Traité élémentaire de la peinture/014

Traduction par Roland Fréart de Chambray.
Texte établi par Jean-François DetervilleDeterville, Libraire (p. 10).


CHAPITRE XIV.

Qu’il faut corriger les fautes dans ses ouvrages, quand on les découvre.

Lorsque vous découvrirez quelques fautes dans vos ouvrages, ou qu’on vous y en fera remarquer, corrigez-les aussi-tôt, de peur qu’exposant vos tableaux aux yeux du public, au lieu de vous faire estimer, vous ne fassiez connoître votre ignorance ; et ne dites point qu’à la première occasion vous réparerez la perte que vous avez faite de votre réputation : car il n’en est pas de la Peinture comme de la musique, qui passe en un instant, et qui meurt, pour ainsi dire, aussi-tôt qu’elle est produite ; mais un tableau dure long-temps après qu’on l’a fait, et le vôtre seroit un témoin qui vous reprocheroit continuellement votre ignorance. N’alléguez pas non plus pour excuse votre pauvreté, qui ne vous permet pas d’étudier et de vous rendre habile : l’étude de la vertu sert de nourriture au corps aussi-bien qu’à l’ame. Combien a-t-on vu de philosophes, qui, étant nés au milieu des richesses, les ont abandonnées, de peur qu’elles ne les détournassent de l’étude et de la vertu !