Traité de la peinture (Cennini)/CXLVII

CXLVII.Comment on colore les visages, les mains, les pieds, et toutes les chairs.

Quand tu as fini de colorer vêtements, arbres, fabriques, montagnes, il faut en venir à colorer les visages. Il convient de les commencer de cette manière : aie un peu de terre verte avec un peu de blanc bien encollé, étends-les d’eau, donnes-en deux couches sur le visage, les pieds, les mains et sur tous les nus. Mais cette première couche sur des visages jeunes qui ont la carnation fraîche doit être encollée avec des jaunes d’œufs pondus en ville, parce qu’ils sont plus blancs que ceux que font les poules à la campagne ou dans les villas. Ces derniers, par leur couleur, sont bons à tempérer les carnations de vieillards et d’hommes bruns. Là ou sur mur tu fais tes tons rosés avec le cinabrese ; souviens-toi que sur panneau tu dois le faire avec du cinabre. Quand tu places les premiers roses, ne les fais pas de cinabre pur, mets-y un peu de blanc et mets aussi un peu de blanc dans le verdaccio qui doit te servir à ombrer. De la même façon que tu as travaillé et coloré sur mur, fais-toi trois sortes de carnations plus claires l’une que l’autre, plaçant chaque degré de carnation en son lieu dans les différentes parties du visage. Ne t’approche cependant pas assez des ombres faites au verdaccio pour que tu puisses les recouvrir, mais fonds-les avec la couleur de chair la plus obscure, léchant et les adoucissant comme une fumée. Sache que sur panneau il faut plus couvrir que sur mur ; pas assez cependant, selon moi, pour empêcher le vert qui se trouve sous la carnation de transparer. Quand tu as conduit tes différentes couleurs de chair, que le visage est à peu près bien, fais un ton de chair plus clair et places-en sur les parties les plus bombées du visage, blanchissant toujours peu à peu avec délicatesse jusqu’à ce que tu puisses revenir avec du blanc pur placer des touches sur les reliefs les plus saillants, comme seraient les cils et la pointe du nez. Puis prends un peu de sinopia obscure avec une pointe de noir, et profile tous les contours du nez, des yeux, des cils, des cheveux, des mains, des pieds et généralement de toutes choses, comme je te l’ai appris sur mur, toujours usant de la tempera de jaune d’œuf.