. Cheadle allait les suivre, avec la notion confuse que tout le monde excepté lui était noyé, lorsqu’il entendit un cri partant du sapin couché sur l’eau. Il jeta les yeux dans cette direction et aperçut Milton, qui se tenait accroché aux branches, le corps passé sous le tronc et la tête tour à tour couverte ou découverte par l’eau. La femme se trouvait un peu plus loin dans une position semblable. Tous les deux étaient dans l’imminent danger d’être entraînés à chaque minute. Cheadle leur cria de tenir ferme, au nom de Dieu, et, se glissant le long de l’arbre, il parvint à saisir Milton qui était le plus près de lui.

Naufrage sur la rivière du Canot. — D’après MM. Milton et Cheadle.

Ensuite nous nous avançâmes tous deux avec précaution au secours de la femme, qui heureusement fut sauvée. Le radeau fut bientôt aussi arrêté par un arbre penché, et M. O’B. s’élança sur la terre.

Nous nous occupâmes alors à sécher nos effets et à constater nos nouvelles pertes. Les paquets qui contenaient tout ce que possédait L’Assiniboine et sa famille avaient disparu ; mais la fortune nous avait conservé nos fusils, nos poires à poudre et le peu de provisions que nous avions encore.

Traduit par J. Belin de Launay.

(La fin à la prochaine livraison.)



  1. Suite. — Voy. page 209.
  2. Larges semelles de bois.
  3. C’est l’orthographe de l’Académie ; les Anglais disent coude du pied ; les Allemands disent l’un et l’autre. (Trad.)
  4. Voy. la seconde carte.
  5. On trouve dans le Tour du Monde (1860, I, p. 288) une vue du fort Edmonton qui est prise de beaucoup plus près que celle-ci et qui est très-bonne pour faire comprendre les descriptions de ces constructions élevées par la Compagnie de la Baie d’Hudson. (Trad.)
  6. Le lac Saint-Alban et la rivière de l’Esturgeon, entre lesquels est située la mission catholique. Cette rivière est un affluent de gauche de la Saskatchaouane septentrionale. (Trad.)
  7. Sur la gauche de l’Athabasca supérieure. Ce fort et l’Athabasca donnent leurs noms, l’un au col de la Cache de la Tête-Jaune, qui conduit au Fraser ; l’autre, à un col qui mène à la Columbia. (Trad.)
  8. N’est-ce pas dans les environs du vieux fort de la Terre Blanche ? (Trad.)
  9. On trouvera plus loin la description du col de la Cache de la Tête-Jaune. (Trad.)
  10. L’endroit où, d’un golfe à l’autre, d’une rivière à l’autre, on porte les embarcations et les bagages. Voy. le Tour du Monde, 1862, II, p. 137 ; mais surtout 1860, I, p. 278 et 281.
  11. Au confluent de la rivière Stuart et du Fraser. (Trad.)
  12. Le bighorn ressemble au mouton ordinaire, mais avec une tête fort grosse et des cornes énormes en forme de boucle.
  13. C’est, du côté de l’est, le commencement du col de la Cache de la Tête-Jaune. (Trad.)
  14. Ce lac est sur la carte appelé Bouse de Vache, Cowdung, et fait parfois donner au col le nom de Cowduny Pass. (Trad.)
  15. Peut-être cent vingt-cinq lieues en ligne droite à partir des montagnes qui sont à l’est de l’Athabasca jusqu’à celles qui sont à l’ouest du Fraser. (Trad.)
  16. C’est l’usage qu’en faisaient les Romains. (Trad.)