Une voix du Père-Lachaise/Suite des concessions a temps et a perpétuité

Une voix du Père-Lachaise ou ses inscriptions jusqu’en 1853
Chez l’auteur, rue de la Roquette, 136, et chez les concierges et les conducteurs du cimetière (p. 205-216).

SUITE DES CONCESSIONS A TEMPS ET A PERPÉTUITÉ.


Veuve DUHAMEL, âgée de 78 ans.


Toi dont l’amour pour nous ranimait les vieux ans,
O toi qui fus toujours la plus tendre des mères,
Dans ce champ de repos tes malheureux enfants
Ne peuvent que t’offrir des larmes amères.




Louis-Auguste HERTENSTEIN, 7 ans 10 mois.


Tout en lui respirait la grâce de l’enfance,
Quand un souffle de mort flétrit ce front si beau.
Mais non, d’un sommeil pur cet ange d’innocence
Ne fit que s’endormir, et c’est là son tombeau.




Épouse LAMBLET. 1846, 49 ans.


Il est des chagrins que nul ne peut décrire,
Quand ils sont incrustés sur la pierre de mort
Tel ainsi qu’un fanal lorsqu’il cesse de luire
Arrête le navire aux approches du port.

Un père est un pilote et sans boussole… lui,
Des faibles passagers, seul il reste l’appui
Veiller au gouvernail, c’est vivre pour défendre
Les erreurs de l’enfance et mourir dans l’ennui.




Achille NOAILLES. 1846, à 2 ans.


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Et secouant ses blanches ailes,
L’ange à ces mots prit son essor
Vers les demeures éternelles.
Pauvre mère ! son fils est mort.




Éléone-Euphrasie DEBEYNE. 1859, à 20 ans.


Aux plus rares vertus, à la sagesse, au goût,
Le ciel joignit en elle un jugement solide,
Modeste avec esprit, la raison fut son guide,
Et sans prétendre à rien elle eut des droits sur tout.




Ci-gît J.-C. PELTIER, physicien. 1785-1845. Théorie de la pile, capacité électrique des métaux, caloricité des courants, tension résineuse de la terre, trombes, etc., etc.




Jean-Nicolas MARJOLIN. 1780-1850. Docteur, Professeur de la Faculté de Médecine de Paris, chirurgien de l’Hôlel-Dieu, de l’hôpital Beaujon, etc.


Pendant sa longue et douloureuse maladie il répétait souvent : Mon Dieu, ayez pitié de moi ! Il demanda lui-même et reçut les secours de l’église ; il fut aimé et il est regretté.




Sur la façade de la chapelle Léger :


Labor probns, fides æterna.




Claudine MINEUR, veuve LAMY. 1833.


Hélas ! à la douleur mon âme s’abandonne,
L’impitoyable mort, cédant à ses désirs,
Vient de frapper celle dont l’âme douce et bonne
De tant de malheureux accueillait les soupirs.
Si mes larmes pour prix de ses vertus sublimes
D’un miracle obtenaient les divines faveurs !
Mais le cercueil, hélas ! ne rend pas ses victimes ;
Je ne puis sur son sort que répandre des pleurs.




Épouse ROUY.


Repose en paix, ombre chérie,
On ne peut qu’envier ton sort.
Qui fut bonne toute sa vie
Ne doit rien craindre après sa mort.




Sur un cippe :

A ELISA, sa mère, sa sœur, son frère. Décédée à l’âge de 24 ans, le jour de l’Ascension 1846.


Repose en paix, ma bonne Elisa, modèle de la piété filiale.




Dame SCHEIB. 1838, à 55 ans.


Son époux, ses enfants, objets de sa tendresse,
Pensent à ses vertus ne pouvant l’oublier,
Et ses nombreux amis accablés de tristesse
Comme moi, pour son repos, ne cessent de prier.




Ici reposent Cécile-Hortense LÉCHALARD, femme MERCIER. 1841, à 26 ans, et Aimée-Marie-Louise LÉCHALARD, femme CARON. 1847, à 37 ans.


Toutes deux dont leurs vies
Étaient unies d’âme et de cœur,
La mort les a réunies
Dans ce lieu de malheur.
Bonnes sœurs, bonnes épouses, bonnes mères.
Exemple de vertus jusqu’au dernier soupir.
Et d’elles maintenant sur la terre
Que reste-t-il, hélas !… qu’un souvenir !

Alfred Caron.




F. DEVAUX. 1847, à 42 ans.


Celui qui dort sous cette pierre
A su mériter mon amour.
Pour son épouse sur la terre
Le bonheur a fui sans retour.




Jean-B. CHARLES. 1810-1847.


Repose en paix, mon cher époux,
Que la terre te soit légère,

Que ton ombre veille sur nous.
Hélas ! ma fille n’a plus de père.




Hippolyte PARMENTIER. 1848, à 27 ans.


Jeune encore il est mort ; des douleurs de ce monde,
Il passa doucement au repos de la tombe.
Pour ses frères, sa sœur, il fut un second père.
En amitié toujours il se montra sincère,
Il vécut honnête homme et mourut en chrétien.
Passants, priez : ici gît un homme de bien.




Valentine LEFEBVRE. 1847.


Elle fut quinze ans à s’éteindre,
À s’éteindre en souffrant, en pleurant, en priant ;
Quinze ans ! Mon Dieu, ayez pitié de son tourment,
Mais malgré ses douleurs, malgré son dévouement,
L’époux qui lui servit est bien le plus à plaindre.




Adrienne-Adélaïde DAUGE. 1837, à 26 ans.


Tu nous as précédés, le sort fut bien injuste.
De la voix, du regard, de ton regard si doux,
Tu dis, parents, amis, dans ce séjour des justes,
Venez, je vous attends au triste rendez-vous.
Adieu, notre meilleure amie,
Adieu !!! tes talents, tes vertus
Faisaient l’espoir de notre vie.
Pleurons, Adrienne n’est plus.




Marie MOREL. 1836, âgée de 44 ans.


Pour ta pauvre amie
Que la perte est cruelle,

Et pour ta fille chérie !
Quelle douleur pour elle !




Ici reposent les corps de François QUEVENOT et de Anne-Françoise BELOEIL, son épouse.


Les dernières volontés d’une mère chérie
Furent qu’auprès des dépouilles de son époux,
On déposât les siennes, et leurs enfants, jaloux
De reposer près d’eux dans ma terre chérie,
Firent construire ce caveau à tous destiné
Devenu pour eux le bien le plus sacré.




A la mémoire de Victorine-Émilie TAVERNE. 1849, âgée de 7 ans.


Ses dernières paroles : « Viens embrasser petit père ; au revoir, mon petit papa ; » pour sa pauvre mère ont été ses adieux les plus tendres et les plus douloureux.


De même sa vie s’éteignait
Et notre ange au ciel s’envolait.




Alphonse-Armand RICADA. 1850, à 5 ans.


Tu dors, enfant chéri, du plus cruel sommeil,
La douleur, les regrets, dans notre réveil.
C’était trop de bonheur de ton aimable enfance,
Le ciel, hélas ! jaloux nous ravit l’espérance
Adieu, cher fils ! adieu ; d’une joie éphémère,
Rien ne consolera et ton père et ton frère !!!




Ici reposent Eugène-Alexandre SANÉ. 1822, âgé de 22 ans. Edmond Pierre SANÉ, étudiant en droit. 1823, âgé de 21 ans.


J’avais deux fils, hélas ! de mon triste veuvage,
Tous deux ils consolaient mes récentes douleurs.
L’aîné me fut ravi, je m’armai de courage,
Espérant que du moins l’autre essuyerait mes pleurs.
Vain espoir ! sous ses pas s’est ouvert un abîme,
Je le vois, c’est le même où son frère a péri !
Il attendait, grand Dieu, la seconde victime,
L’abîme est refermé, rien n’avait donc servi,
Mes veilles ni mes soins, mes pleurs ni mes prières !
Oh ! du moins dors en paix à côté de ton frère.




Épouse MARION. 1842, à 68 ans.


Reprenant votre route ici bas inconnue,
Vous retournez aux cieux d’où vous êtes venue,
Âme sainte de mère et si noble envers tous !

Au sein de l’Éternel tout entière absorbée,
N’oubliez pas ce monde où vous étiez tombée !
Veillez sur vos enfants qui pleurent à genoux.




Eugénie-Eulalie ANGOT. 1850, à l’âge de 13 ans.


Seul charme de mes jours avec peine élevée,
Mon Eugénie faisait ma félicité !…
Mon Dieu, pourquoi me l’avoir enlevée
Cette fleur de bonté !…




A Pauline-Adèle OUDENNE, épouse de Henri Maréchal. 1849, à l’âge de 24 ans.


Toi qui sur cette terre ne connus que la souffrance,

Reçois de ton époux les douloureux adieux !
Tu vas de tes vertus trouer la récompense,
À qui souffre ici bas Dieu réserve les cieux.




Anne-Alice GIROUX. 1847-1849.


Pauvre petite créature,
Dans le cours de ton existence,
Privée des bienfaits de la nature,
Tu n’en connus que la souffrance.




Dame RIGAUD, née en 1812, décédée en mai 1849.


Oh ! malgré mes douleurs et d’affreuses misères,
De souvenir ma Louise reçois l’hommage,
Plus d’une larme a mouillé mes paupières,
En t’édifiant ce modeste entourage ;
Mais ta Louise, ton Albert tant regretté,
Orphelins si jeunes privés d’une mère,
Viendront souvent l’âme émue de piété,
À deux genoux prier sur cette terre !
Ils te prieront de cœur, bonne mère adorée,
Que tu veilles sur eux au céleste séjour,
Femme du prolétaire, ô Louise tant aimée !
Le souvenir, la prière c’est toujours de l’amour.
Terre où repose ta dépouille mortelle,
Depuis que l’âme est remontée aux cieux,
Nous t’arroserons de larmes éternelles,
Jusqu’au revoir, amie, reçois nos adieux !




Alfred PERRIN, dans sa 14e année.


Il vécut comme les roses,
L’espace d’un moment,

Treize printemps c’est peu de chose,
Quand on est aimé tendrement.




Il y avait près d’ici, sur une pierre de 1836, qui a été, comme toutes celles non réclamées, enlevée d’office pour faire place à de nouvelles concessions, l’épitaphe suivante :


Ici, dans le sein de la terre,
Un roi doit finir sa grandeur,
Le riche mondain son bonheur,
Et le malheureux sa misère.




Madame GAUTRON, née en 1818, morte en 1851.


Je pleure ici ma femme.
Passant, si tu me crois,
Viens faire pour son âme
Le signe de la croix.




À Vincent PICARD, sous-lieutenant de grenadiers au 72e, victime de sa bravoure aux événements du 4 décembre 1851.


Ses vrais amis, ses frères d’armes.




Petit temple des plus remarquables, avec vitrage, quatre colonnes dorées ; dedans sont des couronnes blanches, une lampe, un oreiller de satin blanc sur lequel est déposé un bouquet de fleur d’oranger, le tout d’une fraîcheur extraordinaire.

À la mémoire de Mademoiselle Léonie LUDÉ.
19 septembre 1851, âgée de 19 ans.


Ô ma douce compagne, ô ma fille adorée,
Tu m’as quittée trop tôt pour ne plus revenir.
Que ferai-je, ô mon Dieu ! pauvre veuve éplorée !
Te regretter sans cesse est mon seul avenir.




Femme FRÉMY. 1810-1849.


Adieu, femme chérie et digne de regrets,
Femme au cœur excellent, adieu, repose en paix.
Adieu, pauvre martyre, héroïque victime.
Ta mémoire commande une profonde estime.
Un digne et saint respect ! que de regrets cuisants
Pour ceux qui près de toi n’ont été que méchants.




Mademoiselle GIREAUD. 1818.


Après avoir détruit mon seul frère et mon père, la faux de l’inflexible temps m’atteignit à seize printemps… Plaignez ma mère.




Anastasie FONTAINE, dame DURAND. 1851, à l’âge de 42 ans.


Ô ma sœur bien aimée, depuis ta perte, hélas !
Nos cœurs sont navrés en voyant venir ton trépas.
Un cœur si bon ne méritait pas un si grand malheur,
Toi qui nous as fait jurer notre amitié, ma bonne sœur,

Nous accomplirons tes dernières volontés en pensant à toi,
Ton époux, ta sœur à ton souvenir versent des larmes avec moi.
Adieu ! sœur et amie que nos cœurs aimaient,
Nous jurons sur ta tombe de ne t’oublier jamais.




Louis-Ernest MÉNAGER, à l’âge de 10 ans.


Dors, ô toi que la mort enlève à cette terre,
Dors ; en quittant la vie on quitte la douleur.
Ce Dieu t’a rappelé au sein de son parterre,
C’est qu’il manquait au ciel une nouvelle fleur.




Catherine VERMEIL. 1851, à 78 ans.


Le don de Dieu est la vie éternelle, par Jésus-Christ notre Seigneur.
Hom. vi. 23.




À Charles BOISSELOT, artiste dramatique. 1784 — 1851.


Pauvre père, comme on t’aimait !
Et comme à présent on te pleure !
Sans être ému qui passerait
Devant ta dernière demeure !
À toi, père, ces humbles fleurs,
Et puissent nos cœurs qui t’aimaient
Empêcher qu’elles ne s’altèrent
En les arrosant de leurs pleurs.




Achille GODEFROY. 1836, âgé de 36 ans.


Que ton dernier baiser semble doux à ta mère !

Car elle avait encor l’espoir de l’embrasser ;
Mais une mort trop prompte a fini ta carrière,
Il ne lui reste plus que des pleurs à verser.




G.-Ab. CALCANCE. 1843, à 38 ans.


Passants, sous ce gazon que le deuil environne,
Repose un bon ami, vertueux sans efforts ;
Jamais de son vivant il n’affligea personne,
Il n’en est pas de même, hélas ! après sa mort.




Louis GRANGE. 1821, à 59 ans.


…Il ne voulut ni célébrité ni honneur, il préféra l’obscurité à la gloire ; ses services auraient pu lui procurer des distinctions, s’il les eût demandées… Adjudant général il servit dans les guerres de la patrie à côté de DUGOMMIER ; il fut l’ami de ce grand homme… Inspecteur général des contributions indirectes, il obtint l’estime publique et mérita celle du gouvernement.




À quelques pas se trouvent la tombe et le buste d’une ressemblance parfaite de Charles NODIER, tant connu par ses nombreux et spirituels écrits.