Une femme m’apparut/1905/09
Alphonse Lemerre, éditeur, 1905 (nouv. éd.) (p. 51-52).
IX
Autour de Lorély se pressaient de jeunes filles et de jeunes femmes, quêtant ses fuyants sourires et ses caresses.
« Je les veux, » sanglotait-elle à travers ses dents serrées. « Je les désire implacablement. »
Et ses yeux étaient alors aigus, ainsi qu’une lame d’acier bleui.
« J’aime ce qu’elles ont de fugitif, d’insaisissable, tout ce que je ne posséderai jamais d’elles. Et cette volupté incomplète que je bois à leur bouche est plus précieuse que le bonheur, le prosaïque, le matériel bonheur… »
Elle ajoutait, plus bas :
« Et pourtant… Et pourtant… Ah ! si je savais aimer ! »
… Elle n’aimait point ces passantes qui la dérobaient à moi. Cependant, je les enviais, car elles avaient eu d’elle, ne fût-ce qu’un instant, un baiser d’amour.