Vie du pape Pie-IX/Prise de Rome

CHAPITRE XIII.

Prise de Rome.


Il fut convenu, à la conférence de Gaëte, que l’Autriche se chargerait des Romagnes ; le roi de Naples, du midi de l’État romain ; la France, de Rome. L’Espagne avait offert d’attaquer le château fort des révolutionnaires, mais la France réclama cet honneur à titre de « fille ainée de l’Église. »

Une armée française, sous le commandement du général Oudinot, débarqua le 25 avril, à Civita-Vecchia et marcha sur Rome qui obéissait, depuis le 3 mars, à un triumvirat composé de Mazzini, l’âme de la révolte, de Saffi et d’Armellini. L’approche des Français jeta l’épouvante parmi les révolutionnaires, et le général Oudinot serait entré dans Rome sans coup férir si Garibaldi, à la tête de quinze cents aventuriers, venus de tous les coins du monde, ne se fût jeté dans la ville.

Garibaldi, tout en organisant la défense de Rome, permit à ses soldats de commettre toutes sortes d’horreurs. On pillait les églises, on saccageait les maisons des cardinaux et des principaux citoyens, on massacrait les prêtres.

Le 30 avril, Oudinot, ignorant le changement apporté par l’arrivée de Garibaldi, se présenta devant la ville avec une poignée d’hommes et sans artillerie. Il fut repoussé après avoir été trahi.

Ce contre-temps donna du courage aux révolutionnaires français. L’assemblée constituante, à la veille de se dissoudre, blâma la marche de l’armée française sur Rome. Napoléon, effrayé, et voulant ménager les susceptibilités des loges, envoya à Rome un diplomate, M. Ferdinand de Lesseps, qui se montra l’ami, non de l’armée française, mais des révolutionnaires. Il conclut un armistice avec Garibaldi et lui permit d’aller surprendre et battre les Napolitains. Il refusa de laisser débarquer le commissaire du Pape nommé pour reprendre possession de Civita-Vecchia. Il reconnut formellement le triumvirat mazzinien et eut l’audace de demander au général Oudinot de signer le traité qu’il avait conclu avec les ennemis de l’Eglise et de la France. Oudinot refusa, et l’assemblée législative, moins radicale et plus ferme que la constituante, donna raison au soldat contre le diplomate. L’attaque fut ordonnée. Le Pape, dont le cœur paternel saignait, pria les Français d’épargner autant que possible les malheureux habitants de Rome ainsi que les monuments de la ville éternelle. Le 29 juin, jour de la fête de saint Pierre et de saint Paul, les Français pénétrèrent dans l’enceinte des remparts. Le 3 juillet, ils entrèrent en triomphe dans Rome. Le triumvirat était tombé, l’armée de Garibaldi désorganisée, dispersée. Le général Oudinot s’empressa d’envoyer le colonel Niel porter les clefs de la ville au Saint-Père.