LE VIEUX CHÂTEAU OU CHÂTEAU DE RAMEZAY À MONTRÉAL




L E Vieux Château fut construit par Claude de Ramezay, écuyer, seigneur de la Gesse, de Boisfleurant et de Monnoir, chevalier de Saint-Louis, ancien gouverneur des Trois-Rivières, gouverneur de Montréal, père de Jean-Baptiste-Nicolas-Roch de Ramezay qui signa la capitulation de Québec. À cette époque les gouverneurs étaient obligés de pourvoir à leur logement qui devait répondre à l’importance de la charge dont le roi les honorait, c’est-à-dire, qu’il leur fallait encore ajouter cette lourde dépense à tant d’autres auxquelles leur faible traitement ne pouvait suffire.

« M. de Ramezay, qui avait été nommé gouverneur de Montréal en 1703, acquit vers 1704 le terrain où il dut commencer aussitôt à élever sa demeure, dont il faut placer la construction entre cette époque et celle de 1723 où elle se trouve indiquée sur un plan de Montréal.

« Ce château, dans une ville dont les habitants, dit Charlevoix, étaient fort convaincus que leur valeur valait mieux que toute fortification, n’avait ni tourelles, ni donjon, ni créneaux, ni meurtrières. Les fossés étaient remplacés par un jardin spacieux où devaient s’épanouir et briller les fleurs et les fruits de la mère patrie.

« À la mort de M. de Ramezay, en 1724, le château demeura la propriété de sa famille qui le garda jusqu’en 1745. À cette époque il n’était plus habité que par Jean-Baptiste-Roch-Nicolas de Ramezay et son épouse, Louise Godefroy de Tonnancour. M. de la Gesse, son frère, s’était noyé dans le naufrage du Chameau ; de ses quatre sœurs deux s’étaient retirées dans la rue Saint-Paul, une avait épousé M. de Chapt de Lacorne l’aîné, capitaine d’infanterie, l’autre, Henri des Champs de Boishébert, seigneur de la Bouteillerie, aussi capitaine. Tous ces héritiers séduits par des offres avantageuses, pressés aussi par les réclamations de MM. de Courcy et d’Auteuil, consentirent à céder la demeure paternelle à la Compagnie des Indes pour une somme qui était très considérable à cette époque.

« La Compagnie des Indes, obligée de soutenir la lutte où l’engageait le commerce des colonies voisines avec les tribus indiennes, voulait établir un entrepôt plus important que ceux qu’elle avait eus jusqu’alors à Montréal. Le château
Le Vieux Château ou château de Ramezay à Montréal
devint donc un magasin ; les salles furent converties en comptoirs où vinrent s’entasser les étoffes, les épiceries et les liqueurs ; les voûtes reçurent les pelleteries apportées par les Sauvages.

« Puis, arriva bientôt l’époque mémorable qui changea tant de choses. Quoique la Compagnie des Indes eût cessé d’exister vers 1750, la maison portait encore son nom au moment de la conquête. Elle fut alors achetée par M. Grant et passa ensuite au gouvernement. Les gouverneurs de Montréal en firent leur demeure officielle sinon privée, et lui donnèrent le titre d’hôtel du gouvernement qui semblait rappeler son ancienne destination.

« Pendant l’invasion de 1775, les Américains se croyant obligés de remplacer les Anglais partout, le brigadier général Wooster vint loger à l’hôtel du gouvernement. Au printemps de 1776, Arnold, qui était encore dans toute sa gloire, vint remplacer Wooster et se reposer de ses inutiles efforts contre Québec.

« Vers 1784, le Vieux Château fut restauré par le baron de Saint-Léger qui l’habita quelque temps.

« Pendant les sessions orageuses de 1844 à 1849, il fut le siège des délibérations des deux ministères qui se sont succédé dans cette période importante de notre histoire parlementaire. Sir John Colborne et lord Sydenham y tinrent les séances du Conseil Spécial de 1838 à 1841 »[1].

De l’automne de 1849 à l’automne de 1856, le Vieux Château fut occupé comme palais de justice. Puis le département de l’éducation et l’École Normale Jacques-Cartier furent logés dans le Vieux Château.

Par la suite, le château logea l’Université Laval, la Cour de circuit et la Cour de magistrats.

La ville de Montréal, dès 1893, décida d’acheter le château ; mais le contrat ne fut effectivement passé qu’au mois de février 1895.

Deux mois plus tard, la Société d’Archéologie et de Numismatique de Montréal louait, pour une somme nominale, ce très intéressant édifice pour y installer ses collections de portraits, d’objets historiques et de monnaies.

Ce bail a été renouvelé à diverses reprises depuis.

Le séminaire de Saint-Sulpice à Montréal

Cette vue date de 1880 mais l’apparence du vieux séminaire n’a guère changé si ce n’est que les portes extérieures ont été un peu modifiées.

LE FORT DES MESSIEURS À MONTRÉAL



U N certain nombre d’Iroquois de la Prairie de la Madeleine et d’autres Sauvages ayant manifesté aux Sulpiciens leur désir de vivre dans l’île de Montréal, ceux-ci les établirent, en 1676, au bas de la Montagne, à deux milles à peu près de la ville, vers l’ouest.

C’est M. Vachon de Belmont qui bâtit le fort de la Montagne afin de protéger ses néophytes contre les attaques des Iroquois païens.

Bacqueville de la Potherie fait la description suivante du fort des Messieurs :

« La maison de M. l’abbé de Belmont est un des plus beaux endroits du pays… C’est un fort de pierre à quatre bastions. Il a une chapelle de cinquante pieds de long sur vingt-cinq de large, dont les murailles sont revêtues d’un lambris, sur lequel il y a plusieurs ornements comme d’urnes, de niches, de pilastres et de piédestaux en façon de marbre rouge veiné de blanc. Les cabanes des Iroquois qui sont plus de cent vingt, joignent ce fort et sont entourées de palissades. »

M. l’abbé Olivier Maurault à qui nous empruntons tous ces détails explique que l’enclos réservé aux Sauvages portait le nom de fort des Sauvages, et les constructions de pierre se nommaient le Fort des Messieurs.

De toutes les belles constructions élevées par M. l’abbé Vachon de Belmont il ne reste plus que les deux tours reproduites ici.

Citons encore M. l’abbé Maurault :

« De 1854 à 1857 s’éleva l’énorme bâtiment du Grand Séminaire. Pour des raisons que nous aimons mieux ignorer, on crut nécessaire de bâtir le corps principal et les deux ailes de cette institution autour du vieux château. Les tours d’arrière disparurent dans les travaux de fondation. Quant à la maison elle-même elle demeura jusqu’en 1858, enserrée entre les deux bras du Séminaire. Une précieuse photographie de Notman, nous la montre ainsi, prise dans cette sorte d’étau qui allait bientôt la broyer. Que reste-t-il maintenant ?

Le Fort des Messieurs à Montréal
Vue prise de la rue Sherbrooke.

« Sur le flanc de la colline, à un endroit d’où l’en découvre une vue très étendue, une croix de bois accompagnée de quelques peupliers, marque peut-être l’endroit où Chomedey déposa son précieux fardeau, en 1643.

« Dans les jardins, sous des ormes immenses, aux ombres séculaires, s’allonge une pièce d’eau, un canal pavé en pierre. La source, la fameuse source, y jette…

« Sur la colline, un peu partout, des murs solides de pierre, percés ici et là de portes aux larges ferrures.

« Le long de la rue, les deux tours, seuls vestiges des beaux bâtiments d’autrefois, reliques sans prix pour l’histoire de l’enseignement dans notre pays.

« Au-dessus de la porte du Grand Séminaire se lit cette inscription : « Hic evangelizabantur Indi ». Et c’est tout »[2]

Le Fort des Messieurs à Montréal
Vue prise dans le jardin du Séminaire.
La Maison du Patriote, rue Saint-Paul, à Montréal
Cette maison est plus que centenaire. La statue en bois du Canadien de jadis, coiffé de la tuque, vêtu du capot traditionnel et chaussé de souliers de bœuf, sert d’enseigne aux marchands de tabac qui, depuis quatre-vingts ans, se succèdent dans ce poste achalandé.
L’ancien hôtel Rosco, rue Saint-Paul, à Montréal
L’hôtel Rosco fut inauguré en mai 1836. On pouvait y recevoir cent cinquante voyageurs ! C’était le plus bel hôtel de Montréal et peut-être de tout le Canada. Sa vogue dura un peu plus d’une décade. La façade de l’édifice déchu porte encore l’inscription « Rosco’s Hotel. »
Les vieilles maisons de la rue Saint-Vincent à Montréal

Sises sur le côté est de la rue Saint-Vincent, à mi-chemin entre les rues Saint-Paul et Notre-Dame, ces maisons datent du dix-huitième siècle et comptent parmi les quelques anciennes de Montréal. Elles ont hébergé des avocats et des notaires, car la rue Saint-Vincent fut pendant longtemps la rue des bureaux des hommes de loi.

Les vieilles maisons de la rue Saint-Vincent, à Montréal
On a ici une vue de l’arrière des vieilles maisons de la rue Saint-Vincent.
La maison McTavish, rue Saint-Vincent, à Montréal

On a prétendu que cette maison avait été construite vers 1655 par Nicolas-Hubert Lacroix, tailleur. En réalité, elle fut érigée à la fin du dix-huitième siècle et habitée par le fameux Simon McTavish, le roi du commerce de la fourrure. McTavish mourut en 1804.

Les vieilles maisons en face de l’ancien palais de Justice de Montréal

Ces maisons ont été construites entre 1685 et 1723. C’est dans l’une d’elles que vécut Raymond Fabre, libraire, maire de Montréal, et que naquirent Mgr Fabre et l’honorable Hector Fabre. C’est là aussi que se trouvait le fameux « magasin aux contrevents barrés » où Jean-Louis Beaudry, plus tard maire de Mont­réal, fit un commerce considérable.


  1. L’abbé H.-A. Verreau, Journal de l’Instruction publique, août 1857.
  2. Le Fort des Messieurs, p. 22