Théâtre en liberté/Les Mômes
LES MÔMES
I
Oui, je suis amoureux ! De Nini.
Très bien. Jacquot épris de Nini ! Quel âge a
La belle qui te fit au cœur cette blessure ?
Nini ?
Nini.
Cinq ans.
Et, quand vous êtes seuls tous deux, que faites-vous ?
Nous jouons dans le sable et nous faisons des trous.
Et la vois-tu souvent, celle que tu préfères ?
Tous les jours. Nous avons mis toutes nos affaires
Derrière un paravent au fond d’un corridor.
Nous avons un grand chose avec du papier d’or.
Nous collons sur le mur des petites images,
Napoléon, Louvel, le bon Dieu, les trois Mages.
Ça nous fait des tableaux. Nous disons : N’entrez pas !
Nous avons un gros livre où nous lisons tout bas ;
C’est des Romains, Caton, Brutus, la République ;
Elle ne comprend pas toujours, et moi j’explique.
Nous nous serrons tout près et nous nous réchauffons.
Nous habillons le chat avec de vieux chiffons,
Et puis nous le couchons auprès de la poupée.
Nini gronde le chat quand sa robe est fripée,
Et, l’autre jour, le chat m’a mordu jusqu’à l’os.
Et des fois nous allons jouer dans le grand clos ;
On nous y laisse entrer quand nous sommes honnêtes,
Et nous cherchons dans l’herbe, et nous prenons des bêtes.
Ce sont les premiers temps d’un véritable amour !
Nini chante. Des fois nous jouons au tambour.
Je lui fais peur, je prends une voix de rogomme.
Et lui dérobes-tu des baisers, mon bonhomme ?
Qui ça ?
Ont embrassé le sexe.
Oh ! nous nous embrassons !
Et puis après ?
Et je lui donne un peu de ma viande.
C’est jeune !
J’ai fait pour notre chambre un dais en cuir verni ;
C’est moi qui le soutiens de mes deux mains ; Nini
Ne pourrait pas, elle est forte comme une mouche ;
Et, comme j’ai les bras en l’air, elle me mouche.
II
CONVERSATION DES FLOTS.
pendant le drame : la Bourrasque.
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GAMINS : | ||||
ROMARIN. | FILASSE. | ||||
BOILU. | POPARD. | ||||
GRIMEBODIN. | BIGRU. | ||||
TALOTTE. | QUINE-AU-LIÈVRE. | ||||
BIGARREAU. |
Dis-donc, Titi, tu m’as marché à même sur la main.
M’sieu, tu m’embêtes.
Combien qu’tas de feux, Boilu ?
Trois sous.
C’est guère.
Taisez-vous donc, galopins ! on n’entend pas mame Barville ; allez-vous vous taire !
On y va, m’sieu Vissot. (Aux autres flots.) Chut et décence, les vieux !