Larmes humaines

(D’APRÈS TIOUTCHEV)
















LARMES HUMAINES



Larmes humaines, vous coulez,
D’un bout à l’autre de la terre,
De tous les yeux inconsolés,
De tous les pauvres cœurs troublés
Par la vie et par son mystère ;
Ainsi qu’une rosée austère,
Larmes humaines, vous coulez !

Vous coulez, soit qu’on vous dédaigne,
Soit qu’on vous veuille secourir ;
Qu’on vous insulte ou qu’on vous plaigne,
Vous coulez sans jamais tarir…
Vous coulez sans répit ni trêve,
La nuit, le jour, soir et matin,
Comme le torrent que soulève
L’orage, — vous coulez sans fin.

Vous coulez toujours grossissantes
Sous un souffle toujours amer,
Inapaisables, gémissantes
Comme les vagues de la mer.

Soit que la grâce printanière
Enflamme et dore l’horizon,
Soit que la maudite saison
Du ciel exile la lumière,
Larmes humaines, vous coulez,

D’un bout à l’autre de la terre,
De tous les yeux inconsolés,
De tous les pauvres cœurs troublés
Par la vie et par son mystère ;
Ainsi qu’une rosée austère,
Larmes humaines, vous coulez !