JOUR DE LA CAPITULATION.

Janvier 1871.



Ainsi tout est fini. — Sous le vent de tempête,
Ô France, ô mon pays, il faut courber la tête,
Sous la fatalité baisser ton front d’airain ;
L’ennemi triomphant a brisé ta couronne ;
La Fortune te hait, l’univers t’abandonne,
Et sur tes bras meurtris pèse le fer germain.


En vain, grande d’espoir et folle de souffrance,
De tes puissants poumons as-tu crié : Vengeance !
En vain as-tu levé ton regard vers les cieux :
Le cri s’est arrêté dans ta gorge oppressée,
Et, comme tu rêvais de ta gloire passée,
Des larmes de douleur ont obscurci tes yeux.

Ah ! les temps ne sont plus où l’Europe, inquiète,
Dans chacun de tes coups trouvant une défaite,
Pour se venger plus tard implorait ton appui ;
Avec les temps nouveaux vient la nouvelle guerre ;
Ils frappent maintenant, ceux qu’on frappait naguère :
Les vaincus d’autrefois sont vainqueurs aujourd’hui.

Mais va ! ne rougis pas, car, s’il est une honte,
Qu’à l’auteur de la guerre entière elle remonte ;
Sedan l’a condamné, ton crime le punit ;
Pour lui le rouge au front et le regret à l’âme,
Pour lui les noirs remords, pour lui le nom d’infâme,
Pour lui tout ce qui venge et tout ce qui maudit !


Mais toi, tu peux braver l’ennemi qui te tue.
Avec trop de valeur, France, tu t’es battue
Pour qu’aujourd’hui ton front s’abaisse en rougissant.
Tu fus brave toujours, si tu fus malheureuse,
Et jamais une paix ne peut être honteuse
Quand la main qui la signe est couverte de sang.