Tableau historique et pittoresque de Paris/Colléges, Écoles, etc


COLLÈGES, ÉCOLES, SÉMINAIRES.



grand séminaire saint-sulpice.
(Rue du Vieux-Colombier.)


Il doit son origine à Jean-Jacques Ollier, abbé de Pébrac. Ce pieux personnage en avoit jeté les premiers fondements à Vaugirard dans l’année 1641. Il y vivoit en communauté avec quelques ecclésiastiques également recommandables par leurs lumières et par leurs vertus, lorsqu’au mois d’août suivant M. de Fiesque lui résigna la cure de Saint-Sulpice. Persuadé qu’il seroit plus avantageux de fixer à Paris et de faire croître sous ses propres yeux l’établissement qu’il venoit de former dans ses environs, il emmena avec lui ses associés, les logea au presbytère, et plaça dans une maison de la rue Guisarde quelques autres ecclésiastiques qui désiroient entrer dans cette réunion. Leurs exercices furent d’abord communs ; mais le nombre des nouveaux sujets que l’on admettoit chaque jour devint si considérable, que le fondateur se décida à séparer ces deux communautés. Pour exécuter ce projet, il acheta, au mois de mai 1645, une grande maison avec un jardin et un terrain assez vaste qui en dépendoit, le tout situé dans la rue du Vieux-Colombier. Ce fut sur cet emplacement que, du consentement de l’abbé de Saint-Germain, donné en 1645, on construisit les édifices nécessaires à une communauté. Depuis, ces bâtiments furent considérablement augmentés. Dans cette même année, M. Ollier obtint pour l’établissement de son séminaire des lettres-patentes enregistrées au grand conseil en 1646, et à la chambre des comptes en 1650.

La chapelle fut bénite le 18 novembre de cette dernière année. C’étoit un petit édifice qui n’avoit rien de remarquable, mais que l’on visitoit à cause des belles peintures dont Le Brun l’avoit décoré.



CURIOSITÉS DE LA CHAPELLE.


tableaux.


Sur le maître-autel, la Descente du Saint-Esprit ; par Le Brun. (Ce peintre célèbre s’étoit représenté lui-même dans un coin de ce tableau.)

Dans le plafond, l’Assomption de la Vierge ; par le même.

Au dessus de la porte, une Descente de Croix ; par Hallé.

Dans la nef, la Présentation au Temple ; par Marot.

La Naissance de la Vierge ; par Restout.

La Purification et les prophètes Isaïe et Ezéchiel ; par le même.

La Visitation ; par Verdier.

La Naissance du Sauveur ; par Le Clerc.

L’Adoration des Mages ; la Fuite en Égypte ; Jésus-Christ prêchant dans le Temple ; le Couronnement de la Vierge ; sans nom d’auteurs.


sépultures.


Dans cette chapelle avoit été inhumé M. Ollier, fondateur du séminaire, mort en 1657.


Ce séminaire possédoit une belle bibliothèque, composée d’environ trois mille volumes dispersés dans diverses pièces. Il avoit aussi une collection choisie d’estampes et un cabinet d’histoire naturelle[1].


le petit séminaire (rue Férou).


La partie des bâtiments du grand séminaire qui donnoit sur la rue Férou étoit destinée à ceux qui composoient le petit séminaire. Il porta d’abord le nom de Saint-Joseph, et fut fondé, en 1686, dans une maison de cette rue, que la construction du portail de Saint-Sulpice força presque aussitôt de démolir ; on le transféra, dès l’année suivante, dans une autre maison achetée par le séminaire, et toujours dans la même rue. La communauté des étudiants en philosophie, instituée en 1687, eut ses exercices communs avec ceux du petit séminaire jusqu’en 1713 qu’elle en fut séparée. En 1694 on avoit aussi réuni au petit séminaire une autre communauté nommée Sainte-Anne, établie en 1684 dans la rue Princesse.


communauté des robertins (cul-de-sac Férou).


Cette petite communauté, composée d’ecclésiastiques qui se destinoient à entrer au séminaire, fut établie dans ce cul-de-sac en 1677 par M. Boucher, docteur de Sorbonne. Il engagea par son testament MM. de Saint-Sulpice à s’en charger, ce qu’ils acceptèrent le jour même de son décès, arrivé le 20 janvier 1708. Les libéralités dont les combla M. Robert, l’un de leurs supérieurs, leur fit donner le nom de Robertins.


Leur chapelle étoit décorée d’un très beau tableau de Le Sueur, représentant la Présentation au Temple.


les écoles de charité ou les sœurs de l’enfant jésus (rue Saint-Maur).


Ces écoles, dont le but étoit de donner à de pauvres filles ces premiers principes d’une éducation religieuse, principes presque toujours ineffaçables, et que des parents peu éclairés et dans l’indigence sont hors d’état de communiquer à leurs enfants, avoient été instituées par un minime nommé le père Barré. Jaillot pense que les premiers fondements de cette institution charitable furent jetés à Rouen en 1666 et à Paris en 1667, sur la paroisse Saint-Jean en Grève. L’utilité de ces écoles fut bientôt tellement reconnue, que toutes les paroisses s’empressèrent de les adopter. Elles étoient établies par les curés sous l’administration d’une supérieure, et les personnes qui se destinoient à cette œuvre de charité n’y étoient engagées par aucun vœu solennel. La maison de Saint-Maur étoit le chef-lieu de leur institut[2].



les frères des écoles chrétiennes.
(Rue Notre-Dame-des-Champs.)


Cet établissement, formé dans les mêmes vues de charité et pour élever dans le travail et dans la piété de jeunes garçons nés de parents pauvres, succéda, dans cette rue, à une communauté de filles, connue sous le nom de Communauté de mademoiselle Cossart, ou des Filles du Saint-Esprit. Cette association, fondée en 1666 par cette pieuse demoiselle pour l’éducation des pauvres filles, ayant été supprimée, d’abord en 1670, ensuite et définitivement en 1707, il se trouva que la fondatrice, qui sembloit avoir prévu son peu de durée, avoit ordonné que, dans le cas de sa suppression, la propriété en reviendroit à l’hôpital général. Ses intentions furent remplies, et la maison, vendue par les administrateurs, après avoir eu plusieurs propriétaires, passa enfin en 1722 aux frères des écoles chrétiennes.

Ces frères, indistinctement nommés les frères des Écoles, les frères de l’Enfant-Jésus qui est leur véritable nom, et les frères de Saint-Yon, parce que leur noviciat y étoit établi, furent institués à Reims en 1679 par M. de La Salle, docteur en théologie et chanoine de cette cathédrale. Le succès de cet établissement fit naître la pensée d’en former de semblables à Paris. M. de La Salle y fut appelé en 1688, et les frères qu’il avoit amenés avec lui ouvrirent leurs écoles dans la rue Princesse. Elles procurèrent tout le bien qu’on en avoit attendu, et l’on en trouve sept, avant la fin de ce siècle, établies dans divers quartiers de cette partie méridionale de Paris. Enfin elles furent transférées, comme nous venons de le dire, rue Notre-Dame-des-Champs.

La chapelle du Saint-Esprit subsistoit encore dans les derniers temps, et l’on y disoit la messe tous les dimanches et fêtes[3].


collége du mans (rue d’Enfer).


Ce collége fut fondé par Philippe de Luxembourg, évêque du Mans, cardinal et légat du Saint-Siége, lequel destina à cette bonne œuvre une somme de 10,000 fr., par son testament du 26 mai 1519. Ses exécuteurs testamentaires, afin de remplir ses intentions, achetèrent, 1o de François Ier, moyennant la somme de 8,000 fr., les émoluments du scel de la prévôté de Paris, qui produisoit alors 550 livres ; 2o l’hôtel des évêques du Mans, situé rue de Reims, et alors en très mauvais état, pour le prix de 25 liv. de rente ; 3o une place que leur céda l’abbé de Marmoutier, pour 5 liv. de rente et 17 sous de cens, sur laquelle ils firent construire une chapelle. Cette fondation fut faite pour un principal, un procureur qui seroit en même temps chapelain, et dix boursiers du diocèse, et à la nomination des évêques du Mans. On en dressa les statuts en 1526 ; mais, dès 1613, les revenus de la maison étoient tellement diminués, que les exercices furent interrompus et les bourses supprimées ou du moins suspendues. Les jésuites profitèrent de cette circonstance pour réunir ce collége au leur[4] ; et sur la somme de 53,156 liv. 13 sous 4 deniers, que le roi donna pour cette acquisition, on prit celle de 28,000 liv., avec laquelle on acheta l’hôtel de Marillac, rue d’Enfer, dans lequel ce collége fut transféré en 1683. Il a subsisté jusqu’en 1764, époque de sa réunion au collége de l’Université[5].



le séminaire de saint-pierre et saint-louis
(même rue.)


La plupart de nos historiens, ayant négligé de faire des recherches sur l’origine de cet établissement, se sont contentés d’en fixer l’époque à l’année 1696. Il devoit son origine à M. François de Chansiergues, diacre. Ayant réuni quelques pauvres ecclésiastiques qu’il aidoit à subsister, il en forma de petites communautés et leur donna le nom de Séminaire de la Providence[6]. M. de Lauzi, curé de Saint-Jacques de la Boucherie, convaincu de l’utilité de semblables institutions, s’unit à M. de Chansiergues pour les perfectionner. Celle dont nous parlons fut placée d’abord dans une maison rue Pot-de-Fer, laquelle fut cédée, en pur don et en vue de cette œuvre de piété, par M. François Pingré, sieur de Farinvilliers, et dame Catherine Pépin son épouse. M. de Marillac, successeur de M. de Lauzi, voulut imiter son zèle et prendre la suite de ses projets. Propriétaire d’une maison assez vaste, rue d’Enfer, il la destina en 1687 pour recevoir le séminaire de la rue Pot-de-Fer. M. et madame de Farinvilliers y firent bâtir le corps de logis principal ainsi que la chapelle, et donnèrent 80,000 liv. pour la fondation de douze places gratuites, depuis réduites à dix. Elles étoient à la nomination du supérieur ; mais pour donner plus d’émulation aux jeunes clercs, on les mettoit au concours.

M. de Marillac, de son côté, ne borna pas ses bienfaits à ces premières libéralités ; il y joignit en 1696 une maison joignant celle de la rue Pot-de-Fer, deux autres maisons à Gentilli et 1150 livres de rente. Enfin M. le cardinal de Noailles et M. de Marillac, conseiller d’état, frère de l’instituteur, mirent la dernière main à cet établissement, en le faisant confirmer par des lettres-patentes qu’ils obtinrent en 1696. Le roi gratifia alors ce séminaire d’une pension annuelle de 3,000 livres, et le clergé lui en accorda une de 1,000 liv.

Outre les places gratuites fondées par M. de Farinvilliers, il y en avoit trois autres pour de jeunes clercs d’Aigueperse et de Riom, dont on étoit redevable à M. Fouet, docteur en théologie. Ce séminaire étoit en tout composé de cent quarante étudiants, sous l’inspection de quatre personnes nommées par l’archevêque, qui prenoit le titre de premier supérieur de cette maison, et payoit la pension de trente à quarante ecclésiastiques.

La chapelle étoit grande et bien ornée. La première pierre en fut posée en 1703 par le cardinal de Noailles, et le séminaire ne fut transféré dans cette nouvelle demeure que le 1er octobre de l’année suivante[7].


TABLEAUX.


Sur le maître-autel, saint Pierre guérissant le boiteux ; par Jeaurat.

Saint Louis, saint Charles, une Assomption, l’Ange consolant saint Pierre ; par le même.


La bibliothèque de cette maison étoit un legs de M. Louis-Bernard Oursel, prêtre, docteur en théologie, chanoine et grand pénitencier de l’église de Paris.


  1. La maison de cette communauté a été démolie pour former la place Saint-Sulpice ; le nouveau séminaire qui se prolonge dans la rue Pot-de-Fer, a sa façade sur un des côtés de cette place. (Voyez l’article Monuments nouveaux.)
  2. Cette maison et la précédente sont aujourd’hui des habitations particulières.
  3. La chapelle a été détruite ; la maison est habitée par des particuliers.
  4. Voyez t. 3, 3e partie, p. 529.
  5. Ce collége est habité maintenant par des particuliers.
  6. Il avoit déjà établi une communauté du même genre en 1685, près de l’église Saint-Marcel, dans le quartier de la place Maubert.
  7. Les bâtiments en furent d’abord changés en caserne pendant la révolution, et l’église devint le magasin des décorations du Théâtre-François, dit l’Odéon ; maintenant on en a fait une usine où se confectionne le gaze hydrogène qui sert à l’éclairage